L’errance du chevalier Zifar - article ; n°1 ; vol.30, pg 261-286
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Description

Cahiers de linguistique hispanique médiévale - Année 2007 - Volume 30 - Numéro 1 - Pages 261-286
Dans cette étude on tentera un rapprochement entre deux niveaux de
sens possibles pour qualifier les errances du «Libro del cavallero Zifar» entre une dimension sociale et générale qui s’attache davantage à la notion de
déplacement et une signification plus restreinte chargée de l’idéologie
chrétienne. Puis l’on examinera le récit en relation étroite avec la proclamation de l’Année sainte, et avec les récents bouleversements de la pensée religieuse et spirituelle qui depuis Latran IV innovent en matière de confession, de contrition, et de possibilités de gagner son salut. On suggère a) que le discours
de l’auteur-narrateur reflète le discours doctrinal de l’Église et illustre à
sa manière le pèlerinage, b) qu’il existe un niveau de sens anagogique qui chemine parallèlement au sens de la lettre, mais qui repositionne l’Église au coeur de la vie de la cité d’où Alphonse X avait voulu la tenir à l’écart.
En este trabajo se intentará un acercamiento entre dos niveles de significado para calificar
las errancias contenidas en el «Libro del cavallero Zifar», entre una dimensión social y
general que se aplica más a la noción de desplazamiento, y un significado más restringido cargado de ideología cristiana. Después se indagará y reflexionará sobre el relato en estrecha
relación con la proclamación del Año santo, y con los recientes trastornos del pensamiento religioso y espiritual que desde Latrán IV dan nuevas modalidades para la confesión, la contrición, y las posibilidades de ganarse la vida eterna. Se sugiere a) que el discurso
del autor-narrador refleja el discurso doctrinal de la Iglesia e ilustra a su modo lo que es
la peregrinación, b) que existe un nivel de sentido anagógico que se lee paralelamente al sentido de la letra, pero que vuelven a asentar la Iglesia dentro de vida de la polis de la que Alfonso X había querido mantenerla apartada.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2007
Nombre de lectures 91
Langue Français

