La dramaturgie de Fonvizin - article ; n°1 ; vol.46, pg 65-80
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Description

Revue des études slaves - Année 1967 - Volume 46 - Numéro 1 - Pages 65-80
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur François de Labriolle
La dramaturgie de Fonvizin
In: Revue des études slaves, Tome 46, fascicule 1-4, 1967. pp. 65-80.
Citer ce document / Cite this document :
Labriolle François de. La dramaturgie de Fonvizin. In: Revue des études slaves, Tome 46, fascicule 1-4, 1967. pp. 65-80.
doi : 10.3406/slave.1967.1934
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1967_num_46_1_1934'
LA DRAMATURGIE DE FONVIZIN
FAR
FRANÇOIS DE LABRIOLLE
L'œuvre dramatique de Fonvizin n'est pas considérable : il n'a écrit que
deux pièces, le Brigadier (1769) et le Mineur (1782), et laissé trois ébauches,
l'une rédigée avant le Brigadier, c'est le « premier Mineur » (rannij Nedo-
rosľ) (1). Les deux autres vers la fin de sa vie, Le bon précepteur (Dobryj
nastavnik) vers 1784 et Le choix d'un précepteur (Vybor guvernera) vers 1790
ou 1792 (2).
(*■' La première allusion à cette ébauche du Mineur, retrouvée dans les papiers de P. Ja.
Daškov, a été faite par P. N. Polevoj dans Istorija russkoj slovesnosti s dřevnějších vremen
do našich dnej, Saint-Pétersbourg, 1900, II, p. 128. Mais le texte n'en a été publié qu'en 1933
par G. Korovin dans Literaturnoe Nasledstvo, n° 9-10, Moscou, 1933, p. 243-263. K. V. Pigarev
conteste, en s'appuyant sur l'examen des écritures et du filigrane du papier que l'on puisse
attribuer ce texte à Fonvizin (P. N. Polevoj et G. Korovin affirmaient que si le manuscrit était
de la main d'un copiste, les corrections avaient été faites par l'auteur lui-même), et pense qti'il
s'agit d'un texte d'auteur inconnu, écrit après le « vrai » Mineur vers 1784-1785 (cf. Tvorčestvo
Fonvizina,M., 1954, supplément II, p. 281-284). A. P. Mogiijanskij dans l'article « K voprosu o
ranném Nedorosłe » (XVIII vek, t. 4, M.-L., 1959) établit par une analyse chimique que le papier
sur lequel est rédigée cette ébauche date des années 70 et non des années 80, et il attribue la
pièce... au frère de D. I. Fonvizin, Pavel Ivanovic. Mais G. P. Makogonenko, se fondant sur une
analyse précise du texte, montre de façon très convaincante que ce texte est bien de D. L Fonv
izin lui-même : par les thèmes, par les procédés comiques, par l'esprit de la composition, le
« premier » Mineur annonce les grandes œuvres que sont le Brigadier et le Mineur (Denis
Fonvizin. Tvorčeskij puť, M.-L., 1961, p. 62-70).
<2) De ces deux pièces nous ne parlerons pas dans ce travail.
En effet, nous n'avons que deux scènes de la première (cf. Sobranje sočinenij Fonvizina,
I, M.-L., 1959, p. 180-185); nous ne savons pas pourquoi l'auteur a abandonné ce projet. H a
utilisé ces deux scènes dans l'article Razgovor u knjagini Chaldinoj, qui devait paraître dans
la revue Drug čestných Ijudej ili Starodum. Quant à la seconde, le texte, déjà inachevé, nous est
parvenu mutilé : il manque une partie importante de l'acte II, scène 1. Les qualités artistiques
de cette esquisse sont très faibles, les personnages manquent de vie et la construction en est
artificielle. Du moins cette ébauche montre-t-elle que Fonvizin, dans les limites étroites qu'impos
ait la censure depuis le début de la Révolution Française, est resté fidèle à ses convictions :
la pièce est consacrée aux problèmes que pose l'éducation d'un jeune prince et l'auteur avait
de toute évidence l'intention d'en faire un débat d'idées.
ÉTUDES SLAVES 3 66 FRANÇOIS DE LABRIOLLE
Mais cette œuvre présente la caractéristique intéressante d'être tout entière
consacrée à un même problème, essentiel aux yeux des « civilisateurs », l'édu
cation. Or la permanence d'un thème à travers une œuvre permet de mieux
suivre à la fois l'évolution de ce — dans la mesure du moins où l'auteur
ne se répète pas, ce qui est le cas de Fonvizin — et l'évolution de son expression.
