L Art dans la société portugaise au XIXe siècle - article ; n°3 ; vol.19, pg 433-448
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1964 - Volume 19 - Numéro 3 - Pages 433-448
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1964
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

José-Augusto França
L'Art dans la société portugaise au XIXe siècle
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 19e année, N. 3, 1964. pp. 433-448.
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França José-Augusto. L'Art dans la société portugaise au XIXe siècle. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 19e
année, N. 3, 1964. pp. 433-448.
doi : 10.3406/ahess.1964.421165
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1964_num_19_3_421165L'Art dans la société portugaise
au XIXe siècle
Avec la chute du Marquis de Pombal, à la mort du roi Joseph Ier
en 1777, le « despotisme éclairé » touchait à sa fin au Portugal. Expér
ience menée d'une façon empirique, au sein d'une société aux struc
tures économiques et morales depuis longtemps affaiblies, elle ne lais
sait derrière elle qu'une capitale nouvelle, à demi achevée, décor main
tenant vide de sens \ La nouvelle Cour se tenait à l'écart de cette « ville
des lumières » née au lendemain du tremblement de terre de 1755, où elle
n'avait toujours pas d'installation, et se terrait dans un palais en bois
construit hâtivement à Ajuda, avant d'aller résider, en 1794, au château
de Queluz, un « Sans-souci » à l'ancienne mode, bâti en même temps que
la Lisbonne de la bourgeoisie ponïbaline.
Cour minable, dont les voyageurs étrangers nous ont laissé des des
criptions fort sévères, elle présidait aux nouveaux destins d'une nation
qui retombait dans l'apathie. Après la chute de Pombal, les chantiers
de Lisbonne se trouvaient paralysés par un ministère apeuré, la vieille
noblesse revenait d'exil ou sortait des cachots du dictateur, les Jésuites
rentraient en vainqueurs ; ainsi s'inaugurait une longue période réac
tionnaire, où la bêtise prenait le pas sur la méchanceté. Le Portugal
officiel s'isolait de plus en plus, face aux monarchies « éclairées » de
l'Europe. Il se tenait à l'écart de la monarchie voisine d'Espagne, ne
voulait rien savoir des exemples allemands, et tenait toujours en horreur
les idées françaises, véhiculées par des livres que l'on frappait d'interdit
(et dont le résultat révolutionnaire acculera finalement la pauvre reine
à la folie, en 1792). Un ministre de la police tout puissant, Pina Manique,
assurait pourtant l'ordre dans les rues et dans les esprits, en éclairant
celles-là (grande nouveauté à Lisbonne !) et en obscurcissant ceux-ci...
Si, comme l'écrit M. Charles Morazé, vers 1780 « le grand souci des
1. José-Augusto França, Une Ville des Lumières : la Lisbonne de Pombal, Biblio
thèque Générale de ГЕ.Р.Н.Е., sous presse.
433
Annales (19e année, mai-juin 1964, n° 3) 2 ANNALES
Londoniens, des Viennois, des Romains, des Parisiens était d'être heu
reux » \ on ne saurait certainement en dire autant des habitants de Lis
bonne... Et si « le climat des années 80 était à l'esprit », le Portugal de
Marie Ire ne se distingue ni par l'esprit voltairien, ni par l'esprit de « décou
vreur de science et dépositaire sacré du progrès », mais bien par 1' « Esprit,
Personne de la Trinité » (que M. Morazé écarte de son portrait de l'Eu
rope contemporaine)... L'esprit tout court n'arrive pas à percer sous les
couches épaisses des goûts et des terreurs d'une société à la fois « fradesca »
(bigote) et policière.
La basilique da Estrela, à Lisbonne, le seul chantier qui ait été inau
guré après la chute de Pombal (1779), oeuvre chère à la pieuse nouvelle
reine, témoigne à la fois du dynamisme pombalin et du goût baroque de
la première moitié du siècle. Elle fut achevée en 1790. Deux ans plus tard,
la bourgeoisie enrichie sous l'égide de Pombal offrait à la capitale une
autre sorte de temple : le théâtre lyrique de S. Carlos, bâti en six mois,
dans le style néo-classique qui s'accordait au goût « moderne » de la classe
montante. Dix ans plus tard, la Cour fait construire, dans le même style,
un énorme palais royal, à Ajuda, palais dont le plan se rapproche de celui
du palais napolitain de Caserta, tracé en 1750 par Vanvitelli. Le palais
d'Ajuda demeurera inachevé, réduit finalement, en 1844, à un quart de
l'ampleur de son projet initial. Comme à Mafra, à partir de 1796, une école
de peinture naîtra à Ajuda, réunissant une centaine d'artistes d'une
médiocrité écœurante, faiseurs d'allégories aussi compliquées que des
charades. « Avec un peu d'habileté naturelle et peu de connaissances,
j'ai fait fortune », avouera l'un deux.
A partir de 1780, s'ébauchent les débuts d'un enseignement artis
tique : création d'une Académie du Nu (qui, d'ailleurs, a eu du mal à
trouver un modèle), d'une École de peinture fondée par Pillement à
Porto (1782), d'une École de graveurs créée par Bartolozzi (après 1802)
et d'une nouvelle Académie portugaise à Rome, qui durera de 1785 à
1802. Mais l'Académie Royale que rêvaient quelques-uns en 1793 (« C'est
une honte de ne pas en avoir une », disaient-ils) est restée à l'état de proj
et, ce qui vérifie l'état lamentable de la vie artistique portugaise vers la
fin du xvine 6iècle. (Aussi le cosmopolite Pillement quitte-t-il le Portugal
en 1786, attiré par de meilleurs clients). Il suffit de regarder la bibli
ographie artistique de l'époque, ces traductions tardives de Dufresnoy,
de Vignola, de Pozzo, pour mesurer le vide culturel qui régnait. Tel vieux
sculpteur pombalin continuait d'enseigner que « dans l'étude des Beaux-
Arts, il n'y a que deux systèmes, le grec et le barbare »... 2. L'influence
de deux étrangers, arrivés dans les premières années du xixe siècle, le
fameux graveur Bartolozzi et Pellegrini, bon portraitiste vénitien qui
avait connu David à Paris, ne pouvait guère s'exercer sur un si mauvais
1. Ch. Morazé, Les Bourgeois Conquérants, Paris, A. Colin, 1959.
2. Machado de Castro, Dictionario Filosofico da Arte da Escultura (publié en. 1937).
434 ART PORTUGAIS
terrain. La génération des peintres pombalins tardait à disparaître ; une
nouvelle apparaissait, également médiocre. Un seul des artistes
envoyés officiellement à Rome (ils étaient choisis par le ministre de la
Police, en même temps protecteur de l'Académie...) a tiré quelque profit
de son séjour : le sculpteur Aguiar.
Aguiar appartient à la dernière génération du siècle, postérieure à
1765 et dont l'œuvre couvrira le premier quart du xixe siècle. Disciple
de Canova à Rome, c'est, bien entendu, un académique, tout comme Vieira
Portuense (qui a été aussi à Parme, à Dresde, à Munich, à Rome, à Vienne,
à Londres). Mais un troisième artiste, Sequeira (que l'on a comparé à
Goya) annonce un certain renouveau. Formé à Rome, incompris à Lis
bonne (où ses prix étaient jugés trop élevés, vers 1796), il saluera l'inva
sion française de 1807, la révolution libérale de 1820, et s'exilera en 1823
à Paris, où il exposera au fameux Salon de l'année suivante. Il finira
pourtant ses jours à Rome, en 1837, peignant des tableaux religieux où
prédominent les valeurs académiques. En avance sur ses compatriotes,
Sequeira a eu une sorte d'intuition du romantisme qui ne s'installera
que tardivement dans la peinture portugaise, vers 1844, après s'être
affirmé littérairement en 1825. Le porte-drapeau du nouveau mouve
ment au Portugal, Garrett, poète et homme d'action, retarde sur Sequeira,
lorsqu'il publie, en 1821, un poème didactique assez naïf sur l'histoire
de la peinture universelle, O Retrato de Venus (Le Portrait de Vénus),
dont le goût néo-classique teinté de nationalisme, n'innove guère sur celui
qui s'étale dans un manuel fort traditionnel traduit en 1815 : Regras da
Arte da Pintura, de Prunetti, publié à Rome en 1786. Sequeira reste donc
incompris, et les éloges qu'il recueille ne portent que sur son côté acadé
mique. Les artistes qui l'entouraient (

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