Les interactions agriculture-industrie en Thaïlande. Dynamiques agraires et mobilités de la main-d œuvre - article ; n°162 ; vol.41, pg 323-341
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Les interactions agriculture-industrie en Thaïlande. Dynamiques agraires et mobilités de la main-d'œuvre - article ; n°162 ; vol.41, pg 323-341

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Description

Tiers-Monde - Année 2000 - Volume 41 - Numéro 162 - Pages 323-341
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Doryane Kermel-Torrès
Philippe Schar
Les interactions agriculture-industrie en Thaïlande. Dynamiques
agraires et mobilités de la main-d'œuvre
In: Tiers-Monde. 2000, tome 41 n°162. pp. 323-341.
Citer ce document / Cite this document :
Kermel-Torrès Doryane, Schar Philippe. Les interactions agriculture-industrie en Thaïlande. Dynamiques agraires et mobilités
de la main-d'œuvre. In: Tiers-Monde. 2000, tome 41 n°162. pp. 323-341.
doi : 10.3406/tiers.2000.1393
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2000_num_41_162_1393LES INTERACTIONS
AGRICULTURE-INDUSTRIE
EN THAÏLANDE.
DYNAMIQUES AGRAIRES
ET MOBILITÉS DE LA MAIN-D'ŒUVRE
par Doryane Kermel-Torrès* et Philippe Schar**
L'histoire économique de la Thaïlande au cours des dernières décen
nies présente de fortes articulations entre les secteurs agricole et indust
riel. Si celles-ci se sont renforcées à partir du milieu des années 1980, il
semble que le point de rupture soit aujourd'hui atteint. La poursuite du
modèle de développement industriel se heurte à l'augmentation rapide des
coûts du travail, aux dynamiques spécifiques du secteur agricole, ou à la
mobilité d'une force de travail d'origine rurale peu éduquée. Ces con
traintes structurelles conduisent à s'interroger sur la capacité des fa
milles rurales à perpétuer leur fonction de filet social et celle du secteur
agricole à réguler les fluctuations du marché du travail dans un contexte
de crise conjoncturelle d'importance comme celle qu'a récemment connue
la Thaïlande.
La Thaïlande a connu au cours des trois dernières décennies une
croissance forte et rapide de son économie non agricole, en particulier
dans le secteur industriel. La transition de l'agriculture à l'industrie y
revêt des traits spécifiques qu'exprime le rapport, même à un niveau
agrégé, entre l'importance de la population active engagée dans
l'agriculture (près de 50 % en 1996) et la faiblesse de la participation
de ce secteur au pib (à peine supérieure à 10 %y. Il augure de change-
** * Géographe, umr Institut cnrs-ird de recherche « regards pour le ». développement.
1. Ces valeurs étaient respectivement de 80% et 40% en 1961.
Revue Tiers Monde, t. XLI, n° 162, avril-juin 2000 324 Dory one Kermel-Torrès, Philippe Schar
ments sociaux et économiques qui s'appuient à la fois sur les poss
ibilités qu'offrent aux actifs les nouveaux secteurs et espaces de crois
sance et sur les fondamentaux agricoles de la société thaïe. La
rétention de la population active dans le secteur agricole est demeurée
forte et a permis le maintien des familles en zones rurales. Le rôle de
ces dernières relève à la fois de la protection sociale, non assurée par
les secteurs non agricoles, et de la régulation des mobilités de la cam
pagne à la ville.
Les échanges entre l'agriculture et l'industrie sont de nature symb
iotique. Leurs caractéristiques et leurs modes de fonctionnement ont
été jusqu'ici bénéfiques à chacun des secteurs en leur permettant
notamment d'enregistrer une croissance (en moyenne de 4% pour
l'agriculture entre 1990 et 1998). Les liens avec l'agriculture et la com
munauté rurale d'où est issue la main-d'œuvre industrielle sont en
grande partie maintenus par les valeurs sociales et familiales attachées
à la terre et au monde rural. Ils constituent aujourd'hui un handicap
pour le secteur industriel qui, talonné dans sa compétitivité par cer
tains de ses voisins asiatiques, ne parvient pas à se libérer d'un modèle
de production fondé sur une utilisation importante de la main-
d'œuvre, bon marché et longtemps aisément mobilisable. C'est ce que
veut montrer cet article en s'attachant aux différentes formes
d'articulation de l'agriculture avec les autres secteurs d'activité, à
