Une étude sur les relations entre l’obligation principale et ce
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Célin e C OM B ETTE« La solid arité da ns l es g aranties »Esquiss e g énéraleLes sou rces d es obli gations in solidum n e pos ent, g énéralement, g uère d e diff icultés.1En présence d’un e pluralité de débiteurs, et dès lors que la structure d’ un acte impose2à chacun de ceux-ci d’ exécuter l’obli gation dans sa totalité , une obligation solidaire passive3est a dmise . Il existe, cependant, des hypothèses où la reconnaissance de ce lien de solidarité passifpeut êt re suj et à di scussions. C’est l e c as pou r l es s tipulations d e g arantie.D ans ce domaine, la question de la survenance d’un rapport de solidarité se pose dansdeux types de relation. En effet, on peut tout d’abord se demander si, lorsqu’un e même detteest garantie par plusieurs garants, un lien de solidarité se crée entre eux (paragraphe 1 ).D e même, on ne peut que s’ interroger, devant la présence d’ éléments contradictoires, surl’e xistence d’un tel rapport solidaire dans la relation existant entre le débiteur principal et legarant (p aragraphe 2).Paragraphe 1 : la sol idarité ent re ga rantsAfin d’offr ir plus de sécurité à un créancier, une même dette peut être garantiepar plusieurs garants. Cett e pluralité peut se rencontrer dans toutes les formes de garantie.Ap rès s’être interrogé sur la présence d’un lien de solidarité dans la sponsio et lafidepromissio (1° ), nous re viendrons s ur c ette qu estion d ans l e dom aine de l a fideiussio (2° ).1° Un e s olidarité e ntre ...

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Céline COMBETTE « La solidarité dans les garanties » Esquisse générale
Les sources des obligations in solidum ne posent, généralement, guère de difficultés. En présence d’une pluralité de débiteurs, et dès lors que la structure d’un acte 1 impose à chacun de ceux-ci d’exécuter l’obligation dans sa totalité 2 , une obligation solidaire passive est admise 3 . Il existe, cependant, des hypothèses où la reconnaissance de ce lien de solidarité passif peut être sujet à discussions. C’est le cas pour les stipulations de garantie. Dans ce domaine, la question de la survenance d’un rapport de solidarité se pose dans deux types de relation. En effet, on peut tout d’abord se demander si, lorsqu’une même dette est garantie par plusieurs garants, un lien de solidarité se crée entre eux (paragraphe 1). De même, on ne peut que s’interroger, devant la présence d’éléments contradictoires, sur l’existence d’un tel rapport solidaire dans la relation existant entre le débiteur principal et le garant (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : la solidarité entre garants Afin d’offrir plus de sécurité à un créancier, une même dette peut être garantie par plusieurs garants. Cette pluralité peut se rencontrer dans toutes les formes de garantie. Après s’être interrogé sur la présence d’un lien de solidarité dans la sponsio  et la fidepromissio (1°), nous reviendrons sur cette question dans le domaine de la fideiussio (2°). 1° Une solidarité entre sponsores et fidepromissores  Les premiers textes que nous pouvons étudier, et qui font référence à une pluralité de garants dans la sponsio et la fidepromissio , sont des fragments des Institutes de Gaius. Ces passages concernent l’application de la lex Furia 4 .  1 Mais également par la simple volonté des parties ou par une disposition législative 2 Celle-ci ne devant être exécutée qu’une seule fois 3  Une description générale de la solidarité passive en matière de stipulation nous est donnée par un texte de Javolénus au D. 45. 2. 2 : Cum duo eandem pecuniam aut promiserint aut stipulati sunt, ipso iure et singuli in solidum debentu, et singuli debent. Ideoque petitione, acceptilatione unius tota solvitur obligatio . Il décrit également dans ce passage ce qu’est la solidarité active. Dans ce dernier cas, nous nous trouvons face à une pluralité de créanciers. Chaque créancier est en droit de demander le tout, et si l’un vient à en obtenir, par exemple, le paiement, l’obligation s’éteint pour tous les autres. Ce mécanisme n’est pas uniquement présent dans les obligations solidaires nées de stipulation, c'est-à-dire dans ce qu’il faut considérer comme la principale hypothèse de solidarité, mais on le retrouve également appliqué dans toutes les autres hypothèses de solidarité 4 Gaius, Institutes, III 121 Item sponsor et fidepromissor per legem Furiam biennio liberantur, et quotquot erunt numero eo tempore, quo pecunia peti potest, in tot partes diducetur inter eos obligatio, et singuli in uiriles partes uocabuntur; fideiussores uero perpetuo tenentur, et quotquot erunt numero, singuli in solidum obligantur. itaque liberum est creditori, a quo uelit, solidum petere. sed nunc ex epistula diui Hadriani compellitur creditor a singulis, qui modo soluendo sint, partes petere. eo igitur distat haec epistula a lege Furia, quod si quis ex sponsoribus aut fidepromissoribus soluendo non sit, hoc onus ad ceteros non pertinet, si uero ex
Cette loi impose, tout d’abord, une limite temporelle à l’engagement des garants : les sponsores , ou fidepromissores , ne peuvent se retrouver liés pour une durée supérieure à deux années 5 . Puis, et c’est cela qui nous intéresse, principalement, ici, il est prévu que les sponsores  et fidepromissores bénéficient désormais de la division. Plus exactement, il est concédé à ces garants une manus iniectio pro iudicato 6  contre le créancier, dès lors que celui-ci a demandé, à l’un d’eux, plus quam virilem partem . Pour comprendre la portée réelle de cette disposition, il nous faut revenir sur d’autres lois prises antérieurement à celle-ci.
