La menace de la surpopulation - article ; n°3 ; vol.1, pg 253-268
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Description

Tiers-Monde - Année 1960 - Volume 1 - Numéro 3 - Pages 253-268
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Charles G. Darwin
La menace de la surpopulation
In: Tiers-Monde. 1960, tome 1 n°3. pp. 253-268.
Citer ce document / Cite this document :
Darwin Charles G. La menace de la surpopulation. In: Tiers-Monde. 1960, tome 1 n°3. pp. 253-268.
doi : 10.3406/tiers.1960.1208
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1960_num_1_3_1208LA MENACE
DE LA SURPOPULATION
par Sir Charles G. Darwin (i)
On se méfie toujours d'un prophète. Le prophète des catastrophes,
non seulement on s'en méfie, mais on ne l'aime pas. Il existe, cependant,
un rôle plus modeste que celui du prophète, et que chacun considère
comme acceptable : c'est du météorologiste. Celui-ci rassemble
les données dont il peut disposer, puis, utilisant des techniques mathé
matiques aussi bien que son expérience générale, il prévoit ce que va
être le temps dans les vingt-quatre heures à venir. Il se trompe parfois,
mais généralement pas plus d'une fois sur cinq ; il est certainement utile
de formuler des prévisions avec ce degré de probabilité.
Il me semble que nous pouvons, à partir de données actuellement
connues, prévoir les tendances générales de la vie de l'homme pour envi
ron cinquante ans avec la même certitude que le météorologiste pour
vingt-quatre heures. Nous ne pouvons espérer prévoir que les lignes
générales, et il est certain qu'une partie de nos prévisions seront erronées,
mais il semble raisonnable de penser que nous aurons peut-être raison
quatre fois sur cinq.
Ces prévisions forment une partie de mon sujet. Cependant, vous
vous souviendrez que la météorologie en tant que science possède deux
branches : l'une est la prévision du temps, l'autre, plus théorique et
plus profonde, est la climatologie, c'est-à-dire la description générale
des climats, qui consiste, par exemple, à prévoir qu'un climat quelconque
sera pluvieux, sans tenter de déterminer avec précision les jours de
pluie. J'ai également l'intention de traiter un sujet analogue en ce qui
concerne l'avenir général de la race humaine.
Pour exprimer cette analogie avec la météorologie sous une forme
plus simple, nous constatons que le monde connaît actuellement une
prospérité tout à fait exceptionnelle ; c'est l'anticyclone le plus incroyable
(i) Ancien professeur de philosophie naturelle à l'Université d'Edimbourg. Ancien
directeur du National Physical Laboratory. Auteur de : The Next Million Years, 1951, et
de nombreux ouvrages de physique mathématique.
17 SIR CHARLES G. DARWIN
que l'homme ait jamais connu. Nous aimerions évidemment savoir
pendant combien de temps cette situation peut se maintenir. Combien
de temps pourrons-nous nous passer d'un parapluie ? Nous verrons que
la condition actuelle du monde ne peut être considérée comme normale;
nous devons prévoir l'époque à laquelle notre anticylone prendra fin,
et où le temps redeviendra normal. Pouvons-nous espérer trouver un
parapluie ? Ou bien sommes-nous condamnés à un retour aux conditions
difficiles qui ont prévalu pendant la plus grande part de l'Histoire de
l'Humanité ?
LE PASSÉ ET LE PRÉSENT
II sera utile de rappeler, en premier lieu, l'évolution de la population
mondiale. Si nous laissons de côté l'Histoire la plus reculée, c'est-à-dire
la période paléolithique, nous pouvons considérer que la vie moderne
commence environ 10 ooo ans avant J.-C, avec la révolution agricole
due à l'homme néolithique. On ne connaît, évidemment, pas exactement
la population du globe à cette époque, mais on peut supposer, de façon
très générale, qu'elle pouvait se monter à l'époque néolithique à dix
millions, et que, à mesure que l'agriculture s'est répandue dans le monde,
elle a été multipliée par cinq en deux ou trois mille ans.
