Redéfinir les traits - article ; n°3 ; vol.98, pg 545-567
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Description

L'année psychologique - Année 1998 - Volume 98 - Numéro 3 - Pages 545-567
Résumé
Dans cette revue critique, la définition classique des traits en tant qu'adjectifs décrivant la personnalité est relativisée par rapport aux présupposés qu'elle recèle. Nous proposons une nouvelle conception mettant l'accent sur l'aspect polysémique des traits. Il s'avère en effet que les traits peuvent aussi bien catégoriser des événements non diagnostiques de la personnalité, tels que les états internes. Cette conception est principalement basée sur l'idée de Allen et Potkay (1981) relative à l'impossibilité de distinguer les traits et les états dans le langage. Nous avançons alors des arguments mettant en évidence que les traits sont considérés comme des adjectifs décrivant la personnalité du fait de leur usage dominant, et non du fait de leur signification référentielle intrinsèque. Enfin, nous suggérons que l'étude des facteurs à l'origine d'un type d'usage des traits au détriment d'un autre constitue un champ d'étude privilégié pour la psychologie sociale.
Mots-clés : traits, polysémie, causalité implicite du langage.
Summary: Redefining traits.
The classic conception of traits as person attributes (i.e. diagnostic descriptions of personality) is criticized. A new conception which emphasizes that traits are also involved in the description of non-diagnostic events, such as inner states is proposed. This approach is based on Allen and Potkay's idea on the arbitrary distinction between states and traits. It is proposed that traits are linked to personality description because of their dominant use and not because of their intrinsic meaning. This dominant use is socially determined and this phenomenon should be investigated. Such a conception raises new social issues based on the study of social determinants in thefunction of traits.
Key words : traits, polysemy, implicit causality in language.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