Avant cette loi, une autre disposition législative était, en effet, déjà intervenue sur cette question de la pluralité de garants 7 . Il s’agit de la lex Apuleia 8 . Cette loi visait encore une fois et les sponsores  et les fidepromissores . Ce texte prévoyait que, dès lors qu’il y avait une
fideiussoribus, ad ceteros quoque pertinet. 121a Sed cum lex Furia tantum in Italia locum habeat, euenit, ut in ceteris prouinciis sponsores quoque et fidepromissores proinde ac fideiussores in perpetuum teneantur et singuli in solidum obligentur, nisi ex epistula diui Hadriani hi quoque adiuuentur in parte .  Cette loi, que l’on peut considérer comme la loi la plus importante de l’époque Républicaine en ce qui concerne la question de la pluralité de garants, est de datation incertaine, P. Frezza, Le garanzie delle obbligazioni, Corso di diritto romano , I, CEDAM, Padova, 1962, p. 17. De même, P. Collinet, « La garanzia solidale in diritto romano », Memorie della R. Accademia delle scienze dell’Istituto di Bologna , 3, 1931, p. 9. Ce dernier s’est également interrogé sur la raison du vote de cette loi, point sur lequel nous reviendrons ultérieurement. J. Triantaphyllopoulos, « La législation romaine sur le cautionnement », R. H. D ., 1957, p. 508, nous donne deux termes certains entre lesquels cette loi aurait été prise : tout d’abord, cette loi ne peut pas être antérieure à la date à laquelle la première province romaine a été crée, c'est-à-dire 241 av. J. C., ce texte prévoyant, en effet, que la loi ne sera applicable qu’en Italie (sur les conséquences de la limitation géographique de la lex Furia , cf. P. Frezza, op. cit ., p. 16 ; M. Talamanca, « Fideiussione (storia) », E. D ., Giuffrè, p. 327, n. 33). De même, la lex Furia ne peut être postérieure à 180 av. J. C. ; c’est à cette date qu’a été substituée la manus iniectio pure à la manus iniectio pro iudicato . Or, les Institutes de Gaius font justement référence à cette dernière. Plus généralement pour la datation de toutes les lois Républicaines sur le cautionnement, nous renvoyons et à l’ouvrage de J. Triantaphyllopoulos, Lex Cicereia , I, Typois Kleisiounis, Athènes, 1957, et à l’article de ce dernier intitulé « La législation romaine sur le cautionnement », op. cit . ; pour une bibliographie sur les questions relatives aux datations de ces lois républicaines sur le cautionnement nous ne pouvons que renvoyer à G. G. Archi, « Sul concetto di obbligazione solidale », dans Conferenze romanistiche a ricordo di G. Castelli , Giuffrè, Milano, 1940, p. 302, n. 41, et pour une bibliographie plus récente à F. Bribuglio, Fideiussoribus succurri solet , Giuffrè, Milano, 1999, p. 216, n. 22 5 Sur la raison de cette durée, cf. J. Triantaphyllopoulos, « La législation romaine sur le cautionnement », op. cit ., p. 505 et dans Lex Cicereia , op. cit ., p. 6  G. Inst , IV, 22, « […] item lex Furia de sponsu adversus eum, qui a sponsore plus quam virilem partem exegisset […] » 7  Ce qui tend à indiquer qu’une pluralité de garants, pour une même dette, était une pratique très courante à l’époque Républicaine. De cette époque nous est, en effet, parvenu un certain nombre de lois relatives au cautionnement. Ce qui fait du cautionnement « une des rares institutions du droit privé romain, qui ait tenté à ce point le législateur républicain », J. Triantaphyllopoulos, « La législation romaine sur le cautionnement », op. cit. , p. 501. Il s’agit des lois Publilia , Apuleia , Furia , Cicereia , et Cornelia . Sur ces cinq mesures législatives, trois traitent expressément de la pluralité de garants : la lex Apuleia , la lex Furia et la lex Cicereia . Selon G. Provera, « Riflessioni sul beneficium  cedendarum actionum », Studi Sanfilippo , IV, Giuffrè, 1983, ces lois avaient pour unique but de réaliser une redistribution équitable de l’obligation entre les garants, p. 613 8 G. Inst, III, 122 Praeterea inter sponsores et fidepromissores lex Apuleia quandam societatem introduxit. nam si quis horum plus sua portione soluerit, de eo, quod amplius dederit, aduersus ceteros actiones constituit. quae lex ante legem Furiam lata est, quo tempore in solidum obligabantur. unde quaeritur, an post legem Furiam adhuc legis Apuleiae beneficium supersit; et utique extra Italiam superest. nam lex quidem Furia tantum in Italia ualet, Apuleia uero etiam in ceteris prouinciis. sed an etiam in Italia beneficium legis Apuleiae supersit, ualde quaeritur. ad fideiussores autem lex Apuleia non pertinet. itaque si creditor ab uno totum consecutus fuerit, huius solius detrimentum erit, scilicet si is, pro quo fideiussit, soluendo non sit. sed ut ex supra dictis apparet, is, a quo creditor totum petit, poterit ex epistula diui Hadriani desiderare, ut pro parte in se detur actio ; pour une analyse de cette disposition, voir notamment G. Provera, op. cit ., p. 614 ;
pluralité de garants, ils se formaient entre eux comme une société, quandam societatem 9 . La création de cette société avait pour unique résultat de faire supporter aux autres garants les conséquences de la diminution patrimoniale que l’un d’entre eux avait subi en exécutant la totalité de la dette, ou, tout du moins, une part plus importante de ce qu’il devait réellement. Avec la lex Apuleia apparaît, donc, la notion d’engagement partiel des garants. Ceux-ci pouvaient exercer un droit de recours entre eux, dès lors que la somme qu’ils avaient eu à payer excédait leur part. Cette loi est relativement instructive quand à notre thème sur la solidarité. En effet, le créancier peut encore demander à l’un seul des garants l’exécution de la totalité de la dette. Le créancier ne se voit imposer, par cette disposition législative, aucune contrainte quant aux modalités procédurales qu’il doit suivre vis-à-vis des garants. Ce n’est que postérieurement à cette exécution de la part de l’un des garants que les choses se régulariseront entre les sponsores ou les fidepromissores . La lex Apuleia ne touche, en conséquence, que les rapports internes entre les garants et non le rapport entre ces garants et le créancier 10 . Le créancier n’est en rien tenu de diviser ses poursuites et donc sa créance. Il peut, encore, décider de demander l’exécution de la totalité de celle-ci à n’importe lequel des garants ; ces derniers sont toujours tenus de la même manière que le débiteur principal : aussi bien ce dernier que les sponsores ou fidepromissores doivent exécuter le tout à la simple demande du créancier. Ce n’est qu’après cette action de la part du créancier, que les choses se régulariseront entre les garants. Le créancier restant en dehors de toute procédure postérieure à l’exécution de sa créance 11 .
