Évolution de la mobilité et accès à la position de technicien - article ; n°1 ; vol.22, pg 185-206
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Évolution de la mobilité et accès à la position de technicien - article ; n°1 ; vol.22, pg 185-206

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Description

Sociétés contemporaines - Année 1995 - Volume 22 - Numéro 1 - Pages 185-206
Given technicians’ position in the social structure, studying the modes of entry into this category is liable to throw some light on the changes affecting the patterns of social flux as a whole. The statistics show that the increase in the supply of training which occurred in the mid-60’ s had little effect on the numbers of workers and employees who were promoted to the category of technician. The fluctuations which this category has undergone mainly reflect changes in the intrinsic dynamism of its development. The profiles of the skilled workers promoted to technician have remained unchanged over the years. If one looks at the conditions under which this mobility has occurred, however, it can also be seen that less cross-exchange has actually been taking place between the two categories than what seemed at first sight to be the case.
De par la position de la catégorie des techniciens dans la structure sociale, l’étude de ses modalités de renouvellement est à même d’apporter des éclaircissements sur l’évolution de la fluidité sociale. Les observations montrent que le développement d’une offre de formation à partir du milieu des années 1960 a peu affecté les mouvements ascensionnels d’actifs (ouvriers, employés) vers la catégorie des techniciens. Ceux-ci ont essentiellement fluctué selon le dynamisme de développement de la catégorie des techniciens. L’étude de la morphologie des ouvriers qualifiés promus fait apparaître que la «filière traditionnelle» de mobilité qui lie les ouvriers qualifiés aux techniciens s’est conservée au cours du temps. Mais les conditions dans lesquelles s’opèrent ces promotions indiquent aussi que la perméabilité entre ces deux catégories est finalement moins importante qu’elle ne le paraît au premier abord.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 18
Langue Français

Extrait



























PATRICK VENEAU
ÉVOLUTION DE LA MOBILITÉ
ET ACCÈS À LA POSITION DE TECHNICIEN
RÉSUMÉ : De par la position de la catégorie des techniciens dans la structure sociale, l’étude
de ses modalités de renouvellement est à même d’apporter des éclaircissements sur
l’évolution de la fluidité sociale. Les observations montrent que le développement d’une offre
de formation à partir du milieu des années 1960 a peu affecté les mouvements ascensionnels
d’actifs (ouvriers, employés) vers la catégorie des techniciens. Ceux-ci ont essentiellement
fluctué selon le dynamisme de développement de la catégorie des techniciens. L’étude de la
morphologie des ouvriers qualifiés promus fait apparaître que la « filière traditionnelle » de
mobilité qui lie les ouvriers qualifiés aux techniciens s’est conservée au cours du temps. Mais
les conditions dans lesquelles s’opèrent ces promotions indiquent aussi que la perméabilité
entre ces deux catégories est finalement moins importante qu’elle ne le paraît au premier
abord.

INTRODUCTION
Comment la mobilité sociale a-t-elle évolué dans le temps ? Le plus souvent,
c’est à partir d’un examen de la mobilité sociale inter-générationnelle que cette
question est abordée. Nombre de travaux s’accordent alors à reconnaître que les
modifications de la structure sociale de la population active rendent compte pour une
grande part des évolutions observées (Cherkaoui, 1992 ; Lemel, 1991 ; Thélot,
1982). Mais pour notre part, nous nous proposons, dans ce texte, de reprendre cette
question de l’évolution de la mobilité et de la stratification en nous centrant sur la
mobilité intra-générationnelle. Pour cela nous ne procéderons pas à partir d’un
examen de tables de mobilité, comme c’est généralement le cas dans les travaux qui
prennent pour objet la mobilité inter-générationnelle. Nous privilégierons une caté-
gorie sociale particulière, celle des techniciens, dont nous examinerons les modalités
de développement et de renouvellement : mobilité ascendante de membres d’autres
catégories, recrutements de jeunes quittant l’école. Ce faisant nous situerons nos
observations dans une perspective dynamique sur moyenne période, environ 30 ans.
L’intérêt de cette démarche et le choix de cette catégorie sont multiples. Ils
tiennent d’abord à la position particulière de cette catégorie dans la structure sociale.
Elle est classée depuis 1982 avec les « professions intermédiaires » dans la
nomenclature des « professions et catégories socioprofessionnelles » de l’INSEE
(« PCS » dans la suite) et parmi les « cadres moyens » dans les codes précédents.
Sociétés Contemporaines (1995) n° 22/23 (p. 185-206)

