Jacqueries en pays croquant. Les révoltes paysannes en Aquitaine (décembre 1789-mars 1790) - article ; n°4 ; vol.34, pg 760-786
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Jacqueries en pays croquant. Les révoltes paysannes en Aquitaine (décembre 1789-mars 1790) - article ; n°4 ; vol.34, pg 760-786

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Annales. Histoire, Sciences Sociales - Année 1979 - Volume 34 - Numéro 4 - Pages 760-786
Jacqueries in 'croquant' country. The peasant revolts in Aquitaine, december 1789-march 1790
A series of peasant revolts broke out in Aquitaine -the region of peasant uprisings par excellence- in the winter of 1789-1790. But these revolts were vastly different from those of earlier centuries. Collective violence within the rural community was directed against the lord and against rentiers, whatever the source of their rents. To avoid minimizing the complexity of the scenario of the revolt, it needs to be studied in such a way as to shed light on the interaction, within the dynamic of violence, between not only social and economic but also political and cultural factors : the crisis in the State apparatus, rural sociability, the relationship between written and oral culture in the Occitan-speaking regions, etc. The specific character of the northern Occitan countryside, where the rent strategies of landowners, ignorant of the agricultural capitalism of the more developed areas of France, clashed with the precariousness of a society of smallholders and tenant farmers, demands that we take a fresh look at the heterogeneity of the peasant movement in the French Revolution seen in the context of uneven development within the nation as a whole.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 54
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Jean Boutier
Jacqueries en pays croquant. Les révoltes paysannes en
Aquitaine (décembre 1789-mars 1790)
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 34e année, N. 4, 1979. pp. 760-786.
Abstract
Jacqueries in 'croquant' country. The peasant revolts in Aquitaine, december 1789-march 1790
A series of peasant revolts broke out in Aquitaine -the region of peasant uprisings par excellence- in the winter of 1789-1790. But
these revolts were vastly different from those of earlier centuries. Collective violence within the rural community was directed
against the lord and against rentiers, whatever the source of their rents. To avoid minimizing the complexity of the scenario of the
revolt, it needs to be studied in such a way as to shed light on the interaction, within the dynamic of violence, between not only
social and economic but also political and cultural factors : the crisis in the State apparatus, rural sociability, the relationship
between written and oral culture in the Occitan-speaking regions, etc. The specific character of the northern Occitan countryside,
where the rent strategies of landowners, ignorant of the agricultural capitalism of the more developed areas of France, clashed
with the precariousness of a society of smallholders and tenant farmers, demands that we take a fresh look at the heterogeneity
of the peasant movement in the French Revolution seen in the context of uneven development within the nation as a whole.
Citer ce document / Cite this document :
Boutier Jean. Jacqueries en pays croquant. Les révoltes paysannes en Aquitaine (décembre 1789-mars 1790). In: Annales.
Économies, Sociétés, Civilisations. 34e année, N. 4, 1979. pp. 760-786.
doi : 10.3406/ahess.1979.294086
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1979_num_34_4_294086LA SOCI FRAN AISE
Jacqueries en pays croquant
LES VOLTES PA YSANNES EN AQUITAINE
CEMBRE 1789-MARS 1790
Depuis une vingtaine années exhumation des révoltes paysannes époque
moderne est essentiellement concentrée sur les xvie et xvne siècles laissant volontaire
ment de côté enquête du Centre histoire de la civilisation de Europe moderne ne
dépasse pas 1787 la fin du xvnie siècle La grande vague des années 1789-1793 est
pourtant pas une terra incognita historiographique mais apport considérable tant
par les méthodes que par les résultats des recherches sur les soulèvements populaires des
siècles précédents plongé dans oubli un modèle différent de celui des révoltes
communautaires et anti-étatiques qui lui tend ériger en théorie de la société Ancien
Régime Il est donc important de rouvrir le dossier des révoltes de la décennie 1790 grâce
des archives en partie inédites mais surtout avec des méthodes renouvelées pour
retrouver les diverses orientations du mouvement paysan Toute synthèse étant
prématurée est approfondissement monographique qui nous livre la moisson la plus
abondante Ici nous ne nous attacherons pas fondamentalement saisir la transition entre
les révoltes anti-étatiques et celles que nous appellerons pour instant antiseigneuriales
nous essaierons de cerner la spécificité et les mécanismes des révoltes paysannes de la fin
du xvine siècle dans un cadre déterminé en Aquitaine prise dans sa plus large extension)
éclate la fin de décembre 1789 une succession de révoltes paysannes locales qui en près
