Sources, approches et premiers résultats pour une histoire du village vu d en bas - article ; n°1 ; vol.83, pg 89-114
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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1996 - Volume 83 - Numéro 1 - Pages 89-114
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Philippe Papin
Sources, approches et premiers résultats pour une histoire du
village vu d'en bas
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 89-114.
Citer ce document / Cite this document :
Papin Philippe. Sources, approches et premiers résultats pour une histoire du village vu d'en bas. In: Bulletin de l'Ecole
française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 89-114.
doi : 10.3406/befeo.1996.2399
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1996_num_83_1_2399approches et premiers résultats Sources,
pour une histoire du village vu d'en bas
Philippe PAPIN
Dans les pages qui suivent, il ne s'agit pas de traiter du village vietnamien et d'en
exposer les sources historiques, comme si le sujet précédait la documentation, mais il
s'agit au contraire d'examiner les points d'appuis et les nœuds problématiques qui ré
sultent de la confrontation entre ce sujet de recherche et les archives. Le moment est
opportun pour s'interroger puisque la recherche sur le Vietnam s'est enrichie depuis
quelques années de la masse impressionnante de documents conservés à Hanoi. L'accès
à ces archives nouvelles, qui permettent de descendre très bas dans la population et la
vie villageoise, peut-il modifier notre vision — notre approche — de l'histoire vietn
amienne ? Cette adjonction documentaire joue-t-elle comme une extension ou comme
une modification du savoir historique ?
Posons comme préalable cette idée : le mouvement ne va pas du sujet à ses sources
mais bel et bien des sources au sujet. L'état de la documentation conditionne direct
ement l'interrogation historiographique. Cette remarque est peu originale, nous en
convenons, mais elle n'est pas neutre. Transposée au plan du contenu de la recherche,
elle signifie aussi que le mouvement essentiel va d'abord du bas vers le haut, des sys
tèmes sociaux réels aux institutions supérieures productrices d'archives, d'une réalité
diverse, contrastée, hétérogène à une inévitable simplification administrative à qui la
patine du temps et l'absence de sources de niveau inférieur donnent la valeur d'un t
émoignage par défaut. Ce témoignage qui joue comme un rabot sur la réalité dont il
prétend rendre compte n'est donc pas irrécusable car il repose sur un manque — une l
acune documentaire — et il reste prisonnier d'une vision qui oppose, dans un vis-à-vis
univoque, l'administration coloniale dont on connaît bien les ressorts et une société
vietnamienne plus difficile à saisir. Ce vis-à-vis (nous et eux), notons-le au passage,
nous semble suspect parce que mal détaché de la problématique coloniale ou de l'orien
talisme culturaliste des premières heures.
La question des sources et approches ne peut donc faire l'économie d'une réflexion
sur les rapports complexes qui unissent les archives aux sujets et aux contenus de la r
echerche historique. Dans le cas de l'histoire vietnamienne de la fin du XIXe siècle, ces
préliminaires prennent une importance accrue du fait de la scission de facto entre la so
ciété réelle et l'institution productrice ou initiatrice d'archives, savoir l'administration
française. L'on connaît déjà bien les diverses modifications des rapports des Résidents
de provinces qui, d'échelon en échelon, étaient totalement édulcorés pour arriver opti
mistes et confiants sur le bureau du Ministre des Colonies. Ce que l'on sait moins sans
doute, c'est qu'une grande partie de ces rapports étaient en fait rédigés sur la foi des
renseignements fournis par l'administration vietnamienne elle-même. Le document de
l'administration supérieure française ou qui sert parfois de base au cher
cheur a donc subi plusieurs altérations, plusieurs modifications à travers des filtres à la
fois vietnamiens et français. Il nous en apprend souvent moins sur le village vietnamien 90 Sources sur le Viêt Nam PHILIPPE PAPIN
que sur le rédacteur du texte lui-même, fonctionnaire français ou mandarin vietnamien
épris de stabilité sociale. Les notions de «docilité héréditaire», de «village clos», ou
encore de «fort contrôle social», par exemple, qui postulent à la fois immobilité et ho
mogénéité et que l'on trouve sans cesse dans les archives, sont significatives de cette
vision d'en-haut, globalisatrice et univoque. La possibilité nouvelle offerte aux cher
cheurs d'étudier les documents de niveau villageois ouvre davantage le spectre des t
émoignages, elle permet une adéquation a priori entre les sources et la société étudiée,
mais elle ne résout bien sûr pas les difficultés de méthode. C'est un premier problème.