Extrait

L’errance du chevalier Zifar
Catherine D t
Université Paris III – Sorbonne Nouvelle
(LECEMo – EA 3979)
R
Dans cette étude on tentera un rapprochement entre deux niveaux de
sens possib les pour qualifier les er rances duLibro del cavallero Zifar entre
une dimension sociale et générale qui s’attache davantage à la notion de
déplacement et une significa tion plus r estr einte c har gée de l’idéologie
chrétienne. Puis l’on examinera le récit en relation étroite avec la proclamation
de l’Année sainte, et avec les récents bouleversements de la pensée religieuse
et spirituelle qui depuis Latran IV innovent en matière de confession, de
contrition, et de possibilités de gagner son salut. o n suggère a) que le discours
de l’auteur -nar ra teur r eflète le discour s doctrinal de l’Ég lise et illustr e à
sa manière le pèlerinage, b) qu’il existe un niveau de sens anagogique qui
chemine parallèlement au sens de la lettre, mais qui repositionne l’Église au
cœur de la vie de la cité d’où Alphonse X avait voulu la tenir à l’écart.
R
En este trabajo se intentará un acercamiento entre dos niveles de significado para calificar
las errancias contenidas en el Libro del cavallero Zifar, entre una dimensión social y
general que se aplica más a la noción de desplazamiento, y un significado más restringido
cargado de ideología cristiana. Después se indagará y reflexionará sobre el relato en estrecha
relación con la proclamación del Año santo, y con los recientes trastornos del pensamiento
religioso y espiritual que desde Latrán IV dan nuevas modalidades para la confesión,
la contrición, y las posibilidades de ganarse la vida eterna. Se sugiere a) que el discurso
del autor-narrador refleja el discurso doctrinal de la Iglesia e ilustra a su modo lo que es
la peregrinación, b) que existe un nivel de sentido anagógico que se lee paralelamente al
sentido de la letra, pero que vuelven a asentar la Iglesia dentro de vida de la polis de la
que Alfonso X había querido mantenerla apartada.
, n° 30, 2007, p. 261-286
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oblarite culso262 CATHERINE DUCLoS TALBo TIER
1Dès le début du Libro del cavallero Zifar (LCZ) , le projet littéraire annoncé
est de faire un devoir de mémoire pour que tous les hommes se rappellent
la proclamation de la première Année sainte faite par Boniface VIII en
l’an 1300. S’y ajoute le rappel historique que Gonçalo Gudiel fut le pre-
mier cardinal à être enterré en terre d’Espagne. L’annonce et les moda-
lités de l’Année sainte ouvrent le récit et, présidant à l’entier du discours,
orientent de façon décisive sa réception auprès du lecteur-auditeur dont
ils mobilisent ainsi tout particulièrement l’attention. À ce double rappel
qui fait suite au récit des péripéties de l’archidiacre Ferrán Martínez pour
rapporter la dépouille du cardinal accueilli à Tolède comme un véritable
saint, l’auteur-narrateur a adjoint un récit exemplaire, car, dit-il, toujours
dans la même perspective de devoir de mémoire, l’homme doit mémo-
riser des modèles de conduite pour se préserver de yerro et suivre une voie
meilleure dans sa conduite :
[…] ca por razon de la mengua de la memoria del ome fueron puestas estas cosas a esta obra,
en la cual ay muy buenos enxienplos para se saber guardar ome de yerro si bien quisiere bevir
e usar de ellos (LCZ, fol. 4, p. 57).
Ce récit, celui des aventures du chevalier Zifar et de sa famille, s’inscrit
ainsi dès l’exorde dans un propos ouvertement didactique, mais cet ensei-
gne me nt e st ré solume nt c hré t ie n e t e n affinit é a v e c l’Anné e saint e comme
nous le verrons plus loin, puisqu’il est immédiatement complété par le
rappel du pouvoir de Dieu, des dons du Créateur et de l’éternelle alliance
possible entre Dieu et les hommes à condition que l’homme doué de bon
sens place Dieu avant chacun de ses actes, et lui demande son aide. Tel est
le leitmotiv qui parcourt le Libro del cavallero Zifar : anteponer a Dios en la su
obra. La récurrence de cette règle et le système analogique qui permet de
r elier le récit fictif de la famille Zifar au récit historique de l’Année sainte
et du rapatriement de la dépouille du cardinal par « asy commo » placent
le livre entier sous l’emprise d’une lecture à sens religieux et à valeur spi-
rituelle, dans laquelle il n’est pas étonnant de trouver les sacrements fon-
damentaux de l’eucharistie, et de l’extrême-onction, et l’exaltation de la
position dogmatique de l’Église dans celui du mariage qui est toujours
parfait lorsqu’il est célébré selon ses règles.
C’est dans cette perspective dogmatique que nous étudierons d’abord les
implications de l’Année sainte dans le thème qui nous occupe aujourd’hui
1. Une des difficultés majeur es de l’œuvr e est que sa da ta tion r este inconn ue , même si la
ecritique s’accorde à la placer dans la première moitié du siècle. Nous utiliserons pour cette
étude l’édition de González Muela de 1982 qui, même si elle présente de nombreuses lacunes
et erreurs, a l’avantage d’être la seule à reprendre le manuscrit de Madrid (Ms 11, 309 de la
Bibliothèque nationale de Madrid) qui est le manuscrit le plus ancien connu à ce jour. Nos réfé-
rences prendront en compte les folios du manuscrit et l’édition moderne de 1982.
xiv L’ERRANCE DU CHEVALIER ZIFAR 263
dans sa manifestation essentielle : le pèlerinage, en tant que représentation
symbolique de la condition d’homo viator et en tant qu’élément réparateur
de l’errance du chrétien. Ensuite, nous déterminerons quel type d’errance
caractérise la vie du chevalier Zifar ; doit-on privilégier le sens social du
terme médiéval (voyageur qui se déplace sans cesse) ou le sens chrétien
du terme (erreur, et égarement) pour comprendre sa vie.
Année sainte et pèlerinage
Lorsque Boniface VIII proclame l’Année sainte par la bulle du 22 février 1300,
il ouvr e officiellement le pr emier jubilé de l’histoir e c hrétienne a v ec ef fets
rétr oactifs sur les indulgences dont les fidèles auraient pu bénéficier de puis
la vigile de la fête de Noël de l’année précédente, après avoir fait un pèleri-
nage à la basilique Saint-Pierre pendant trois jours. Par de successifs élar-
gissements de la bulle, le pape inclut par la suite dans le trajet la basilique
Saint-Paul-hors-les-murs ; l’une et l’autre basiliques devaient être visitées
pendant trente jours, pour les Romains, et seulement quinze par les pèle-
2rins venus du dehors . outre le trajet désigné, cette modalité essentielle
de l’Année sainte impliquait une fréquentation réitérée et un constant
va-et-vient que devait alimenter une pratique cultuelle à l’intérieur de ces
mêmes lieux. Nous allons y revenir.
Indulgence : acte sacramentel et acte existentiel
3La finalité du pèlerinage jubilair e est de g agner des indulgences plénièr es ,
pour recouvrer la grâce de Dieu et la possibilité du salut éternel de
4l’âme .
L ’indulgence se distingue du temps or dinair e où la seule confession suffit
à obtenir le pardon de Dieu ; elle acquiert une densité spirituelle parti-
culière parce qu’elle se gagne dans des circonstances extraordinaires que
2. Agostino P , Boniface VIII, Paris : Biographie Payot, p. 269. L’impor-
tance de cette décision est à comprendre dans le mouvement religieux qui a introduit les moda-
lités et les exigences de la « nouvelle confession » et qui, par conséquent, a renforcé le contrôle
des âmes et l’encadr ement des chrétiens par le clergé, à la suite du concile de Latran IV.
3. Pour tout ce qui est position dogmatique de l’Église concernant l’Année sainte et les dispo-
sitions qu’elle suppose nous avons pris comme source la bulle d’indiction du Grand Jubilé 2000
et la pastorale des migrants concernant le pèlerinage du Grand Jubilé. C’est à eux que je me
référerai constamment.
4. « En elle (l’indulgence) se manifeste la plénitude de la miséricorde du Père, qui vient à
la rencontre de tous avec amour, exprimé avant tout par le pardon des fautes. ordinairement,
Dieu le Père accorde son pardon par le sacrement de pénitence ou de la réconciliation. En
effet, céder consciemment et librement au péché grave sépare le croyant de la vie de la grâce
avec Dieu et par là même l’exclut de la sainteté à laquelle il est appelé […] » Incarnationis mys-
ter

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