de deux mois gagnent plus de trois cent trente paroisses en prennent une bonne
centaine de châteaux sur un territoire qui recouvre en totalité ou en partie neuf
départements actuels Nous suivrons alors cet immense embrasement dans toutes ses
ramifications en le considérant comme un phénomène social total qui engage
ensemble des conduites individuelles et collectives au sein une société donnée
La révolte le geste et la parole
Dès le début des troubles angoisses et fantasmes des dominants déforment la réalité
des comportements paysans Les interventions qui se succèdent la tribune de Assemblée
attachent souligner intensité des horreurs Ma province est en feu déclare de
Foucault député du Périgord les gens sans propriété dépouillent les propriétaires est
un appel au secours que lance un député du Quercy Le mal empire il arrive son
comble on en veut toutes les propriétés Je vous en supplie je vous en conjure au nom
de ma province de prendre ce mal en considération histoire des brigandages que
760 LES VOLTES AQUITAINES BOUTIER
rédige abbé de Mondésir la demande de la bourgeoisie montalbanaise le tableau des
Incendies et ravages dans le Bas-Limousin donnent corps ce que abbé Maury nomme
un effrayant début de guerre civile opposé les humbles témoignages que laisse
passer la machine judiciaire montrent une forte cohérence des démarches paysannes la
réitération lors de chaque émeute paroissiale de séquences fondamentales identiques
structure un modèle aquitain de la contestation rurale au crépuscule de la monarchie
destruction des symboles des anciennes dominations renversement des fondements
économiques de la seigneurie pouvoir paysan exer ant une forte pression sur les notables
qui voient leur maigre évergétisme transformé en une redistribution forcée des richesses
mobilières
Une attaque frontale contre la seigneurie
La destruction des symboles par lesquels les pouvoirs que on veut faire disparaître se
manifestent quotidiennement aux foules inaugure les violences collectives incendie
joyeux des bancs et des chaises qui des titres divers banc du seigneur haut-justicier
un fondateur ou un restaurateur de édifice ou simplement concédé par la fabrique
moyennant finances annuelles encombraient église paroissiale théâtre par excellence
des hiérarchies campagnardes met fin la cascade des mépris au sein de la vie collective
II ni doit avoir aucun privilège quelconque surtout dans un lieu saint et sacré où
est placée la sainte divinité3 Les paysans attaquent au premier habitant de la
paroisse travers toutes ses prérogatives Puy Arnac et Saint-Chamant en Bas-
Limousin on brise le tombeau de la famille seigneuriale dans église La Capelle-
Cabanac en Quercy les paysans détruisent les chaperons des consuls qui décorés de la
livrée du seigneur rendent trop présente la soumission de la communauté4 Mais
surtout on en prend aux girouettes qui surmontent les toits privilège dans le Sud-Ouest
des possesseurs de fief Si le seigneur ne cède pas aux demandes on les arrache
violemment avec poutres tuiles ou ardoises immédiateté métonymique de ces objets
implique leur suppression au printemps 1815 la réinstallation de bancs dans certaines
églises corréziennes provoque aussitôt leur destruction car les paysans ont interprétée
comme un retour du temps des seigneurs
est une tornade egalitaire qui dévaste Aquitaine autour de Saint-Alvère en
Périgord la fin de janvier 1790 les paysans ne veulent rien qui ait air de la moindre
distinction et ... on fait brûler tous les bancs des églises sous prétexte que ceux qui les
ont ne sont pas de meilleure condition que ceux qui les brûlent et il faut que tout le
monde soit genoux sur le pavé de église6 Ils imposent la reconnaissance une dignité
ils viennent acquérir puisque comme le proclame un habitant Allassac il ne
fallait plus ni bourgeois ni gentilhomme ils adoptent alors des conduites nouvelles
refusent ôter leur chapeau oublient la particule en nommant le seigneur réclament une
accolade fraternelle Saint-Bonnet-la-Rivière en Bas-Limousin humiliation unit la
provocation jubilante Un des meneurs paysans affectait approcher le plus près il
pouvoit du régisseur du château) lui envoyoit en parlant de la salive dans la figure ...)
tenant toute sorte de propos sur tous les seigneurs et gentilhommes disant ils étoient
pas plus que lui il ne leur devoit plus rien il ne faudroit plus tenir le chapeau bas ni
être nuds pieds8 Là où la revendication est la plus radicale la volonté annihilation des
distances sociales la conquête de égalité formelle deviennent exigence du renversement
des rôles Foutus Jean Foutre vous avez été longtemps les maîtres nous voulons être
notre tour rétorquent deux artisans aux Chartreux seigneurs de Chanteix Bas-
Limousin Un des paysans qui ont envahi le monastère de Glandier Orgnac se prélasse dans le lit du prieur alors un autre dans les cuisines répète
deux reprises qu autrefois il respectait la religion huy il en moquait
761 LA SOCI FRAN AISE
image de ruraux passifs mus par des forces extérieures que véhiculent les lieux
communs de idéologie des élites citadines doit céder la pla

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