185 PATRICK VENEAU
Pourtant l’appartenance de certaines fractions de ses membres aux couches moyen-
nes n’a rien d’évident (du point de vue, entre autres, du travail effectué ou de
l’origine sociale). Et cette catégorie semble plutôt se situer à l’articulation de cliva-
ges sociaux importants. Effet et cause de cette position particulière, elle est au centre
de mouvements de mobilité conséquents. Par exemple, l’accès à des fonctions ou à
un statut de technicien constitue une des possibilités les plus fréquentes pour les
ouvriers qualifiés qui amorcent une mobilité professionnelle ascendante. Cet
ensemble de traits a ainsi amené certains auteurs à voir dans cette catégorie « un
groupe de passage » (Mallet, 1963).
Sa croissance numérique quasi continue depuis la fin des années 1950 et par
conséquent le fait qu’elle ait pu jouer le rôle de catégorie d’accueil, pour des mem-
bres d’autres groupes, pour des jeunes, constitue un second élément de cet intérêt.
La dernière raison tient au développement d’une offre de formation technique.
Or, il n’est pas nécessaire d’insister longuement sur le rôle, diversement apprécié, de
l’école comme instance de sélection, d’attribution de positions, et donc sur sa place
dans les processus de stratification et de mobilité. Par rapport à cet aspect, nous
avons cherché à voir si la présence de plus en plus importante de jeunes diplômés de
l’enseignement technique à partir du milieu des années 1960 s’accompagnait d’une
atténuation de la mobilité ascensionnelle d’actifs (par exemple des ouvriers), comme
l’avançait D. Bertaux (Bertaux, 1972, 1974) ; cette atténuation étant pour lui
synonyme d’un renforcement des clivages sociaux.
Pour réaliser ce travail nous nous sommes principalement appuyés sur une
1exploitation secondaire des enquêtes « Formation Qualification Professionnelle »
(dites FQP) de 1965/70, 1972/77, 1980/85 et 1988/93. Les possibilités et les limites
de ces enquêtes sont connues (« approche transversale », durée d’observation portant
2sur une période courte, cinq ans ). Cependant, la perspective diachronique qui
oriente notre questionnement atténue, nous semble-t-il, ces limites.
Dans un premier temps nous examinerons l’évolution des flux d’entrée dans
cette catégorie et les modalités de son développement. Puis nous considérerons la
morphologie sociale des individus qui accèdent à cette catégorie et les conditions de
ces accès. Nous serons alors en mesure de préciser comment a évolué la fluidité
entre la catégorie des techniciens et celle des ouvriers qualifiés.
1. MOBILITÉS ASCENSIONNELLES ET RECRUTEMENTS :
COEXISTENCE OU SUBSTITUTION ?
1. 1. UNE MOBILITÉ FORTEMENT LIÉE À LA DYNAMIQUE DE
DÉVELOPPEMENT
DE LA CATÉGORIE DES TECHNICIENS
En 30 ans l’effectif de la catégorie des techniciens a plus que doublé. Il est passé
de 350 600 (recensement de 1962) à 727 900 (recensement de 1990). Cette expan-

1. La majeure partie de cette exploitation a été réalisée dans le cadre d'un travail de thèse (Veneau,
1992). Pour des développements on se reportera à ce travail.
2. Pour une présentation de ces enquêtes nous renvoyons à R. Phol et J. Soleihavoup (1982).
Précisons simplement que ces enquêtes qui interrogent les individus à deux dates distantes de 5 ans
(t et t+5) permettent d'appréhender des changements de situation.
186 MOBILITE, POSITION DETECHNICIEN
sion a connu deux phases assez distinctes. Tout au long des années 1960 le taux de
développement de la catégorie des techniciens est un des plus élevés dans
l’ensemble des catégories sociales : environ 7 %. La vive croissance de cette caté-
gorie précède donc l’arrivée sur le marché du travail de générations plus nombreuses
de diplômés. Au début, elle est portée par la conjoncture économique favorable de
ces années-là. Cette demande de travail accrue est accentuée pour les techniciens par
un approfondissement de la division du travail, par le développement des activités
d’études qui se traduit par une forte croissance des emplois de dessinateur et, enfin,
par l’émergence de nouvelles qualifications en relation avec les évolutions
techniques : électroniciens, programmeurs, etc.
Le retournement de conjoncture du début des années 1970 affecte brutalement
cette expansion. Dès lors le rythme de progression de la catégorie des techniciens se
ralentit sensiblement et avoisine les 1 % ou 2 %. Voilà, brièvement résumée, la
dynamique de développement qui a marqué les mouvements ascensionnels de mo-
bilité qui alimentent cette catégorie.
Divers mouvements de mobilité d’actifs contribuent à son renouvellement et à sa
croissance. Cependant, les plus importants, de loin, concernent la promotion
d’employés et d’ouvriers et notamment d’ouvriers qualifiés (cf. tableau 1)

TABLEAU 1 : ÉVOLUTION DES PRINCIPALES ENTRÉES D’ACTIFS DANS LA CATÉGORIE DES TECHNICIENS
1959/64 1965/70 1972/77 1980/85 1988/93
Employés 18 800 42 400 27 950 31 650 25 650
Ouvriers spécialisés 9 000 22 450 21 650 7 700 7 600
Ouvriers qualifiés 30 100 55 150 49 200 53 400 61 400
57 900 120 000 98 800 92 750 94 700 Total
11,4 % 17,3 % 12,2 % 12 % 9,7 %
Source : exploitation secondaire des enquêtes FQP de l’INSEE, champ : population active. Le champ est
le même pour tous les tableaux.
Les pourcentages sont calculés par rapport aux techni

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