La tradition comique et son renouveau dans les historiettes de Jacques le fataliste et son maître - article ; n°1 ; vol.15, pg 41-53
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Recherches sur Diderot et sur l'Encyclopédie - Année 1993 - Volume 15 - Numéro 1 - Pages 41-53
Jane Rush: The Comic Tradition and its Renewal in the stories of Jacques le fataliste.
The aim of this study is to examine the importance of the mediæval tradition as it appears in the stories contained in Jacques le fataliste et son maître and to study it in the context of a narrative which is perpetually undermining itself, as can be seen in the dominant image of the great scroll. Several examples are given of the stereotyped characters who appear in the stories contained in the work, as in their mediæval predecessors, and particularly of the theme of sexual transgression which undermines the smooth functioning of social institutions. The way in which the content of the stories subverts by means of parody is also reflected in the dual nature of the characters and in the narrative form. We see the importance of the oral style of narration, which enables Diderot to subvert literary conventions. The author's originality consists in using the mediæval story to produce a modern work using a modern form of the comic which questions the very nature of the written text and its convention.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 52
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jane Rush
La tradition comique et son renouveau dans les historiettes de
Jacques le fataliste et son maître
In: Recherches sur Diderot et sur l'Encyclopédie, numéro 15, 1993. pp. 41-53.
Abstract
Jane Rush: The Comic Tradition and its Renewal in the stories of Jacques le fataliste.
The aim of this study is to examine the importance of the mediæval tradition as it appears in the stories contained in Jacques le
fataliste et son maître and to study it in the context of a narrative which is perpetually undermining itself, as can be seen in the
dominant image of the great scroll. Several examples are given of the stereotyped characters who appear in the stories contained
in the work, as in their mediæval predecessors, and particularly of the theme of sexual transgression which undermines the
smooth functioning of social institutions. The way in which the content of the stories subverts by means of parody is also reflected
in the dual nature of the characters and in the narrative form. We see the importance of the oral style of narration, which enables
Diderot to subvert literary conventions. The author's originality consists in using the mediæval story to produce a modern work
using a modern form of the comic which questions the very nature of the written text and its convention.
Citer ce document / Cite this document :
Rush Jane. La tradition comique et son renouveau dans les historiettes de Jacques le fataliste et son maître. In: Recherches sur
Diderot et sur l'Encyclopédie, numéro 15, 1993. pp. 41-53.
doi : 10.3406/rde.1993.1224
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rde_0769-0886_1993_num_15_1_1224Jane RUSH
La tradition comique
et son renouveau
dans les historiettes de
Jacques le fataliste et son maître
L'image privilégiée qui traverse Jacques le fataliste et son maître est
celle du grand rouleau qui offre, par son caractère encyclopédique,
un point de départ particulièrement fécond pour la compréhension de
cette œuvre de maturité. Symbolisant le vaste texte de la nature, le
grand rouleau englobe également l'ensemble des productions littéraires
passées, présentes et à venir. Comme le remarque Jacques, «tout a été
écrit à la fois » ' . Aussi les formes décelées à travers le texte représentent-
elles une version parodique de l'histoire évolutive de la narration : les
formes médiévales du fabliau et de la nouvelle, certains éléments de la
nouvelle psychologique de la Renaissance et même des aspects du
roman picaresque s'inscrivent pêle-mêle dans le texte et dénotent
l'envergure de l'entreprise diderotienne.
L'importance des formes médiévales dans les chaînons de cette
gourmette narrative ne doit pas être sous-estimée. La coloration médiév
ale de Jacques le fataliste et son maître a déjà été relevée par Jacques
Proust. Ce dernier nota que le mémoire lu par le comte de Caylus en
1746 à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres ainsi que la parution
successive de deux éditions de fabliaux provoquèrent un renouveau
d'intérêt pour le genre2. D'autre part, l'accueil favorable que reçut
l'édition de Le Grand d'Aussy dans la Correspondance littéraire du mois
1. Denis Diderot, Jacques le fataliste et son maître, édition critique et annotée par
Jacques Proust dans Œuvres complètes, DPV, XXIII, 28. Toutes les autres citations de
ce texte seront tirées de cette édition.
