L écriture pendant les états d excitation artificielle - article ; n°1 ; vol.9, pg 57-78
23 pages
Français

L'écriture pendant les états d'excitation artificielle - article ; n°1 ; vol.9, pg 57-78

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
23 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

L'année psychologique - Année 1902 - Volume 9 - Numéro 1 - Pages 57-78
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1902
Nombre de lectures 6
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Alfred Binet
L'écriture pendant les états d'excitation artificielle
In: L'année psychologique. 1902 vol. 9. pp. 57-78.
Citer ce document / Cite this document :
Binet Alfred. L'écriture pendant les états d'excitation artificielle. In: L'année psychologique. 1902 vol. 9. pp. 57-78.
doi : 10.3406/psy.1902.3427
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1902_num_9_1_3427Ill
L'ÉCRITURE PENDANT LES ETATS D'EXCITATION ARTI
FICIELLE PRODUITS PAR UN TRAVAIL DE NATURE
GRAPHIQUE.
Il y a douze ans, faisant à la Salpétriere des expériences sur
les hystériques, j'avais remarqué que ces malades, quand on
les fait écrire pendant un état d'excitation, ont une écriture
plus grande et des traits plus épais que leur écriture d'état nor
mal '. Les excitants dont je m'étais servi pour amener cette
modification de leur écriture sont assez variés : soit sensoriels,
soit émotionnels ; bruits réels ou imaginaires, odeurs fortes,
vue d'un disque rouge, hallucination du rouge, suggestion de
colère, et d'autres sentiments analogues.
J'avais complètement perdu de vue cette observation, il y a
trois ans, lorsque je fis des recherches dans quelques écoles
primaires de Paris pour faire une mesure de l'attention chez
les écoliers. Il se trouva que, sans m'en douter, je confirmai
mes expériences précédentes. Les expériences sur l'attention
ayant été exposées longuement dans l'Année, je les rappellerai
seulement en peu de mots. Dans un des tests que j'employais,
les enfants devaient rayer dans un texte imprimé certaines
lettres convenues d'avance ; c'est un travail dont il est facile de
mesurer la vitesse et l'exactitude. Pendant deux séances, les
élèves s'habituaient à rayer toujours la même série de lettres;
puis, à une troisième séance, ils devaient, rompant avec l'h
abitude déjà établie, rayer des lettres différentes. Il faut se sou
mettre à ce genre de travail pour en comprendre toute la diff
iculté. Chez- 8 élèves sur 11, je constatai que la nature du trait
servant à barrer les lettres varie à la troisième expérience ; il
1. Eludes de psychologie expérimentale. Paris, Doin, 1894, p. 3ûl. BINET. — EXPÉRIENCES SUR L'ÉCRITURE 59 A.
j'ai encore constaté que si Ton fait changer les lettres à barrer,
cette rupture d'habitude amène un allongement des traits.
11 n'est pas difficile de se rendre compte que ces expériences
présentent beaucoup d'analogies avec celles que j'ai faites
autrefois sur des femmes hystériques. Ces dernières me
paraissent aujourd'hui un peu vagues, parce qu'à l'époque où
je les ai faites je n'ai pas noté avec soin tous les petits détails
qu'il me paraît indispensable maintenant de relever, et par
exemple la grandeur des traits ; je retiens seulement le fait que
j'obtenais facilement un agrandissement de l'écriture. Réunis
sant donc ces diverses observations, pour en tirer l'idée direc
trice de recherches nouvelles, plus complètes et mieux appro
fondies, je formulerai la proposition suivante : dans un état
d'excitation, le mouvement graphique augmente d'ampli
tude.
On me demandera sans doute de définir l'état d'excitation. Je
le définis bien entendu d'une manière toute relative, par com
paraison avec l'état moyen ; et la définition que j'en propose
est toute psychologique. L'état moyen d'activité intellectuelle
est celui où nous nous trouvons quand nous nous reposons,
quand nous laissons aller, nous ne faisons pas un
travail mental particulier, que nous ne sommes pas vivement
émus, ou que nous ne sommes pas surpris par des sensations
particulières, exceptionnelles ou intenses.
L'état moyen ou état neutre ne diffère véritablement qu'en de
grés de l'état d'excitation ; et l'état d'excitation n'est point un