C’est sur ces derniers points que la lex Furia va, elle, innover. 9  On peut les considérer comme des associés d’une même affaire, cf. G. Provera, « Beneficium cedendarum actionum », op. cit ., p. 614 10  G. G. Archi, op. cit.,  p. 300 ; P. Frezza, op. cit ., p. 16, qui souligne avec beaucoup de vigueur que ce n’est uniquement qu’après le paiement que le garant a effectué que celui-ci peut agir contre les autres garants pour récupérer ce qui excède sa part de responsabilité ; F. Briguglio, op. cit ., p. 219. La situation du créancier n’est en effet en rien affecté par cette disposition législative. Ce n’est que postérieurement à son action que la disposition législative s’appliquera, finalement, si celui-ci a décidé de poursuivre l’un des garants pour une part supérieure à ce qu’il devait. On peut s’interroger sur les conséquences pratiques de la lex Appuleia . Le créancier ayant requis une pluralité de garants, il devait donc craindre que certains d’entre eux ne soient pas, ou plus, solvables au moment où la créance devenait exigible. Si le créancier agit pour le tout contre le garant qui lui parait le plus apte à exécuter la garantie, celui-ci peut avoir à supporter définitivement le poids de cette somme si les autres se révèlent insolvables. Cette inefficacité relative de la lex Apuleia  pourrait expliquer certains fragments. Ainsi, Julien au D . 46. 1. 17, évoque le cas d’une pluralité de fideiussores , un terme qui aurait remplacé celui de sponsores. La doctrine retenant, en effet, unanimement que Julien faisait ici référence aux sponsores et non aux fideiussores (cf. G. G. Archi, op. cit. , p. 306, n. 58). Or dans ce passage, Julien évoque une sorte de remède qui pourrait être concédé, succurit solet , à ces garants. Celui qui en justice se déclare prêt à payer la somme dans sa totalité, aurait pu demander que les actions que le créancier détient contre les autres garants lui soient cédées. Cette possibilité n’aurait existé que pour les garants qui n’étaient régis que par la lex Apuleia , dans ce sens G. G. Archi, op. cit ., p. 310 ; M. Talamanca, « Fideiussione (storia) », op. cit ., p. 338, n. 139 ; F. Briguglio, op. cit ., p. 224, n. 44 11  Il nous cependant préciser un point important. Avant la lex Apuleia ,  la lex Publilia avait introduit un recours du garant à l’encontre du débiteur principal si, celui-ci, ne le remboursait pas dans les six mois après le paiement. Ce recours était exercé au moyen d’une manus iniectio pro iudicato . Avant cette loi, les garants pouvaient donc être non seulement poursuivis avant toute action contre le créancier, mais supportaient définitivement le poids de la dette. La lex Publilia  ne semble avoir modifié que cette dernière disposition. De cette information, on peut affirmer que le débiteur et le garant se trouvait bien sur un pied d’égalité : le créancier pouvait décider de poursuivre l’un ou l’autre de ces deux personnages. Il n’y a aucune indication laissant entendre que le créancier doit préalablement agir contre le débiteur principal.
Selon les informations que nous fournit Gaius, en cas de pluralité de garants, le créancier, sous peine d’être sujet à la manus iniectio,  devait diviser ses poursuites entre les garants, . chacun ne répondant plus que pour une pars virilis 12 Il faut cependant tout de suite signaler que si, dans les effets que peuvent entraîner cette loi, la garantie ne devient plus que partielle, stricto sensu la garantie reste entière. Les garants sont encore, iure civile , tenus pour le tout. Nous devons, en effet, soulever deux cas ici. Jusqu’à ce que la dette devienne exigible, d’une part, les garants sont encore tenus pour le tout : si un sponsor, par exemple vient à décéder, nous savons que son obligation est intransmissible à ses héritiers 13 . Or, ce n’est pas le créancier qui va supporter la charge de cette disparition. Le montant de l’obligation que ce garant aurait du exécuter va être supporté par les autres garants présents au moment de la réalisation de la créance 14 . On peut donc en conclure que jusqu’au moins au moment où la dette devient exigible, les garants sont solidairement tenus. D’autre part, nous pensons, également, qu’au tout début de l’application de cette loi, le créancier pouvait très bien décider de n’en poursuivre qu’un seul pour la totalité de la somme normalement due et il obtiendra satisfaction. Mais, en faisant cela, il s’expose à la manus iniectio  des garants et, donc, à une condamnation au quadruplum 15 . En conclusion de ce dernier point on peut dès lors admettre que si effectivement la dette reste bien entière, dans la pratique, on ne voit pas un créancier risquer de s’exposer à une condamnation en agissant pour le tout contre un seul des garants. Cette loi a, donc, des conséquences relativement importantes sur la notion de solidarité.
12 Cette division comme l’indique l’emploi des termes pars virilis se fait en parts égales. C. A. Cannata, Corso di istituzioni di diritto romano , II, 1, Giappichelli, Torino, p. 153, n. 217, « L’aggettivo virilis (pars virilis) significa appunti « individuale, per persona, da attribuirsi a ciascuna persona secondo il numero complessivo delle persone considerate ». 13 G. Inst. III. 120, Praeterea sponsoris et fidepromissoris heres non tenetur […] 14  Prenons l’exemple d’une dette de 100 avec 4 garants. Comme nous le verrons avec la lex Furia , le montant exigible à chacun de ces garants n’est plus que de 25. Si l’un vient à disparaître, ou encore si la première disposition de lex Furia s’applique, c'est-à-dire si l’un des garants est engagé depuis plus de deux ans, la somme de 100 au moment où elle devient exigible devra être divisée par 3. On ne tient pas compte toutefois dans cette loi de l’éventuelle insolvabilité de l’un de ces garants. 15  M. Talamanca, « Alia causa  e durior condicio  come limite dell’obbligazione dell’ adpromissor », Studi Grosso , III, Giappichelli, Torino, 1970, p. 131-132, notamment p. 131, n. 30 ; également de ce même auteur, « Fideiussione », op. cit. , p. 327, n. 33 ; se prononce dans le même sens, F. Briguglio, op. cit ., p. 219, notamment n. 32. Comme M. Talamanca, cet auteur défend, en effet, l’idée, que nous soutenons, que la division entre les garants n’apparaissait pas ipso iure , mais que ce n’est que postérieurement à son action que le créancier s’exposait à une manus iniectio  pour ne pas avoir divisé ses poursuites. Cette opinion semble confirmer par Gaius lorsque celui-ci évoque la manus iniectio qui avait lieu dans cette hypothèse. Celle-ci n’est concédée, selon Inst. IV, 22, que pour le paiement ultra virilem partem . Cette analyse correspondrait, dès lors, au but poursuivit par les lois Républicaines, c'est-à-dire défendre la position du garant, on lui accorde un droit de recours contre les autres garants si sa participation excède sa part contributive ; tout en laissant au créancier la possibilité d’agir contre un seul des garants pour le tout. Même si, comme nous l’avons vu, cette possibilité est, dans la réalité, presque rendue inopérante par la concession aux garants d’une manus iniectio , elle existe cependant. Cette question sur la qualité de la division, c'est-à-dire si celle-ci intervient ipso iure  ou si le garant doit avoir recours à la manus iniectio  pour obtenir satisfaction, est une question importante pour notre sujet. Si, comme nous le pensons, cette division n’a pas lieu ipso iure , cela permet de conclure à un semblant de maintient de la solidarité dans la relation entre les garants ; par contre, si cette division intervient ipso iure , on ne peut que conclure qu’à la disparition de la notion de solidarité dans ce rapport. Contre cette opinion, J. Triantaphyllopoulos, « Législation romaine sur le cautionnement », op. cit ., p. 506, selon lequel, la division opère de plein droit. Dès lors, selon cet auteur, la manus iniectio ne pouvait être exercé que par le sponsor qui avait payé, par erreur, plus que sa part virile, p. 507. De même G. Provera, op. cit., p. 614. M. Talamanca avait, lui aussi, soutenu un temps cette analyse, « Recensioni, I. Triantaphyllopoulos, Lex Cicereia », Archivio  giuridico Filippo Serafini , 1957, p. 166
Si comme nous l’avons admis précédemment, entre les garants il y avait bien une solidarité qui se créait, avec cette loi, les choses semblent changer. En effet, avant la lex Furia , nous pouvons déduire de ces faits et des propos mêmes de Gaius sur la lex Apuleia , que les garants devaient chacun la totalité de la dette 16 . Ce n’est que postérieurement à l’action du créancier qu’un éventuel partage de celle-ci avait lieu. On peut donc en conclure que nous étions dans un système de solidarité : une pluralité de sujets, qui doivent tous exécuter la totalité de la dette à la simple demande du créancier 17 . Avec la lex Furia , un coup important 18 est porté à cette solidarité. Mais une atteinte que l’on pourrait cependant qualifier de déguiser. Si comme nous l’avons, en effet, admis, la division n’est pas de plein droit pour le garant, il n’en reste pas moins qu’en n’effectuant pas cette division de sa propre initiative, il s’expose à une condamnation très lourde.
