Nécrologie : M. Lucien Gallois - article ; n°3 ; vol.29, pg 505-512
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Revue de géographie alpine - Année 1941 - Volume 29 - Numéro 3 - Pages 505-512
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Publié le 01 janvier 1941
Nombre de lectures 107
Langue Français

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Raoul Blanchard
Nécrologie : M. Lucien Gallois
In: Revue de géographie alpine. 1941, Tome 29 N°3. pp. 505-512.
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Blanchard Raoul. Nécrologie : M. Lucien Gallois. In: Revue de géographie alpine. 1941, Tome 29 N°3. pp. 505-512.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1941_num_29_3_4324NÉCROLOGIE
M. LUCIEN GALLOIS
En apportant à la mémoire de notre vieux maître disparu
le fidèle souvenir de la Revue de Géographie alpine, nous lui
témoignons non seulement l'affection filiale qu'éprouvaient
pour lui tous les géographes français, mais aussi notre recon
naissance à l'égard d'un ami de la première heure de notre
maison, et qui a bien voulu honorer de sa collaboration cette
Revue elle-même.
M. Gallois, qui a succombé en mars dernier, victime d'un
banal accident, était né à Metz en février 1857. Ses études,
commencées au lycée de sa ville natale, continuées après 1870
au lycée Henri IV à Paris, indiquaient en lui une prédilection
pour les Lettres traduite par des succès au Concours Général;
mais ce Lorrain, qui avait connu l'Ecole d'application de Metz
et désirait mettre toutes ses forces au service de la patrie bles
sée, s'était orienté vers les Mathématiques spéciales et la pré
paration à Polytechnique. La vocation fut pourtant plus forte
que la volonté, et c'est à l'Ecole normale supérieure, Section
des Lettres, que Lucien Gallois était admis en 1881; il y trou
vait aussitôt le maître auquel il devait toujours demeurer
fidèle, et c'est sous la bannière de Vidal de la Blache qu'il s'en- 506 NÉCROLOGIE.
rôlait dans le petit bataillon des géographes. Agrégé de 1884,
il faisait au lycée de Nice un stage d'une année qui lui avait
laissé le plus lumineux des souvenirs; mais ce grand laborieux
s'arrachait bientôt aux charmes des rivages méditerranéens
pour venir à Paris préparer ses thèses de doctorat. Surveillant
à l'Ecole Normale, boursier de voyage en Allemagne, il menait
à bien cette besogne, refusant à cette occasion d'aller enseigner
la géographie à la Faculté des Lettres de Montpellier; il était
docteur en 1890.
L'époque était dure 'aux vrais géographes : notre discipline
n'était guère admise que comme une auxiliaire effacée de cette
grande dame, l'Histoire. Vidal de la Blache n'était devenu doc
teur qu'en écrivant une thèse sur Hérode Atticus; Lucien Gal
lois dans la sienne ne put aborder la géographie que par le
biais de l'histoire, en étudiant les Géographes allemands de la
Renaissance. Il avait d'ailleurs pris goût, avec sa conscience
ordinaire, à cette fréquentation obligatoire; il était devenu un
excellerît historien de la géographie, qui faisait autorité dans
les problèmes se rapportant au mouvement scientifique qui a
abouti à la découverte de l'Amérique. C'est à ce genre de pré
occupations que nous devcns l'excellent article sur Oronce
Fine, géographe briançonnais, qu'il a bien voulu donner en
1918 à la Revue de Géographie alpine.
Si la matière pouvait paraître étroite et un peu rebutante,
du moins les places ne manquaient pas pour les courageux qui
avaient mené leur tâche à bonne fin. Déjà sollicité pour Montp
ellier, M. Gallojs était nommé, sitôt docteur, professeur à la
Faculté des Lettres de Lyon, et de suite se mettait à l'explora
tion de la région qui lui était confiée; débarrassé des entraves
scholastiques, c'est en vrai géographe qu'il donnait des tr
avaux sur les Dombes, puis sur les massifs montagneux qui se
succèdent du Maçonnais au Lyonnais. Cependant Lyon ne le
conserva pas longtemps. En 1894, la Sorbonně l'appelait
comme maître de conférences; en 1898, il était délégué à So C Л ..
