Les poupées Caraja (Brésil) - article ; n°1 ; vol.56, pg 161-177
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Description

Journal de la Société des Américanistes - Année 1967 - Volume 56 - Numéro 1 - Pages 161-177
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 25
Langue Français

Extrait

Isabelle Ruef
Les poupées Caraja (Brésil)
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 56 n°1, 1967. pp. 161-177.
Citer ce document / Cite this document :
Ruef Isabelle. Les poupées Caraja (Brésil). In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 56 n°1, 1967. pp. 161-177.
doi : 10.3406/jsa.1967.2275
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1967_num_56_1_2275LES POUPEES CARAJA
par Isabelle RUEF 1
Les Indiens Carajá habitent l'état de Goiás, dans le centre ouest du Brésil,
par 8° à 17° lat. et 48° à 52° de longitude.
Le centre de leur territoire est l'île de Bananal, dans les bras du fleuve
Araguaya qui servit de voie de pénétration dès le xvme siècle, et qui faisait
partie du système fluvial Tocantins-Araguaya reliant le Brésil Central à
l'Amazonie : après la pacification en 1755, les Carajá se trouvèrent ainsi
en contact continuel avec des naturalistes, des voyageurs, puis des ethno
logues. Castelnau en parle déjà mais les travaux les plus importants, ceux
d'Ehrenreich et de Krause, datent des premières années du xxe siècle. Lip-
kind, qui passe plusieurs années parmi eux, rédige l'article sur leur groupe
dans le Handbook of South American Indians. Tout récemment enfin,
H. Dietschy a séjourné chez eux et a publié des études sur leur vie sociale
et religieuse.
Outre le travail de Krause, l'art figuratif des Carajá a été traité par Castro
Faria et Heloisa Fenelon Costa. Nous n'avons pu consulter que la première
de ces études.
Ehrenreich estimait les Carajá à 10.000, à la fin du siècle dernier, mais
en 1939, Lipkind n'en recense plus que 1.510.
Les Carajá vivent dans des villages qui surplombent la rivière, à l'abri des
1. Cette étude a été menée dans le cadre du Centre de Formation à la Recherche
Ethnologique (C.F.R.E. de l'Université de Paris). Elle porte principalement sur quatre
collections, conservées au Département d'Amérique, Musée de l'Homme, Paris : Jean
Vellard (1930) ; R.P. Guénin (1931) ; Claude Lévi-Strauss (1938) ; Geraldo Pita-
GUARY (1951).
Nos remerciements vont d'abord à Mme Mireille Simoni, qui fut l'instigatrice de notre
travail et grâce à laquelle nous avons pu avoir accès aux collections ci-dessus. Nous r
emercions également M. le Professeur Hans Dietschy, qui a bien voulu nous aider de ses
conseils et nous fournir les références bibliographiques. 162 SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES
crues, mais ils cultivent le manioc et le maïs dans les jardins de la forêt-
galerie, sur les rives de Г Araguaya- Leur principale ressource reste la poche,
particulièrement abondante pendant la saison sèche, de mai à octobre. La
chasse et la cueillette viennent compléter leurs ressources.
Les femmes, outre leurs travaux de cuisine et de ménage, font la poterie,
et ce sont elles seules qui modèlent les statuettes d'argile qui font l'objet
de cet article. Ces poupées ont la particularité d'être identifiables bien plus
par des éléments culturels que par des traits morphologiques ; l'âge, le
sexe, le rang sont indiqués par les attributs que leur confère la culture ca-
rajá : habits, ornements, peintures corporelles.
Voici quelle est, d'après H. Dietschy, la signification sociale de ces attri
buts selon les classes d'âge :
Les petits enfants (ula-diť) vont nus jusqu'au moment du sevrage qui
n'intervient que tard, vers la deuxième année. Les filles (irari) portent alors
une ceinture de fils de coton teint en noir (wa-tekanď dideidissu' ) alors que
les garçons (weryri-bo' ) restent nus. Vers 2 ou 3 ans, la ceinture devient bande
tissée et ornée de franges, toujours en coton noir, et qui vont s'épaississant
jusque vers la dixième année (djubulď ). Les fillettes portent désormais le
nom de irari-kà : grande fille.
Quant aux garçons, à l'âge de 8 ou 9 ans, ils sont réunis dans la maison