Pour rendre cette loi plus effective 19 , une autre disposition législative va être prise : il 20 s’agit de la lex Cicereia . Cette loi impose au créancier de faire une déclaration publique qui doit contenir deux informations principales : d’une part indiquer le contenu de l’objet de l’obligation garantie, et, d’autre part, donner la liste des sponsores et fidepromissores qu’il a obtenu pour garantir cette obligation. Le but de cette loi était évidente : permettre à tous les garants de se connaître et de savoir exactement l’objet qu’ils garantissaient. Cette information permettait, ainsi, de rendre 1 certaine l’application de la lex Furia 2 .
Avec cette dernière loi, on peut donc bien dire qu’un coup presque fatal est porté à la notion de solidarité entre les sponsores et les fidepromissores .
16 Une des phrases de Gaius est en effet très claire, Institutes , § III. 121 […] fideiussores uero perpetuo tenentur, et quotquot erunt numero, singuli in solidum obligantur […]. 17 Pour certains auteurs cela n’aurait pas été suffisant pour admettre un lien de solidarité entre les garants. Selon eux, il aurait fallu que les sponsores  fassent une stipulation corréale avec le créancier. Se prononcent dans ce sens, E. Lévy,  Sponsio, Fidepromissio, Fideiussio , F. Vahlen, Berlin, 1907. A partir de l’étude des textes de Gaius, nous pensons que la solidarité à la charge des sponsores, qui devaient répondre à la simple demande du créancier, était de plein droit. Elle ne devait pas faire l’objet d’une stipulation corréale. En effet, Gaius dans aucun texte ne nous parle d’une telle stipulation. Il n’indique pas que devant une pluralité de garants la forme avec laquelle la garantie devait être réalisé devait prendre une autre forme que celle qui avait lieu normalement. Nulle part, il nous est indiqué que le créancier devait, pour obtenir que ces garants soient des débiteurs solidaires, poser la même question de l’engagement successivement à chacun d’eux et que chacun devait donner sa réponse. C'est-à-dire utiliser la formule de la stipulation corréale. Ici, devant le silence des sources on ne peut en conclure que l’on ne fait que suivre la forme normale de la garantie : chaque sponsor répond immédiatement après qu’on lui ai posé la question sur sa volonté de s’engager. La solidarité serait, donc, de plein droit. Se prononce dans ce sens P. Collinet, op. cit ., p. 6. 18 Nous empruntons, ici, l’expression de F. Briguglio, op. cit ., p. 219 ; selon ce même auteur, la solidarité entre les garants auraient disparu à partir de l’introduction de la lex Furia , op. cit ., p. 14, n. 18 ; G. G. Archi, op. cit ., p. 301, cette loi aurait eu pour conséquence de « distruggere la posizione privilegiata del creditore quale gli derivava dal funzionamento della obbligazione solidale » ; pour P. Frezza, op. cit ., « la legge trasforma dunque la responsabilità solidale del garante in responsabilità parziaria », p. 16. D’une façon plus générale, on peut dire que ces lois Républicaines sur le cautionnement, ont effectué un véritable travail de sape sur la notion de solidarité contenu dans les obligations de garantie. La lex Furia n’est que le point culminant d’un travail commençait bien avant. G. G. Archi parlant à propos des trois principales lois, Apuleia , Furia , Cicereia d’effets « rivoluzionarie nei confronti del concetto della solidarietà romana », op. cit ., p. 300 19 Pour une bibliographie sur le lien entre la lex Furia et la lex Cicereia , G. G. Archi, op. cit., p. 301, n. 46 0 2  Gaius, Institutes , III, 123 Praeterea lege Cicereia cautum est, ut is, qui sponsores aut fidepromissores accipiat, praedicat palam et declaret, et de qua re satis accipiat et quot sponsores aut fidepromissores in eam obligationem accepturus sit; et nisi praedixerit, permittitur sponsoribus et fidepromissoribus intra diem XXX. praeiudicium postulare, quo quaeratur, an ex ea lege praedictum sit; et si iudicatum fuerit praedictum non esse, liberantur. qua lege fideiussorum mentio 21  Pour l’application de cette loi dans le domaine de la fideiussio , P. Frezza, op. cit ., p. 17 ; M. Talamanca, « Recensioni, I. Triantaphyllopoulos, Lex Cicereia », op. cit ., p. 159
Si la division n’a pas lieu de plein droit, les informations et recours offert aux garants sont désormais des gardes barrières suffisant à l’application de cette solidarité 22 .
