Malthus et le sous-développement - article ; n°93 ; vol.24, pg 189-204
17 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Malthus et le sous-développement - article ; n°93 ; vol.24, pg 189-204

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
17 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Tiers-Monde - Année 1983 - Volume 24 - Numéro 93 - Pages 189-204
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Yves Breton
Malthus et le sous-développement
In: Tiers-Monde. 1983, tome 24 n°93. pp. 189-204.
Citer ce document / Cite this document :
Breton Yves. Malthus et le sous-développement. In: Tiers-Monde. 1983, tome 24 n°93. pp. 189-204.
doi : 10.3406/tiers.1983.4276
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1983_num_24_93_4276CHRONIQUE BIBLIOGRAPHIQUE
Malthus et le « sous-développement »
par Yves Breton*
Pendant l'entre-deux-guerres, il n'y avait eu que peu d'intérêt scientifique
pour les problèmes économiques des pays « sous-développés » — la science
économique orthodoxe ne se développant alors qu'en fonction et qu'à l'usage
des pays « avancés ». Ce n'est qu'après le deuxième conflit mondial que le
« sous-développement » s'est imposé comme réalité à la conscience universelle.
L'urgence, l'importance et la gravité des problèmes qu'il évoquait alors justi
fiant la place de plus en plus grande qu'il occupait dans les conférences et les
discussions des organisations internationales, dans la littérature économique
la plus quotidienne comme dans les controverses académiques. En mai 195 1,
un groupe d'experts réunis à l'initiative du secrétaire général des Nations
Unies remettait un rapport qui concernait la situation des pays « sous-dévelop
pés » et faisait des propositions concrètes pour leur développement écono
mique et social1. Date historique, car c'était la première fois que la pensée
économique orthodoxe traitait le « sous-développement » comme un problème
original, spécifique2. Ce changement drastique dans les préoccupations de
certains spécialistes des sciences humaines ne fut ni autonome ni spontané
mais n'était que la conséquence :
— d'une part des grands bouleversements politiques de l'après-guerre (déco
lonisation, concurrence de plus en plus vive entre les deux grands sys
tèmes politiques et économiques...)3;
— d'autre part, des aspirations des peuples nouvellement libérés de leur
tutelle coloniale et prenant conscience de leur profonde misère.
* Chargé de recherche au cnrs et chargé de cours à I'iedes.
1. United Nations, Measures for the economic development of the underdeveloped
countries, report by a group of experts appointed by the Secretary general of the United
Nations, department of economic affairs, New York, May 195 1.
2. Б faut noter que К. Marx et ses disciples (Rosa Luxemburg, Lénine, Sternberg...)
ont été une remarquable exception — voir J. Freyssinet, jL« concept de sous-développement,
chap. 8 : « La théorie marxiste de l'impérialisme. »
3. M. Niveau, Histoire des faits économiques contemporains, p. 548 et s.
Revue Tiers Monde, t. XXIV, n° 93, Janvier-Mars 1983 TIERS MONDE 19О
La découverte de ce « Tiers Monde, ignoré, exploité, méprisé »* ainsi que
l'insuffisance de la science économique orthodoxe à prendre en charge ses
problèmes spécifiques et originaux furent à l'origine de la constitution dans le
cadre de cette science d'une nouvelle discipline : l'économie du développement.
Une question vient naturellement à l'esprit : la réalité du « sous-développement»
était-elle aussi nouvelle que le terme qui la désignait ? Autrement dit n'existait-il
pas avant le second conflit mondial des écarts importants entre les niveaux de
bien-être des peuples ou encore de grandes inégalités dans la répartition du
revenu mondial ? Nombreux étaient ceux qui répondront positivement en
soulignant que dès la fin du xvme siècle et le début du xixe, des écarts écono
miques importants existaient entre des pays riches (Angleterre, France, Hol
lande, Amérique du Nord...) et le reste du monde6. L'origine de ces écarts étant
à rechercher dans le grand bouleversement qui ébranla l'Europe de l'Ouest
à la suite des grandes découvertes maritimes de la fin du xve et du xvie siècle
et dans la révolution industrielle de la fin du xvnie siècle et du début du xixe
siècle.