état unique ; il y a sans doute bien des degrés d'intensité diff
érents dans l'excitation, de même que la nature de l'excitant et
la nature de l'excitation qui en résulte doit être extrêmement
variée. Je dirai encore que, pour le moment, je ne connais aucun
moyen d'apprécier par des signes objectifs les états d'excita
tion, et encore moins de les mesurer, si tant est que la chose
est possible. Je fais toutes ces réserves pour bien démontrer
tout d'abord que nous sommes profondément ignorants sur le
détail de ces oscillations du psychique; mais je crois que l'exi
stence même de ces oscillations est hors de doute ; je crois
aussi que, sauf un certain nombre de cas où l'erreur est pos
sible, on peut très bien se rendre compte si une personne est
plus ou moins dans un état d'excitation. Lorsque je passe de la
lecture de mon journal à l'étude d'un problème, j'arrive à
un état d'excitation plus grand ; il en est de même si, dans la
rue, après une marche monotone et machinale, je rencontre un MÉMOIRES ORIGINAUX 60
ami, ou si j'assiste à un accident de voiture ; de même encore
si, après avoir travaillé dans le silence de mon cabinet, j'en
tends tout à coup le sifflet d'une sirène, dont la prolongation
m'énerve et me décide à quitter ma table de travail.
11 me paraît probable que l'état d'excitation que je viens de
signaler dans ces quelques exemples n'est pas seulement carac
térisé par une augmentation d'activité psychique; beaucoup
d'observations permettent de croire que cet état est accompa
gné par des modifications d'autres fonctions du corps, une
accélération desbattements du cœur, une modification du rythme
et de l'amplitude des mouvements pour la respiration, peut-
être aussi une forme particulière du pouls capillaire. Mais s'il
est vrai que ces divers signes physiologiques accompagnent
l'état d'excitation, et peuvent, par leur retentissement dans la
conscience, donner à la perception de l'excitation un caractère
particulier, il faut admettre en revanche qu'aucun de ces signes,
probablement, n'est constant ni nécessaire pour constituer
1 état d'excitation.
Avant de terminer ces considérations toutes théoriques,
j'ajouterai encore que j'oppose l'état d'excitation à l'état moyen,
et non à l'état de dépression, pour ne pas compliquer la ques
tion par une hypothèse inutile. Je sais, tout le monde sait, qu'il
existe un état de où nous nous trouvons au-dessous
du niveau normal ; mais l'étude de cet état est singulièrement
difficile pour la psychologie normale, car nous ne pouvons
guère, hors quelques cas exceptionnels, pousser les expériences
sur nos sujets au point de les faire tomber dans cet état; et de
plus, les auteurs américains, toujours si courageux, qui ont
cherché à étudier l'épuisement sur la sensibilité et les autres
fonctions, en se prenant eux-mêmes comme sujets, ne sont pas
arrivés à des résultats entièrement satisfaisants. Pour long
temps encore l'étude de l'état de dépression restera hors du
domaine de la psychologie expérimentale.
J'ai donc cherché à connaître ce que devient l'écriture d'une
personne lorsqu'on la place dans un état d'excitation. Voici les
recherches que j'ai faites. Je vais les décrire dans l'ordre même
où elles se sont suivies.
Supposons que nous écrivions d'abord une phrase quelconque,
par exemple « les laboratoires de psychologie ne reçoivent pas
assez d'argent » et qu'ensuite nous écrivions la même phrase
avec la consigne de remplacer partout la voyelle par celle qui,
dans l'alphabet, lui succède immédiatement ; l'a par e, Ye pare, BINET. EXPÉRIENCES SUR L'ÉCRITURE 61 A.
Yi par o, Vo par w, I'm par a. Il est incontestable que le tracé
de cette seconde phrase demandera plus de temps que la pre
mière, parce que c'est un travail plus difficile ; quelle que soit la
nature de ce travail, le scripteur se trouve placé par là dans un
état d'excitation, par rapport à son état moyen, où il était, je
suppose, quand il a écrit la première phrase, avec l'orthographe
ordinaire. Comme nous tenons compte seulement de la diff
érence de ces deux états, notre affirmation

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents