Une commune de deux habitants : Pomet (Hautes-Alpes) - article ; n°3 ; vol.29, pg 513-519
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Revue de géographie alpine - Année 1941 - Volume 29 - Numéro 3 - Pages 513-519
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Publié le 01 janvier 1941
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Langue Français

Extrait

Paul Veyret
Une commune de deux habitants : Pomet (Hautes-Alpes)
In: Revue de géographie alpine. 1941, Tome 29 N°3. pp. 513-519.
Citer ce document / Cite this document :
Veyret Paul. Une commune de deux habitants : Pomet (Hautes-Alpes). In: Revue de géographie alpine. 1941, Tome 29 N°3.
pp. 513-519.
doi : 10.3406/rga.1941.4327
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1941_num_29_3_4327ACTUALITÉ
UNE COMMUNE DE DEUX HABITANTS
POMET (HAUTES-ALPES) (1>
Le département des Hautes-Alpes est un de ceux qu'atteignent
les suppressions, ou plutôt les extinctions de communes 2, car la
mesure administrative de la suppression ne fait que donner le
coup de grâce à un long dépérissement. Son nécrologe des com
munes n'est vraisemblablement pas clos; il y a tout lieu de penser
qu'il s'augmentera d'une nouvelle victime, la commune de Pomet.
Une enquête récente nous en a révélé la situation paradoxale et
nous a donné le désir d'en rechercher les antécédents. Un tableau
préliminaire du décor dans lequel se déroule ce drame démogra
phique ne sera pas inutile pour en faire comprendre les péri
péties.
Le décor. — Bien que très proche du Buech, — le chef-lieu n'en
est éloigné que de trois kilomètres en ligne droite, — Pomet appart
ient sans conteste aux Baronnies. Le territoire entier de la com
mune s'y étale à l'intérieur du vaste synclinal qui, évasé vers l'Est,
rétréci vers l'Ouest, sépare de la Montagne de Chabre l'Anticlinal
Nord de Lure. Il appartient d'autant mieux aux Baronnies que la
structure lui impose de tourner le dos à la vallée du Buech. L'extré
mité orientale du synclinal, entraînée sans doute par la surrection
du dôme, aujourd'hui profondément excavé, de Laragne, se relève
en effet de l'Ouest vers l'Est, de telle sorte que Pomet, accroché au
1 C'est pour nous un plaisir de remercier nos aimables informateurs :
M. Reneuve, inspecteur des Eaux et Forêts, à Gap; M. Moullet, maire de
Pomet, à Châteauneuf de Chabre.
2 Agnielles, Châtillon le Désert, Chaudun, Clausonne, Molines-en-
Champsaur. 514 PAUL VEYRET.
flanc relevé de la cuvette synclinale ainsi dessinée, se trouve su
spendu à plus de 200 m. au-dessus du Buech. Les escarpements
d'une falaise jurassique l'en séparent de toute leur muraille qu'une
seule rainure incise : la vallée de la Méouge. Singulière rivière :
après s'être prélassée à l'amont sur le fond du synclinal dont elle est
la gouttière, elle est contrainte de traverser en force, dans son cours
inférieur épigénétique, le bord oriental relevé de la cuvette. Cette
épreuve lui impose une gorge profonde et un profil héroïque. Tout
incommode qu'elle soit, la coupure offre à Pomet une issue vers
le Buech, mais en lui gâtant ses communications intérieures. Le
moindre ruisseau qui de là-haut dévale vers la Méouge s'enfonce
lui-même en des abîmes pour rattraper son niveau de base. Le
terroir est ainsi découpé en blocs presque isolés les uns des autres,
communiquant péniblement les uns avec les autres.
La nature des roches ajoute ses entraves à celles de la structure.
Les calcaires marneux berriasiens, avares de terre végétale, cou
vrent au moins les trois quarts du territoire. D'immenses pierriers
attestent le labeur qu'ils ont donné aux générations de paysans.
De l'ancienne couverture de marnes valangitiiennes, plus meubles,
le relèvement de la cuvette n'a laissé subsister que deux lambeaux,
qui fixèrent l'emplacement de deux hameaux, Piloubeau et le Bmsq.
Quant au Tithonique à peine décomposé du chef-lieu, il n'offre
que bien peu de ressources. La sécheresse du calcaire aggrave donc
la sécheresse du climat, sauf dans les cantons matelassés de mar
nes ou d'argile de décalcification. La couverture végétale porte la
marque de cette nature peu généreuse. De la Montagne de Chabre,
