Jean-Louis Barrault monte «La Vie parisienne » - article ; n°102 ; vol.28, pg 51-61
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Description

Romantisme - Année 1998 - Volume 28 - Numéro 102 - Pages 51-61
Jean-Louis Barrault reste le mal-aimé de la critique théâtrale savante. Il a la réputation de bâcler ses mises en scène, de rester dans le registre du divertissement et de flatter les goûts du public bourgeois. La Vie parisienne est un bon exemple de ces pièces à succès qu'il a toujours maintenues à côté du grand répertoire.Un examen attentif des Archives J.-L. Barrault à la Bibliothèque de l'Arsenal permet de rendre compte de la somme de travail exigé par cette pièce difficile à monter à laquelle le metteur en scène a voulu donner le rythme d'une comédie musicale à l'américaine, tout en prêtant aux protagonistes une épaisseur humaine et poétique.
Jean-Louis Barrault remains undervalued among academic drama critics. He still has the reputation of somebody who does not spend enough time on his productions, whose work remains confined to the register of light entertainment and tends to flatter the middle class taste of his public. TheVie parisienne is a good example of one of those succesfull play that he has always produced alongside major titles from he repertory. A close analysis of J.-L. Barrault's archives at the Arsenal Library reveals the amount of work required by this challenging production in wich J.-L. Barrault tried to adopt the rythm of an american musical whilst enpowering the protagonists with a human and poetic dimension.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Jean-Claude Liéber
Jean-Louis Barrault monte «La Vie parisienne »
In: Romantisme, 1998, n°102. pp. 51-61.
Résumé
Jean-Louis Barrault reste le mal-aimé de la critique théâtrale savante. Il a la réputation de bâcler ses mises en scène, de rester
dans le registre du divertissement et de flatter les goûts du public bourgeois. La Vie parisienne est un bon exemple de ces pièces
à succès qu'il a toujours maintenues à côté du grand répertoire.Un examen attentif des Archives J.-L. Barrault à la Bibliothèque
de l'Arsenal permet de rendre compte de la somme de travail exigé par cette pièce difficile à monter à laquelle le metteur en
scène a voulu donner le rythme d'une comédie musicale à l'américaine, tout en prêtant aux protagonistes une épaisseur humaine
et poétique.
Abstract
Jean-Louis Barrault remains undervalued among academic drama critics. He still has the reputation of somebody who does not
spend enough time on his productions, whose work remains confined to the register of light entertainment and tends to flatter the
middle class taste of his public. TheVie parisienne is a good example of one of those succesfull play that he has always produced
alongside major titles from he repertory. A close analysis of J.-L. Barrault's archives at the Arsenal Library reveals the amount of
work required by this challenging production in wich J.-L. Barrault tried to adopt the rythm of an american musical whilst
enpowering the protagonists with a human and poetic dimension.
Citer ce document / Cite this document :
Liéber Jean-Claude. Jean-Louis Barrault monte «La Vie parisienne ». In: Romantisme, 1998, n°102. pp. 51-61.
doi : 10.3406/roman.1998.3343
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1998_num_28_102_3343Jean-Claude LIÉBER
Jean-Louis Barrault monte «La Vie parisienne»
Le chef-d'œuvre de Carné, Les Enfants du Paradis, a un effet de trompe-l'œil. On
imagine volontiers Barrault, interprète du personnage de Baptiste de Deburau au Boul
evard du crime, fasciné par ce dix-neuvième siècle remuant, agité de soubresauts
révolutionnaires, admirateur naïf du meurtrier philosophe (Lacenaire) et de son double
théâtral (Frederick Lemaitre, incarné par Brasseur). Or le dix-neuvième siècle français,
dans l'abondante production scénique de Jean-Louis Barrault, n'occupe qu'une por
tion congrue : un Musset (On ne badine pas avec l'amour), un Hugo tardif (Angelo),
une pièce de circonstance, Le Nouveau Monde, de Villiers de L' Isle- Adam, montée
pour célébrer la révolution américaine (1777), trois Feydeau où triomphe Madeleine
Renaud (Occupe-toi d'Amélie, N'te promène donc pas toute nue, On purge Bébé) et
Le Bossu, un mélodrame de Paul Féval et Anicet Bourgeois, qui remplissent la caisse
du théâtre et «équilibrent le bateau» (l'autre bouée de sauvetage de la Compagnie,
c'est Madame Sans-Gêne de Sardou, monté par Pierre Dux en 1957).
