Des Nomades méconnus Pour une typologie des communautés péripatétiques - article ; n°95 ; vol.25, pg 97-120
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Description

L'Homme - Année 1985 - Volume 25 - Numéro 95 - Pages 97-120
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 29
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Aparna Rao
Des Nomades méconnus Pour une typologie des communautés
péripatétiques
In: L'Homme, 1985, tome 25 n°95. pp. 97-120.
Citer ce document / Cite this document :
Rao Aparna. Des Nomades méconnus Pour une typologie des communautés péripatétiques. In: L'Homme, 1985, tome 25 n°95.
pp. 97-120.
doi : 10.3406/hom.1985.368592
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1985_num_25_95_368592Aparna Rao
Des Nomades méconnus
Pour une typologie des communautés péripatétiques
Aparna Rao, Des Nomades méconnus. Pour une typologie des communautés
péripatétiques. — L'anthropologie des populations nomades s'est concentrée
sur l'étude des pasteurs et des chasseurs-cueilleurs, ignorant largement les
centaines de communautés endogames non productrices de nourriture,
que l'on rencontre dans le monde entier et qui vivent de la vente de leurs
biens et services. Indépendamment de leur identité ethnique et linguistique
et de leur organisation sociale, ces communautés ont été souvent rangées au
hasard dans la catégorie des « Tsiganes », des « vagabonds », des « tribus
criminelles » ou des « parasites », ce qui est source de confusion, aussi bien
terminologique que théorique. Cet article s'efforce d'y remédier en propo
sant une vue d'ensemble de ces communautés dont la stratégie économique
essentielle consiste à migrer d'un groupe de clients à un autre.
Il nous faut d'abord mettre de l'ordre dans les
mots eux-mêmes et bien définir [...] Décider
du mot, c'est un peu décider de la méthode
d'analyse [...] Décider du mot, c'est en outre
établir la frontière...
Guy-H. Allard (1975 • *7)
Les récits de voyage et la plupart des monographies sur les sociétés
tant pastorales que paysannes mentionnent l'existence fréquente — de nos
jours et dans un passé plus ou moins récent — de groupes itinérants endo
games. Briggs (i960 : 70) note qu'ils se rencontrent partout dans le monde
islamique ; Musil (1928 : 125) les a observés chez les Bédouins Rwala ;
Spooner (1972 : 124) signale leur présence au Baloutchistan et Vainshtein
(1980 : 220-221) en Asie centrale. Mais peu ont fait l'objet d'études systé
matiques, à l'exception de certains groupes tsiganes, des Travellers
d'Irlande (Gmelch 1977), des Gaduliya Lohar (Ruhela 1968 ; Misra 1975),
L'Homme 95, juil.-sept. 1985, XXV (3), pp. 97-120. 98 APARNA RAO
des Nandiwalla d'Inde (Hayden & Malhotra 1977), des Qalandar du Pakis
tan (Berland 1982), des Ghorbat d'Afghanistan (Olesen 1977 ; Rao 1979,
1981, 1982a) et des forgerons Enaden au service des Touareg. Selon
Arnold (1980 : 11) et Piasere (1980 : 3), l'activité de ces communautés, qui
ne pratiquent ni l'élevage ni l'agriculture, serait une sorte de cueillette.
En réalité, à la différence des chasseurs-cueilleurs, ces gens n'ont pas le
contrôle des ressources alimentaires qui leur sont nécessaires et qu'ils
obtiennent de tiers auxquels ils proposent en échange biens et services.
I. PROBLEMES DE TERMINOLOGIE
Au cours des derniers siècles, les autorités administratives, les voya
geurs et les ethnologues ont désigné ces groupes sous le nom de « Tsi
ganes » ou de « vagabonds » ; en Inde britannique, on a même parlé de
« tribus criminelles ».