des hommes (idjasso-hâto) : les liens serrés autour de leurs chevilles pour
aider à la croissance sont retirés, et un homme âgé et expérimenté leur perce
la lèvre inférieure pour y introduire un petit labret en os (idje' ) : ils sont
alors idja'-rgrâ : garçons à lèvre.
Cette première initiation inaugure la rupture avec le monde des femmes,
mais elle est suivie d'une seconde vers la douzième année : les cheveux sont
alors coupés très courts et le garçon reçoit l'unique « vêtement » masculin :
la ficelle, qui sert à lier le prépuce tiré au-dessus du gland.
A peu près deux ans plus tard, lorsque les cheveux ont repoussé, les jeunes
gens reçoivent le tatouage clanique, petit rond de 2 ou 3 cm. de diamètre,
incisé sur la pommette et peint en bleu-noir (olomuraro' ). Parfois le tatouage
est peint seulement sur les joues des garçons plus jeunes. A cela s'ajoutent
les autres marques de l'âge adulte : toupet de cheveux formé par une mèche
sur le sommet de la tête (lassi), raie rasée et peinte en rouge (ce trait tend
à disparaître), long labret en éclat de bois (oluo' ), lien de fil rouge crocheté,
noué au bras et que le jeune homme enlèvera à son mariage.
Quant aux petites filles, dès l'âge de dix ans, elles portent un pagne noir
de tissu serré et dépourvu de franges ; il est désormais complété par une
bande d'écorce grise qui passe entre les jambes et s'attache à la ceinture
(ina-tu). A la menstruation, elles reçoivent, elles aussi, la scari ficationclani-
que: dès lors, elles porteront un pagne tout en écorce battue, enserrant la taille
et passant entre les jambes. Les cheveux resteront longs, avec le toupet
sur le sommet du crâne, et les ornements de coton seront désormais rouges
et non plus noirs.
Les jeunes gens seront jugés mûrs pour passer dans la classe suivante, Pl. I
Illustration non autorisée à la diffusion
*•■
Fulvio Roiter, Meolo-Venise) LES POUPÉES CARA J A 165
celle des gens mariés, lorsque leurs cheveux auront repoussé jusqu'aux reins.
Ils les nouent parfois en tresse dans le dos (rahàto-wo-du). Le long labret
est remplacé par des pièces de bois de plus en plus courtes. Les jeunes femmes
abandonnent en général les liens rouges attachés à leurs bras et leurs che
villes : II n'y a dès lors plus de changements extérieurs. Vers 45 ans, hommes
et femmes déposent leurs derniers ornements. L'homme ne porte plus qu'un
bouton de bois en guise de labret : on l'appelle watwari~re', le vieux et
la femme sanadure, la vieille.
Cette esquisse des étapes de la vie carajá va nous permettre de situer les
poupées dans leur contexte culturel et de les identifier, dans la mesure où
elles représentent plutôt un groupe, une classe d'âge, qu'un individu.
Les Poupées
Le Musée de l'Homme possède une collection de 57 poupées (tîkoké),
dont 49 en argile crue (irfide) séchée au soleil, œuvre exclusive des femmes.
Les 8 autres, en cire (tqbora), exécutées par des hommes ou des petits gar
çons, sont d'un modelé plus maladroit. Certaines figures de cire représentent
des animaux domestiques, mais la collection du Musée n'en possède pas.
Les femmes n'emploient la cire que pour la coiffure de leurs poupées, parf
ois pour le pénis ou le mamelon des seins.
Les pièces sont petites : celles que nous avons étudiées varient entre 7 cm.
et 12 cm. de hauteur ; il est vrai qu'elles appartiennent toutes à une période
ancienne. Pour un même type de statuettes, Krause ne signale aucune pièce
dépassant 30 cm. On peut distinguer deux types principaux :
1. Les poupées dont la partie inférieure est représentée par deux bulbes,
prolongés parfois par une amorce de membres inférieurs en forme de
pointe (fig. 1).
2. D'autres attestent un prolongement dans l'axe du corps, évoquant de
courtes jambes terminées par un pied (fig. 2).
Les deux types offrent des variantes : les bulbes s'étirent parfois jusqu'à
former des masses cylindriques dans le prolongement du corps. Les jambes
présentent fréquemment des étranglements à la hauteur du genou et de la
cheville. L'ampleur relative de la partie inférieure se trouve souvent équi
librée par une chevelure plus ou moins volumineuse.
Les pièces

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