2° La pluralité de fideiussores Les diverses dispositions que nous venons de voir visées presque exclusivement les sponsores et fidepromissores 23 . Selon Gaius, les fideiussores , même après la lex Furia , sont tenus in solidum . En effet, au III, 121, celui-ci indique, et quotquot erunt numero, singuli in solidum obligantur 24 . Cette solidarité entre fideiussores  va perdurer jusqu’à l’ epistula Hadriani . Cette dernière va mettre en place un principe de division de la dette comme pour la lex Furia , mais à la différence de celle-ci, la division ne pourra avoir lieu qu’entre les fideiussores solvables. Ce sont donc ces derniers qui supporteront la charge de l’insolvabilité de l’un d’eux 25 . Si l’ epistula Hadriani semble s’inscrire dans la même démarche de la lex Furia , c'est-à-dire celle d’offrir aux garants un bénéfice de division, on peut se demander pourquoi, la lex Furia  n’a pas été appliqué au cas des fideiussores ? La lex Cicereia,  comme nous l’avons précédemment indiqué, elle, grâce à la jurisprudence, s’appliquait déjà à ces garants. Si la lex Furia  n’a pas été étendue aux cas des fideiussores  c’est qu’il existe une différence dans les conséquences de ces deux lois. Et nous pensons que cette différence provient de l’absence de précision dans la lex Furia de l’hypothèse où l’un des garants se trouve insolvable au moment de l’exécution de la créance. Là, l’ epistula Hadriani prévoit ce cas ; en effet, se sont les autres fideiussores qui supportent la charge de cette insolvabilité. Pour la lex Furia rien de tel n’est prévu. On prévoit juste que le garant peut se retourner contre le créancier si celui-ci lui a demandé plus que sa part contributive. La lex Furia  semble donc faire supporter les conséquences de l’insolvabilité de l’un des garants au créancier. Ce qui n’est pas le cas avec l’ epistula Hadriani 26 . La situation du créancier se trouve donc amélioré dans le cas d’une pluralité de fideiussores .  Paragraphe 2 : Le rapport débiteur principal - garant comme source de solidarité en droit classique
22 Cette notion d’engagement partiel des garants sera encore présente dans la lex Cornelia . Cette loi sanctionne de la nullité partielle la part de la garantie supérieure à 20 000 sesterces. Dans certains cas, l’égalité entre le garant et le débiteur principal est donc rompu. Si la dette est supérieure à 20 000 sesterces, le garant ne pourra lui être inquiété pour un montant supérieur à cette somme. 23  Seule la loi Cicereia , par une extension jurisprudentielle, semble s’appliquer également à cette catégorie de garants. La praedictio  demandée par cette loi concernant l’objet de la garantie mais également le nombre des garants s’appliquerait aux fideiussores . Sur le plan pratique on ne voit pas l’avantage qui découle de cette concession du bénéfice de cette loi aux fideiussores . Ils ne peuvent pas jouir du bénéfice de la lex Furia, et, donc, ne peuvent agir contre le créancier. Ils ne bénéficient au travers de la concession de cette loi que d’une simple information. Ils savent le montant total de la dette qu’ils garantissent, et combien ils sont à offrir cette garantie. Ni plus ni moins. Pour les raisons de l’absence d’extension aux fideiussores des bénéfices concédés par les autres lois, P. Collinet, op. cit ., p. 9 à 13 24  Une interprétation a contrario  confirme, comme nous l’avons vu, que les autres garants, sponsores  et fidepromissores ne sont plus, eux, tenus in solidum . Si originairement la division offerte par la lex Furia n’était pas de plein droit, on peut penser que celle-ci l’est devenue au fil du temps 25 Pour la raison de cette condition de solvabilité, P. Collinet, op. cit., p. 18 26  Selon G. G. Archi, op. cit.,  p. 302, avec l’ epistula Hadriani on accorde, pour la fideiussio , le beneficium divisionis déjà introduit par la lex Furia pour les cas de sponsio et fidepromissio , mais ce bénéfice aurait, selon lui, « tali emendamenti per cui la solidarietà fra i più confideiussori viene da esso solo temperata, rimanendo sempre fattore vivace e operante ».
Traditionnellement, dans le domaine des obligations provenant de stipulations, la doctrine retenait qu’une obligation solidaire pouvait naître dans le cadre de la relation débiteur principal – garant. Que ce dernier soit sponsor , fidepromissor , ou encore fideiussor . Mais au début du 20 ème siècle cette doctrine a subi de vives oppositions 27 . Arguant du fait que certains des éléments caractéristiques des obligations solidaires seraient absents dans la relation débiteur principal – garant, des auteurs ont soutenu que les obligations de garantie ne pourraient pas faire naître un lien de solidarité dans cette relation. Et, en effet, si, par certains points, on retrouve, dans ce rapport, des éléments caractéristiques des obligations solidaires : ainsi, par exemple, aussi bien le débiteur principal que le garant doit la totalité de l’obligation, celle-ci n’étant due également qu’une seule fois. Par d’autres aspects, la relation naissant entre l’obligation du garant et l’obligation du débiteur principal semble se détacher très nettement de cette institution : par exemple, la stipulation de garantie faisant partie des obligations verbales, elle devrait avoir une structure similaire à celle de la stipulation corréale, source par excellence de solidarité contractuelle, or tel n’est pas le cas. Ainsi, alors que dans la stipulation corréale, on se trouve face à un seul acte accompli par les différentes parties, c’est l’ unitas  actus qui prévaut, dans le cas des obligations de garantie, il existe différents actes juridiques, l’un étant même subordonné à la conclusion préalable de l’autre 28 .
27 Pour un rappel historique de la doctrine sur ce point, G. Sacconi, op. cit ., p. 10 ; de même F. Briguglio, op. cit ., p. 28, n. 54 28 La stipulation de garantie ne peut, en effet, naître que si l’obligation principale a déjà été conclue. P. Frezza, op. cit.,  p. 23 a souligné la différence entre la forme de la stipulation de garantie et celle de la stipulation corréale. La forme de la stipulation corréale nous est donné par un fragment des Institutes  de Justinien, III, 16 pr : […] duo pluresve rei promittendi ita funt  : « Maevi, quinque aureos dare spondes ? Sei, eosdem quinque aureos dare spondes ? respondeant singuli separatim « spondeo ». Ainsi, à la différence de la stipulation de garantie où le garant est interrogé séparément et répond séparément du débiteur principal, dans la stipulation corréale passive, en droit classique, le créancier interrogeait ensemble tous les débiteurs corréaux, et ce n’est qu’après l’interrogation du dernier de ces débiteurs, que tous pouvaient répondre, ou séparément comme ce fragment, ci-dessus, nous l’indique, ou donner une réponse collective, comme le démontre le spondemus d’un fragment de Pomponius, cette fois-ci au Digeste , 45. 2. 4.
