L horreur économique - article ; n°1 ; vol.55, pg 59-66
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Description

Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique - Année 1997 - Volume 55 - Numéro 1 - Pages 59-66
8 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 30
Langue Français

Extrait

Guy Bottinelli
L'horreur économique
In: Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique. N°55, 1997. pp. 59-66.
Citer ce document / Cite this document :
Bottinelli Guy. L'horreur économique. In: Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique. N°55, 1997. pp. 59-66.
doi : 10.3406/chris.1997.1985
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1997_num_55_1_1985L'horreur économique
Guy Bottinelli*
Cette fin de siècle nous offre le spectacle espéré et redouté d'un
monde qui prend toute la mesure de sa recomposition globale. Il faut
entendre par là, la conscience universelle de la similitude des pro
blèmes qu'il doit affronter. L'époque des grands blocs antagonistes,
Est-Ouest, étant révolue, celle où il était simple de désigner l'ennemi
extérieur contre lequel il fallait faire la démonstration de sa supérior
ité. Aujourd'hui l'ennemi est à l'intérieur : c'est l'espèce de paralysie
qui affecte nos décideurs face aux enjeux qui ont pour nom, chômage,
repli nationaliste, exclusion sociale. Ce qui ne nous empêche pas de
toujours chercher à extérioriser cet ennemi, identifié depuis peu, à la
mondialisation. C'est le nouveau démiurge de nos sociétés malades. Il
a mis à nu le ressort qui les propulse vers un avenir bouché : la compétit
ivité.
Pour dénoncer cette trajectoire fatale, Viviane Forrester a poussé un
cri : « L'horreur économique ». Ce cri a répercuté l'écho que l'on sait,
à en juger par les tirages de son livre. En fait, cette « horreur » n'est
jamais que le déroulement logique des mécanismes du marché. Si l'on
reprend l'image de la paralysie, c'est plutôt « d'horreur politique »
qu'il convient de parler, ainsi que l'indique très justement l'éditorial
de la revue Alternatives économiques d'avril 1997. Redonner sa place
au politique, en vue d'une meilleure maîtrise du « tout économique »
est une urgente mission.
Le pamphlet de V. Forrester rejoint d'une certaine manière le devoir
de contestation dont l'Évangile est, entre autres, le ferment. C'est sou
vent dans ce registre que s'expriment les hommes d'église lorsqu'ils
dénoncent les injustices, les atteintes aux droits, les déchaînements de
violence, et depuis peu, les effets pervers du libéralisme économique.
Tout cela est nécessaire et urgent. Toutefois on ne peut s'empêcher de
rester sur sa faim, quand, dépassant le pessimisme radical, on s'inter-
* Mission dans l'industrie de la région lyonnaise.
59 roge sur les moyens d'enrayer le processus décrit par V. Forrester.
Elle-même d'ailleurs, au détour d'une phrase reconnaît qu'on ne peut
refuser la mondialisation ou l'essor des technologies, mais qu'il s'agit
de les prendre en compte. Elle s'arrête là. Comme s'arrêtent là en gé
néral les discours des hommes d'église, au nom du fait qu'une fois la
protestation exprimée, il ne leur appartient plus de faire des proposit
ions. On entre alors dans le domaine de l'action collective où les
chrétiens rejoignent des organismes existant à cet effet : partis, syndi
cats, associations, groupes de pression, etc.
La suite à « l'horreur économique » on peut la trouver dans des r
éponses relevant d'un optimisme mesuré : « il ne faut rien exagérer...
on trouvera bien des moyens d'en sortir... ». Il m'a paru intéressant de
chercher des réponses du côté de ceux qui, tout en reconnaissant le
« cri » de V. Forrester : « On va dans le mur ! » essaient de donner des
signes d'espoir.
Des ouvrages récents apportent des éclairages substantiels sur ces
problèmes. Leurs auteurs peu connus du grand public, poussent les dé
veloppements actuels des logiques en cours jusqu'à leur aboutisse
ment naturel, à savoir, l'état de guerre économique dont nous vivons
les prémices. Ils relèvent les signes d'inquiétude et les mesures cor
