Le problème de l imagination chez Bergson - rire,  rêve et mythe -
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Le problème de l'imagination chez Bergson - rire, rêve et mythe -

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Langue Français

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Le problème de l'imagination chez Bergson
- rire, rêve et mythe -
TAKI Ichiro
Bergson pense que.1' «imagination» n'est qu'un mot, en ce sens que cette notion
subdivise son objet improprement ou artificiellement pour la commodité du
langage. En rejetant cette notion, il emploie, d'autre part, l' «image» pour
désigner l'expérience pure qui n'est ni subjective ni objective, d'où se divisent à la
fois le caractère subjectif de la conscience et son caractère objectif. Le problème
de l'imagination doit donc être considéré en termes non pas d'imagination comme
mot mais d'image comme expérience.
Je prends ici comme topique d'imagination trois thèmes où se crée un jeu entre
l'intuition et les images: rire, rêve et mythe. Sans doute trouve-t-on dans ces trois
thèmes des problèmes relatifs à l'imagination reproductrice et non pas a
l'imagination créatrice, mais, selon moi, il y a des éléments de création dans le
passage de l'image à l'intuition.
a. Rire
--------
Dans Le Rire (1900), étude sur l'association des images, sur le mouvement par
lequel l'apparence comique se propage de l'une à l'autre, Bergson soutient qu'il y
a dans la communication de la fantaisie comique une logique de l'imagination.
D'après Bergson, cette logique, qui s'oppose à la logique de la raison et ressemble
à celle du rêve, se réduit à un mécanisme monté en nous par une longue habitude
de la vie sociale.
Quand on compare cette théorie avec celle de S. T. Coleridge, qui distingue deux
espèces d'imagination -- l'une qui combine et l'autre qui crée -- on peut dire
que la fantaisie comique telle qu'elle est conçue par Bergson combine et crée à la
fois. C'est-à-dire que, vue de l'extérieur, elle combine automatiquement des im­
ages anciennes, tandis que, vue de l'intérieur, elle crée une image nouvelle par une
énergie vivante.
D'après D. Janicaud, le concept d'habitude de Bergson est différent de celui de F.
Ravaisson ; l'habitude n'est que fossilisation du spirituel chez le premier, alors
qu'elle est au contraire spiritualisation de l'inerte chez le second. Cependant, dans
sa tentative d'éclaircissement du mécanisme du rire, Bergson découvre aussi, a
travers l'habitude, moteur de ce mécanisme, le passage de l'inerte au spirituel.
b. Rêve
Dans "Le Rêve" (1901), Bergson prétend que le rêve, n'étant qu'une résurrection
du passé, ne crée rien. Selon lui, le rêve a le même mécanisme que la perception;
l'image-souvenir du passé s'actualise dans la sensation présente. Mais ce mé-
-39-canisme travaille différemment dans les deux cas. Le rêve est une sorte de relâ­
chement, un jeu des images sans porter «attention à la vie» , tandis que la percep­
tion est une tension, effort pour «la précision de l'ajustement» .
Mais d'autre part, Bergson soutient que le moi fondamental ou substratum de
notre état normal, qui n'est rien d'autre que la durée réelle, est donné ou plutôt
suggéré dans l'image du rêve. Donc, la conscience immédiate dans le rêve, où l'on
ne distingue guère le sujet de l'objet, ressemble à l'intuition bergsonienne, sauf que
le premier est donné sous la forme d'une image, alors que la seconde se situe au­
dessus de l'image.
~.: __ M.r~~~
G. Sorel est influencé beaucoup par la pensée de Bergson, surtout par sa théorie
de l'image. Ce qu'il a trouvé dans le bergsonisme est, selon ce philosophe de
l'intuition lui-même, «l'idée d'un mythe créateur». Je montre ici qu'il y a aussi
la créativité dans la fantaisie mythologique discutée dans le 2' chapitre des Deux
sources (1932) de Bergson.
Il appelle ici «fabulation» ou «fiction» au lieu d'imagination l'acte qui fait
surgir les représentations fantasmatiques. Selon lui, de cette fonction fabulatrice,
qui consiste à faire des fables ou à créer des personnages fictifs, relèvent le roman,
le drame, la mythologie avec tout ce qui l'a précédée.
Suscitée par l'instinct au sein même de l'intelligence, cette forme d'imagination
qu'est la fonction fabulatrice peut être interprétée comme une activité où l'instinct
et l'intelligence se complètent. D'après moi, Bergson pense que cette réciprocité se
trouve à l'origine de la religion statique sous la forme d'une fabulation, ré action
défensive de la nature, de même d'ailleurs qu'elle est à la base de l'obligation mo­
rale sous la forme d'une habitude, c'est à dire d'une imitation de l'instinct par
l'intelligence. En tant que l'une des tendances découlant de la réalité de la vie, la
fonction fabulatrice est égale à l'instinct et à l'intelligence, mais elle est différente
de la première dans sa virtualité, et de la seconde dans sa direction. Car elle est
tournée comme l'instinct vers la vie, non pas comme l'intelligence vers la matière
inerte, et elle contient une logique de l'absurde qui favorise la prolifération du
déraisonnable.
Bergson trouve ces représentations imaginaires, qui contrecarrent le travail
intellectuel, dans la conception primitive du hasard, la magie, la croyance aux
esprits, le culte des animaux ou le totémisme et la croyance aux dieux. Dans tous
les cas, la fonction fabulatrice est considérée principalement comme répondant à
une exigence fondamentale de la vie.
La fonction fabulatrice ressemble ainsi à l'intuition, comme « une frange
d'instinct autour de l'intelligence» qui puisse travailler en les faisant coopérer
l'une avec l'autre. Je pense qu'il y a cependant une différence de nature entre la
fonction fabulatrice et l'intuition mystique. La première, dont la raison d'être est
la religion statique et extérieure, donnée par la nature, est infra-intellectuelle,
alors que la seconde, qui est elle-même, selon moi, la raison d'être de la religion
-40-dynamique et intérieure, apportée par le génie humain, est au contraire supra­
intellectuelle. Il me semble que, entre l'infra-intellectuel et le supra-intellectuel, le
clos et l'ouvert, il y a, d'un côté, une discontinuité vue de dehors, de l'autre
côté, le chemin continu vu de dedans. C'est sur ce chemin que je voudrais déceler
la créativité dans la fantaisie mythologique, comme dans l'image du rêve et dans
la fantaisie comique.
-41-

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