l'impact de l'industrialisation sur les systèmes agraires et sur les mobil
ités des ruraux. L'étude s'appuie sur des analyses fines de communaut
és et de familles dans des contextes ruraux variés et identifiés,
d'employés industriels dans l'environnement de deux régions périphéri
ques de la Thaïlande, le Nord-Est et le Sud, dont la comparaison per
mettra de dégager les invariants des processus mis en œuvre1.
1. LA SPÉCIFICITÉ DE LA TRANSITION
DE L'AGRICULTURE À L'INDUSTRIE
Lorsque la Thaïlande s'engage dans le processus d'industrialisation
par substitution des importations à la fin des années 1950, le pays a
largement atteint l'autosuffisance alimentaire. Principal objet du traité
de Bowring en 1855, qui inaugura l'ouverture commerciale du
1. Des enquêtes ont été menées dans le cadre d'un programme cnrs-ird avec des universités thaï
landaises dans 13 villages et leurs systèmes agraires (755 maisonnées) et auprès de 400 employés indust
riels dans un échantillon de 31 usines de plus de 500 employés chacune. interactions agriculture-industrie 325 Les
Royaume de Siam, la production et les exportations rizicoles furent à
l'origine d'un vaste mouvement de colonisation spontanée de terres
agricoles. La mise en valeur progressive des forêts et des terres non
défrichées caractérisa un mode de développement agricole largement
extensif qui permit de maintenir un ratio homme/terre favorable1 et
d'augmenter la superficie cultivée par travailleur agricole. De la Plaine
centrale, dont les terres rizicoles étaient déjà exploitées, le mouvement
des fronts pionniers se déploya aux régions périphériques, appuyé par
le développement par l'État des infrastructures de communication et
d'irrigation et l'encadrement des commerçants sino-thai, véritables
chevilles ouvrières de la commercialisation et de la transformation des
produits agricoles. Les terres rizicoles conquises, le défrichement des
hautes terres du Nord et surtout du Nord-Est se fît à la faveur de cul
tures spéculatives (maïs au début des années 1960, suivi du kénaf, du
jute et du manioc puis de la canne à sucre dans les années 1970). Malg
ré une augmentation de sa production, la contribution relative du riz
dans l'économie agricole diminua au bénéfice de celle de nouvelles cul
tures dont l'adoption fut stimulée par l'amélioration des voies de com
munication, la demande du marché mondial et une politique de prix
du riz défavorable aux producteurs. Entre 1950 et 1985, le riz a été un
produit lourdement imposé et les taxes à l'exportation, nettement
supérieures à celles des autres produits agricoles, ont engendré
d'importantes ressources fiscales et budgétaires2.
Ainsi, et contrairement à ce qui peut être observé dans d'autres
pays nouvellement industrialisés d'Asie orientale (Corée du Sud et
Taiwan par exemple)3, le secteur agricole, qu'il s'agisse de l'augment
ation de la production de la denrée alimentaire de base ou de la diver
sification de productions agro-alimentaires largement intégrées dans le
processus industriel et dans les exportations, n'a bénéficié en Thaï
lande d'aucune subvention ni d'incitation directe. La flexibilité dont
ont fait preuve les agriculteurs, leur capacité à répondre aux signaux
du marché ont été à l'origine de l'essor de l'agriculture et du renouvel
lement incessant de ses productions mais elles l'ont en contrepartie
exposée de plein fouet aux caprices des marchés mondiaux, en
l'absence de toute politique efficace de soutien des cours intérieurs. Le
maintien artificiellement bas du prix du riz, jusqu'à l'effondrement des
cours mondiaux des années 1980, a permis d'abaisser le coût du travail
dans les usines et c'est sur l'avantage comparatif de ces bas salaires
1. Par rapport à la population rurale : 1,87 ha/tête en 1950, 2,16 ha/tête en 1983 (Phélinas, 1996).
2. Entre 1955 et 1970, les prix domestiques du riz étaient inférieurs de 50 % en moyenne à ceux des
marchés internationaux en raison du rice premium (Ingram, 1971).
3. Grijol, 1997 ; Park and Johnston, 1995. 326 Dory one Kermel-Torrès, Philippe Schar
qu'a pu se faire le passage à une industrialisation tournée vers les mar
chés extérieurs. Dans le même temps, l'agriculture a largement parti
cipé a

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