La parole naissante  des femmes dans le mouvement occitan - article ; n°1 ; vol.11, pg 33-44
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Description

Langage et société - Année 1980 - Volume 11 - Numéro 1 - Pages 33-44
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 14
Langue Français

Extrait

Ulrike Brummert
" La parole naissante " des femmes dans le mouvement occitan
In: Langage et société, n°11, 1980. Mars 1980. pp. 33-44.
Citer ce document / Cite this document :
Brummert Ulrike. " La parole naissante " des femmes dans le mouvement occitan. In: Langage et société, n°11, 1980. Mars
1980. pp. 33-44.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lsoc_0181-4095_1980_num_11_1_1238PAROLE NAISSANTE" DES FEMMES "LA
DANS LE MOUVEMENT OCCITAN
Ulrike BRUMMERT
UNIVERSITÉ DE LIMOGES
Les analyses sur les mouvements minoritaires deviennent nom
breuses, on pourrait presque dire qu'elles sont à la mode, mais jusqu'à
nos jours, dans l'ensemble, on s'est contenté de faire des recherches sur
l'ensemble d'une minorité sous des aspects politiques, sociologiques et
linguistiques. Donc grosso modo, on a considéré chacune de ces minorités
comme un bloc monolithique. Mais que se passe-t-il à l'intérieur du mou
vement, notamment du point de vue des sexes.
Dans cette étude je m'intéresse particulièrement aux attitudes
langagières de la femme occitane. Quel est son rapport à l'occitan, la
langue occitane, et qu'apprend-on au-delà sur sa condition à l'intérieur
de la société occitane.
Plusieurs indices me permettent de parler d'une 'parole naissante1
des femmes occitanes et occitanistes; comme il s'agit de premiers pas sur
un terrain nouveau, je me contente de présenter certains phénomènes qui
me semblent être significatifs pour l'ensemble du mouvement des femmes
en Occitanie. Je ne prétends pas non plus présenter quelque chose d'accom
pli, mais en revanche, je tente d'animer un débat en reprenant certains
facteurs d'un mouvement de femmes en train de prendre forme, un mouvement
qui s'interroge sur certains aspects de la civilisation occitane. A partir - - 34
de ces questions, une nouvelle orientation du mouvement occitan est possi
ble; par son dynamisme, le courant féministe devra influencer les Occitans
dans leur recherche d'identité.
Je prends ici comme exemple Femnas d'bc, un groupe de femmes,
vivant en Occitanie (la région toulousaine), c'est-à-dire que mon intérêt
se porte sur une initiative qui est "née au Pays", par conséquent, je laisse
de côté des associations comme le groupe femmes Forabanda à Paris, où il
faut se demander dans quelle mesure l'exil, c'est-à-dire dans quelle mesure
le fait de vivre dans l'émigration, donc dans une situation marginale en
général, -et dans ce cas précis une émigration dans un pays non-méditerra
néen- a joué un rôle important:
Les problèmes des femmes sont planétaires bien sûr, mais certains
de ces sont plus aigus, plus difficilement cernables
en milieu méditerranéen du fait du masclum (machisme). D'où une
démarche féministe particulière. 1
Pour vous présenter certains points de vue de Femnas d'bc (Foc ),
je me permets de prendre comme point de repère L 'Oprimit Opressor, Defensa
e iliustracion de! talher de las femnas dins l'Escbla d'estiu 1978 , commu
niqué qui reprend un certain nombre d'idées centrales de Fbc. Ce papier me
semble être d'autant plus significatif qu'à ma connaissance cette initiative
fut la première dans le cadre d'une école occitane d'été.
Dans cet atelier, seules les femmes étaient admises: "..., lo
volian dire en defora dels ornes." -une décision bien compréhensible, si
on prend en considération la condition féminine en général, qui se voit
néanmoins dotée d'une interprétation supplémentaire dans le contexte du
mouvement occitan, particulièrement révélatrice: "... Perque fariam de
segregacion?" 5 était la réaction de certains hommes qui semblent au pre
mier abord réagir en tant qu'occitanistes; ils refusent, eux, tout débat
qui risque de montrer qu'il existe des divergences à l'intérieur du mou
vement, et ils partent d'un consensus vague, "1 'occitanité". Ceci indique