Multiplication des sources, diversité des points de vue, hiérarchie des niveaux ad
ministratifs et sociaux : les archives deviennent soudain volubiles et les renseignements
disparates. À titre d'illustration, nous voudrions ici présenter les sources permettant
d'écrire une histoire vue d'en-bas, ou plus exactement vue du plus bas possible, à tra
vers l'étude d'un lieu privilégié: la périphérie immédiate de la ville de Hanoi. Si l'on
quitte un instant le point de vue omniprésent de la Résidence supérieure au Tonkin ou
de la Mairie de Hanoi pour se tourner vers les archives des villages, l'on décèle en réa
lité des phénomènes de longue durée, internes à la société vietnamienne, et qui perdu
rent en se modifiant selon des modalités qui nous éloignent encore davantage des mutat
ions qui affectent l'Administration coloniale française. Il y a d'évidence une évolution
propre des sociétés urbaines ou péri-urbaines vietnamiennes mais le recours aux sources
locales conduit à une diversité, une hétérogénéité même, qui complique l'analyse.
Présentation des sources et statut de l'archive villageoise
La zone étudiée
Rappelons brièvement que si Hanoi était une ville française, le Tonkin était placé
sous le régime du Protectorat et donc sous administration essentiellement vietnamienne.
La périphérie de Hanoi faisait l'objet d'un traitement intermédiaire car elle fonctionnait
administrativement comme la province mais, de par sa situation, elle était gérée et
contrôlée comme la ville. Sur cet espace restreint, à l'échelle d'un district (huyên) un
Résident (ou Délégué) français remplissait les fonctions dévolues ailleurs aux Résidents
chefs de province. C'est précisément cette situation de contact qui explique la richesse
documentaire du fonds: la zone étudiée était suffisamment contrôlée par l'administra
tion coloniale pour avoir laissé des archives mais elle était aussi suffisamment auto
nome, vietnamienne, pour nous permettre de comprendre ce qu'était un village à la fin
du XIXe et au début du XXe siècle1. Les archives villageoises du huyên de Hoàn-Long
1. Nous n'ignorons pas la distinction entre le làng (village) et la xâ (commune, au sens
administratif) mais elle ne présente pas vraiment d'intérêt pour notre propos. De plus, et il faut insister
sur cette diversité, les villages qui entouraient Hanoi avaient précisément des statuts administratifs très
divers. Si l'on regroupe les informations fournies par les dia-ba (cadastres), on compte au début du
XIXe siècle (1805-1837) 44 villages dans le huyên Vîhh Thuân : 16 thon, 15 phirông , 13 trai ; en 1866,
42 villages: 15 thon, 15 phtfông, 12 trai. Alors que le statut de communes (xâ) était indiqué pour
d'autres villages (exemple : xâ Nhân HiBn, tô'ng C6 Hiën, huyên Thtfçfng Phuc), le huyên Vîhh Thuân
n'en comptait pas une seule. Ces informations sont tirées du manuscrit На Nôi Dia Ba (Institut Hán
Nom, A.628, 57 p.), et, pour la période 1805-1837, des fiches analytiques des cadastres aimablement
communiquées par le Professeur Phan Huy Le que je remercie ici. Toutes ces informations issues des
cadastres entrent en parfaite cohérence avec les deux ouvrages majeurs concernant les villages au
XIXe siècle, à savoir le Các trSn tôhg xâ danh bi 13m (1810-1813, Bibliothèque de l'Institut des Pour une histoire du village vu d'en bas 91
— qui forme comme une ceinture autour de la ville de Hanoi — se trouvent réunies dans
le fonds de la Résidence de Hà-D&

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