L Église évangélique de confession luthérienne au Brésil face à la théologie de la libération - article ; n°1 ; vol.54, pg 50-65
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L'Église évangélique de confession luthérienne au Brésil face à la théologie de la libération - article ; n°1 ; vol.54, pg 50-65

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Description

Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique - Année 1997 - Volume 54 - Numéro 1 - Pages 50-65
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Martina Schmidt
L'Église évangélique de confession luthérienne au Brésil face à
la théologie de la libération
In: Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique. N°54, 1997. pp. 50-65.
Citer ce document / Cite this document :
Schmidt Martina. L'Église évangélique de confession luthérienne au Brésil face à la théologie de la libération. In: Autres Temps.
Cahiers d'éthique sociale et politique. N°54, 1997. pp. 50-65.
doi : 10.3406/chris.1997.1958
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1997_num_54_1_1958Enjeux
L'Église « évangélique »
de confession luthérienne
au Brésil (IECLB)
face à la théologie
de la libération
Martina Schmidt
Je me propose d'entrer dans le cœur de la problématique avec une
petite anecdote: un jour, j'eus l'occasion de parler à un ami du sujet de
cet article. D'un air provocateur, celui-ci répondit : « La théologie de
la libération, est-ce que ça existe encore ? », sous-entendant :
« N'était-ce pas un mouvement de passage dont on a souvent entendu
parler dans les années soixante-huit et septante ; une théologie de la
révolution sociale un peu marxiste sur les bords ?... »
En effet, la question semble particulièrement pertinente.
Aujourd'hui, elle se pose dans une double alternative. Tandis que les
uns, critiques, demandent : « Y a t-il une crise au sein de la théologie
de la libération ? » « La théologie de la libération ne serait-elle pas
morte ? »2 ; les autres, ses défenseurs, prétendent qu'elle est plus v
ivante que jamais. De manière générale, deux raisons contribuèrent à
ce que la TdL3 soit tant discréditée. Premièrement, les théologiens de
la libération « ne sont plus sous les feux de la rampe », comme c'était
le cas dans les années soixante. Depuis les interventions de censure du
côté de Rome, « l'avant-scène ecclésial est désormais plus souvent oc-
Assistante, diplômante, Faculté de théologie de l'Université de Lausanne (Suisse).
50 par les partisans » de ce que l'on peut appeler la « contre-récupée
forme néoconservatrice »\ Deuxièmement, certains prétendent que la
chute du mur de Berlin, l'effondrement du socialisme en Europe de
l'Est et également de plusieurs projets socialistes en Amérique latine
(Nicaragua, Cuba), auraient provoqué une désillusion parmi les prota
gonistes de la TdL. Le peuple opprimé n'aurait désormais plus d'en
nemi déclaré. Les grands bouleversements politiques auraient rendu le
discours habituel de la TdL sur la « révolution » sociale et le « chan
gement structurel » anachroniques5.
Mais ceux qui réduisent la TdL à une théorie marxiste ou à un mou
vement social de passage n'éprouvent qu'une ignorance considérable
à l'égard d'un renouveau théologique qui non seulement provoqua des
changements dans l'Église catholique et le monde laïc en Amérique
latine, mais qui s'adresse aujourd'hui plus que jamais comme un défi
à l'Église occidentale et à l'hégémonie de sa théologie, élitaire pen
dant tant de siècles. Alors que les théologiens de la libération emprunt
èrent les méthodes d'analyse sociale des marxistes, pour mieux comp
rendre la réalité de la pauvreté, « les vraies racines de la théologie de
la libération se trouvent dans l'existence massive des pauvres »,
affirme Frei Betto, prêtre dominicain brésilien6. En effet, ce fut la
masse des pauvres qui commença à lire sa réalité « dans le miroir de
la Bible »7 et à se découvrir inscrite dans l'histoire de la révélation
continue du Dieu libérateur. Les Communautés de Base (CEBs) ratt
achées pendant longtemps surtout au milieu de l'Église catholique, font
