Les dimensions de l expérience piquetera : tensions et cadres communs dans l organisation et la mobilisation des chômeurs en Argentine - article ; n°178 ; vol.45, pg 419-441
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Les dimensions de l'expérience piquetera : tensions et cadres communs dans l'organisation et la mobilisation des chômeurs en Argentine - article ; n°178 ; vol.45, pg 419-441

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Tiers-Monde - Année 2004 - Volume 45 - Numéro 178 - Pages 419-441
Maristella Svampa, Sebastian Pereyra — Profiles of the « piquetera » experience : Tensions and common frameworks within the organisation of the unemployed in Argentina Since 1996, the unemployed who have adopted the name of piqueter os have become a new and particularly perturbing actor on the Argentinean political scene. This article examines the conditions which have brought about the constitu- tion of the unemployed into organisations. The first part analyses the principal currents of the piquetero movement, its different political and ideological matrices, the relationships it establishes with the State and the institutionalisation of social programmes. The second part studies the common elements which constitute the piquetero space. Finally, the article assesses the current difficulties of the movement.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Les dimensions de l'expérience piquetera : tensions et cadres
communs dans l'organisation et la mobilisation des chômeurs en
Argentine
In: Tiers-Monde. 2004, tome 45 n°178. pp. 419-441.
Abstract
Maristella Svampa, Sebastian Pereyra — Profiles of the « piquetera » experience : Tensions and common frameworks within the
organisation of the unemployed in Argentina Since 1996, the unemployed who have adopted the name of piqueter os have
become a new and particularly perturbing actor on the Argentinean political scene. This article examines the conditions which
have brought about the constitu- tion of the unemployed into organisations. The first part analyses the principal currents of the
piquetero movement, its different political and ideological matrices, the relationships it establishes with the State and the
institutionalisation of social programmes. The second part studies the common elements which constitute the piquetero space.
Finally, the article assesses the current difficulties of the movement.
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Les dimensions de l'expérience piquetera : tensions et cadres communs dans l'organisation et la mobilisation des chômeurs en
Argentine. In: Tiers-Monde. 2004, tome 45 n°178. pp. 419-441.
doi : 10.3406/tiers.2004.5895
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2004_num_45_178_5895LES DIMENSIONS
DE L'EXPÉRIENCE PIQUETERA1 :
TENSIONS ET CADRES COMMUNS
DANS L'ORGANISATION
ET LA MOBILISATION DES CHÔMEURS
EN ARGENTINE2
par Maristella Svampa* et Sebastian pereyra**
Depuis 1996, les chômeurs qui ont adopté le nom de piqueteros sont
devenus un nouvel acteur, particulièrement perturbateur, du scénario
politique et social argentin. Le point de départ de cet article porte sur les
conditions qui ont permis la constitution des organisations de chômeurs.
La première partie analyse les courants principaux du mouvement pique-
tero, ses différentes matrices politiques et idéologiques, le rapport qu'il
établit avec l'État et l'institutionnalisation des programmes sociaux. La
deuxième partie étudie les éléments communs qui constituent l'espace
piquetero. Enfin, l'article fait le point sur les difficultés actuelles du
mouvement.
L'émergence et le développement d'un mouvement social de chô
meurs ne sont pas un phénomène évident. Les études sociologiques
ont plutôt insisté sur l'ensemble des difficultés, tant objectives que sub
jectives, auquel se confronte l'action des chômeurs et qui constitue un
* Universidad Nacionál de General Sarmiento/CONICET.
** Doctorant CEMS/EHESS.
1. Les piqueteros sont des groupes de chômeurs et de travailleurs précaires, ainsi appelés parce que
leur mode de protestation privilégié est la formation de « piquets » pour barrer routes et carrefours
(NdT).
2. Cet article reprend des fragments de notre ouvrage : Entre la ruta y el barrio. La experiencia de las
organizations pique ter as, Buenos Aires, Biblos, 2003.
Revue Tiers Monde, t. XLV, n° 178, avril-juin 2004 420 Maristella Svampa et Sebastian Pereyra
frein à leur représentation en tant qu'acteurs sociaux reconnus. La
problématique est liée au fait que les chômeurs se trouvent « hors » de
la structure sociale, qu'ils n'occupent « aucun espace particulier » et
n'ont, de ce fait, aucune représentativité. S'y ajoute cette autre dimens
ion qui renvoie à l'hétérogénéité des parcours ou des situations englo
bées par cette catégorie.
