Chronique d'une endémie opportuniste. Développement rural et onchocercose au Nord Cameroun (Foyer du Faro) - article ; n°2 ; vol.18, pg 241-252

Frédéric Paris

Description

Espace, populations, sociétés - Année 2000 - Volume 18 - Numéro 2 - Pages 241-252
Chronicle of an opportunist endemic Disease. Rural Land Development and Onchocerciasis in North Cameroon (Faro Focus).
The intention of this study is to reconstruct the epidemiological history of a savanna onchocerciasis focus, basing on the evolution of the blindness rates. The endemic level of this disease was tolerated by population at the beginning of the colonial period, because the intensive space occupancy system of the piedmont by Dowayo, restricted the contact between man and the black fly vector. Because of lack of knowledge about the incurred danger, the policy of plains land development induced a severe transmission with disastrous sanitary, demographic and economic consequences.
Chronicle of an opportunist endemic Disease. Rural Land Development and Onchocerciasis in North Cameroon (Faro Focus).
The intention of this study is to reconstruct the epidemiological history of a savanna onchocerciasis focus, basing on the evolution of the blindness rates. The endemic level of this disease was tolerated by population at the beginning of the colonial period, because the intensive space occupancy system of the piedmont by Dowayo, restricted the contact between man and the black fly vector. Because of lack of knowledge about the incurred danger, the policy of plains land development induced a severe transmission with disastrous sanitary, demographic and economic consequences.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: ESPACE-_POPULATIONS-_SOCIETES
• Publié le: 01 janvier 2000
• Nombre de lectures: 21
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Frédéric Paris
Chronique d'une endémie opportuniste. Développement rural et
onchocercose au Nord Cameroun (Foyer du Faro)
In: Espace, populations, sociétés, 2000-2. Maladies émergeantes et reviviscentes. pp. 241-252.
Abstract
Chronicle of an opportunist endemic Disease. Rural Land Development and Onchocerciasis in North Cameroon (Faro Focus).
The intention of this study is to reconstruct the epidemiological history of a savanna onchocerciasis focus, basing on the evolution
of the blindness rates. The endemic level of this disease was tolerated by population at the beginning of the colonial period,
because the intensive space occupancy system of the piedmont by Dowayo, restricted the contact between man and the black fly
vector. Because of lack of knowledge about the incurred danger, the policy of plains land development induced a severe
transmission with disastrous sanitary, demographic and economic consequences.
Résumé
The intention of this study is to reconstruct the epidemiological history of a savanna onchocerciasis focus, basing on the evolution
of the blindness rates. The endemic level of this disease was tolerated by population at the beginning of the colonial period,
because the intensive space occupancy system of the piedmont by Dowayo, restricted the contact between man and the black fly
vector. Because of lack of knowledge about the incurred danger, the policy of plains land development induced a severe
transmission with disastrous sanitary, demographic and economic consequences.
Citer ce document / Cite this document :
Paris Frédéric. Chronique d'une endémie opportuniste. Développement rural et onchocercose au Nord Cameroun (Foyer du
Faro). In: Espace, populations, sociétés, 2000-2. Maladies émergeantes et reviviscentes. pp. 241-252.
doi : 10.3406/espos.2000.1944
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/espos_0755-7809_2000_num_18_2_1944i. \no\s. soi
Frédéric PARIS Institut de Recherche pour le Développement
213, rue Lafayette
75480 Paris Cedex 10
[e-mail]
Chronique
d'une endémie opportuniste
Développement rural et onchocercose
au Nord Cameroun (foyer du Faro)
AVANT PROPOS
cutanées - éruption érythémateuse, pachyder- L'onchocercose est provoquée par un
Nématode - Onchocerca volvulus - qui est mie, dépigmentation -, lymphatiques - aine
inoculée à l'homme lors d'une piqûre d'un pendante, elephantiasis du scrotum -, et sur
Diptère hématophage - Simulium damnosum tout oculaires - kératite sclérosante, chorio-
s.l- Les gîtes de pontes des simulies vec- rétinite, atrophies du nerf optique - qui about
trices correspondent aux seuils rocheux des issent à une cécité irréversible. Ces lésions
cours d'eau : les teneurs en oxygène et en peuvent se manifester après cinq années d'in
matière organique permettent le développe tense exposition aux piqûres infectantes,
ment des larves subaquatiques. Après éclo- lorsque le potentiel annuel de transmission
sion, les imagos vivront quelques semaines à est supérieur à 100 microfilaires/individu. En
raison d'un repas sanguin hebdomadaire pour 1985, l'OMS estimait à 86 millions la popul
les femelles; en zone de climat soudanien - de ation rurale exposée au risque pour 7,8 mil
