L eugénisme en France : le tournant des années trente. - article ; n°3 ; vol.4, pg 81-114
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Sciences sociales et santé - Année 1986 - Volume 4 - Numéro 3 - Pages 81-114
William H. Schneider: Eugenics in France: the turning point in the 1930s.
The eugenics movement is not limited to the Anglo-Saxon countries. Deeply rooted in France, the debate on eugenics became involved in a number of political and social issues which marked the first four decades of the twentieth century. Known until the 1920s for its moderation and respect for individual rights, it took a sterner and more restrictive turn during the 1930s, when certain political programs were reconsidering moderate eugenic themes. This article provides an in-depth analysis of specific factors in the social, political, and scientific contexts which led to these changes, and which are important to anyone wishing to reflect on the future of genetic counseling.
William H. Schneider : L'eugénisme en France : le tournant des années trente.
Le mouvement eugénique n'a pas été limité aux pays anglo-saxons. En France, ses racines sont profondes et le débat sur l'eugénisme s'est trouvé mêlé à de nombreuses questions politiques et sociales qui ont marqué les quatre premières décennies du vingtième siècle. D'abord caractérisé, jusqu'aux années vingt, par sa modération et son respect des droits de l'individu, il s'est ensuite transformé dans un sens plus sévère et restrictif dans le courant des années trente, alors que certains programmes politiques reprenaient les thèmes de l'eugénisme modéré.
Cet article analyse en profondeur le contexte social, politique, scientifique dont les spécificités ont conduit à ces changements, et qu'il est important de connaître pour qui veut réfléchir sur l'avenir du conseil génétique.
William H. Schneider : La eugenésica en Francia : la alterna- tiva de los anos treinta.
No fue limitado a los paises anglo-sajones el movi- miento eugenésico. Son profundas sus raices en Francia y el debate acerca de la eugenésica hallôse mezclado a numero- sas cuestiones politicas y sociales que marcaron los cuatro primeros decenios del siglo veinte. Caracterizado primero por su moderaciôn y respeto del individuo — hasta los anos veinte — se fue modificando en el sentido de la severidad y restricciôn — en la corriente de los anos treinta — cuando ciertos programas polïticos volvïan hacia los temas de la eugenésica moderada.
Hace este articulo un anâlisis profundo del contexto social, policito, cientifico, cuyos caractères especificos condujeron a dichos cambios. Conocer ese contexto es importante para aquel que desee reflexionar sobre el porve- nir del consejo genético.
34 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 9
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

William H. Schneider
L'eugénisme en France : le tournant des années trente.
In: Sciences sociales et santé. Volume 4, n°3-4, 1986. Handicap et politique sociale. pp. 81-114.
Citer ce document / Cite this document :
Schneider William H. L'eugénisme en France : le tournant des années trente. In: Sciences sociales et santé. Volume 4, n°3-4,
1986. Handicap et politique sociale. pp. 81-114.
doi : 10.3406/sosan.1986.1041
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/sosan_0294-0337_1986_num_4_3_1041Abstract
William H. Schneider: Eugenics in France: the turning point in the 1930s.
The eugenics movement is not limited to the Anglo-Saxon countries. Deeply rooted in France, the
debate on eugenics became involved in a number of political and social issues which marked the first
four decades of the twentieth century. Known until the 1920s for its moderation and respect for
individual rights, it took a sterner and more restrictive turn during the 1930s, when certain political
programs were reconsidering moderate eugenic themes. This article provides an in-depth analysis of
specific factors in the social, political, and scientific contexts which led to these changes, and which are
important to anyone wishing to reflect on the future of genetic counseling.
Résumé
William H. Schneider : L'eugénisme en France : le tournant des années trente.
Le mouvement eugénique n'a pas été limité aux pays anglo-saxons. En France, ses racines sont
profondes et le débat sur l'eugénisme s'est trouvé mêlé à de nombreuses questions politiques et
sociales qui ont marqué les quatre premières décennies du vingtième siècle. D'abord caractérisé,
jusqu'aux années vingt, par sa modération et son respect des droits de l'individu, il s'est ensuite
transformé dans un sens plus sévère et restrictif dans le courant des années trente, alors que certains
programmes politiques reprenaient les thèmes de l'eugénisme modéré.
Cet article analyse en profondeur le contexte social, politique, scientifique dont les spécificités ont
conduit à ces changements, et qu'il est important de connaître pour qui veut réfléchir sur l'avenir du
conseil génétique.
Resumen
William H. Schneider : La eugenésica en Francia : la alterna- tiva de los anos treinta.
No fue limitado a los paises anglo-sajones el movi- miento eugenésico. Son profundas sus raices en
Francia y el debate acerca de la eugenésica hallôse mezclado a numero- sas cuestiones politicas y
sociales que marcaron los cuatro primeros decenios del siglo veinte. Caracterizado primero por su
moderaciôn y respeto del individuo — hasta los anos veinte — se fue modificando en el sentido de la
severidad y restricciôn — en la corriente de los anos treinta — cuando ciertos programas polïticos
volvïan hacia los temas de la eugenésica moderada.