Environ 3 ooo ans avant J.-C. se produisit la seconde grande révo
lution, la révolution urbaine, au cours de laquelle l'homme apprit à
vivre dans les villes et où apparut la civilisation au sens le plus exact de
ce terme. Le développement du commerce et la division du travail — et
aussi, il faut l'admettre, des phénomènes moins désirables, comme
l'esclavage et l'armée de métier — permirent une densité de peuplement
plus forte que ne l'avait fait l'agriculture. D'où un nouvel accroissement
de la population, à peu près du même ordre.
On estime la population du monde, au début de l'ère chrétienne, à
deux ou trois cents millions. La question de savoir lequel de ces deux
chiffres est le plus vraisemblable n'a pas la moindre importance. Une
grande partie des chiffres que je vais citer ne sont pas connus de façon
exacte, mais même si les progrès de la connaissance permettaient de les
préciser à l'avenir, cela ne changerait rien au raisonnement général que
je vais développer.
Il y avait donc, au début de l'ère chrétienne, plus de deux ou trois
cents millions d'hommes, et ce chiffre augmenta progressivement avec
diverses fluctuations. Mais, même vers 1750, la population mondiale
254 LA MENACE DE LA SURPOPULATION
n'avait guère dépassé 500 millions. Puis un phénomène entièrement
nouveau se produisit, qui, en deux siècles, multiplia par cinq la population
mondiale, celle-ci atteignant de ce fait le chiffre de deux milliards et demi :
alors qu'elle n'avait que doublé en près de deux mille ans, elle connut
donc en ces deux siècles une soudaine explosion.
Il est inutile d'analyser longuement les causes de ce changement,
qui sont, d'une part, la découverte du Nouveau Monde, pratiquement
inhabité selon les normes européennes ou asiatiques, d'autre part et
surtout, la Révolution scientifique, grâce à laquelle le contrôle de la
nature par l'homme différa non seulement quantitativement, mais aussi
qualitativement, de toute expérience antérieure. Cette Révolution conti
nue, d'ailleurs, à provoquer l'accroissement de la population, et ceci à
un rythme encore plus rapide.
Nous sommes tous nés pendant cette révolution, qui nous semble
être l'état naturel du monde; de même que les cinq ou six générations
qui nous ont précédés n'ont jamais connu autre chose. Pourtant, il est
évident que cette expansion rapide ne peut se poursuivre indéfiniment;
en fait, il faut qu'elle prenne fin prochainement, et je dirai plus tard dans
quel délai nous pouvons nous attendre à ce que cesse cette explosion.
Il convient, à ce stade, de mentionner Malthus, qui, en 1799, écrivit
l'ouvrage dans lequel il prévoyait la menace qu'allait impliquer la
surpopulation. Il est évident que les prévisions de Malthus ne se sont
pas vérifiées pendant le xixe siècle; c'est qu'elles précédaient l'invention
du chemin de fer et de la navigation à vapeur, et que la facilité avec
laquelle on peut désormais transporter les produits alimentaires, tran
sforma les conditions existant dans le monde à la date à laquelle il écrivait.
La seule raison pour laquelle je me réfère à Malthus, c'est que l'on affirme
souvent que Malthus avait prévu une catastrophe, qui ne s'est pas
produite; donc il ne faut pas croire ceux qui prévoient de nouvelles
catastrophes, puisqu'il se produira toujours un événement qui réduira
leurs prévisions à néant. Ceux qui avancent de tels arguments oublient
qu'en ce qui concerne une moitié importante de ses prévisions, c'est-à-
dire l'accroissement de la population, Malthus avait parfaitement raison,
puisqu'il est exact que la population ait augmenté selon une progression
géométrique (dans mon pays, la population a quadruplé en un siècle).
Ce sont les nouveaux et importants développements de l'agriculture
chez nous et dans le Nouveau Monde qui nous ont permis de ne pas
payer le prix de cette augmentation.
255 CHARLES G. DARWIN SIR
L'optimiste soutiendra qu'une nouvelle invention quelconque
viendra à nouveau faire reculer la menace malthusienne, et, sans plus
réfléchir, il affirmera qu'il en sera toujours ainsi. Cette argumentation
est pourtant réfutée par l'arithmétique la plus simple, puisqu'il est facile
de calculer que, si la population mondiale continuait à augmenter au
mêm

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