un refus latent de- discussion, une attitude qui consiste à refouler tout ce
qui est susceptible d'évoquer des différences à l'intérieur du mouvement.
On peut donc constater l'existence d'un courant qui se contente de parler - - 35
d'une certaine spécificité occitane sans pour autant la doter d'un contenu.
Si cette voie est poursuivie et si ces conceptions deviennent majoritaires,
le mouvement occitan s'expose au péril d'un appauvrissement sans pareil.
A un autre niveau, cette prise de parole met en question le rôle
dominateur des hommes dans le mouvement aussi bien que dans la société occi
tane en général; car le mouvement s'est calqué dans ses structures sur le
modèle de la famille traditionnelle, le militant occitan représente l'auto
rité du pater familias. Cette domination se manifeste par le fait que le
domaine de l'expresion verbale est réservé aux hommes; la parole devient
ainsi un instrument de l'oppression mâle, comme elle peut être un instrument
d'oppression de classes sociales. Le mouvement occitan, bien qu'il se veuille
libérateur est en train de reproduire à l'égard des femmes les mêmes mécanis
mes de domination que ceux qu'il subit de la part de l'Etat français. Il
faut se poser la question de savoir si le mouvement occitan est capable
d'assumer son rôle d'émancipateur. Est-ce par exemple la phrase suivante
de Robert Lafont inclut le problème des femmes?
La lutte difficile et exigeante pour une Occitanie autonome, -,
mais démocratique et libératrice, traverse le mouvement occitan .
Pour mieux comprendre l'attitude langagière des femmes occitanes,
il faut surtout étudier l'emploi de l'occitan au cours de notre siècle. Les
changements de la société rurale occitane ont surtout transformé le mode de
vie des femmes, Francesa Joanna aborde ce problème dans le chapitre intitulé o
d' ornes? : La lenga, un afar
Chantai, una colega de! grop Forabanda nos di si à : J'ai eu au dé
part beaucoup de difficulté à m 'exprimer dans cette langue (l'oc
citan). Je me suis demandée pourquoi. Dans ma famille, mon père
parlait le patois en particulier avec l'un de mes oncles. Ma mère
le comprenait, mais refusait de le parler sauf pour dire des 'cho
ses qu'elle ne voulait pas que nous sachions. Est-ce cela ou
est-ce le fait que seuls les hommes parlaient le 'patois" et que
par conséquent c'était la langue des hommes (souligné par U.B.).
Ce témoignage de valeur indicative est confirmé par une remarque
formulée par Gérard Monédiaire:
... Cette volonté de ne plus vivre cette vie qui était, je crois
qu'il ne faut pas se raconter des histoires sur la réalité de la - 36
vie dans les campagnes de cette époque-là, une vie extrêmement
dure, extrêmement pénible. Cette volonté se marquait, si vous
voulez, au niveau de l'anecdote, mais ce n'est peut-être pas
qu'une anecdote, par le fait par exemple que dans les familles
paysannes on a cessé entre les guerres d'apprendre le 'patois',
ce que l'on désignait comme le patois, donc la langue occitane,
aux filles. Parce que, à la rigueur, il était utile aux fils de
connaître le 'patois", parce que c'était la langue du travail...
pour discuter avec les autres paysans, il fallait utiliser la
langue du travail, mais, il était en même temps tout à fait r
ecommandé que les filles, elles, ne la parlent pas, parce que
c'était en quelque sortegmarquer la volonté qu'elles ne se ma
rient pas avec un paysan .
Avec l'apprentissage ou le non-apprentissage de l'occitan, je
touche un ensemble qui mériterait des analyses plus détaillées et appro
fondies, mais les témoignages évoqués ci-dessus et d'autres que j'ai pu
recueillir me permettent quand même de remarquer que dans l'ensemble de
l'Occitanie les femmes sont davantage 'coupées' de la langue occitane,
fait qui se manifeste aujourd'hui toujours dans les difficultés qu'ont les
militantes occitanes à s'exprimer dans cette langue. Des remarques intéres
santes ont été faites par des enseignants d'occitan dans l'Académie de
Limoges: la demande de cours d'occitan est plus importante de la part des
filles, bien que les garçons sachent mieux la langue, ils ne s'intér

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