Les grands travaux d'aménagemen de la Baie James (Québec). Un exemple d'intégration régionale en zone subarctique - article ; n°498 ; vol.90, pg 151-202

Guy Dimeo, Gilbert Gilbertdallarosa

Description

Annales de Géographie - Année 1981 - Volume 90 - Numéro 498 - Pages 151-202
An example of a regional integration in a subarctic zone : the case of the territor y of James Bay (Quebec).
On the inhospitable shores of Bay James, the recent implementing of a state-capitalistic way of production is represented by the harnessing of rivers for hydro-electricity and by an ever-increasing tapping of the resources of the soil and the underground. Entrusted to two public companies of Quebec — Société de Développement de la Baie James, Société d'Energie de la Baie James —, the socio-economic integration of the Territory is creating very tense social relationship in production and definite hazards for the natural balance. The claims of the workers coming from the South and the sometimes violent opposition of the people on the land are the limits to how far capital can encroach upon in that field of exploitation.
Sur les rivages inhospitaliers de la Baie James, la mise en place récente du mode de production capitaliste-étatique se traduit par l'équipement hydro-électrique des cours d'eau, par une exploitation accrue des ressources du sol et du sous-sol. Confiée à deux sociétés publiques québécoises — Société de Développement de la Baie James, Société d'Energie de la Baie James —, l'intégration socio-économique du Territoire instaure des rapports sociaux de production extrêmement durs et provoque la dégradation d'une nature fragile. La revendication des travailleurs venus du Sud et l'opposition parfois virulente des autochtones marquent les limites de l'emprise du capital sur cette périphérie exploitée.
52 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: ANNALES_DE_GEOGRAPHIE
• Publié le: 01 janvier 1981
• Nombre de lectures: 20
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 4 Mo

