Savoir et croire - article ; n°1 ; vol.102, pg 56-68
14 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Savoir et croire - article ; n°1 ; vol.102, pg 56-68

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
14 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Langue française - Année 1994 - Volume 102 - Numéro 1 - Pages 56-68
Co Vet : « Savoir and croire » It is generally assumed that savoir « to know » and croire « to believe » belong to the same class of attitudinal predicates. In this article it is shown however that, from a syntactic point of view, their behaviour is quite different (for example, savoir can be in the scope of croire, but not vice versa). It is also shown that, when used « directly » (first person, present tense), croire serves to modify the truth value of the proposition, whereas savoir can be used to correct what the hearer thinks the speaker knows.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 12
Langue Français

Extrait

Co Vet
Savoir et croire
In: Langue française. N°102, 1994. pp. 56-68.
Abstract
Co Vet : « Savoir and croire »
It is generally assumed that savoir « to know » and croire « to believe » belong to the same class of attitudinal predicates. In this
article it is shown however that, from a syntactic point of view, their behaviour is quite different (for example, savoir can be in the
scope of croire, but not vice versa). It is also shown that, when used « directly » (first person, present tense), croire serves to
modify the truth value of the proposition, whereas savoir can be used to correct what the hearer thinks the speaker knows.
Citer ce document / Cite this document :
Vet Co. Savoir et croire. In: Langue française. N°102, 1994. pp. 56-68.
doi : 10.3406/lfr.1994.5714
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1994_num_102_1_5714Co Vet
Centre de recherches linguistiques et cognitives
Université de Groningue
SAVOIR ET CROIRE
Introduction *
Dans cet article, nous concevons les êtres humains comme des « systèmes de
traitement d'information ». Ils ne sont pas seulement capables d'acquérir des info
rmations et de les stocker dans leur « base de données » personnelle (désormais
« domaine de connaissances »), mais ils peuvent aussi créer de nouvelles connaissan
ces à partir d'informations qui y figurent déjà (par inference ou déduction). Il est
plausible qu'une partie des informations au moins est munie d'une « étiquette »
indiquant la façon dont l'information a été acquise ou l'avis qu'on a sur la fiabilité ou
la vérité des données. Ces « étiquettes » peuvent accompagner les messages que
transmet le locuteur à son interlocuteur :
(1) Jean doit avoir manqué son train.
(2) J'apprends que Jean a manqué son train.
(3) Je trouve/ crois/ sais que ce film est intéressant.
(4) Ce film est peut-être/ probablement
Les verbes devoir et apprendre servent à indiquer la manière dont l'information a été
acquise par le locuteur, par inference et par ouï-dire respectivement (cf. Dendale,
1991 : 253). Les verbes trouver, croire et savoir indiquent l'attitude du locuteur à
l'égard de la proposition ce film est intéressant. Je trouve présuppose en outre que le
jugement du locuteur est basé sur une expérience directe de la chose « elle-même »
(Ducrot, 1980). Cette nuance est absente dans le sens des verbes croire et savoir. Ces
verbes expriment généralement le degré d'engagement du locuteur par rapport à la
vérité de la proposition qui les suit (modalité épistémique), tout comme les adverbes
peut-être, probablement.
Dans cet article, nous essaierons de démontrer que les verbes croire et savoir,
dans leur usage direct (au présent et à la première personne) sont des opérateurs
énonciatifs qui appartiennent à deux catégories de modalité distinctes. Dans la
première section, nous donnerons une impression du rôle de savoir et de croire dans
la structuration du domaine de connaissances, pour passer ensuite en revue les
différences entre les usages direct et oblique de ces verbes et les différences syntaxi
ques et sémantiques qu'ils présentent. Dans la deuxième section, nous montrerons
1. Nous tenons à remercier Brigitte Kampers-Manhe, Liliane Tasmowski-De Ryck, Patrick
Dendale et Arie M olendijk de leurs remarques tout à fait judicieuses à propos de la première version de
ce texte.
56 dans leur usage direct, ces deux verbes ont une fonction nettement distincte dans que,
le processus de renonciation : alors que croire se rapporte à la valeur de vérité de la
proposition, savoir sert à ajuster les présuppositions de l'interlocuteur.
1. Croire et savoir