Ces différences ont poussé une partie de la doctrine a crée pour les obligations de garantie la notion de solidarité accessoire 29 . On se trouverait devant un cas anormal de solidarité qui « non rientra sotto molti punti di vista nello schema tipico » 30 . Suivant ce raisonnement, deux types d’obligations solidaires coexisteraient 31 .  Parmi ces différences, c’est sur un point essentiel aux obligations solidaires que la doctrine va se diviser. En effet, alors que dans l’obligation solidaire, tous les sujets sont censés être placé sur un plan d’égalité 32 , c’est l’indépendance caractéristique de ces obligations, dans le cas des obligations de garantie, il y aurait une différence entre le débiteur principal et le garant. Plus exactement, l’obligation de ce dernier serait subordonnée à celle naissant du rapport débiteur principal – créancier. Cette absence d’autonomie 33  annihilerait toute possible reconnaissance d’un caractère solidaire dans les obligations de garantie. Nous devons, donc, tout d’abord, analyser la relation débiteur principal – garant afin de voir si l’obligation de ce dernier est belle et bien subordonnée à l’obligation principale. Ce n’est qu’après avoir analysé ce rapport que nous pourrons tenté de donner une première conclusion sur le caractère solidaire ou non des obligations de garantie. 1° Entre dépendance et autonomie, l’antinomie des obligations de garantie Une étude sur les relations entre l’obligation principale et celle de garantie doit obligatoirement partir de l’observation d’un certain nombre de passages des Institutes  de
29  Emploi ce terme d’obligation accessoire J. Binder, Die Korrealobligationem im romischen und im heutigen Recht , A. Deichert, Leipzig, 1899, p. 130. Nous devons ici souligner un fait important. C’est, en effet, à cette époque que la doctrine divise en deux catégories différentes les obligations solidaires. Si, pour certains auteurs, une obligation solidaire ne peut pas naître dans le cadre de la relation débiteur principal – garant, pour d’autres, on serait, ici, face à un cas de solidarité imparfaite : ainsi, pour F. De Martino, « L’origine delle garanzie personali e il concetto di obbligazione », S. D. H. I.,  6, 1940, p. 136, « una solidarietà accessoria è già una solidarietà impropria ». Ce même auteur, dans son ouvrage, Le garanzie personali dell’obbligaione , I, Foro Italiano, Roma, 1940, semble, toutefois, critiquer cette différence entre ces deux types de solidarité, p. 71. D’autres auteurs ont, cependant, postérieurement, fait une différence entre ces deux types de solidarité. Ainsi, F. Schulz, Classical roman law , At the Clarendon Press, Oxford, 1951, fait également une distinction entre les obligations solidaires et les obligations corréales, p. 491 ; dès lors selon cet auteur, « the principal promissor and the acessory sponsor , were not plures rei promittendi . Accordingly there was here no correality », p. 497. Il en serait de même pour la fideiussio , « the principal debtor and the fideiussor were solidary debtors. [...]. Principal debtor and fideiussor were not plures rei promittendi », p. 501. Il en est de même pour G. Provera, op. cit . ; après avoir admis que toutes les obligations de garantie contractée sous la forme de l’ adpromissio présentent toutes le caractère de la solidarité, et cela aussi bien dans le rapport qui se constitue entre le débiteur principal et le garant, que dans le rapport entre plusieurs garants, p. 612, cet auteur arrive cependant à la conclusion que l’on se trouverait face à une solidarité accessoire dans le cas de la relation entre le fideiussore et le débiteur principal. Par contre, dans le cas d’une pluralité de fideiussores , le rapport intervenant entre eux, serait un cas de solidarité pure, voir sur ce point p. 655. Nous ne pouvons, ici, plus développer cette distinction entre ces deux types d’obligation solidaire. 30 G. G. Archi, op. cit ., p. 296 31  Cette divergence soulève une question primordiale dans le droit des obligations in solidum : la solidarité est-elle soumise à des critères prédéfinies qui en leur absence empêchent la survenance de celle-ci ? Si, nous arrivons à démontrer que les obligations de garantie peuvent donner naissance à un lien de solidarité, nous démontrerons que la solidarité est plus liée à un état qu’à une condition. 32 P. Frezza, op. cit. , selon cet auteur, aussi bien dans la solidarité active que passive on serait face à un ensemble de rapports obligatoires entre eux autonomes, p. 3 ; F. Briguglio, op. cit ., p. 14 33  Reconnaît, entre autre, au contraire que l’obligation du garant est autonome par rapport à celle du débiteur principal, F. De Martino, Le garanzie personali dell’obbligazione , op. cit., p. 71 à 108 ; et du même auteur, Studi sulle garanzie personali, I, L’autonomia classica della sponsio , Jovene, Napoli, 1937
Gaius 34 . Et notamment du § III, 126 35 de ce manuel. Selon ce texte, et alors qu’il vise, ici, les trois types de cautionnement verbis , Gaius indique que le garant ne peut s’engager pour un debere  plus important que celui du débiteur principal. Cette interdiction d’avoir une obligation du garant plus importante que celle du promettant serait du au caractère accessoire de l’obligation du garant. Tout le problème réside dans l’interprétation qu’il faut donner à ce terme d’ accessio que Gaius présente comme commun aux trois formes de garantie. Si, pour certains auteurs, ce texte est particulièrement limpide et n’a pas besoin, dès lors, de commentaires plus important 36 , il faut croire que sa clarté n’a pas été évidente pour tout le monde. Ce passage a été l’objet, en effet, de nombreuses interprétations et notamment le terme accessio  qu’il contient. C’est à partir de ce fragment, et de ce terme, qu’a été construit, entre autre, une bonne partie de la doctrine concernant le caractère accessoire des obligations de garantie ; une doctrine qui retient le mot accessio  dans le sens d’une dépendance de l’obligation de garantie à l’encontre de celle principale 37 .
Mais qu’en ait-il pour le droit classique et pour l’utilisation qu’en fait Gaius dans ce paragraphe ? Les obligations des garants sont-elles considérées comme subordonnées à celles de la stipulation principale ? Gaius a-t-il compris ce terme comme impliquant autre chose que ce lien de subordination ? 38  
34  C’est à travers les Institutes  de Gaius que nous connaissons le mieux le droit des obligations de garantie en droit classique. Pour R. Feenstra, « Le caractère accessoire des différents types de cautionnement verbis en droit romain classique », Etudes Macqueron , Aix-en-Provence, 1970, p. 310, « notre seul guide sûr reste Gaius ». Deux des stipulations de garantie du droit classique ont été purement et simplement éliminées par les compilateurs. En effet, les ceux-ci ont supprimé, dans tous les textes, les références concernant la sponsio et la fidepromissio . Ils n’ont, toutefois, fait, là, que tirer les conséquences de l’évolution jurisprudentielle. La fideiussio dominant, déjà, les obligations de garantie. En supprimant les références à la sponsio , ils ne voulaient et n’ont fait que simplifier ce domaine. Voir dans ce sens, V. Mannino, L’estensione al garante delle eccezioni del debitore principale nel diritto romano , Giappichelli, Torino, 1992, p. 2. Devant cette œuvre d’élagage de la part des compilateurs, il nous faut donc être, particulièrement, vigilent. Certains des textes, qui nous ont été transmis, avec des références à la fideiussio, pouvant se rapporter originairement à la sponsio . 