Dans l'œuvre de Malthus, il y a suffisamment de développements concer
nant les sociétés « attardées » de son époque (livre I de Y Essai, section IV du
livre II de ses Principes...) pour affirmer que le pasteur anglais avait eu cons
cience de la réalité du « sous-développement » de son époque. Notre objectif
n'est pas d'étudier l'intérêt que peut avoir le principe de population établi par
le pasteur anglais dans les problèmes actuels du « sous-développement», mais de
présenter son analyse du « » avec l'idée de voir si ses
réflexions sont pleines d'intérêt et d'enseignement pour un spécialiste actuel
du « sous-développement ». La recherche entreprise relève donc de l'histoire
de la pensée économique, dans le sens où les écrits de Malthus ont constitué
l'essentiel de notre documentation, mais son objectif comme nous venons de le
noter n'a jamais été d'un ordre purement spéculatif et historique.
On peut trouver dans les écrits de Malthus de multiples facteurs explicatifs
du « » de certaines sociétés ; facteurs explicatifs que nous
regrouperons en deux classes : la première sera relative aux facteurs internes
(Ire Partie), la seconde concernant les facteurs externes (IIe Partie).
I. — Les facteurs internes
1. Les institutions
Une bonne charpente institutionnelle, législative et réglementaire était
pour Malthus une condition nécessaire à la croissance économique d'un pays.
Parmi les institutions et les lois qui étaient des obstacles à la croissance de la
production et parfois étaient même incompatibles avec la écono
mique, Malthus citera les institutions féodales6, certaines lois fiscales7 ainsi que
4. A. Sauvt, L'Observateur, 14 août 1952.
5. Voir par exemple l'article de P. Bairoch, Les écarts des niveaux de développement
économique entre pays développés et pays sous-développés de 1700 à 2000, in Revue Tiers
Monde, n° 47, t. XII, juillet-septembre 1971.
6. T. R. Malthus, Essai, livre III, p. 76, 87.
7. Ibid., livre П, p. 160. CHRONIQUE BIBLIOGRAPHIQUE 191
certains règlements8. La longue stagnation de l'économie chinoise n'était-elle
pas due à la nature même de ses lois et de ses institutions9 ? Dans le cadre
d'autres lois et d'autres institutions soulignait notre auteur, la Chine sortirait
de sa stagnation séculaire. Dans ce paragraphe nous présenterons les institutions
politiques, sociales et économiques dont les effets, selon notre économiste,
étaient soit de retarder la croissance économique d'un pays ou de maintenir
son économie dans un état de stagnation (cas chinois), soit enfin de la conduire
au déclin. Nous commencerons cette revue par la puissance publique. Suivra
une institution « féodale » qui n'avait pas complètement disparu à l'époque où
Malthus écrivait : le servage. Nous terminerons cette présentation par la pro
priété privée dont l'importance primordiale dans la pensée économique clas
sique en général et malthusienne en particulier n'est plus à souligner.
La puissance publique. — La puissance publique conduisait l'économie au
déclin ou la maintenait dans le « sous-développement » de multiples manières :
— en commettant de multiples exactions : il était fréquent, sous le gouverne
ment faible mais oppressif des Turcs, des pachas ou de leurs agents, que les
paysans fuient leurs villages, soit pour retourner à l'état pastoral, soit pour
se cacher dans les villes afin d'être mieux en mesure d'échapper au pillage
ou à de soudaines et arbitraires levées d'impôts10. Les exactions, les spolia
tions de toute sorte perpétrées par le pouvoir ou l'administration, en décou
rageant l'haHleté et l'activité des personnes ainsi que leur épargne avaient
des effets économiques désastreux11;
— en étant incapable de maintenir l'ordre intérieur et d'éviter les conflits
externes.
L'accumulation du capital dont le rôle dans le processus de croissance
économique était considéré comme primordial dans la pensée économique
classique, était presque impossible dans

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents