Les bases sensorielles de la connaissance - article ; n°1 ; vol.33, pg 1-14
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Description

L'année psychologique - Année 1932 - Volume 33 - Numéro 1 - Pages 1-14
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1932
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Henri Piéron
I. Les bases sensorielles de la connaissance
In: L'année psychologique. 1932 vol. 33. pp. 1-14.
Citer ce document / Cite this document :
Piéron Henri. I. Les bases sensorielles de la connaissance. In: L'année psychologique. 1932 vol. 33. pp. 1-14.
doi : 10.3406/psy.1932.5139
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1932_num_33_1_5139L'ANNÉE PSYCHOLOGIQUE
TOME XXXIII
MÉMOIRES ORI&INAUX
i
LES BASES SENSORIELLES DE LA CONNAISSANCE
Par Henri Piéron l
Les données des sens constituent la base fondamentale sur
laquelle s'édifie la connaissance humaine. Aussi ne sauràit-on
donner trop d'importance à l'étude précise des phénomènes
sensoriels, étude qui se place à un carrefour où se rencontrent
les sciences physico-chimiques, et les sciences biologiques,
physiologie et psychologie, dans leur étude générale des
organismes et de l'homme, sans oublier les sciences morpholog
iques et pathologiques.
Grâce à un ensemble de recherches convergentes, qui d'ailleurs
trop souvent s'ignorent, il s'est accumulé de nombreuses données
qui permettent déjà de mieux comprendre comment s'éta
blissent les premiers contacts entre l'homme et le monde. Et je
voudrais essayer de dégager les principales leçons que comporte
la riche moisson des faits, en envisageant successivement ce que
nous pouvons connaître du monde par les sens, comment nous
pouvons en assurer des discriminations qualitatives, comment
nous pouvons en réaliser des appréciations quantitatives, com
ment nous pouvons enfin en suivre les variations dans le temps.
1 . Conférence faite au Congrès de V American Association for Advancement
of Science, à l'occasion de l'Exposition (Century of Progrese), Chicago,
le 21 juin 1933.
l'année psychologique, xxxiii. 1 I
A la question : que connaissons-nous par les sens ? il semble
que s'impose une simple réponse énumérative fondée sur un
inventaire de couleurs, d'odeurs, de saveurs, etc. Mais les ingé
nieux procédés d'investigation qui ont, fourni des révélateurs
indirects des processus évoluant dans le monde nous permettent
de confronter, avec les données des appareils des sens dont nous
a doués la nature, celles de ces organes artificiels que sont les
multiples dispositifs enregistreurs utilisés par notre technique.
C'est ainsi que nous pouvons préciser la place des phénomènes
susceptibles d'exercer une stimulation sensorielle, et de ceux
que nos sens ignorent et dont nous n'avons pu prendre connais
sance qu'indirectement en les transformant en des processus
capables de nous impressionner, comme un rayonnement ultra
violet insoupçonné par votre oeil ge révèle, par une fluorescence
induite.
Nous savons que l'organisme, soumis dans certaines condi
tions à des rayonnements, éprouve des sensations (thermiques
ou lumineuses), que des ébranlements mécaniques, chocs ou
ondulations périodiques, engendrent des impressions (tactiles
ou sonores), que certaines actions chimiques se traduisent sous
une forme sensorielle (de saveurs ou d'odeurs). Des forces,
comme la gravitation ou la force centrifuge, les accélérations
positives ou négatives, sont le point de départ d'excitations
nous fournissant une connaissance de ces forces. Des phéno
mènes électriques — passage de courant, ionisation — sont
encore des stimuli efficaces. Le niveau d'agitation moléculaire
se révèle à notre sensibilité thermique.
Mais, dans ces catégories de processus, il existe des limitations
d'efficacité, et par exemple des substances capables d'exercer
des actions chimiques révélatrices, ne se décèlent en solution
aqueuse ni par l'odeur ni par la saveur, ou des rayonnements,
des ondes électro-magnétiques, correspondant à des fréquences
assez élevées ou assez basses, ne se manifestent, ni comme l
umière ni même comme chaleur.