35 G. Inst , III, 126 In eo quoque iure par condicio est omnium, sponsorum, fidepromissorum, fideiussorum, quod ita obligari non possunt, ut plus debeant, quam debet is, pro quo obligantur. at ex diuerso, ut minus debeant, obligari possunt, sicut in adstipulatoris persona diximus; nam ut adstipulatoris, ita et horum obligatio accessio est principalis obligationis nec plus in accessione esse potest quam in principalire 36 G. Scherillo, Lezioni sulle obbligazioni, Corso di diritto romano , Cisalpino, Bologna, 1994, p. 98-99 37  Originairement, le terme accessio  aurait seulement désigné l’adjonction d’un acte à un autre. Dans ce sens, F. Pastori, Il negozio verbale in diritto romano , Cisalpino, Bologna, 1994. C’est à partir du terme accessio que l’on retrouve dans ce passage, mais également dans d’autres fragments du Digeste, que l’adjectif accessorius  a été crée par les glossateurs. Ce terme a fortement marqué les juristes puisque on a pris l’habitude d’appeler les cautions des débiteurs accessoires. Ce caractère accessoire marque, alors, dans le droit moderne, la dépendance qui existerait entre l’obligation principale et celle de garantie. Pour une histoire de l’évolution de ce terme, R. Feenstra, op. cit. , notamment les pages 301 à 303 ; de même, P. Ziliotto, Studi sulle obbligazioni alternative nel diritto romano , CEDAM, Padova, 2004, p. 242, n. 31. S. Solazzi, « Nè accessiones , nè adpromissores », B. I. D. R ., 1930, p. 2, s’interroge, quant à lui, sur la dernière phrase de ce passage des Institutes de Gaius, et, c'est-à-dire, se demande à quoi ou à qui le terme accessio se rapportait-il ? Pour certains, par opposition avec le débiteur principal, le garant aurait porté le nom d’ accessio . Pour d’autres, ce terme accessio  n’aurait pas été appliqué au garant mais à l’obligation de celui-ci. S. Solazzi retient que tous les passages où le terme accessio aurait le sens de « personne obligée de façon accessoire » seraient des interpolations. Ce terme se rapporterait donc, selon lui, uniquement au rapport obligatoire, p. 19 38 Le caractère accessoire des obligations de garantie a divisé la doctrine. Pour un certain nombre de romanistes, il ne fait aucun doute que toutes les obligations de garantie sont subordonnées à l’obligation principale. Se prononce dans ce sens, S. Riccobono, « Dal diritto romano classico al diritto moderno », dans Ann. sem. giur. Palermo , III-IV, 1917, selon lequel, « il carattere accessorio è proprio a tutte le figure di garanzia », p. 618, et en tire dès lors la conséquence que « la condizione è pari tra sponsori e fideiussori ». Pour d’autres, cette subordination ne serait pas un trait de commun à toutes les obligations de garantie ; citons, comme auteurs soutenant cette divergence de caractère entre les différentes sources de garantie, P. Ziliotto, op. cit ., selon laquelle « l’accessorietà […] non sia un caratterre comune a tutte le stipulazioni accessorie di garanzia », p. 242 ; selon elle, « è opinione largamente condivisa che le stipulazioni accessorie di garanzia più antiche, sponsio  e
Pour tenter d’apporter une réponse à ces interrogations nous nous devons d’étudier d’autres passages des Institutes de Gaius. Et tout d’abord trois textes 39  qui se suivent, et qui concernent la naissance des obligations de garantie verbis .
Dans le premier de cette série, Gaius indique que la situation d’une part du sponsor et du fidepromissior , et celle du fideiussior d’autre part, serait différente, valde dissimilis . C’est donc, naturellement, que l’on se rapporte aux textes suivants pour avoir une idée plus précise sur cette divergence de conditions que Gaius annonce. Dans le paragraphe suivant, Gaius traite de la naissance de la sponsio  et de la fidepromissio . Selon ce passage, ces deux stipulations de garantie ne peuvent exister que si préalablement à leur survenance une obligatio verbis  a eu lieu. Le lien de droit entre le créancier et le débiteur principal ne peut, donc, résider que dans ce type d’engagement. Gaius apporte, par la suite, une précision très importante. Il n’est pas nécessaire que le débiteur principal lui-même soit valablement engagé, quamvis ipse qui promiserit non fuerit obligatus . La garantie d’une stipulation peut avoir lieu alors que cette dernière n’est pas valide. Gaius indique trois cas où l’acte principal se retrouve dans cette hypothèse d’invalidité ; il s’agit, de la stipulatio  de la femme ou du pupille sine tutoris auctoritate , et la promissio post mortem dari . Deux autres cas font l’objet de discussions, le cas de la stipulation de l’esclave et celui 40 de l’étranger . Au § 119a 41 , Gaius traite de la fideiussio . Cette garantie peut, quant à elle, intervenir à la suite de n’importe quel type d’obligation ; l’attribut omnis servant, en effet, à indiquer que
fidepromissio , erano fonte di una obbligazione di garanzia autonome. La più recente, fideiussio , invece, faceva nascere una obbligazione accessoria », p. 243 ; nous pouvons simplement souligner ici que nous avons une parfaite confirmation de ce que nous indiquions précédemment, c'est-à-dire le caractère fortement imprégné du vocabulaire crée par les glossateurs ; en effet, alors que cet auteur énonce qu’il faut faire une distinction entre les garanties, car certains sont accessoires et d’autres pas, elle-même, alors qu’elle indique que la sponsio  et la fidepromissio sont des garanties autonomes commence par qualifier ces deux sortes de garantie de « stipulazioni accessorie ». Pour R. Feenstra, originairement ce terme n’aurait indiqué que la différence entre l’obligation de la caution et celle du débiteur principal, op. cit ., p. 302 ; dans le même sens, F. Briguglio, op. cit. , selon lequel « il termine accessio , cosi come il corrispondente verbo accedere , indica nelle fonti romane il rapporto esistente fra l’obbligazione di garanzia e quella del debitore principale », p. 15. Pour M. Talamanca, l’utilisation du terme accessio  servirait dans ce texte uniquement non pas à exprimer « il dogma dell’accessoirità in senso moderno, bensi il limite soltanto della durior causa », dans « Alia causa  e durior condicio dell’ adpromissor » , op. cit., p. 137, n. 43. Nous ne pouvons, ici, donner la position de tous les auteurs qui se sont prononcés sur ce sujet. Nous renvoyons pour une bibliographie quasi exhaustive à celle que donne F. Briguglio, op. cit ., p. 11 et s. 39 G. Inst ., III. 118-119a 118. Sponsoris uero et fidepromissoris similis condicio est, fideiussoris ualde dissimilis. 119.  Nam illi quidem nullis obligationibus accedere possunt nisi uerborum, quamuis interdum ipse, qui promiserit, non fuerit obligatus, uelut si mulier aut pupillus sine tutoris auctoritate aut quilibet post mortem suam dari promiserit. at illud quaeritur, si seruus aut peregrinus spoponderit, an pro eo sponsor aut fidepromissor obligetur. 119a . Fideiussor uero omnibus obligationibus, id est siue re siue uerbis siue litteris siue consensu contractae fuerint obligationes, adici potest. at ne illud quidem interest, utrum ciuilis an naturalis obligatio sit, cui adiciatur; adeo quidem, ut pro seruo quoque obligetur, siue extraneus sit, qui a seruo fideiussorem accipiat, siue ipse dominus in id, quod sibi debeatur. La plupart des auteurs ont étudié ces textes simultanément. E. Levy, Die Konkurrenz der Aktionen und Personen , II, Verlag Vahlen, Berlin, 1922, p. 64 et s ; W. Flume, Studien zur Akzessorietät der Römischen Bürgschaftsstipulation , Weimar, 1932, p. 64 et s. ; du même auteur, Rechtsakt  und rechtsverhältnis, Römische Jurisprudenz und modernrechtliches Denken , F. Schöningh, Paderborn-München-Wien-Zurich, 1990, p. 29 et s.; R. Feenstra, op. cit . ; F. De Martino, Le garanzie personali dell’obbligazione , op. cit ., p. 71 et s. ; P. Beretta, « Sulle formule da stipulazione fideiussoria e novativa », Scritti Ferrini , I, Società editrice « vita e pensiero », Milano, 1947, p. 80, n. 2 ; F. Pastori, « Osservazioni intorno alla sponsio  romana », S. D. H. I.,  1947-48, p. 217 à 234 ; J. Coudert, Recherches sur les stipulations et les promesses pour autrui en droit romain , Société d’impression typographiques, Nancy, 1957, p. 56 et s ; P. Frezza, op. cit., p. 43 et s. ; R. Quadrato, Le Institutiones nell’insegnamento di Gaio, Omissioni e rinvii , Jovene, Napoli, 1979, p. 116 ; G. Sacconi, Studi sulle obbligazioni solidali da contratto in diritto romano , Giuffrè, Milano, 1973, p. 127 ; F. Pastori, op. cit ., p. 120 et s. ; F. Briguglio, op. cit., p. 19 et s ; P. Ziliotto, op. cit ., p. 245 40 P. Ziliotto, op. cit ., p. 245
sont susceptibles de cette garantie non seulement les obligations verbis mais également celles nées re , litteris  et consensu contractae 42 . Peu importe que cette obligation principale soit civile ou naturelle 43 .
