La courbe d offre individuelle de travail - article ; n°4 ; vol.17, pg 603-639
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Description

Revue économique - Année 1966 - Volume 17 - Numéro 4 - Pages 603-639
37 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

R. Sourdain
La courbe d'offre individuelle de travail
In: Revue économique. Volume 17, n°4, 1966. pp. 603-639.
Citer ce document / Cite this document :
Sourdain R. La courbe d'offre individuelle de travail. In: Revue économique. Volume 17, n°4, 1966. pp. 603-639.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1966_num_17_4_407720LA COURBE
D'OFFRE INDIVIDUELLE DE TRAVAIL
Limites de l'analyse marginaliste
« Dans les années où la vie est bon marché, les travailleurs
pauvres ne veulent pas oeuvrer plus de deux jours par semaine, car
leur humeur est telle ... qu'ils ne travaillent que le temps nécessaire
pour se maintenir dans les conditions de vie auxquelles ils se sont
accoutumés. 1 »
C'est en ces termes que l'un des derniers représentants du
mercantilisme exprime l'opinion qui domine à son époque en matière
d'offre de travail. La baisse du coût de la vie équivaut à une hausse
du taux réel de salaire. Celle-ci entraîne une réduction de la quant
ité de travail. Cette réduction est inversement proportionnelle à la
hausse du taux de salaire, le produit du taux réel de salaire par la
durée du travail étant constant. L'élasticité de l'offre de travail est
donc constamment égale à — 1. La courbe d'offre de est
une hyperbole équilatère.
Cette « théorie » avait une incidence importante en matière de
politique économique : elle justifiait l'hostilité professée par les mer-
cantilistes à l'égard de toute hausse des taux de salaire. Celle-ci
ne pouvait qu'entraîner une diminution de la production, donc de la
« richesse du prince ».
Adam Smith va rompre avec cette tradition : « Une rétribution
libérale du travail, écrit-il, ... accroît l'activité du peuple ... Quand
les salaires sont élevés, nous trouvons toujours le travailleur plus
actif, plus diligent et plus expéditif que lorsqu'ils sont bas » 2. Il
considérait donc, à l'encontre des marcantilistes, que l'accroissement
du taux de salaire entraînant l'accroissement de la richesse des
nations.
1. Josiah Child, «A new discourse of trade», 1668 (p. 12 de la 6e édition).
Cf. P.H. Douglas, The theory of wages. New York, 1957, p. 270.
2. A. Smith, Wealth of nations.:., Edinburgh, 1831, livre 1, chapitre 8, p. 34. .
604 REVUE ECONOMIQUE
Mais il ne fera pas école sur ce plan. Au xixe siècle, les libéraux
ont plutôt partagé le point de vue d'un contemporain de Smith, le
grand voyageur Arthur Young, qui déclarait qu'il était « bien connu
de chacun, sauf des idiots, que les basses classes de la société doivent
être maintenues pauvres, sans quoi elles ne seront jamais indus
trieuses » 3.
Il est vrai que l'assertion de Smith ne reposait pas sur une
analyse approfondie du comportement du travailleur : il n'avait donc
aucune chance d'imposer un point de vue qui ne pouvait que heurter
profondément les habitudes des classes dirigeantes. En effet, Smith
reconnaissait par ailleurs que « les maîtres cherchent à payer le
moins qu'ils peuvent... » 4. Or ceux-ci trouvaient dans la « théorie »
traditionnelle une justification qu'ils n'étaient pas près d'abandonner.
La rupture entre la théorie et la pratique devait être le fait des
marginalistes. La nouvelle approche des phénomènes économiques
était fondamentalement opposée à celle proposée par les marcantilistes.
En effet, les marginalistes prétendaient que les individus cher
chent à égaliser leurs satisfactions à la marge. Le maintien du salaire
à un niveau constant semblait maintenir constante la satisfaction
retirée du dernier franc touché. En revanche, il était difficile de
soutenir que l'insatisfaction retirée de la dernière heure du travail
ou la satisfaction retirée de la dernière heure de loisir ne variait
pas avec la durée totale du travail ou du loisir.
Par conséquent, l'offre de sera un domaine que les marg