Les Tsiganes et les gens du voyage
En Europe, ces communautés se sont rarement identifiées aux Tsiganes
et n'ont jamais été acceptées comme tels par ceux-ci. Même de nos jours,
l'interaction sociale entre elles et les divers groupes tsiganes est limitée et
problématique (Rehfisch 1961 : 121 ; Kenrick 1977 : 23 ; Vaux de Foletier
1981 : 21 ; Lerch 1981, etc.). Au Moyen-Orient, en Asie du Sud, en Asie
centrale et en Afrique du Nord, elles sont, bien souvent aussi, classées
comme « Tsiganes » ou du « genre tsigane » en raison de leur nomadisme,
de leurs langues (différentes pourtant du romanes), de leurs professions
traditionnelles et, peut-être avant tout, de leur marginalité. La présence
dans ces langues d'un grand nombre de termes dont on connaît mal la
signification (Rao 1982b, 1983, 1985), et dont la littérature ne fournit que
quelques références éparses, complique encore le problème. La compilation
de glossaires a permis de repérer quelques mots qui, à première vue, sem
blaient proches du romanes. Les professions qu'exercent ces communautés
sont sans doute analogues à celles qui étaient et sont encore en partie
attribuées aux Tsiganes d'Europe, et certains auteurs prêtent aux unes
comme aux autres des comportements communs — rapt d'enfants, vol de
chevaux, port de vêtements bariolés — sans trop se soucier de leur réalité
et de leur généralité. Mais cet amalgame ne repose sur aucune base
scientifique. Des Nomades méconnus 99
Errance et vagabondage
Tous ces groupes mobiles non producteurs de denrées alimentaires ont
été taxés fort souvent de vagabondage, et la législation de nombreux pays
leur a été hostile, en Europe et ailleurs. En Anatolie par exemple, à partir
de la fin du xve siècle, le terme aptal (ou abdal) désignait aussi bien les
individus errants que les Tsiganes (G. Lewis 1950-1955 : 222), et à la fin
du xixe siècle en Inde du Nord, « la plus basse couche de la société » était
composée de « tribus errantes, criminelles et tsiganes » (Ibbetson 1974 :
3O)-
La définition juridique du vagabondage a connu des variantes, mais
toutes retiennent trois caractéristiques. La première est ce que Mauro
(1972 : 134-135) appelle la « mobilité professionnelle non rythmée » ; il
s'agit d'un mode de déplacement irrégulier, indépendant des facteurs éco
nomiques, culturels ou saisonniers. En fait, toutes les données empiriques
disponibles sur l'économie et les schémas de nomadisation révèlent une
mobilité régulière — souvent saisonnière — et en tout cas étroitement liée
à des paramètres fixes. La seconde est l'absence de lieu où s'établir, de
domicile au sens large du terme. A nouveau, un examen même superficiel
montre que ces populations possèdent « un endroit pour dormir » : tentes,
wagons, charrettes, caravanes, cabanes ou encore maisons, dans le cas où
seule une partie de la famille se déplace. Enfin, les vagabonds n'ont pas
d'occupations précises, pas de ressources bien définies. Or, les nomades
dont nous parlons exercent au moins une profession, parfois plusieurs
(éventuellement liées aux catégories de sexe), plus ou moins spécialisées.
En outre, dans quelque région que ce soit, les vagabonds ignorent évidem
ment l'endogamie caractéristique des communautés dont il est question
ici.
Les « tribus criminelles »
Si, dans l'Inde britannique et même pré-britannique, les administrat
ions centrales et régionales qualifiaient ainsi les groupes itinérants, c'est
qu'elles considéraient comme criminel tout refus de reconnaître la loi
et l'ordre qu'elles avaient établis (Kosambi 1977 : 15). Tout défi lancé
contre le système politique dominant était un « crime », alors que les
« délits » s'expliquaient souvent par le dénuement et la famine. De nos
jours encore, bien que le Criminal Tribes Act ait été depuis longtemps
révoqué, survivent en Inde des stigmates de ce passé. APARNÀ RAO
II. LES COMMUNAUTÉS PÉRIPATÉTIQUES
Quelques auteurs (Weissleder 1978 : xvn ; Rao 1982b) ont tenté
d'établir une nouvelle terminologie. Posant la question du bien-fondé d'un
classement de ces communautés parmi les nomades pasteurs, Leshnik
(1975 : xv) a suggéré de réserver le terme « nomade » aux pasteurs nomades
et de désigner les mobiles ne se consacrant pas à la produc
tion alimentaire par le terme wanderers ; de même, en français, il est
courant de parler des « gens de voyage », mais les deux qualificatifs
manquent de précision. Luiz (1961 : 299) avait distingué itinérants
commerçants, artisans et non-artisans, abondant ainsi dans le sens de
Baines (1912 : 105). Misra (1978) a avancé non-ecological nomads, par
opposition aux nomades pasteurs qui sont plus directement dépendants
de facteurs écologiques. L'expression service nomads lancée par Hayden

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