Cette étude analyse le processus de formation d'organisations de
chômeurs en Argentine au cours de la seconde moitié des années 1990,
désignées comme « organisations piqueteras ». Les résultats d'une
longue recherche, entreprise en 2002, permettent de tenter de répondre
à ces questions fondamentales : quel sens peut-on donner à l'émer
gence d'un aussi grand nombre d'organisations de chômeurs en
Argentine ? Quelle clef permet de comprendre leur importance et le
rôle politique qu'elles ont joué au cours de ces dernières années ?
Dès le milieu des années 1990, débute un processus de blocage des
routes du pays. Des barrages routiers qui se multiplient, naît le terme
de piqueteros pour en désigner les protagonistes, à savoir les habitants
de communautés entières. Telle est l'origine de petites organisations
locales de chômeurs, qui, le plus souvent, finiront par intégrer des
fédérations à l'échelle nationale.
Pour comprendre cette évolution, il est indispensable de se remé
morer le contexte de transformations économiques, sociales et polit
iques de l'Argentine de ces trente dernières années car il est à l'origine
de ces processus d'organisation et de mobilisation. Ces transformat
ions, qui ont été les corollaires de l'application de politiques néol
ibérales, ont fini par reconfigurer complètement les bases de la société
argentine. Ce processus, marqué par l'appauvrissement, la vulnérabil
ité et l'exclusion sociale, a débuté au cours des années 1970, pendant
la dernière dictature militaire ; il s'est infléchi entre 1989 et 1991, avec
l'accession au pouvoir de Carlos Menem - période au cours de
laquelle se renforcent les politiques d'ouverture commerciale et de re
structuration de l'État -, puis s'est accéléré après 1995, avec
l'intensification de la crise économique et une aggravation accélérée du
chômage1.
Au cours de la décennie 1990, période où la vie économique du
pays connaît un changement définitif2, marqué par une redéfinition
1 . D'après VEncuesta Permanente de Hogares (EPH, Enquête permanente des ménages) de Y Institute
Nacionál de Estádisticas y Censos (INDEC, Institut national des statistiques et recensements), le taux de
chômage est passé de 6,9 % en 1991 à 18,4 % en 1995. Après un nouveau sommet de 21,5 % en 2002, il
avoisine actuellement les 16,4%.
2. À partir de 1989, dans le contexte d'une crise hyperinflationniste et du changement anticipé de
gouvernement, les nouvelles autorités ont établi une politique de stabilisation de l'économie (fixation du
taux de change et instauration de la convertibilité monétaire), suivie d'une restructuration énergique de dimensions de l'expérience piquetera 421 Les
très claire de l'intervention de l'État dans l'économie, la société argen
tine est privée de réseaux de soutien, centres de formation ou de réin
sertion professionnelle ; en même temps flagrante est l'absence de poli
tiques gouvernementales destinées à compenser les effets des mesures
progressives de flexibilité dans la sphère du travail ou les licenciements
massifs accompagnant les processus de privatisation et la reconversion
des entreprises dans le nouveau contexte d'ouverture économique.
D'autre part, rappelons que les syndicats intégrant la Confédération
générale du travail (cgt), de sensibilité péroniste comme le gouverne
ment de Carlos Menem, ne se sont pas opposés aux réformes, qui
cependant détruisaient leurs bases d'affiliation, mais, bien au contraire,
ont négocié avec le gouvernement leur survie matérielle et politique et
ont choisi de s'adapter au nouveau contexte économique et social1.
La seule politique systématique de l'État pour faire face à la crise
progressive de l'emploi est l'application du Plan Trabajar (travailler),
en 1996. Cette initiative, reformulée en 2002 sous l'appellation de
Plan Jefes y jefas de hogar (chefs de famille), est porteuse dès
l'origine d'une ambiguïté prononcée, ne se définissant ni comme une
assurance chômage, ni comme un programme d'assistance ou une
politique de réinsertion, mais bien tout cela à la fois2. Les « plans »,
ou programmes de subvention, ont été le noyau autour duquel s'est
structurée la politique de soutien du gouvernement ; au cours des
années, ils se sont transformés en instruments de négociation avec les
organisations pour mettre fin aux barrages routiers. En 1997,
200 000 subventions en moyenne avaient été distribuées ; ce chiffre
atteignait 1 300 000 en octobre 2002. À l'heure actuelle, le Plan Jefes
y Jefas de hogar concerne plus de 2 millions de personnes, selon des
l'administration publique et d'une importante ouverture commerciale. En ce qui concerne l'État, en cinq

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