Notre dramaturge s'est essentiellement consacré aux auteurs français contempor
ains : Claudel avant tout (cinq pièces, dont les quatre versions du Soulier de satin),
mais aussi Sartre, on l'oublie souvent (Les Mains sales), Camus (L'État de siège),
Gide, Giraudoux après la mort de Jouvet (Pour Lucrèce, Intermezzo, Judith), Mont
herlant, Supervielle, Anouilh, André Obey, bientôt suivis de Vauthier, Schéhadé,
Ionesco, Duras, Sarraute, sans oublier Beckett (Oh les beaux jours) et Genet (Les
Paravents), dont il confie la mise en scène à Roger Blin. Il s'est préoccupé de la
constitution d'un répertoire classique, susceptible de reprises et de tournées internatio
nales : les Grecs (L'Orestie, Les Oiseaux d'Aristophane), Shakespeare, en particulier
Antoine et Cléopâtre et Hamlet, dans la traduction de Gide, le siècle d'or espagnol
(Cervantes, Lope de Vega), le théâtre français du dix-septième et du dix-huitième
siècle : Molière (cinq pièces), Racine (trois pièces) mais pas de Corneille, après sa
décevante expérience du Cid à la Comédie-Française en 1942, Marivaux (trois
pièces), Beaumarchais (Le Mariage de Figaro) et le Théâtre de foire d'après Lesage.
Il a enfin, dès ses débuts, investi toute son énergie dans les adaptations où pouvait se
déployer son ambition d'un théâtre total — plastique, gestuel, poétique et musical.
Autour d'une mère (d'après Faulkner), La Faim (d'après Knut Amsun), le Hamlet de
Laforgue, les deux Kafka : Le Procès, dans l'adaptation de Gide, avec les décors de
Labisse au Marigny, en 1947, et Le Château, dans de Pol Quentin dix ans
plus tard; deux pièces provocatrices à l'Élysée-Montmartre après son éviction de
l'Odéon en 1968 : Rabelais et Jarry sur la Butte; puis sa lecture de Zarathoustra, Les
Nuits de Paris d'après Restif de la Bretonne, Zadig ou La Destinée. Malgré son
amour de la danse et de la musique, manifeste dans le choix des musiques de scène
(commandées à Honneger, Auric, Sauguet, Ibert, Milhaud, Kosma, voire à Michel
Legrand, Polnareff et Guy Béart), il ne s'est guère mêlé d'opéra ou de ballet, s' effa
çant toujours derrière des chorégraphes professionnels, même pour ses propres adaptat
ions. Il a pourtant eu la gloire de participer à la création française, à l'Opéra en 1963,
du chef-d'œuvre de Berg, Wozzeck, d'après Biichner, avec Pierre Boulez au pupitre et
ROMANTISME n° 102 (1998-4) 52 Jean-Claude Liéber
les décors d'André Masson. Il a également monté Faust et Carmen au Metropolitan
Opera de New- York.
La Vie parisienne, opéra-bouffe d'Offenbach, fait donc office d'exception. C'est la
première comédie musicale de Barrault. Elle célèbre les fastes du Second Empire et sa
course au plaisir. Elle ouvre la treizième saison de la Compagnie, au Théâtre du
Palais-Royal, par un hommage à Offenbach, l'amuseur public numéro un, qui avait
créé la pièce dans cette salle en 1861. Le choix est presque polémique. En associant
dans le même programme La Vie parisienne et Le Soulier de satin, Barrault s'amuse à
provoquer ses détracteurs, les partisans d'un théâtre engagé, brechtien, qui réclament
une ligne politique : «Nous sommes définitivement des hurluberlus, ni distanciés ni
didactiques, ni affiliés ni apparentés : des artistes, quoi ! » l. Si Barrault a une ligne, un
style, on doit le repérer non au niveau du contenu idéologique, mais au niveau formel
de l'esthétique : celui du théâtre total qui fait appel à toutes les ressources du comé
dien : la pantomime, le chant, la danse et le jeu dramatique. Mais il exige des acteurs
complets, sachant «chanter, parler, se mouvoir, jouer, mimer, danser». Et de citer
comme modèles « Rex Harisson dans My Fair Lady, certains acteurs américains, tous
les acteurs d'Extrême-Orient, certains acteurs russes et de rares acteurs européens».
Dans ce débat entre théâtre de laboratoire et théâtre commercial, le sociologue Jean
Duvignaud monte au créneau pour pourfendre « le fantôme du théâtre bourgeois » :
Ce théâtre de divertissement a non seulement été un art d'expression populaire, comme
le prouve le succès écrasant et permanent des œuvres de Meilhac et Halévy, mais encore,
ce jeu a exercé une influence profonde. [Il a] libéré le public des pesantes mythologies
classiques [et] habitué le spectateur à laïciser, pour ainsi dire, les grandes figures du
Panthéon classique. Plus efficacement que les théories romantiques, qui n'ont pas atteint
le grand public, ses pièces nous ont délivrés des thèmes éternels [...] Or cette volupté
d'appartenir à une époque délivrée, aucun dramaturge ne l'avait éprouvée avant 1860 :
historiquement, le théâtre bourgeois est sorti de ses préoccupations, confuses chez la
plupart, de produire un art pour des contemporains et non pour des juges éternels. 2
D'ailleurs, ce sont les succès populaires qui permettent à Barrault de financer le
théâtre expérimental (Le Procès, Numance, Rhinocéros), c'est le magasin qui nourrit
le laboratoire, comme dit Duvignaud.
L'intrigue est assez compliquée. Francisque Sarcey comparait La Vie parisienne à
Monsieur de Pourceaugnac, la farce de Molière, en moins no

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