800 à 1200 mm de précipitations annuelles - lions de personnes infectées, 336 400
leur nuisance correspond à la période d'écou aveugles et autant ayant une baisse d'acuité
lement des eaux, de juin à octobre. Cette fila- visuelle invalidante : 99% étaient localisés en
riose associe à un état cachectique des lésions Afrique subsaharienne (1).
PRESENTATION DE LA ZONE D'ETUDE
L'échelle micro régionale retenue ici corre opposées. Le Ilou, affluent de la rive droite
du Faro est situé par 8°35' de latitude est et spond à l'aire élémentaire d'expression et de
13° de longitude ouest. Il s'écoule avec un diffusion de la cécité des rivières : un cours
d'eau principal et ses affluents secondaires débit moyen de 15m3/s sur une longueur de
60 km selon une direction sud-est - nord- qui drainent respectivement une vallée
majeure et les interfluves des deux rives ouest. Le socle granitique favorise les Tauxd«cécHé Taille de* village* :
O 1 à 100 habitants O 0à1,9% quartier (te cultures actuel
*~ N piste carrossable O 101 à 200 de <xritur«6 abandonné (I 2*3,9
vWay abandonné Alla ethnonyme O 201 à 400 «t plu* 4%etpkis 243
affleurements rocheux; une pente moyenne Cantons de Djoumté, Doayo du Nord, Godé
de 2,5m/km assure un courant propice aux Garé, Konglé, Louggéré Téré et Poli ; rap
gîtes à simulies. Deux massifs-îles, le Nyoré portée à une superficie de 1700 km2, la dens
et le Godé, culminant à 1167m et 1665m, se ité moyenne était de 11 h/km2. Les aires
font face au nord et au sud du Ilou (carte 1). d'interfluves peu cultivées par les Doayo,
Le Recensement National de 1976 dénomb ethnie majoritaire, sont parcourues par les
rait 19150 habitants pour l'ensemble des éleveurs peuls.
LE CONTEXTE HISTORIQUE : UN PEUPLE PERSECUTE ET REPLIE SUR LUI-MEME
ceux-ci perpétuent les exactions comme le C'est au contact des Téré, autochtones du
cirque de Poli, que l'ethnie composite des signale Floc'h (4) : "Depuis la prise de
Doayo s'est constituée au cours du 18ème~ Garoua, en 1901, par le Capitaine Kramer
siècle, à partir de peuples fuyant les plaines von Clausbuch jusqu'en 1907, les All
de la Bénoué et du Faro envahies par les emands ne s'occupent guère du pays
Bâta. Peu à peu les Doayo essaimèrent sur Namchi \ En Juin 1907, Strumpell visite le
les pourtours des inselbergs des plaines du Tsorké, le Nyoré, emprunte la vallée du
Ilou et du Pounko. En 1804, Ousman dan Mayo Ilou et va jusqu'à Mango. Il est
Fodio, fondateur peul du califat de Sokoto, accompagné du Lamido Bakari de Tchéboa.
proclame la jihad et confie à l'Émir Adama Les villages sont brûlés, le chef de Garé est
la conquête de la Haute-Bénoué à partir de tué, des milliers de boeufs sont confisqués
la ville de Yola au Nigeria actuel. Les Bâta (...). A l'arrivée des Français, quelques vi
sont vassalisés mais les Doayo résisteront llages sont soumis aux chefs peuls auxquels
farouchement aux attaques répétées des ils versent tribut quand ils le veulent. Mais
chefferies peules de Touroua et de Tchéboa, la plupart demeurent réfractaires. Des opé
tributaires de Yola (2). Strumpell (3) en fait rations militaires vont amener leur soumis
F évocation suivante : "Attaquer les païens sion et l'établissement du Poste militaire de
sur la montagne même, escalader les fortes Poli en 1923 (...). Poste uniquement poli
pentes sous une grêle de flèches empoisonn tique et administratif placé au milieu des
ées, se mesurer au corps à corps entre les populations primitives, pour lesquelles il
murs étroits des villages retranchés, dont doit être le symbole de notre pacifique entê
chaque habitation représentait elle-même tement pour arriver à l'apprivoisement
une citadelle, tout cela les Peuls l'abandon cherché".
nèrent aussi bientôt (...) l'utilisation la plus
Le contenu circonspect de ces rapports dessoigneuse du terrain ne pouvait suffire à
tinés à la Société des Nations - à l'origine du couvrir les besoins en céréales des païens.
mandat du Protectorat français sur une partCeux-ci devaient descendre cultiver égale
ie du Cameroun en 1919 - couvre en fait de ment dans les bois du piémont. (...) ils
nombreuses opérations de représailles de étaient contraints au bout d'un certain
l'armée en réponse aux actes d'insoumisstemps de solliciter la paix, c'est-à-dire de
ion des Doayo 2. L'attitude des Français ne livrer le nombre exigé d'esclaves", p. 82 .
fait pas exception à la règle : faute de numér
En 1901, les Anglais font le siège de Yola aire pour payer les impôts, ceux-ci sont exi
tandis que les Allemands occupent Garoua. gés en nature, justifiant ainsi les prélève
Cependant la politique d'administration ments de bétail et des récoltes, d'autant plus
indirecte menée par ces derniers s'appuie mal vécus que la peste bovine de 1923 avait
décimé les troupeaux et les invasions acri- sur la collaboration des chefs peuls soumis :
1 Namchi est l'ethnonyme employé par les Peuls pour désigner les Doayo : il fut largement utilisé par l'administ
ration colonial