P. Mollaret
Redéfinir les traits
In: L'année psychologique. 1998 vol. 98, n°3. pp. 545-567.
Résumé
Dans cette revue critique, la définition classique des traits en tant qu'adjectifs décrivant la personnalité est relativisée par rapport
aux présupposés qu'elle recèle. Nous proposons une nouvelle conception mettant l'accent sur l'aspect polysémique des traits. Il
s'avère en effet que les traits peuvent aussi bien catégoriser des événements non diagnostiques de la personnalité, tels que les
états internes. Cette conception est principalement basée sur l'idée de Allen et Potkay (1981) relative à l'impossibilité de
distinguer les traits et les états dans le langage. Nous avançons alors des arguments mettant en évidence que les traits sont
considérés comme des adjectifs décrivant la personnalité du fait de leur usage dominant, et non du fait de leur signification
référentielle intrinsèque. Enfin, nous suggérons que l'étude des facteurs à l'origine d'un type d'usage des traits au détriment d'un
autre constitue un champ d'étude privilégié pour la psychologie sociale.
Mots-clés : traits, polysémie, causalité implicite du langage.
Abstract
Summary: Redefining traits.
The classic conception of traits as person attributes (i.e. diagnostic descriptions of personality) is criticized. A new conception
which emphasizes that traits are also involved in the description of non-diagnostic events, such as inner states is proposed. This
approach is based on Allen and Potkay's idea on the arbitrary distinction between states and traits. It is proposed that traits are
linked to personality description because of their dominant use and not because of their intrinsic meaning. This dominant use is
socially determined and this phenomenon should be investigated. Such a conception raises new social issues based on the study
of social determinants in thefunction of traits.
Key words : traits, polysemy, implicit causality in language.
Citer ce document / Cite this document :
Mollaret P. Redéfinir les traits. In: L'année psychologique. 1998 vol. 98, n°3. pp. 545-567.
doi : 10.3406/psy.1998.28582
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1998_num_98_3_28582L'Année psychologique, 1998, 98, 545-567
Département de Psychologie
LPA, Laboratoire de Psychologie Appliquée
Université de Reims1
REDEFINIR LES TRAITS
par Patrick MOLLARET
SUMMARY : Redefining traits.
The classic conception of traits as person attributes (i.e. diagnostic
descriptions of personality) is criticized. A new conception which emphasizes
that traits are also involved in the description of non-diagnostic events, such as
inner states is proposed. This approach is based on Allen and Potkay's idea
on the arbitrary distinction between states and traits. It is proposed that traits
are linked to personality description because of their dominant use and not
because of their intrinsic meaning. This dominant use is socially determined
and this phenomenon should be investigated. Such a conception raises new
social issues based on the study of social determinants in the function of traits.
Key words : traits, polysemy, implicit causality in language.
La psychologie quotidienne, celle que chaque individu utilise dans son
existence sociale pour expliquer les comportements d'autres personnes ou
pour s'en faire une impression, constitue un objet d'étude traditionnel de
la psychologie sociale cognitive (Asch, 1946 ; Heider, 1958). Les traits y
occupent une place centrale parce qu'ils constituent une catégorie impor
tante du vocabulaire courant impliqué dans l'activité quotidienne de des
cription psychologique. Le travail de recensement effectué par Allport et
Odbert (1936) donne une idée de l'étendue de ce lexique : pour la langue
anglaise, 4 504 termes furent identifiés comme des traits. Cependant, les
critères permettant de décider qu'un terme particulier est ou n'est pas un
trait sont peu explicites (Allen et Potkay, 1981). Cette difficulté pose dire
ctement la problématique de la définition des traits.
1 . 57, rue Pierre Taittinger, 51096 Reims Cedex. 546 Patrick Mollaret
Le but de cette contribution est de proposer un exposé critique des dif
férentes options prises pour définir les traits, et d'esquisser une autre
manière de les concevoir. Nous proposerons l'idée que les traits ne sont pas
des adjectifs nécessairement liés à la description de la personnalité, comme
l'expression « trait de personnalité » (se retrouvant tant dans la terminolog
ie scientifique que dans le langage commun) pourrait le laisser croire. Des
arguments seront avancés pour tenter de démontrer que chaque trait fait
potentiellement référence à au moins deux registres d'événements (les
comportements et les états internes) aux implications psychologiques
contrastées, ce qui permettra de les définir comme des adjectifs polysémi
ques. Cette revue de question est développée en trois parties. La première
partie a pour but de rendre compte d'un présupposé commun à de nomb
reuses recherches, sans pourtant y être explicité. Il s'agit d'un postulat
implicite, qui revient à envisager les comportements des acteurs sociaux
comme l'unique catégorie d'événements auxquels les traits font référence.
Ce postulat trouve son équivalent psychologique dans une conception
envisageant l'ensemble des traits comme le résultat des inferences faites à
partir des observables comportementaux. Lors de cette première partie est
ébauchée une analyse des conséquences métathéoriques de cette concep
tion en rendant compte de certains de ses soubassements philosophiques.
La deuxième partie concerne le problème de savoir si ce lien entre les traits
et les observables comportementaux est vraiment le seul possible (il est
alors constitutif de la définition des traits d'un point vue sémantique) ou
s'il en existe d'autres (il ne rend alors compte que d'une partie de la signi
fication referentielle des traits). Les éléments en faveur de la seconde pos
sibilité, sans doute trop négligée, sont nombreux. Il existe en outre des
résultats expérimentaux récents venant à son appui, et mettant direct
ement en évidence l'aspect polysémique des traits. La troisième partie
concerne les implications psychosociales d'une définition des traits comme
adjectifs polysémiques, en particulier du point de vue des perspectives de
recherche qu'elle autorise.
I. LES TRAITS DU POINT DE VUE
DE LA PSYCHOLOGIE SOCIALE COGNITIVE
Dans la typologie classique de Allport et Odbert (1936), les traits sont
envisagés parallèlement à la notion de personnalité, et donc associés à une
notion de stabilité. Ils définissent alors « un mode d'adaptation consistant
et stable de l'individu à son environnement. Les exemples les plus évidents
sont : agressif, introverti, sociable » (Allport et Odbert, 1936, p. 26). Ce
parallélisme est plus explicite encore chez Cattell (1956) : « L'on utilise
généralement les traits pour décrire la personnalité normale et les types
pour décrire la personnalité pathologique » (Cattell, 1956, p. 7). Dans ces Redéfinir les traits 547
optiques, les traits définissent des adjectifs personnologiques dont la fina
lité est de décrire les dispositions comportementales relativement perman
entes des personnes. La conséquence principale de cette conception est de
considérer que les traits peuvent être utilisés comme des facteurs explicat
ifs des comportements. Par exemple, il est possible d'expliquer le compor
tement « battre son enfant » par le trait « violent ». La facilité avec
laquelle une telle inference causale peut être faite a été soulignée par Ross
(1977), qui a décrit une nette propension à surestimer le poids causal de
l'acteur — et de ses dispositions supposées - dans l'explication des comport
ements, au détriment des facteurs situationnels. Les travaux du courant
de la cognition sociale ont envisagé depuis d'autres fonctions des traits que
celle liée à l'explication dispositionnelle des comportements. Elles provien
nent principalement du concept de catégorie cognitive de Rosch (1978),
qui est analysé dans le cadre de cette première partie. Nous chercherons à
déterminer dans quelle mesure ces approches plus récentes se démarquent
de la conception classique, liant les traits à la description de la personnali
té. Nous apporterons une répo

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