M. Lucien GALLOIS GALLOIS. oOl LUCIEN
l'Ecole Normale Supérieure pour l'enseignement de la géogra
phie. Les grandes tâches commençaient; elles n'ont plus lâché
M. Gallois jusqu'à sa retraite, on peut même dire jusqu'à sa
mort.
Et d'abord, il a été un grand professeur, l'homme pour qui
" cette besogne d'enseignement était sacrée. Accablé de corvées
-et de devoirs aussi variés qu'astreignants, il n'a jamais négligé
son métier, jamais manqué un cours, ne s'est fié aux
hasards d'une improvisation, a toujours soigneusement pré
paré ses leçons en suivant scrupuleusement les progrès de la
science. Nous en appelons à tous ceux qu'il a formés à l'Ecole
Normale au cours d'une dizaine d'années de labeur presque
forcené; tous ont gardé le souvenir ému de cet enseignement
sérieux, probe, de ces cours à la fois clairs et denses, dont pas
une phrase n'était perdue.
Mais M. Gallois savait bien qu'un professeur ne dure, ne se
renouvelle, qu'en faisant lui-même avancer la science. Même
au temps où son rôle de maître de conférences à l'Ecole Nor
male lui imposait une énorme tâche d'enseignement, il n'a
jamais cessé d'écrire, de publier. La bibliographie de ses tra
vaux est considérable. Nous retrouvons dans leur liste la
trace de cette prédilection que depuis sa thèse il avait conser
vée pour les études de géographie historique : les articles sur
Toscanelli et Christophe Colomb, Waldseemuller, Martin
Béhaim, les Portugais et l'astronomie nautique, y sont nom
breux et manifestement écrits avec une particulière tendresse.
La dernière production que je connaisse de lui, écrite lorsqu'il
touchait aux 80 ans, concerne les Portugais et la cartographie
marine au xv° et au xvie siècles. En même temps il suivait les
transformations des noms qui ont désigné un certain nombre
de régions naturelles françaises, et examinait si les caractères
et les limites de ces régions, qu'il avait déterminés avec soin
sur le terrain, correspondaient à cette terminologie. Ainsi ont
été précisés le Bassigny, la Woëvre et la Haye, et exorcisés les 508 NÉCROLOGIE.
prétendus monts Faucilles; notre maître, mis par là en posses
sion d'une méthode fondée à la fois sur l'observation géogra
phique soigneuse et sur des recherches historiques, put ainsi
publier en 1908 un gros livre, « Régions naturelles et Noms d£
pays, Etude sur la région parisienne »,.qui est à la fois une
fine analyse de l'Ile-de-France et une esquisse du concept de
région naturelle. Ce livre, que tous les géographes français ont
médité, est à coup sûr l'œuvre la plus originale de M. Gallois,
celle qui assure à son talent une place à part, entre l'histoire
de la géographie et la description régionale.
Professeur et savant, notre maître devait également assumer
les prérogatives d'un chef. Son tempérament ne l'y portait
pas : c'est par devoir qu'il lui fallut en 1917, à la mort sou
daine de Vidal de la Blache, accepter l'obligation d'être à la
tête de notre groupe de géographes français. En fait, il n'avait
jamais failli à la mission de conseiller ses élèves, de les encour
de'
veiller à leur avenir, de multiplier pour eux les ager,
démarches; j'ai été, comme beaucoup d'autres, son obligé.
Mais la disparition du « patron » incontesté qu'était Vidal lui
créait des obligations beaucoup plus lourdes. Il lui fallait fr
équenter le ministère, siéger dans des commissions, défendre
les intérêts de notre discipline et les nôtres : il le fit avec son
dévouement tranquille et sa haute conscience du devoir.^ Il
devait également prendre la direction suprême des Annales de
Géographie, dans les réunions régulières du comité de direc
tion dont il ne manquait pas une; on ne pouvait le rencontrer
sans qu'il vous parlât des Annales, énumérât le contenu des
futurs numéros, s'enquît d'articles à publier. Tâche plus
lourde encore : il lui fallut assumer la mise en train définitive
d'une œuvre presque colossale, la publication de la Géographie
Un

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