Le mythe du marché - article ; n°1 ; vol.139, pg 3-12
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Actes de la recherche en sciences sociales - Année 2001 - Volume 139 - Numéro 1 - Pages 3-12
Le mythe du marché Beaucoup prétendent que l'efficacité des marchés dépend de l'absence d'intervention étatique. Deux exemples fameux de transformation des marchés sont ici considérés dans le cadre des États-Unis : l'émergence de la « valeur actionnaire » comme conception du contrôle des entreprises et la création de la Silicon Valley. Il sera démontré qu'aucun de ces deux phénomènes ne peut être appréhendé hors du contexte socio-politique qui les a fait naître. Le gouvernement américain facilita le mouvement de fusions des années 1980, qui mena au développement de la «valeur actionnaire» comme conception de contrôle, en suspendant les lois antitrust et en réduisant substantiellement l'impôt sur les sociétés. Pour ce qui est de la Silicon Valley, l'État finança la recherche et la formation des ingénieurs, et se fit le principal acheteur de nombreuses innovations technologiques à l'époque de leur mise sur le marché. Il participa également à la création d'Internet et finança la recherche universitaire qui permit le développement de nombreux programmes informatiques nécessaires au fonctionnement d'Internet. Ainsi, l'État et les marchés sont intimement liés. Les entrepreneurs jouent un rôle, bien sûr, mais ils dépendent de l'État qui crée les conditions par lesquelles l'exploitation profitable d'un produit donné devient possible.
Myths of the Market It is often argued that markets produce efficient outcomes only if governments and regulators stay out of trying to affect market outcomes. I consider two paradigmatic cases of supposed market innovations in the US : the rise of the shareholder value conception of the firm and the creation of Silicon Valley. I show that neither of these market phenomena can be understood outside of the social and political context that generated them. The US government aided the 1980s merger movement that produced the « shareholder value » conception of firm by suspending the antitrust laws and providing a large tax cut to firms that allowed them to engage in mergers. In the case of Silicon Valley, the government underwrote research, the training of engineers, and was the main consumer for many innovative products at their origin. The government helped create the internet and funded the research of engineers that led to many of the programming breakthroughs that made the internet possible. States and markets are inextricably linked. Entrepreneurs are important, but they rely heavily on states to create the conditions whereby the profitable exploitation of a product is possible.
El mito del mercado Son muchos los que pretenden que la eficacia de los mer- cados dépende de la ausencia de intervención estatal. En este articulo se examinan dos conocidos ejemplos de trans- formación de los mercados en los Estados Unidos : por un lado, la emergencia del «valor accionista» como idea del control de las empresas y, por el otro, la creación de Silicon Valley. Se demostrará que no es posible aprehender ninguno de estos fenómenos fuera del contexto sociopoli- tico que los originó. El gobierno estadounidense facilité el movimiento de fusiones de la década de 1980, que llevé a desarrollar la idea de « valor accionista » como instrumento de control, suspendiendo las leyes antitrust y reduciendo considerablemente el impuesto sobre sociedades. En lo que respecta a Silicon Valley, el Estado, que financió la investigation y la capacitación de los ingenieros, se convir- tió en el principal comprador de numerosas innovaciones tecnológicas en el momento de ser comercializadas. Participé, además, de la creación de Internet y financió la investigation universitaria ; esta posibilitó el desarrollo de un gran numero de programas informáticos necesarios para el funcionamiento de Internet. De este modo, existe un estrecho vinculo entre el Estado y los mercados. Naturalmente, los empresarios desempe?an un papel; no obstante, dependen del Estado, que créa las condiciones que permiten obtener beneficios de un producto dado.
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2001
Nombre de lectures 120
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Neil Fligstein
Le mythe du marché
In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 139, septembre 2001. pp. 3-12.
Citer ce document / Cite this document :
Fligstein Neil. Le mythe du marché. In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 139, septembre 2001. pp. 3-12.
doi : 10.3406/arss.2001.3351
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_2001_num_139_1_3351Resumen
El mito del mercado.
Son muchos los que pretenden que la eficacia de los mercados depende de la ausencia de
intervención estatal. En este articulo se examinan dos conocidos ejemplos de transformación de los
mercados en los Estados Unidos : por un lado, la emergencia del «valor accionista» como idea del
control de las empresas y, por el otro, la creación de Silicon Valley. Se demostrará que no es posible
aprehender ninguno de estos fenómenos fuera del contexto sociopolitico que los originó. El gobierno
estadounidense facilité el movimiento de fusiones de la década de 1980, que llevé a desarrollar la idea
de « valor accionista » como instrumento de control, suspendiendo las leyes antitrust y reduciendo
considerablemente el impuesto sobre sociedades. En lo que respecta a Silicon Valley, el Estado, que
financió la investigación y la capacitación de los ingenieros, se convirtió en el principal comprador de
numerosas innovaciones tecnológicas en el momento de ser comercializadas. Participé, además, de la
creación de Internet y financió la investigación universitaria ; esta posibilitó el desarrollo de un gran
numero de programas informáticos necesarios para el funcionamiento de Internet. De este modo, existe
un estrecho vinculo entre el Estado y los mercados. Naturalmente, los empresarios desempeñan un
papel; no obstante, dependen del Estado, que crea las condiciones que permiten obtener beneficios de
un producto dado.
Abstract
Myths of the Market.
It is often argued that markets produce efficient outcomes only if governments and regulators stay out of
trying to affect market outcomes. I consider two paradigmatic cases of supposed market innovations in
the US : the rise of the shareholder value conception of the firm and the creation of Silicon Valley. I
show that neither of these market phenomena can be understood outside of the social and political
context that generated them. The US government aided the 1980s merger movement that produced the
« shareholder value » conception of firm by suspending the antitrust laws and providing a large tax cut
to firms that allowed them to engage in mergers. In the case of Silicon Valley, the government
underwrote research, the training of engineers, and was the main consumer for many innovative
products at their origin. The government helped create the internet and funded the research of
engineers that led to many of the programming breakthroughs that made the internet possible. States
and markets are inextricably linked. Entrepreneurs are important, but they rely heavily on states to
create the conditions whereby the profitable exploitation of a product is possible.
Résumé
Le mythe du marché.
Beaucoup prétendent que l'efficacité des marchés dépend de l'absence d'intervention étatique. Deux
exemples fameux de transformation des marchés sont ici considérés dans le cadre des États-Unis :
l'émergence de la « valeur actionnaire » comme conception du contrôle des entreprises et la création
de la Silicon Valley. Il sera démontré qu'aucun de ces deux phénomènes ne peut être appréhendé hors
du contexte socio-politique qui les a fait naître. Le gouvernement américain facilita le mouvement de
fusions des années 1980, qui mena au développement de la «valeur actionnaire» comme conception
de contrôle, en suspendant les lois antitrust et en réduisant substantiellement l'impôt sur les sociétés.
Pour ce qui est de la Silicon Valley, l'État finança la recherche et la formation des ingénieurs, et se fit le
principal acheteur de nombreuses innovations technologiques à l'époque de leur mise sur le marché. Il
participa également à la création d'Internet et finança la recherche universitaire qui permit le
développement de nombreux programmes informatiques nécessaires au fonctionnement d'Internet.
Ainsi, l'État et les marchés sont intimement liés. Les entrepreneurs jouent un rôle, bien sûr, mais ils
dépendent de l'État qui crée les conditions par lesquelles l'exploitation profitable d'un produit donné
devient possible.:
Neil Fligstein
LE MYTHE
DU MARCHÉ
;. artout de par le monde, on présente aujourd'hui l'économie des États-
Unis comme un modèle de « libre entreprise » où la compétition est
dynamique, les entreprises efficaces et les gouvernements des États et
de l'Union aussi discrets que possible. Ces derniers se tiendraient à l'écart
du «marché», ne favoriseraient pas d'entreprises, d'industries ou de tech
nologies en particulier et, lorsqu'ils interviendraient, ce serait seulement en
vue de garantir la pleine et entière liberté de concurrence. La réalité n'a pas
grand-chose à voir avec cette vision, puisque l'État américain est, depuis
l'origine, profondément impliqué dans le fonctionnement de l'économie
nationale, et ce d'une façon qui n'est guère étrangère aux Européens1. La
création et le développement de nouveaux marchés sont en effet rarement
laissés aux seuls entrepreneurs ; ceux-ci bénéficient de l'appui continu d'un
grand nombre d'institutions, tant privées que publiques. L'objet de cet
article n'est pas de nier le rôle déterminant de l'entrepreneuriat et de la
concurrence dans l'émergence de nouvelles industries, mais d'affiner notre
compréhension en montrant que ces dernières ne pourraient se produire et
se diffuser sans le soutien de structures sociales stables, et plus particulièr
ement sans l'action continue et multiforme de l'État fédéral.
Deux facteurs essentiels conditionnent en effet les actions stratégiques des
entreprises le comportement de leurs concurrents et la capacité des États à 1 -Je l'ai montré dans le cas de l'évolu définir ce qui constitue un comportement acceptable du point de vue de la tion sur la longue durée du mode de
concurrence, la principale préoccupation des dirigeants et des propriétaires contrôle des cent plus grandes entre
prises américaines dans mon livre The des firmes étant d'assurer la stabilité de leurs interactions avec les princiTransformation oj Corporate Control, paux rivaux. Si l'entreprise réussit à établir un cadre d'interaction durable, Cambridge, Harvard University Press,
1990. et que celui-ci est légal et profitable, elle s'efforcera de perpétuer ce cadre et
2 - Par exemple, le marché des boissons l'ensemble des stratégies associées. Les dirigeants et les propriétaires de gazeuses aux États-Unis est clairement toutes les firmes impliquées dans un marché donné développent ainsi des dominé par deux firmes, Pepsi-Cola et
Coca-Cola, dont la stratégie concurrent attentes précises par rapport au comportement de chacun, ce qui renforce et
ielle commune est de se disputer des pérennise leur position dans le secteur2. parts de marché par le biais de la public
Le gouvernement américain façonne le fonctionnement des marchés de trois ité et des offres promotionnelles. Cette
domination partagée et les stratégies façons. Tout d'abord, il élabore et applique un ensemble de lois et de règl
communes qui l'assoient durent depuis ements bureaucratiques concernant la politique fiscale, le capital boursier et quarante ans.
3 - Ainsi, le gouvernement fédéral le passif des entreprises, les rapports salariaux, les brevets et les divers
n'impose pas de taxe de vente sur les droits de propriété (matérielle, commerciale, intellectuelle, etc.), ainsi que la achats faits par l'intermédiaire de l'Inter politique de concurrence. À la demande d'acteurs particulièrement influents net. Cette politique est censée permettre
à l'Internet de se développer plus pleine dans une industrie, l'État interviendra éventuellement afin de favoriser ou
ment comme moyen d'échange. de sauver certaines entreprises3. Ensuite, l'État peut acheter en vastes quantL'octroi d'une réduction de prix de 5 à
ités (et, partant, favoriser) certains produits ou financer la recherche et le 8 % par rapport aux entreprises tradi
tionnelles, dites « de briques et de mort développement de certains procédés et marchandises, et, par conséquent,

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