Juges, lieutenants de police et bourgeois à Paris aux XVIIe et XVIIIe siècles - article ; n°5 ; vol.45, pg 1189-1215

Paolo Piasenza

Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1990 - Volume 45 - Numéro 5 - Pages 1189-1215
Judges, Police Lieutenants, and the Bourgeoisie in Paris during the Seventeenth and Eighteenth Centuries.
During the first half of the seventeenth century, the Parisian administration was under the direction of the police assemblies formed by the Parliament, the Chatelet and the bourgeoisie. This system, based on traditional relations of faithfulness and clientel, was overturned by the creation of the role of police lieutenant in 1667. Starting in 1700-1701, the police lieutenant made ever greater use of the King's orders, while increasing the number and powers of the exempt persons and social worlds that worked for him. The response of the administration, represented by the magistrature, was not long in coming and took its place alongside popular resistance and revolt that developed against the New Police.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: ANNALES_ECONOMIES_SOCIETES_CIVILISATIONS
• Publié le: 01 janvier 1990
• Nombre de lectures: 20
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Paolo Piasenza
Juges, lieutenants de police et bourgeois à Paris aux XVIIe et
XVIIIe siècles
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 45e année, N. 5, 1990. pp. 1189-1215.
Abstract
Judges, Police Lieutenants, and the Bourgeoisie in Paris during the Seventeenth and Eighteenth Centuries.
During the first half of the seventeenth century, the Parisian administration was under the direction of the "police assemblies"
formed by the Parliament, the Chatelet and the "bourgeoisie". This system, based on traditional relations of faithfulness and
clientel, was overturned by the creation of the role of police lieutenant in 1667. Starting in 1700-1701, the police lieutenant made
ever greater use of the "King's orders", while increasing the number and powers of the "exempt" persons and social "worlds" that
worked for him. The response of the administration, represented by the magistrature, was not long in coming and took its place
alongside popular resistance and revolt that developed against the "New Police".
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Piasenza Paolo. Juges, lieutenants de police et bourgeois à Paris aux XVIIe et XVIIIe siècles. In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 45e année, N. 5, 1990. pp. 1189-1215.
doi : 10.3406/ahess.1990.278898
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1990_num_45_5_278898LIEUTENANTS DE POLICE ET BOURGEOIS JUGES
PARIS AUX XVIIe ET XVIIIe SI CLES
PAOLO P1ASENZA
La police parisienne Ancien Régime est un sujet que historiographie
traité de fa on ambiguë on retrouve ses traces dans presque toute recherche
histoire sociale mais son organisation ses hommes et ses conflits restent sou
vent mal connus Dans la plupart des cas le lecteur se trouve face des ouvrages
sur le xvnie siècle dans lesquels tous les principaux responsables de ordre
public jouent un rôle essentiel on pourra rappeler importance des rapports
des mouches dans les recherches de Steven Kaplan sur le Complot de
famine la place des inspecteurs dans La vie fragile Ariette Farge ou dans la
Police des urs étudiée par Erica-Marie Benabou pour ne citer que quelques
travaux parmi les plus récents1 On aussi impression cette époque on se
trouve toujours après 1720 la police est très clairement définie dans ses compé
tences et dans son organisation mais il est vrai que la lieutenance générale
peut apparaître un centre de pouvoir et de gestion désormais bien établi
quelques conflits tout fait exceptionnels et surtout la révolte de 1750 contre la
police et les ravisseurs enfants remettent en question son rôle et son
unité En cette occasion on assiste pas seulement un conflit ouvert entre le
Parlement et la lieutenance mais opposition de deux conceptions différentes
de ordre public dont la première est assez bien représentée par le style judi
ciaire des commissaires et autre par les enquêtes et les réclusions secrètes
opérées par les inspecteurs et leur monde2 Plus important les Parisiens pren
nent nettement parti dans ce conflit et ailleurs la révolte elle-même dirigée
surtout contre les mouches semble ménager les commissaires Le silence
gardé une date récente sur les problèmes posés par cet événement pour
tant bien connu pas de quoi surprendre un vrai mythe fait de la police de
Paris un des meilleurs exemples de croissance sans contrastes une grande
institution urbaine et même un problème aussi traditionnel que celui de ses
origines est régulièrement escamoté3 Certes dès 1705 le premier volume
du Traité de la police de Delamare ouvrage officiel plus un titre présente
aux lecteurs de toute Europe le visage serein et pacifié une administration
1189
Annales ESC septembre-octobre 1990 no pp 1189-1215 INSTITUTIONS ET CULTURES URBAINES
qui paraît avoir surgi du néant en 16674 Avant la création de la lieutenance il
aurait eu qu un désordre presque universel une affirmation qui passe
volontairement sous silence action des magistrats qui ont dirigé la police jus
après la Fronde et qui ont fondé une tradition autant plus profondément
enracinée dans histoire de la ville que même le discours du Traité sans le vou
loir peut-être lui est largement redevable5 Les pages qui suivent voudraient
rappeler les traits essentiels de cette police liée la magistrature les innovations
apparues surtout après 1700 les conflits qui en ont dérivé et attitude des Pari
siens face aux transformations de ordre public6
Bien il ne soit pas possible de revenir ici en détail sur le thème du
désordre Paris avant la Fronde il faut rappeler que dans la première
moitié du xvne siècle les affrontements entre les clientèles des Grands des juges
et de la Cour représentent autant occasions de violence et que la présence des
protestants pose des problèmes peut-être encore plus sérieux et fréquents7 Les
différentes factions en lutte ne peuvent pas considérer ces événements comme
des questions de simple police et ils les interprètent avec raison comme des
épisodes de la concurrence armée pour le contrôle du pouvoir Ainsi faire la
police de la Ville avant la Fronde signifie surtout se situer par rapport au
conflit quotidien qui pour enjeu équilibre religieux et politique établi par
édit de Nantes le règlement de force entre milices privées et pouvoir central
ou la concurrence acharnée entre différents groupes officiers pour le contrôle
de administration Le jugement de Delamare influencé par quelques décen
nies de centralisation paraît donc être fondé sur des bases tout fait réelles
mais assez paradoxalement on peut retrouver au sein même de affrontement
des factions ébauche un projet ordre et de pacification sociale très ambi
tieux En effet bien que longtemps méconnue une nouvelle administration de
police se met en place partir de la première moitié du xvne siècle et elle mar
quera très profondément histoire des rapports entre magistrats et citoyens
la fin de Ancien Régime Après 1630 surtout le Parlement reprend
son compte dans administration de Paris la tradition consultative et les prin
cipes de collégialité qui ont été confirmés par la convocation toute récente des
tats Généraux et des Assemblées des Notables en 1617 et en 16268 Il ne faut
pas oublier la place décisive attribuée aux magistrats en ces occasions en 1614-
1615 ils représentent 70 des membres du Tiers et dans les assemblées leur
influence est encore plus marquée celle de 1626 est composée par 27 hauts
magistrats qui représentent la majorité des 53 convoqués9 Dès 1617 le procu
reur général avait compris quel prestige le Parlement pouvait tirer de ces réu
nions destinées pourvoir aux plaintes contenues aux cahiers présentés aux
derniers tats et régler et faire réparer plusieurs désordres qui se sont
glissés en ce royaume 10 Pour les magistrats il est donc essentiel que cette tra
dition ne soit pas remise en cause elle représente le seul moyen institu
tionnel accordé au Parlement avoir accès au pouvoir politique autant plus
que est justement partir de cette position de conseillers naturels du Roi
ils ont théorisé une conception exigeante de la légitimité qui voudrait
imposer au souverain lui-même et tous ses officiers le respect des lois divines
et naturelles de cette équité et paternité qui doivent caractériser une cou
ronne fortement idéalisée Avec la fin de ce type de consultations le Parlement
ne pourra reproduire le modèle organisation et les références idéologiques qui
1190 PIASENZA LA POLICE PARISIENNE XVII XVIII6 SI CLES
étaient la base des convocations des Notables que dans les affaires de Paris
Les assemblées de police réunies par les magistrats représentent donc un modèle
tout fait légitime et traditionnel de gouvernement elles vont rassembler plus
ou moins régulièrement partir de 1626 les juges inférieurs du Châtelet avec
plusieurs commissaires notables et simples bourgeois En 1630 une assemblée
de ce type prévoit que tous les mardis et vendredis le lieutenant civil du Châtelet
présidera les consultations du lieutenant de Robe Courte de 16 commis
saires anciens de échevins et de 32 notables bourgeois choisis par les
commissaires même les ordonnances les plus importantes tel le règlement
pour la sûreté de Paris en 1635 sont le produit du travail commun de ces diffé
rents personnages12 Les données nous manquent pour déterminer le statut pro
fessionnel de cette bourgeoisie bien sûr on sait que les commer ants aisés