Extrait

G. Dalla-Rosa
Guy Di Méo
Les grands travaux d'aménagemen de la Baie James (Québec).
Un exemple d'intégration régionale en zone subarctique
In: Annales de Géographie. 1981, t. 90, n°498. pp. 151-202.
Abstract
An example of a regional integration in a subarctic zone : the case of the territor y of James Bay (Quebec).
On the inhospitable shores of Bay James, the recent implementing of a state-capitalistic way of production is represented by the
harnessing of rivers for hydro-electricity and by an ever-increasing tapping of the resources of the soil and the underground.
Entrusted to two public companies of Quebec — Société de Développement de la Baie James, Société d'Energie de la Baie
James —, the socio-economic integration of the Territory is creating very tense social relationship in production and definite
hazards for the natural balance. The claims of the workers coming from the South and the sometimes violent opposition of the
people on the land are the limits to how far capital can encroach upon in that field of exploitation.
Résumé
Sur les rivages inhospitaliers de la Baie James, la mise en place récente du mode de production capitaliste-étatique se traduit
par l'équipement hydro-électrique des cours d'eau, par une exploitation accrue des ressources du sol et du sous-sol. Confiée à
deux sociétés publiques québécoises — Société de Développement de la Baie James, Société d'Energie de la Baie James —,
l'intégration socio-économique du Territoire instaure des rapports sociaux de production extrêmement durs et provoque la
dégradation d'une nature fragile. La revendication des travailleurs venus du Sud et l'opposition parfois virulente des autochtones
marquent les limites de l'emprise du capital sur cette périphérie exploitée.
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Dalla-Rosa G., Di Méo Guy. Les grands travaux d'aménagemen de la Baie James (Québec). Un exemple d'intégration régionale
en zone subarctique . In: Annales de Géographie. 1981, t. 90, n°498. pp. 151-202.
doi : 10.3406/geo.1981.20009
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1981_num_90_498_20009Les grands travaux
aménagemen
de la Baie James Québec
Un exemple en zone intégration subarctiQue régionale
Gilbert Dalla Rosa
et Guy Di Meo*
Le territoire de la Baie James étend entre le 49e et le 55e
parallèle au nord de ce Québec de base où installèrent en sui
vant axe de pénétration du Saint-Laurent les colons fran ais
est une région subarctique rude et inhospitalière où les hivers
éternisent et ne laissent que peu de temps été pour ranimer la
nature La partie sud dans la forêt boréale ne se trouve
500 km de Montréal mais la Grande Rivière choisie pour le plus
gigantesque aménagement hydro-électrique du monde coule tra
vers la taïga 300 km au nord de la grande métropole québé
coise isolement quasi total de la région vaincu hui par
la route et par les transports aériens ne fut jamais un obstacle
majeur la valorisation des ressources locales fourrures abord
dans les premiers temps de la colonisation minerais et bois
ensuite dans le courant du XXe siècle Bien sûr la portée des amé-
naux Université Groupe de Recherche Pau sur Organisation et le Développement inégal des Espaces régio 152 ANNALES DE OGRAPHIE
nagements actuels et intensité du développement économique
envisagé pour le Territoire renouvellent complètement les concepts
géographiques traditionnellement appliqués cet espace Il agit
un véritable défi pour mettre en valeur une contrée de
350 000 km2 et produire 68 milliards de kWh par an grâce une
première tranche de quatre centrales totalisant une puissance ins
tallée de 10216 MW Malgré son ampleur le programme des réali
sations hydro-électriques ne constitue pourtant que aspect le plus
spectaculaire un projet plus global aménagement extraction
des minerais abattage du bois et ses industries de transformation
amorce une superstructure manufacturière le tourisme. for
ment autant de rubriques que ne négligent pas les sociétés publi
ques et les entreprises privées qui hui investissent des capi
taux au nord du 49e parallèle Cette phase de développement qui
démarra en 1971 lorsque le premier ministre du Québec
Robert Bourassa annon ouverture prochaine des chantiers
du complexe de production hydro-électrique se déroule dans un
contexte historique particulièrement cohérent qui sera analysé en
premier lieu Il conviendra ensuite de présenter les structures origi
nales des organisations techniques et financières qui dans les diffé
rents secteurs de économie régionale se trouvent confrontées aux
problèmes spécifiques que pose la nature boréale Trois séries de
faits conduiront enfin une réflexion sur les modalités et sur les
conséquences géographiques du développement sans faille du
capitalisme-étatique dans une région extrême périphérie origi
nalité des rapports sociaux de production1 qui se tissent sur les
chantiers et dans les mines du Nord constitue la base la plus solide
pour une approche théorique de la question écroulement défini
tif des genres de vie autochtones ébranlement des écosystèmes
sous le choc des grands aménagements routiers et hydrauliques...
ne se classent plus dès lors au rang des conséquences logiques
de efficience un mode de production parvenu son apogée
Les principales étapes de la mise en valeur du Territoire
Trois facteurs principaux retardèrent longtemps la mise en
valeur active des ressources naturelles de la Baie James De ce
point de vue la localisation subarctique fut autant plus dissua
sive que les besoins de la formation économique nord-américaine
ne justifiaient pas avant 1970 la mobilisation massive des réserves
generale Ces Le Seuil termes 1977 sont employés dans le sens défini par Fossaert La Sucictc une théorie NAGEMENT DE LA BAIE JAMES AM ANNALES DE OGRAPHIE 154
énergie et de matières premières du Grand-Nord Par ailleurs le
rattachement en 1912 des rivages orientaux de la Baie la province
francophone du Québec dépourvue de capitaux ne favorisa guère
investigation précoce des richesses du Territoire Enfin la pré
sence une population autochtone clairsemée contrôlée depuis
plusieurs siècles par une grande compagnie mercantiliste soucieuse
de ses intérêts ralentit les formes intervention externe
Dans ces conditions les modes de vie traditionnels des groupes
Indiens et Inuit Esquimaux gardèrent tant bien que mal leur
originalité millénaire simultanément consolidée et dénaturée au
contact des postes de négoce de la Compagnie de la Baie James
partir des années 1930 mais surtout au cours des années 1950 une
exploitation forestière et minière prolongeant vers le nord la colo
nisation de Abitibi et du Témiscamingue se développa sur la
frange méridionale de la région au sud de la rivière de Rupert
Elle amor une nouvelle forme de contrôle social sur espace et
déclencha une première vague vrai dire limitée de peuplement
non autochtone Par contre les années 1960 donnèrent un tour
complètement neuf aux modes intervention externes sur le Terri
toire La crise latente de approvisionnement électrique des gran
des métropoles du Nord-Est de Amérique du Nord la pression de
puissants groupes industriels et financiers désireux de assurer une
énergie abondante et bon marché amenèrent les autorités québé
coises équiper une des dernières grandes réserves énergie
hydro-électrique du continent le bassin de la Grande Rivière et
ceux de deux cours eau adjacents Eastmain et la Caniapiscau
voir croquis 1)
ère des modes de production primitif et mercantiliste
exclusifs ou dominants
On ne peut encore cerner de fa on très précise époque loin
taine au cours de laquelle les Inuits2 et les Indiens Montagnais-
Naskapi leur dénomination anglaise Crée été francisée en
Cri intallèrent sur les terres orientales de la Baie James au
terme une longue migration asiatique Leurs premières rencontres
avec les Occidentaux remontent la fin du XVIe siècle quand les
expéditions britanniques entrèrent en compétition avec celles des
jésuites coureurs des bois marchands et autres aventuriers fran
ais3 Ces derniers après de multiples aléas finirent par imposer
aux raient Gabriel rivages les Druillettes Les Tandis côtes d