1.1. La structure du domaine de connaissances du sujet parlant
Le domaine de connaissances d'un sujet parlant contient tout ce qu'il sait ou
croit savoir. Pour ne pas compliquer la description, nous partons de l'idée que ces
connaissances y sont stockées sous la forme d'une liste de propositions. Cette idée est
sans aucun doute incorrecte, car il est probable que les propositions sont organisées
en réseaux (ou en « frames » ou « scénarios »). On admet aussi qu'une partie de nos
connaissances au moins est de nature non-propositionnelle (par exemple les « images
mentales » des visages des personnes que nous connaissons).
Ces aspects du domaine de connaissances ne sont pas pertinents pour notre
propos. Ce qui importe pour nous ici, c'est que les propositions n'ont pas toutes le
même statut épistémique dans le domaine de connaissances. Certaines propositions
sont acceptées inconditionnellement par le sujet comme étant vraies, tandis que, pour
des raisons diverses (manque d'évidence suffisante, source incertaine, inference,
etc.), d'autres ne sont admises que provisoirement. Nous admettrons donc que le
domaine de connaissances d'un locuteur L comporte (au moins) deux « comparti
ments », A et В , qui portent respectivement les étiquettes « je sais que » et « je crois
que » (Voir Figure ci-dessous).
Il y a lieu d'admettre qu'il y a dans le domaine de connaissances de L, outre les
propositions de A et de В , un compartiment (C) où se trouvent les propositions dont il
n'accepte pas la vérité et qui porte l'étiquette « je ne crois pas ». Ce sont des que, vu leur incompatibilité avec d'autres propositions ou par manque
d'évidence suffisante, il n'accepte pas. Il s'agit, cependant, d'une non-acceptation
conditionnelle. Nous dirons qu'elles sont « conditionnelle ment non acceptées ».
Domaine de connaissances de L
A В je ne crois pas
je sais que p je crois que p quep
propositions propositions inconditionnellepropositions conditionnelle- conditionnelle-
ment acceptées ment non acceptées ment acceptées
comme vraies comme vraies comme vraies
En dehors du domaine de connaissances :
Je ne sais pas si p
57 Il n'y a pas, dans le domaine de connaissances, de compartiment qui porte
l'étiquette « Je ne sais pas ». Je ne sais pas (sip) indique simplement quep ne figure
pas dans le domaine de connaissances du locuteur : en effet, p n'a pas de statut
épistémique, parce que le locuteur n'exprime aucune attitude, positive ou négative,
vis-à-vis de la proposition et qu'il signale qu'il ne sait pas si elle est vraie ou fausse (ce
qui explique la présence de la conjonction si). La structure du domaine de connais
sances de L pourrait donc être représentée comme dans la Figure ci-dessus.
Ce bref examen du statut épistémique des complétives de (nepas) savoir et de (ne
pas) croire révèle déjà une asymétrie intéressante entre ces verbes. Nous y revien
drons dans la section 1.3. Dans la section suivante, nous passerons en revue les
différences entre ce que Martin (1987) appelle les usages direct et oblique de ces
verbes.
1.2. Asymétrie : usages direct et oblique
Borillo (1982) classe les verbes croire et savoir parmi les verbes « assertifs »,
« parce que, à la forme affirmative et renvoyant au locuteur, ils attribuent ou
conservent à la proposition qu'ils introduisent la valeur d'une assertion ou d'une
quasi-assertion » (p. 7). Le comportement de la question-reprise (si ?, non ?), qui
s'applique normalement à une phrase déclarative ayant le statut d'une phrase
matrice ou indépendante corrobore cette idée. Les phrases négatives sont reprises par
si ?, les phrases positives par non ? (Borillo 1982 : 18) :
(5) Ce n'est pas très beau, si ?
(6) Je t'avais dit que ce n'était pas très beau, non ?
L'exemple (7) montre qu'on peut difficilement reprendre la phrase subordonnée par
si :
(7) ?Je t'avais dit que ce n'était pas très beau, si ?
Cependant, si la phrase matrice contient un verbe assertif, la reprise de la subordon
née est possible :
(8) Je suppose que tu n'es pas pressé, si ?
(9) J'ai l'impression que tu n'as pas compris, si ?
Si la question reprise ne porte que sur la partie assertée de l'énoncé, on peut
expliquer la possibilité d'employer si dans (8) et (9) par le fait que je suppose que et
j'ai l'impression que n'appartiennent pas à la partie assertée de l'énoncé, mais à la
« partie pragmatique » (ce sont ce que nous appellerons des « opérateurs énoncia-
tifs »). Si les verbes supposer, etc. ne sont pas à la première personne (ni au présent), <

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents