Le rôle de la sociologie dans le positivisme (suite et fin) - article ; n°39 ; vol.10, pg 245-252
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Revue néo-scolastique - Année 1903 - Volume 10 - Numéro 39 - Pages 245-252
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Publié le 01 janvier 1903
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Langue Français

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Maurice Defourny
Le rôle de la sociologie dans le positivisme (suite et fin)
In: Revue néo-scolastique. 10° année, N°39, 1903. pp. 245-252.
Citer ce document / Cite this document :
Defourny Maurice. Le rôle de la sociologie dans le positivisme (suite et fin). In: Revue néo-scolastique. 10° année, N°39, 1903.
pp. 245-252.
doi : 10.3406/phlou.1903.1799
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-5541_1903_num_10_39_1799X.
LE ROLE DE LA SOCIOLOGIE DAXS LE POSITIVISME.
(Suite et fin. *)
III.
La sociologie de Comte est tout d'abord une théorie de
la méthode J). Comme cette théorie conclut n la disparition
des procédés theologico-metaphvsiques et a leur remplace
ment par l'observation exclusive des faits, elle est un
positivisme. Progressivement élargie, cette sociologie trace
non plus seulement le développement de l'esprit, mais
encore celui des sentiments, des activités et de toutes les
manifestations de la vie individuelle et collective qui se
rattachent a cette triple evolution Prolongeant idéalement
par les deux bouts la suite des faits historiques, elle
remonte a nos plus lointaines origines et soulève le voile
de nos destinées. Elle est de ce chef — dans la pensée
de son auteur — une philosophie. Et cette philosophie
est un sociologisme, a la fois parce qu'elle se sert de la
méthode sociologique et qu'elle identifie les plus hautes
realites avec les faits sociaux. Enfin comme la sociologie,
après avoir résolu le problème de nos destinées, impose
*) V la Revue Neo-Scolastique, novembre 1902 et mai 190-S
l) Voici un nouveau supplement a. la bibliographie sur Aug Comte
1902 Molenaar, Die Geistesentwickelung der Menschheit nach Aug Comte
Leipzig, Uhhg — G Milhaud, Le positivisme et le progrès de l'esprit Etudes
'critiques sur Aug Comte Paris, Alcan — F Brunetiere, La métaphysique
positiviste (Revue des Deux Mondes, 1er octobre) — Michel Salomon, L'utili-
sation du positivisme (Revue de philosophie, octobre).
1903 J Brunetiere, La religion comme sociologie (Revue des Deux-Mondes,
15 février). M. DEFOURNY £46
a la pensée, aux affections et aux actions, a l'homme tout
entier, une discipline sous l'égide de laquelle il puisse
développer son être — sans contradiction avec lui-même,
ni heurt avec le développement d'autrui, — dans l'unique
sens de sa destinée, elle devient une religion. Car le propre
d'une religion est d'encadrer d'une manière complète l'acti
vité privée et sociale par une discipline qui fasse converger
toutes les manifestations humaines vers le but de la vie.
Et comme le but de la vie ne peut être ni au-dessus, ni
au-dessous de l'homme social — attendu que celui-ci est
l'être supreme — cette religion sera la religion de la
société ou la sociolâtrie.
En se développant la sociologie, d'une théorie de la
méthode devient d'abord une philosophie et puis une reli
gion. Mais son contenu comme philosophie et comme
religion est prédétermine par ce qu'elle est comme théorie
de la méthode : elle rejette la théologie et la métaphysique ;
le spiritualisme ne peut avoir de place dans son elaboration
philosophico-religieuse. Mais il suffit que cette exigence
soit respectée pour que ses transformations successives ne
recèlent ni illogisme, ni contradiction. Il n'y a aucun
dualisme dans l'œuvre de Comte.
Que vaut la prétention de la sociologie d'être a la fois
une méthode, une philosophie et une religion £ Une méthode
absolument générale doit être vide : elle ne peut impliquer
en elle-même la solution des questions auxquelles on devra
l'appliquer. Elle doit être indifférente et laisser subsister
la possibilité de toutes les conclusions : autrement elle est
un instrument vicieux, inapte a l'exécution de certaines
tâches peut-être nécessaires, elle cesse d'être une méthode
pour devenir une doctrine. Effectivement la loi des trois
états est bien une Mais c'est une doctrine erronée.
Elle oppose l'observation positive, la métaphysique et la
théologie et se demande laquelle sortira victorieuse de la
lutte. Question mal posée ! Ce qui s'oppose dans ces trois
méthodes, ce sont leurs extensions arbitraires. Ramenées LE RÔLE DE LA SOCIOLOGIE DANS LE POSITIVISME 247
dans leur lit naturel, elles se superposent au contraire :
l'une mené a l'autre. La plus élevée commence ou l'inf
érieure finit. Aucun conflit n'est possible entre elles, parce
que chacune vise un objet different. La prétention de
trancher les questions de faits par des spéculations theo-
logico-métaphysiques est énorme ei inadmissible ; mais
celle de trancher les questions métaphysiques par des
observations de faits est pareillement contradictoire. Y
a-t-il un au-delà l L'observation positive n'a rien a voir
dans cette question, parce qu'elle poite sur un objet qui,
par hypothèse, est soustrait a ses prises. Si le postulat
de l'opposition et de la lutte des trois méthodes est arbi
traire et erroné, demander a l'histoire d'examiner cette
lutte — qui n'existe pas — et d'en pronostiquer l'issue,
c'est poser une question sans objet. La sociologie est
incompétente pour trancher le problème de la méthode.
Elle l'est encore pour trancher celui de nos destinées.
Le problème de nos destinées est passionnant et tragique
a la fois. S'il n'est pas résolu la vie n'a pas de sens, et
d'après la solution qu'on lui donne le sens de la vie est
tout different. En réalite, on n'entreprend de rechercher
notre origine et notre nature que parce que cette recherche
est la condition d'une solution a la question de notre fin.
Ou allons-nous l Tous les autres problèmes sont suspendus
a celui-là comme des moyens a leur but. A propos d'un
être quelconque, on peut se demander a quoi il tend en
fait dans son développement et a quoi il devrait tendre.
Les deux questions n'en font qu'une, si la force d'-igir de
cet être est identique avec la loi de son activité. Cela n'a
pas lieu pour l'homme. Celui-ci sent intérieurement que la
loi a laquelle il astreint son acte n'est pas nécessairement
celle a il devrait l'astreindre. La question : où
allons-nous l. est équivoque ou plutôt elle est double. Où en fait ? C'est a quoi repond la sociologie.
Examinant le passe de l'humanité, elle prévoit le terme
où elle arrivera, si elle poursuit sa marche sans changer £48 k. DEFOURNY
de direction. Où devrions-nous aller ? C'est à quoi elle
ne peut repondre, parce que la marche de l'humanité n'est
pas nécessairement d'accord avec ce qu'elle devrait être.
Cette deuxième question constitue le problème spécifique
de la philosophie. Est-elle soluble l Nous ne le discutons
pas actuellement ; mais si elle l'est, ce ne peut être par la
méthode sociologique.
Incompétente pour trancher le problème de la méthode
et celui de la philosophie, la sociologie ne peut devenir
une religion parce qu'une religion suppose une philosophie.
En admettant même que la a pour fonction exclu
sive de donner a la vie entière, individuelle et collective,
une discipline rigoureuse assignant son rôle a chaque
pensée, a chaque sentiment, a chaque action, réglant
leurs mutuelles relations, et orientant leur masse vers un
unique but, la sociologie ne pourrait encore être une
religion. Car enfin cette discipline sera une discipline
<- en l'air », si la question de notre destinée vis-a-vis de
laquelle la sociologie est incompétente, n'est pas résolue.
D'ailleurs, s'il est vrai que la religion a pour effet d'engen
drer une discipline de la vie, il est tout aussi vrai qu'elle
n'arrive jamais a ce résultat que par un recours au divin,
au surnaturel, qu'en satisfaisant nos aspirations au mysté
rieux. Cela est vrai a priori, parce que la solution du
problème philosophique sera métaphysique et théologique
ou ne sera pas ; cela est vrai a posteriori, parce qu'éliminer
de la religion le surnaturel c'est la mutiler. Pour appauv
rir le concept de <- religion » au point d'en éliminer le
surnaturel, Comte n'a pas limité son abstraction statique
— ce qui était exigé par la méthode — aux religions
historiques, mais il l'a étendue a celle qu'il avait l'intention
d'instituer. Grâce a cet artifice, le divin a pu lui appara

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