Une nouvelle administration pour l agriculture : la réforme du ministère - article ; n°5 ; vol.17, pg 889-917
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Description

Revue française de science politique - Année 1967 - Volume 17 - Numéro 5 - Pages 889-917
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Yves Tavernier
Une nouvelle administration pour l'agriculture : la réforme du
ministère
In: Revue française de science politique, 17e année, n°5, 1967. pp. 889-917.
Citer ce document / Cite this document :
Tavernier Yves. Une nouvelle administration pour l'agriculture : la réforme du ministère. In: Revue française de science
politique, 17e année, n°5, 1967. pp. 889-917.
doi : 10.3406/rfsp.1967.393045
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1967_num_17_5_393045Une Nouvelle Administration
pour l'Agriculture
La réforme du ministère
YVES TAVERNIER
L'étude de la réforme du Ministère de l agriculture n'intéresse
pas seulement le spécialiste des problèmes ruraux. Elle s'ins
crit dans l'effort de réflexion générale sur le pouvoir politique
et l'administration. Elle permet d'aborder et d approfondir certains
des thèmes, parmi les plus importants, de la recherche en socio
logie administrative :
1. Le monde paysan et l'économie agricole subissent des trans
formations profondes et très rapides depuis la fin de la seconde
guerre mondiale. La puissance publique a été contrainte de redéfinir
la politique agricole et de l'orienter dans des voies entièrement
nouvelles. Dans quelle mesure l administration a-t-elle compris cette
évolution et a-t-elle tenté de s'adapter au changement ? Dans quelle
mesure l'organisation administrative de l'agriculture est-elle liée à la
définition d'une politique ?
2. CEuvre d'un homme seul qui l'a conçue et réalisée malgré
l'opposition très vive de son administration, cette réforme apporte
d'utiles enseignements sur le processus de formation de la décision
politique. Elle est un exemple assez remarquable d'échec dû à la
non-application de textes juridiques qui demeurent cependant en
vigueur. L'arrivée d'un nouveau ministre a suffi, en quelques mois,
à la priver d'une grande partie de son efficacité.
3. Cette étude met enfin en lumière le rôle des corps d'ingé
nieurs dans les ministères dits « techniques ». Leur mentalité, les
conflits d'intérêts et de prestige qui les opposent, leur attachement
à la tradition favorisent l'isolement et le particularisme du Minist
ère de l'agriculture. Ils ont constitué un des obstacles majeurs à
l'évolution des structures administratives. 890 Yves Tavernier
Le Ministère de l'agriculture est né avec la Troisième Répub
lique. C'est pour des raisons d'ordre politique qu'il a acquis son
autonomie par rapport au Ministère du commerce auquel il était
rattaché sous le Second Empire.
Le monde paysan était alors dans une large mesure organisé
et influencé par la Société des agriculteurs de France, dont les
principaux dirigeants appartenaient à la noblesse terrienne et
avaient été éloignés du pouvoir après la victoire des républicains
aux élections de 1876. Très rapidement, ces derniers comprirent
qu'ils ne pouvaient laisser d'anciens officiers et d'anciens magistrats
se préoccuper seuls de l'intérêt des ruraux. Aussi, face aux syndicats
de la droite, créèrent-ils des coopératives, des mutuelles et des
caisses de crédit. Ils regroupèrent ces organismes, en 1880, dans
la Société nationale d'encouragement à l'agriculture.
Mais cette société ne disposait pas des moyens nécessaires
pour détourner les masses paysannes de l'emprise des adversaires
de la République. Il fallait que l'Etat s'en préoccupât lui-même.