preuve de cette nouvelle mobilisation laïque.
Mais, quelle est l'emprise de la TdL sur une Église minoritaire de
tradition allemande ?
J'aimerais ici proposer quelques pistes de réflexion. Tout d'abord, il
faut relever qu'il n'y a pas une seule TdL. Pour être plus exacte, je de
vrais parler « des théologies de la libération », en étant consciente que
chacune d'entre elles a vu le jour dans un contexte différent (théologie
de l'Afrique noire ; théologie asiatique ; théologie latino-américaine)8.
Cependant, elles relèvent toutes d'une situation comparable : du cri
des plus démunis dans une société dans laquelle régnent injustice et
misère. Quand j'utilise, par la suite, le terme TdL, je me réfère exclu
sivement à la situation du continent latino-américain et plus précisé
ment du Brésil. La démarche proposée suivra quatre points :
1. Au départ: un questionnement personnel.
2. Quelques traits caractéristiques de la TdL en Amérique latine.
3. L'attitude de l'Église « évangélique » de confession luthérienne
face à la situation socio-politique du Brésil.
51 4. Vers une réflexion luthérienne relative à la pratique de la libéra
tion.
Au départ: un questionnement personnel
Au printemps 1991, après avoir terminé ma licence en théologie, et
avant de commencer le stage pastoral, j'ai eu l'occasion de passer six
mois au Brésil. J'ai résidé notamment dans le sud du pays, où j'ai pu
travailler en tant que collaboratrice pastorale dans une paroisse de tra
dition luthérienne, située dans la ville de Sapiranga. La paroisse de
Sapiranga fait partie de « l'Église "évangélique" de confession luthé
rienne au Brésil » (IECLB)9 et ses caractéristiques ne font certes pas
exception dans l'ensemble. J'y ai rencontré un luthéranisme foncière
ment marqué par la tradition de l'Eglise luthérienne allemande : une
communauté qui était caractérisée par un fort attachement de la rel
igion à la culture allemande, des cultes en langue allemande, et un dé
tachement frappant à l'égard du contexte brésilien. Si les idées de la
TdL étaient présentes, c'était un peu à part, à savoir dans des groupes
bibliques de femmes qui se retrouvaient, au cours de leurs lectures b
ibliques, dans l'image du pauvre, elles-mêmes inscrites dans un
contexte d'injustice et de misère. Par ailleurs, les idées d'une TdL
latino-américaine avaient déjà largement pénétré dans l'enseignement
à YEscola Superior de Teologia à Sâo Leopoldo (Rio Grande do Sul).
Ce constat, fait immédiatement surgir les questions suivantes : quelle
est la mission d'une Église luthérienne de tradition étrangère au Brés
il ? A quel prix peut-elle mener une existence à part dans un contexte
de vie marqué par de nombreux problèmes socio-politiques et humanit
aires ? Ne devrait-elle pas s'engager dans la voie d'un renouveau
théologique qui s'exprimerait en termes d'une nouvelle herméneutique
biblique et d'une nouvelle ecclésiologie à l'exemple de la TdL latino-
américaine ?
Quelques traits caractéristiques de la TdL en Amérique latine
Au risque de répéter ici des connaissances élémentaires, j'aimerais
débroussailler brièvement le champ de la TdL et tracer quelques traits
caractéristiques de sa naissance sur le continent latino-américain, no
tamment au Brésil.
Jalons historiques
Deux aspects fondamentaux sont à la base de la naissance de la TdL
52 en Amérique latine. Le premier est l'accès à l'indépendance des
peuples autrefois colonisés par le monde européen. Le développement
d'une conscience nationale chez les peuples colonisés, leur prise en
considération en tant que nation par le monde extérieur, leur influence
sur la politique internationale, constituent historiquement et politique
ment le grand acquis des dernières décennies.
Parallèlement, suite aux deux guerres mondiales, l'image de
l'homme blanc se brise une fois de plus10. Elle avait déjà d'ailleurs été
bien entamée après la « mission à l'épée » au détriment des indigènes.
En même temps, la profonde mise en question de la supériorité de

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