Des forces pouvant exercer des effets considérables, comme
le magnétisme, sont entièrement ignorées par nos sens : entre
les armatures du plus puissant électro-ainiantf, rien ne nous
révèle directement si le champ magnétique déploie qu non ses
millions de gauss. PIÉRON. — BASES SENSORIELLES DE LA CONNAISSANCE É H.
II suffirait évidemment que des particules de fer se groupent
en concrétions intra-cellulaires. forment des otolithes. pour que
la révélation du magnétisme soit rendue possible, comme dans
l'élégante expérience de Kreidl, sur ses crevettes qui, soumises
à l'action d'un aimant placé au-dessus de leurs otocystes anten-
nairea remplis de fine limaille de fer, se retournent dans l'eau
comme s'il y avait eu un renversement de la pesanteur. Mais
la nature n'a jamais réalisé cette expérience.
D'une manière générale, pour qu'il y ait stimulation sensor
ielle, il faut et il suffit que se produise, sous l'influence d'un
phénomène extérieur, une modification cellulaire, du moins
une modification réversible (car les actions léthàles, destruct
rices, ne sont plus des actions sensorielles). Les processus eff
icaces chez l'homme le sont déjà chez les organismes unicellu-
laires, chez les Protozoaires. La spécialisation d'une substance
nerveuse particulièrement labile, excitable, ne crée pas l'exci
tabilité sensorielle ; elle la développe seulement et surtout la
localise — ce qui facilite les réactions spatialement orientées
dans le milieu — ; et les différenciations des appareils des sens,
qui renforcent électivement l'action de certains processus en
protégeant contre les autres, ont une signification d'adaptation
réactionnelle, facilitant le jeu d'un clavier plus nuancé de r
éponses conditionnées par la nature et le lieu de la stimulation ;
mais, en général, les appareils récepteurs ne sont pas des condi
tions indispensables de la réception, comme le montre l'étude
des organismes élémentaires.
Dans deux cas toutefois l'appareil semble comporter un
révélateur comparable à ceux que l'ingéniosité humaine a su
créer : C'est l'otolithe, attiré par la pesanteur, qui va heurter
l'une ou l'autre paroi de sa prison sensible, renseignant par le
choc ou la pression exercée sur la direction de la verticale, oto-
lithe qui n'est pas sécrété chez tous les animaux, car des Crus
tacés Décapodes introduisent des graviers dans la cavité ^oto-
cystique — ce qui a permis à Kreidl, n'offrant aux crevettes
après la mue que de la limaille de fer, de les rendre sensibles
à l'aimant — , et c'est la substance sensibilisatrice des cellules
visuelles décomposée par des radiations de 400 à 800 m[j. en
proportion de leur absorption, comme le pourpre rétinien des
bâtonnets, dont les cônes possèdent certainement à l'état dilué
un équivalent chimiquement très voisin, qui engendre la
lumière.
Mais peut-on dire que, dans l'évolution des organismes il ,
4 MÉMOIRES ORIGINAUX
s'est produit une invention d'un dispositif récepteur, permettant
la connaissance de phénomènes jusque-là inconnus, ce qui
serait singulièrement paradoxal !
En réalité les radiations lumineuses — s' étendant même un
peu plus du côté des courtes longueurs d'onde, sans doute parce
que les radiations ultra-violettes, très vite absorbées, atteignent
plus facilement chez eux la zone excitable — agissent déjà chez
les Protozoaires, qui possèdent dans leur protoplasme des
substances photosensibles. Si les nerfs ne sont pas normalement
excités par la lumière, mais le deviennent lorsqu'on les imprègne
d'un colorant absorbant les rayons lumineux et modifié par eux
(les nerfs amyéliniques, du moins, plus facilement excitables),
c'est sans doute que les substances qui se rencontrent dans le
protoplasme où se trouvent condensées toutes les fonctions
biologiques des organismes unicellulaires se sont portées, en se
concentrant, exclusivement dans certaines des cellules de
l'organisme différencié des Métazoaires les plus évolués, et ne
se trouvent pas dans les fibres nerveuses, ou du moins ne s'y plus à concentration suffisante.
Et des granulations plus denses se déplaçant dans le proto
plasme sous l'influence de la pesanteur, constituent

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