Il nous faut donc comparer les différentes informations que Gaius nous fournit au travers de ces deux fragments, pour trouver quelle est la divergence qu’il énonce dans le premier paragraphe que nous avons cité. La difficulté pour cerner cette différence réside dans le fait, en effet, selon nous, que Gaius ne dit pas expressément qu’elle est la divergence que lui-même retient entre ces différentes formes de garanties. Il indique simplement quelles sont les conditions nécessaires à la survenance de chacune des obligations verbis . Et c’est de la confrontation des conditions nécessaire à chacune des ces garanties que découle les différences entre les obligations de garantie.
Le premier élément qui semble évident est relatif au domaine d’application de ces garanties. Alors que la sponsio 44 ne peut s’adjoindre qu’à une obligatio verbis , la fideiussio a, quant à elle, un secteur d’activité beaucoup plus étendu puisque l’acte principal qu’elle peut garantir est, tout simplement, toute obligation que celle-ci soit civile ou naturelle 45  On ne . retrouve pas la restriction indiquée pour la sponsio . A partir de cette divergence, une première conclusion s’impose. Si la sponsio ne peut naître qu’à la suite d’un acte qui a la structure d’une verborum obligatio et, cela, quant bien même celui que cette sponsio garanti, ne se trouve finalement pas obligé, c’est que cette garantie ne peut être qu’autonome vis-à-vis de l’obligation principale.
41 Outre la bibliographie que nous avons donnée précédemment et qui traite du thème de la garantie personnelle, d’autres ouvrages doivent également être pris en compte pour ce fragment. Ce texte a, en effet, fait l’objet de nombreuses analyses pour la référence qu’il contient aux obligations naturelles ; ces études ne sont pas inintéressantes pour notre sujet, elles permettent, en effet, de se faire une idée, comme nous le verrons plus tard, sur la démarche que Gaius se proposait de suivre dans ces différents paragraphes ; nous renvoyons dès lors aux études suivantes : S. Perozzi, « Interpretazione di Gaio III, 119a », Studi Bonfante , I, Milano, 1930, p. 73 et s., J. Vazny, « Naturalis obligatio », Studi Bonfante, IV, Milano, 1930, p. 135 et s., P. Cornioley, Naturalis obligatio. Essai sur l’origine et l’évolution de la notion en droit romain , Genève, 1964 ; L. Labruna, « Interpretazione di Gai 3. 119a », Gaio nel suo tempo. Atti del simposio romanistico , Napoli, 1966, p. 55 et s., S. Longo, « Naturalis obligatio e debitum servi in Gai. 3. 119a », R. I. D. A ., 1995, p. 53 à 97 42  S. Longo, Filius familias se obligat ? Il problema della capacità patrimoniale dei filii familias , Giuffrè, Milano, 2003, p. 87, n. 87 ; P. Ziliotto, op. cit ., p. 247 43  Cette notion d’obligation naturelle a posé de nombreuses difficultés. On s’est beaucoup interrogé sur la démarche que Gaius voulait employer ici. En effet, après avoir cité les obligations civiles et naturelles, Gaius fait tout de suite référence à un acte principal fait par un esclave. Le point central de la discussion résidait dans l’interprétation à donner à la locution, « adeo ut ». Pour certains, cette expression n’aurait fait qu’annoncer des exemples d’obligation naturelle. Le cas de l’esclave aurait été un cas extrême d’obligation naturelle et il fallait dès lors préciser que dans le cas de l’engagement d’un esclave une fideiussio pouvait naître. Cornioley proposait une thèse assez innovante puisqu’elle finissait par exclure les obligations de l’esclave de la catégorie des obligations naturelles. Dans sa démonstration, comme le relève S. Longo, l’expression « adeo ut » aurait eu, alors, la signification de « a tal punto che...», p. 86 ; et en effet, comme le précise S. Longo, dans certains passages des Institutes  de Gaius cette locution a cette signification. Et, dès lors, si on retient cette traduction, selon S. Longo, « Gaio introdurebbe […] una ulteriore particoliarità di questa forma di garanzia, precisando che essa è altresi inodea a garantire i debiti servi (assunti tanto verso l’estraneo quanto verso il dominus) debiti che […] costituirebbero un tertium genus cui fideiussor adici potest », p. 86. S. Longo retient pour sa part une toute autre traduction de cette expression. Selon cet auteur, dans ce passage, Gaius voulait souligner « l’assoluta irrilevanza del tipo di obligatio  che la fideiussione è idonea a garantire, sia essa cioè civilis  o naturalis  con la conseguenza appunto che a tale forma di garanzia si può validamente ricorre pure se ad obbligarsi sia stato uno schiavo », p. 87 44 Nous ne parlerons plus désormais que de la sponsio ;  mais nous visons également dans ces développement  l’autre garantie personnelle dont le régime juridique est quasi similaire à celui de la sponsio , c'est-à-dire la fidepromissio 45 R. Feenstra, op. cit ., p. 311 ; P. Cornioley, op. cit ., p. 45 ; ce même auteur, p. 46, parle d’un « caractère quasi universel de la fideiussio ».
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