dont la ligne rectiligne ferme l'horizon monotone du Nord, un
taillis peu nourri, troué de larges pelades, descend vers les landes
à lavandes et les calcaires mouchetés de bouquets d'arbres, de
touffes de buis. Si les champs n'ont pas encore disparu, ils se
voient peu et il n'y aura pas beaucoup à faire pour les effacer.
L'impression de stérilité sur laquelle on reste est donc fondé?,
mais cependant excessive. Si les calcaires l'emportent sur les sols,
ceux-ci ne sont tout de même pas absents. Limités en étendue, ils
ne pouvaient nourrir qu'une population limitée en nombre, mais
ils effectivement la nourrir. La dépopulation progressive
que nous allons retracer n'aurait donc pas dû se poursuivre jus
qu'à la désertion presque absolue : dans nos essais d'explication,
nous aurons à faire intervenir bien d'autres facteurs que la pauv
reté.
La dépopulation. — Jusque vers la fin du xvnie siècle, nous ne
possédons sur la population que des chiffres sporadiques, souvent
établis, au surplus, sur des calculs qui comportent une part d'in- :
UNE COMMUNE DE DEUX HABITANTS : POMET. 515
certitude; leurs indications, cependant, concordent assez bien :
220 habitants en 1698, 266 en 1707-12, 280 en 1740-41 -î. Les sta
tistiques révolutionnaires, sans doute imparfaites, atteignent aussi
des valeurs du môme ordre : 215 en 1790, 270 en 179(5. Malgré
cet accord, ce sont là des jalons trop éloignés les uns des autres
pour étayer une discussion qui ne peut guère commencer ({n'en
1801, avec la série continue des dénombrements français. Depuis
1. -— Graphique de lY'vohit ion du peu plemeni de Pomet depuis 1801.
'■'■ L'étude des phénomènes de population est facilitée, pour les Hautes-
Alpes, par deux travaux dont nous faisons un large usage : Guil
laume (P.), Mouvement de la du département des Hautes-
Alpes au xix" siècle (Hull. Soc. Eludes II.-A., XXVII, 1908, p. 2(),'i-!221 )
Blanchard (Raoul), Note sur la population du diocèse de Gap, du xvn'1 siè
cle à nos jours (Hull. Soc. Etudes II.-A., XXXVII, 19LS, p. 4Н-П0). 516 PAUL VEYRET.
cette date initiale, un graphique retrace aisément l'évolution démo
graphique de Pomet, en fait apparaître les trois phases. De 1801
à 18kl inclus, période de population soutenue, deux maxima se
placent en 1806 et 1836, atteignant chaque fois 270. Les creux de
1820 (224) et 1826 (233) jie font pas disparaître l'allure générale
qui est celle d'un long maximum étalé sur quarante ans. De 18Ы
à 1891, la décroissance s'affirme, mais assez lente et coupée de
gains éphémères (1851-1856, 1871, 1886). De 260 en 1841, le chiffre
total tombe à 161 en 1891, soit une perte de 37 %, sérieuse mais
non alarmante. Par contre, de 1896 à 1931, la chute devient dégrin
golade, la population passant de 161 (1891) à 40 et perdant ainsi
74 % de ses effectifs déjà fort réduits. Aucun gain, même léger
et provisoire, n'altère la courbe constamment descendante. A ces
deux rythmes différents ne correspondent sans doute pas les
mêmes causes de dépopulation.
La décroissance préliminaire, lente et discontinue, marque le
début de l'exode montagnard,, soit vers les grandes vallées où le
progrès agricole, qui ne remplaçait pas encore l'homme par la
machine, absorbait des bras, soit vers les villes en plein essor
industriel. Le départ de ces premiers emigrants soulageait la com
munauté de sa surpopulation et, permettant à ceux qui restaient
de constituer des propriétés capables d'occuper de fortes familles,
suscitait sans doute les poussées de natalité qui gonflent les gains
de 1851-56, 1871, 1886. L'émigration ainsi atténuée donnait de l'air
mais n'affaiblissait pas la tension de la population. On ne peut pas
en dire autant de l'émigration massive qui, depuis 1886-1891, vide
Pomet. Pourquoi cette aggravation d'un phénomène jusque-là bien
faisant? La réponse n'est pas facile.
La dégringolade s'affirme, dès son début, avec une force qui
laisse prévoir un trouble soudain et profond de l'équilibre écono
mique. Il ne suffit plus d'évoquer simplement l'attraction des vil-
les : elle ne s'enfla pas du jour au lendemain sans avoir trouvé dans
le pays même des alliés puissants, c'est-à-d

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