Telle était la pensée de Gambetta, qui écrivait le 25 avril 1880
dans son journal La République française :
« La République est décidée à venir en aide aux travailleurs
des campagnes mais elle ne saurait continuer à favoriser la
féodalité agricole. Elle ne sacrifiera pas plus longtemps les
intérêts de la démocratie rurale à une coterie de hobereaux et
de grands seigneurs. Les populations agricoles n'ont plus besoin
qu'un groupe privilégié vienne s'entremettre entre elles et le
gouvernement. Elles s'adresseront directement à l'Etat. »
Gambetta définissait ainsi le rôle qu'il attribuait au Ministère de
l'agriculture qu'il créera dix-huit mois plus tard, le 14 novembre
1881, dès son arrivée au pouvoir. Fondé pour des raisons autant
politiques que techniques, le Ministère de l'agriculture devait jouer
le rôle d'un Ministère de l'intérieur des ruraux. Cette marque
d'origine allait déterminer son organisation et son champ d'action
jusqu'à la réforme actuelle.
En effet, ses attributions ne sont pas fixées en fonction des
problèmes qu'il a à traiter, mais selon la profession d'une catégorie
de citoyens. Il est plus le ministère des paysans et même des
ruraux que celui des problèmes agricoles !. Ainsi au niveau de l'a
dministration centrale, existent des directions techniques de carac
tère spécifiquement agricole : Production agricole, Eaux et Forêts,
Haras, Répression des fraudes, mais également des services dont
l'existence paraît moins justifiée. Les activités du Génie rural sont
sensiblement identiques à celles des Ponts et Chaussées (électrifi-
1. Vaugelas (Charles de), «Le Ministère de l'agriculture», in Fauvet (J.),
Mendras (H.), Les paysans et la politique, A. Colin, 1958, pp. 253-268. Réforme du Ministère de V Agriculture 891
cation, adductions d'eau...), mais elles s'exercent dans les com
munes rurales. Quant aux directions de l'Enseignement agricole
et des Affaires professionnelles et sociales, elles remplissent pour
le monde paysan, les fonctions normalement dévolues aux Minist
ères de l'éducation nationale et du travail.
Le Ministère de l'agriculture a la charge d'un Français sur
cinq, de sa naissance à sa mort. Seul le Ministère de la France
d'outre-mer disposait d'une structure aussi particulière. Il n'est pas
téméraire de déceler certaines analogies entre ces deux ministères.
Celui de l'Agriculture devait, du moins à l'origine, encadrer les
agriculteurs et assurer leur fidélité à la République. D'une façon
générale, le monde paysan était considéré comme un monde à part,
moins évolué, ayant une mentalité particulière qui exigeait la for
mation d'administrateurs spécialisés. L'économie agricole avait ses
propres lois d'organisation et de développement qui rendaient très
difficile son intégration dans l'économie générale du pays.
Cette extrême diversité des tâches au niveau de l'administration
centrale provoquait une multiplication extraordinaire des services
au niveau départemental. Il en existait parfois quatorze ou quinze,
sans compter les centres d'enseignement, les laboratoires de recher
ches, les organismes para-administratifs et les établissements
publics ! Les services étaient entièrement autonomes, situés le plus
souvent dans des immeubles différents, parfois répartis dans plu
sieurs villes du département, et le préfet chargé de la coordination
éprouvait de grandes difficultés à assurer les liaisons. Une telle
incohérence et l'absence de « chef d'orchestre » ayant autorité sur
l'ensemble des services rendaient particulièrement aléatoire l'appli
cation de toute politique agricole. Quant au paysan, une telle comp
lexité le déroutait et l'effrayait. L'Administration créait ainsi un
fossé difficilement franchissable entre elle-même et l'usager 2.
L'organisation du Ministère de l'agriculture apparaissait comme
la conséquence d'un choix idéologique et politique. Jusqu'à une
date récente, la plupart des cadres supérieurs de l'administration
centrale ne provenaient pas du recrutement ordinaire de la fonction
publique. Il était alors admis que pour administrer l'agriculture il
fallait être agronome. Ainsi, en 1954, sur les quarante-quatre fonc
tionnaires occupant des emplois de conception et de direction à
l'administration centrale, quarante-trois étaient diplômés de l'e
nseignement supérieur agricole s. Ministère encadré essentiellement
2. Cf. Cépède (M.), Weill (G.), L'agriculture

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