Le but de cette étude est de montrer qu'une réflexion incessante sur le même
problème a conduit notre auteur à l'aborder sous des aspects divers, de plus en
plus riches, que l'enrichissement de sa pensée a provoqué une profonde tran
sformation de ses conceptions dramatiques et enfin que cette découverte esthé
tique de Fonvizin a exercé sur la littérature dramatique russe une influence
telle que l'on peut y voir une des causes profondes de son ouverture au réa
lisme.
On sait quelle importance l'éducation revêtait aux yeux des écrivains
« progressistes » russes. Comme tous les esprits éclairés du xvine siècle, ils
croyaient à la théorie de la « table rase »; l'homme naît semblable à une surface
vierge sur laquelle l'éducation peut imprimer ce qu'elle veut (Helvétius con
sacre une bonne partie de son livre De l'homme à démontrer que l'homme est
« tout éducation »). lis pensaient aussi que l'instruction est à la base de l'essor
économique des peuples, qu'elle est la condition du progrès : une nation main
tenue dans l'ignorance est une nation d'esclaves, elle ne peut se développer ni
le peuple améliorer son sort. Novikov, Radiščev, Krylov reviennent inlassabl
ement sur cette idée.
Aucun écrivain russe ne manifeste dans cette lutte une constance et une
ardeur égales à celles de Fonvizin. Ardeur et constance d'autant plus vives
qu'elles sont intéressées. Car celui-ci a conçu très tôt une vive inquiétude
devant l'évolution à rebours de la classe à laquelle il appartient, la noblesse :
il croit qu'elle a à jouer dans l'État le rôle essentiel de classe dirigeante et il
constate perd sans cesse davantage ses titres à jouer ce rôle. Ses atta
ques contre la sottise, la malhonnêteté ou la cruauté de certains propriétaires
ne doivent pas tromper, il ne cherche pas à abattre cette classe, mais à la fusti
ger pour qu'elle se reprenne et lutte contre l'asservissement moral et l'oisiveté
où elle s'enlise. Il souhaite que les jeunes nobles, qui représentent à ses yeux
l'avenir de la Russie, se posent en voyant sur la scène des hobereaux stupides
et ignorant la question cruciale : en sommes-nous là? Il veut provoquer en
eux un sursaut de dignité, il veut inquiéter ^. Est-ce naïveté de sa part?
Peut-être, mais comme tous les « Civilisateurs » Fonvizin croit au pouvoir de
la parole ; si l'on sait employer les mots justes, on peut toujours éveiller la con
science morale qui sommeille au cœur de chaque homme. Il suffit d'écrire la
vérité, pense-t-il, il se trouvera toujours des hommes pour la comprendre et
pour l'aimer. La tâche de l'écrivain est d'amener les hommes à sentir où est
í1' Dans le Mineur : « Un noble indigne d'être noble, je ne connais rien de plus vil au monde ». LA DRAMATURGIE DE FONVIZIN 67
cette vérité, ils agiront alors suivant la raison et deviendront meilleurs. Fonviz
in ne veut pas être simplement un auteur satirique qui raille et qui dénonce,
il souhaite être le maître, le guide qui montre la faute, mais qui donne aussitôt
les moyens de la corriger.
Dans cette tâche pédagogique, Fonvizin utilise toujours la même méthode,
il a recours à une opposition évidente, pratique et expressive, il montre les
méfaits d'une mauvaise éducation et les avantages d'une bonne éducation.
Sur cette- antithèse élémentaire, il revient sans cesse en homme de théâtre
averti qu'il est, car il sait que s'il veut être compris, il doit être clair. Mais à
mesure que les années passent, que son expérience personnelle s'accroît, ce
thème de l'éducation se modifie et s'enrichit : Fonvizin essaye d'abord de le
poser sur le plan personnel dans le « premier » Mineur, et s'aperçoit vite que
ce point de vue est trop étroit; le problème a des aspects moraux, qu'il tente
vainement de faire sentir dans le Brigadier; il a aussi des prolongements poli
tiques et sociaux qu'il réussit à montrer dans le Mineur.
À l'évolution du thème qui devient de plus en plus complexe correspond
une évolution profonde de la méthode d'exposition, de la dramaturgie.
À idéologie nouvelle, esthétique nouvelle. Après avoir été tenté par la farce,
Fonvizin la rejette, il renonce mê

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