rectives suggérées par nombre de spécialistes. Ils proposent des issues
qui se concrétisent déjà dans des actions de type alternatif, dont cer
taines dépassent largement le cadre de la confidentialité. Ne s'en t
enant pas là, ils proposent des dispositions globales que les nations se
raient bien inspirées de prendre pour remettre l'économie à sa place.
Ils insistent sur le fait que des politiques économiques différentes
existent, à condition qu'elles ne se contentent pas de mélanger autr
ement les mêmes ingrédients, ce qui est souvent le cas de ce qu'on dé
signe vaguement sous le terme « d'autre politique ».
On peut reprendre l'argumentation de nos auteurs sous trois cha
pitres :
• La mondialisation conduit-elle inexorablement à la guerre
économique ?
• Les signaux d'alarme sont tirés.
• Pour en sortir, quelles sont les utopies disponibles ?
La mondialisation de l'économie
De la on peut décrire les facettes suivantes :
• La plus importante est incontestablement la mondialisation du sec
teur financier, avec la mobilité internationale du capital depuis 1990,
60 les hausses et les fusions de firmes. La mondialisation des entraînant
portefeuilles d'actions n'en est qu'à ses débuts.
• La mondialisation des marchés et des stratégies, qui rendent les
pays toujours plus interdépendants les uns par rapport aux autres.
C'est une sorte de « solidarité commerciale » à l'échelle planétaire.
• La mondialisation de la technologie, de la recherche-
développement (RD) et des connaissances, qui a accéléré les proces
sus cités ci-dessus.
Enfin, par delà ses aspects économiques, la mondialisation se dé
ploie dans le domaine des modes de vie et de consommation, de la
culture, des institutions internationales, et ce qui n'est pas le moindre
de ses effets, dans la prise de conscience planétaire (voir les nombreux
mouvements mondialistes qui se multiplient dans les domaines les
plus divers : pour la défense de l'environnement, pour le respect des
cultures, contre la torture, contre le travail des enfants, etc.).
Ainsi qu'il apparaît dans cette ébauche, nous sommes dans un pro
cessus inachevé, ce qui inquiète certains, mais peut aussi laisser un es
pace et du temps pour entreprendre les régulations nécessaires. Cha
cun a conscience que notre avenir se fabrique désormais à l'échelle du
monde.
Mais aujourd'hui, l'avance prise par la mondialisation des échanges
et des flux financiers à donné libre cours à la règle du marché devenue
universelle, avec tous les effets pervers que l'on connaît en matière
sociale, écologique, identitaire. Quant aux perspectives d'avenir ce
n'est pas l'affaire du marché dont chacun sait qu'il est myope. Pour
l'heure la mondialisation du capital a érigé la compétitivité, forme
exacerbée de la concurrence, en objectif. Objectif sur lequel s'alignent
les stratégies des grands groupes multinationaux, car « tout le monde
est contre tout le monde ». Un ancien responsable de la Shell, à
qui l'on demandait pourquoi il fallait investir dans la recherche-
développement, fit cette réponse : « Pour abattre nos concurrents ».
Dans un ouvrage récemment traduit, Les fractures du capitalisme,
Lester Thurow, répond de même que le but est de « chasser les autres
du marché, s'emparer de leurs occasions de gagner, tout le jeu de la
concurrence est là ». Or, il est de plus en plus évident que cette comp
étition mortelle ne peut relever les défis majeurs que sont :
- les inégalités et les phénomènes de marginalisation croissants ;
- les atteintes aux écosystèmes ;
- la concentration de pouvoir entre les mains d'entités économiques
peu responsables, et devant lesquelles les gouvernements baissent pa
villon.
61 Ce dernier constat est particulièrement lourd de conséquences, si
l'on se réfère au rôle qui doit être celui de l'État dans toute société :
maintenir la cohésion sociale, garantir les intérêts de l'ensemble de la
population, promouvoir et développer la démocratie. Quand les chefs
d'État se transforment en VRP des entreprises de leur pays, ils confi
rment leur ad

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