Hace este articulo un anâlisis profundo del contexto social, policito, cientifico, cuyos caractères
especificos condujeron a dichos cambios. Conocer ese contexto es importante para aquel que desee
reflexionar sobre el porve- nir del consejo genético.Sociales et Santé - vol. IV - n° 3-4 - novembre 1986 Sciences
L'EUGENISME EN FRANCE :
LE TOURNANT DES ANNÉES TRENTE
William H. Schneider*
L'histoire de l'eugénisme peut aider à mieux com
prendre les tentatives d'application des connaissances de
l'hérédité à l'amélioration de l'être humain. En particulier,
l'eugénisme français peut servir d'exemple à ceux qui s'inté
ressent au conseil génétique car il a connu un bouleverse
ment important/^De son origine aux années vingt,
l'eugénisme français s'est distingué par sa modération et son
respect des droits de l'individu. Mais les conditions ont
beaucoup changé dans les années trente, et le ton de l'eugé
nisme français est devenu plus sévère et restrictif tandis que
l'eugénisme modéré se trouvait repris dans certains pro
grammes politiques. Un examen de ces changements peut
donc servir d'illustration à ceux qui spéculent sur l'avenir du
conseil génétique.
I - Observations préliminaires sur l'eugénisme français
avant 1930
Le fait le plus important est sans doute qu'il existait un
mouvement eugénique en France et non pas seulement dans
les pays anglo-saxons, où il a été jusqu'à présent le plus
étudié, comme en témoigne le livre récent de Daniel Kev-
les [23]. On remarque, à chaque congrès international d'eu
génisme, plusieurs participants venus non seulement de
* William H. Schneider, historien, Department of History, University of
North Carolina, Wilmington, NC 28403, U.S.A. 82 WILLIAM H. SCHNEIDER
France mais d'autres pays «latins», et même d'Amérique
latine et du Japon. Mais en France, l'existence d'autres acti
vités, d'organisations, de propagandes et de projets de loi,
prouve que l'eugénisme y a une base plus profonde et se
mêle à beaucoup de questions politiques et sociales parmi les
plus importantes durant les quatre premières décennies du
vingtième siècle [48].
Le présupposé théorique de la plupart des eugénistes
français était d'inspiration lamarckien. Ce fait infirme l'h
ypothèse de la plupart des historiens de l'eugénisme selon
laquelle l'acceptation du mendelisme était obligatoire pour
ceux qui voulaient améliorer biologiquement la race
humaine. L'eugénisme d'inspiration mendelienne n'est
apparu en France que dans les années trente, accompagnant
les propositions les plus extrêmes visant à la restriction de
l'immigration [34]. Mais ce lien entre le mendelisme et des
mesures eugéniques sévères et négatives a été la seule appli
cation du mendelisme en France. En général, la France était
renommée pour être le centre d'un eugénisme néo-
lamarckien qui promouvait des mesures positives, afin que
l'amélioration de la population puisse être transmise aux
générations suivantes. Cette référence aux théories de
Lamarck était en cohérence avec les propositions destinées à
résoudre le problème de la population en France. Le déclin
de la natalité au dix-neuvième siècle et la menace de dépopul
ation à la fin du siècle s'opposaient au développement de
mesures eugéniques négatives, car elles risquaient de dimi
nuer encore les naissances. Même celles visant à réduire le
nombre des tares se heurtaient à la crainte qu'elles influent
négativement sur la pratique du mariage ou de la procréat
ion. La plupart des eugénistes français évoquaient donc les
mesures positives susceptibles d'accroître la qualité de la
descendance. Celles-ci rencontraient un soutien important
tant émotionnel que scientifique en raison de la croyance
aux théories de l'hérédité des caractères acquis. Elles
avaient, en outre, l'attrait de la logique. Pour améliorer la
qualité des générations futures, on n'avait qu'à le
milieu et la santé de la génération présente. On faisait ainsi
coup double.
Cependant, on risque d'opérer une hypersimplification
si l'on réduit l'eugénisme en France à un « pur eugénisme
nataliste » [27]. Pendant toute cette période du mouvement
eugénique, il a été également proposé l'élimination des él
éments dits « dysgéniques », sans qu'il y ait nécessairement de L'EUGÉNISME EN FRANCE 83
justification en termes mendeliens. A côté des eugénistes
positifs qui voulaient multiplier les éléments sains, d'autres
voulaient éliminer les inaptes par des mesures sévères : pro
hibition du mariage, stérilisation et restriction de l'immigrat
ion. On trouve, dès les années 1890, la proposition de telles
mesures dans les écrits de l'anthropologiste-bibliothéquaire
Georges Vacher de Lapouge [26]. Le fait que la Société fran
çaise de l'eugénique soit dès le début aux mains des néo-
lamarckiens et des puericulteurs comme Georges Perrier et
Adolphe Pinard [50] ne doit pas faire oublier les écrits et
discours de Charles Richet (Vice-Président de la société)
dont le livre Sélection humaine, écrit en 1912 mais publié en
1919, proposait toutes ces mesures et d'autres encore. A ce
moment, ses idé

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