inalistes vont s'empresser d'explorer. Le résultat a été particuli
èrement intéressant. La courbe d'offre de travail est sans doute une
des plus belles conquêtes du marginalisme ..... tout au moins sur le
plan de la théorie pure. Il leur fut en effet facile de souligner le
simplisme de la conception primitive. L'élasticité de l'offre de travail
n'était pas constamment égale à — .1 : elle pouvait varier et même
devenir positive. A l'hyperbole équilatère se substituait la « courbe
en S ».
Mais la forme de cet S ne fut jamais bien définie. Certains
auteurs présentent un S majuscule . normal. D'autres le voient avec
des yeux de typographe. Enfin, est-ce par prudence que certains
présentent la courbe d'offre de travail sous l'apparence d'un point
d'interrogation ?
Cette imprécision est regrettable. Car, à l'époque de la sociali
sation des rapports du travail, la connaissance du comportement du
3. A. Young, Eastern Tour, vol. 4, p. 361.
4. A. Smith, Wealth of nations..., op. cit., livre I, chapitre 8, p. 27. L'OFFRE INDIVIDUELLE DE TRAVAIL 605
travailleur individuel a autant, sinon plus d'importance qu'au temps
du mercantilisme et du libéralisme.
C'est ainsi que les entreprises rennaises du bâtiment sont confront
ées avec le problème du « boni » et du « mali », pour reprendre
l'expression utilisée dans plusieurs d'entre elles. Certaines catégories
de salariés ont la coutume d'augmenter leur cadence de travail au
début du mois afin de bénéficier des primes de rendement. Puis,
une fois qu'ils ont atteint un « boni » tel que leur revenu mensuel
s'élève aux environs de 800 F, ils réduisent leur activité, en produi
sant même au-dessous de la norme. Et comme le « mali » n'est pas
déductible du salaire, les firmes se plaignent de subir un déficit.
Si le travailleur individuel reste encore maître de l'intensité de
son travail malgré les progrès de l'organisation scientifique du travail,
il en influence également la durée, ce qui est non moins paradoxal.
C'est ainsi que, depuis la guerre, les salariés font preuve d'un
engouement, inconnu auparavant, pour les heures supplémentaires.
Mais cet allongement de la durée du travail n'a été obtenu qu'au
prix d'une majoration du taux des heures Des
plaintes se sont élevées concernant le coût de ces heures. Mais les
pouvoirs publics hésitent à en réduire le taux, car l'incidence sur
la production n'est pas calculable à l'avance.
Le problème de l'élasticité de l'offre de travail présente donc
un intérêt non négligeable, tant sur le plan de la firme que sur celui
de l'économie globale. D'où vient alors que l'on se soit toujours
montré incapable de fournir une « loi » de l'offre de travail ?
Cette incapacité semble découler de l'insuffisance des instruments
utilisés pour l'analyse.
Les théoriciens de l'offre de travail ont d'abord fait appel à une
notion cardinale de l'utilité. Leur raisonnement reposait, explicitement
ou implicitement, sur un tableau, inspiré de Menger, qui donnait
l'évaluation de l'utilité que le travailleur retire, d'une part, du pouvoir
d'achat correspondant au salaire touché, et d'autre part, du loisir
qui découle des heures non utilisées au travail. Il est ainsi possible
d'imaginer les satisfactions que le salarié retire de son emploi du
temps pour un taux de salaire donné. S'il est logique avec lui-même,
le salarié égalisera les utilités marginales pondérées de son pouvoir
d'achat et de son loisir.
Mais cette approche a fait l'objet des mêmes critiques que celles
opposées à l'application de la notion cardinale de l'utilité au marche
des biens de consommation. En ce qui concerne les hypothèses de 606 REVUE ECONOMIQUE
départ, il est d'abord aussi utopique de chiffrer l'utilité d'une heure
de loisir que de chiffrer celle d'un kilogramme de beurre. En outre,
même en supposant que cette évaluation puisse se faire, elle ne fut
pas correctement établie. Car, malgré Edgeworth, les auteurs qui
ont recouru à la notion d'utilité cardinale pour l'étude de l'offre de
travail ont supposé implicitement que la satisfacti

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