2. Jacques Proust, «Introduction», DPV, XXIII, 10.
Recherches sur Diderot et sur Y Encyclopédie, 15, octobre 1993 42 JANE RUSH
d'avril 1780 se produisit au moment même où Diderot y insérait l'avant-
dernière livraison de Jacques (ibid.). L'esprit comique du fabliau s'était
déjà manifesté chez Diderot. La composition des Bijoux indiscrets,
inspirés du fabliau intitulé «le chevalier qui fit parler les *** et les ***,
consistait à «faire parler sans inhibition les parties les plus intimes du
beau sexe dans certaines circonstances précises»3. L'emploi limité et
répétitif de ce procédé dans les Bijoux indiscrets s'éclipsera toutefois
devant l'ampleur et la variété des historiettes de Jacques le fataliste et
son maître.
Celles-ci constituent un apport essentiel dans l'élaboration d'une
esthétique du comique chez Diderot. L'auteur déploie, de façon exemp
laire sur la scène narrative du texte, une suite de vignettes, issues
d'une tradition comique, qui, tout en ajoutant au plaisir du texte, font
œuvre de démonstration : le lecteur assiste à la fois à la dissolution
d'une comique et à l'apparition d'un nouvel ordre comique.
Ainsi, sous l'égide du grand rouleau se dégage la juxtaposition paradoxale
de deux visions comiques, l'une traditionnelle, l'autre moderne. Comme
Jacques est inconcevable sans son maître, le comique diderotien,
marqué du signe de la modernité, doit nécessairement être apprécié
par rapport à son passé. Ce paradoxe esthétique est au centre de l'univers
diderotien. L'objet de cette étude sera donc d'examiner, à travers les
historiettes, ce passé comique si valorisé dans le texte et de voir son
influence dans le contexte plus vaste d'une narration qui se remet sans
cesse en question.
Avant d'examiner esthétiquement la vision comique qui émane de
ces diverses anecdotes, quelques considérations théoriques méritent
d'être soulevées. Du point de vue terminologique, il sera question de
«forme» médiévale, car toute distinction générique entre le fabliau et
la nouvelle médiévale dans le texte diderotien demeure brouillée et
arbitraire. L'optique de Hans Robert Jauss sur la notion de genre
s'avère pertinente, puisqu'il transforme les données du problème,
concevant le genre non plus comme concept substantialiste mais comme
concept historique de continuité. «L'historicité d'un genre littéraire»,
dit-il, «se manifeste dans le processus de création de la structure, ses
variations, son élargissement et les rectifications qui lui sont apportées»4.
Aussi serait-il plus exact de parler de genres littéraires «non comme
gênera (classes) dans un sens logique, mais comme groupes ou familles
historiques5 ». Jauss poursuit son argument en soutenant que l'intégration
3. Otis Fellows, Diderot, Boston, Twayne Publishers, 1977, p. 44.
4. Hans Robert Jauss, «Littérature médiévale et théorie des genres», Poétique,
vol. 1, 1970, p. 86.
5. Jauss, p. 82. LES HISTORIETTES DE JACQUES LE FATALISTE ET SON MAÎTRE 43
d'un groupe de genres simples, déjà existants, dans un principe d'orga
nisation supérieure crée, à partir de ces modifications structurelles, la
forme d'un genre nouveau. Jacques le fataliste, à travers ses innombrables
historiettes, propose une telle lecture générique. Il est possible de voir
la forme des historiettes comme des transformations historiques de
genres plus anciens.
Les propos de Jauss complètent l'analyse, structurelle de Paul
Zumthor qui voit une corrélation entre la nouvelle et le fabliau. Dans
son Essai de poétique médiévale, Zumthor insiste sur les affinités des
deux genres et incorpore le fabliau dans la «forme» de la nouvelle.
Selon ce dernier, « cette structure (de la nouvelle) se manifeste généra
lement en ceci que l'aboutissement de l'action constitue une «pointe»,
une cause finale par laquelle est produit et en vertu de laquelle s'organise
ce qui la précède et l'amène »6. Les remarques de Jauss sur l'impossibilité
de figer les notions de genre ainsi que les précisions d'ordre formel
indiquées par Zumthor peuvent être appréciées dans le contexte de
Jacques le fataliste où l'élargissement et la fluidité des concepts de genre
et de forme permettent d'intégrer une variété d'historiettes dans le
cadre de cette étude.
Un premier survol des historiettes offre une interprétation caricaturale
de l'espèce humaine. Les personnages qui déambulent à travers les
pages diderotiennes, sont, pour la plupart, des types qui rappellent
l'aspect conventionnel et stéréotypé de leurs antécédents médiévaux.
Pareillement à ces derniers, Diderot présente une multitude de person
nages dont la psychologie inexistante, ou du moins, rudimentaire, se
résume à dramatiser les sept p

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