Mobilité professionnelle des domestiques au Brésil (Nordeste) : une logique complexe - article ; n°170 ; vol.43, pg 265-285
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Tiers-Monde - Année 2002 - Volume 43 - Numéro 170 - Pages 265-285
Marie Anderfuhren — Professional mobility of domestic servants in North East Brazil : a complex pattern.
Domestic servants have to continually device strategies out of exploitation, poor wages and the low social esteem they are held in. They thus conceal their functions, deem them temporary, hoping for better prospects. But the domestic's condition stays on, so they are forced to forge acceptable identities. The article studies the relationships between poor work conditions, the self-perceptions of the domestic servants, and the prospects of professional mobility. It shows the stigmatising effects that hamper possibilities of improvement, leading to complex strategies, such as the forging of identity.
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 20
Langue Français
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Extrait

Marie Anderfurhen
Mobilité professionnelle des domestiques au Brésil (Nordeste) :
une logique complexe
In: Tiers-Monde. 2002, tome 43 n°170. pp. 265-285.
Abstract
Marie Anderfuhren — Professional mobility of domestic servants in North East Brazil : a complex pattern.
Domestic servants have to continually device strategies out of exploitation, poor wages and the low social esteem they are held
in. They thus conceal their functions, deem them temporary, hoping for better prospects. But the domestic's condition stays on,
so they are forced to forge acceptable identities. The article studies the relationships between poor work conditions, the self-
perceptions of the domestic servants, and the prospects of professional mobility. It shows the stigmatising effects that hamper
possibilities of improvement, leading to complex strategies, such as the forging of identity.
Citer ce document / Cite this document :
Anderfurhen Marie. Mobilité professionnelle des domestiques au Brésil (Nordeste) : une logique complexe. In: Tiers-Monde.
2002, tome 43 n°170. pp. 265-285.
doi : 10.3406/tiers.2002.1594
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2002_num_43_170_1594MOBILITÉ PROFESSIONNELLE
DES DOMESTIQUES
AU BRÉSIL (NORDESTE):
UNE LOGIQUE COMPLEXE
par Marie Anderfuhren*
Emploi socialement discrédité, mal rémunéré et exploité, la domesticité
pousse ses employées à développer des stratégies pour sortir du mépris
subi. Les domestiques masquent leur fonction, la décrètent provisoire en
affirmant qu'elles trouveront un autre métier. Mais la condition de domest
ique n'est pas provisoire. Ce fait les oblige à se construire des identités
acceptables. L'article étudie l'imbrication entre les mauvaises conditions
de travail, les représentations qu'ont les travailleuses domestiques d'elles-
mêmes et les possibilités de mobilité professionnelle. Il montre les effets de
la stigmatisation qui freine les chances d'amélioration, et qui les oblige à
construire des stratégies, notamment identitaires, complexes.
Les diverses études sur l'emploi domestique en Amérique latine1
montrent que la question de la mobilité professionnelle y est centrale.
Que permet l'emploi domestique, pour celles qui l'exercent, en termes
de mobilité sociale et professionnelle ? Quelle place tient-il dans les
processus migratoires2, l'arrivée en ville et l'accès à l'emploi ? Quel rôle
joue-t-il plus largement dans la configuration des systèmes d'emplois
accessibles aux femmes ? Que représente cet énorme contingent de
* Sociologue, responsable de formation à l'Institut d'études sociales, Genève.
1 . En Amérique latine, l'emploi domestique rémunéré occupe grosso modo 25 % de la force de tra
vail féminine. Pollack, Molly, 1997 (cf. p. 25). À noter qu'en Amérique du Sud, la population active fémi
nine se répartit de la manière suivante : agriculture : 10 % ; industrie : 14 % ; services : 76 %. (Organisation
internationale du travail, 1994). Au Brésil ces proportions sont assez proches : agriculture : 10 % ;
industrie : 19 % ; services 71 % (OIT, 1994). La population économiquement active de l'Amérique latine et
des Caraïbes s'élève à 217 000 000 de personnes pour l'année 2000 (CEPAL, 2001).
2. Elizabeth Jelin, 1977, ou Margo L. Smith, 1973. Les ouvrages cités ne le sont qu'à titre
d'exemples et parce qu'ils ont fait date ; rares sont ceux qui n'abordent pas le sujet de la mobilité.
Revue Tiers Monde, t. XLIII, n° 170, avril-juin 2002 266 Marie Anderfuhren
femmes non formées dans une économie capitaliste en pleine expans
ion1 ? La question de savoir s'il y a ou non mobilité vers d'autres
emplois est donc assez systématiquement posée par les chercheur-e-s
s'intéressant à la domesticité2.
Les raisons de l'omniprésence du thème de la mobilité dans l'étude
de la domesticité latino-américaine sont sans doute diverses : peut-être
faut-il y voir un thème de toute manière très largement abordé par la
sociologie des migrations, l'emploi domestique ayant été associé à la
migration campagne-ville durant plusieurs décennies. L'étude de la
domesticité ne pourrait échapper à des questions posées à propos de
n'importe quelle situation de travail rémunéré atteinte après un par
cours migratoire ayant induit un changement radical de mode de vie.
Ce sont bien les questions qui sont posées par des chercheur-e-s dési
reux d'élucider le parcours migratoire après l'arrivée en ville. L'emploi
domestique est-il provisoire, permettant une installation en ville qui
donne ensuite un accès à d'autres emplois ?
Le présent article s'attachera à analyser le rapport que l'on peut
déceler entre le désir de mobilité professionnelle des employées hors de
l'emploi domestique, les raisons invoquées pour vouloir sortir de cet
emploi, les limitations très importantes face à la possibilité de concrét
iser ce changement d'emploi en rapport avec, d'une part, le type de
relation de travail qui s'établit entre les protagonistes, soit en particulier
les domestiques et leurs patronnes3 et, d'autre part, les représentations
sociales de l'emploi. Autrement dit, il s'agira ici de comprendre quelles
représentations sociales sont à l'œuvre qui participent à la construction
de relations de travail qui empêchent les domestiques de quitter la
domesticité tout en changeant d'emploi à un rythme soutenu.
REJET DE L'EMPLOI DOMESTIQUE, FUITE ET MOBILITÉ
La première étude disponible4 concernant les employées domesti
ques de la région métropolitaine de Recife (rmr, Nordeste du Brésil),
au tout début des années 1970, analyse les difficultés qu'ont les
patronnes à trouver une domestique qui veuille bien garder son
emploi, à cause d'un départ important d'employées domestiques vers
le secteur industriel, en croissance dans la région à cette époque. Une
1. Heleieth B. I. Saffïoti, 1979.
2. Voir également Bruno Lautier (coord.), 1994.
3. Pour une analyse approfondie des relations entre les patronnes et leurs domestiques, voir Maria
Suely Kofes, 1990.
4. Instituto Joaquim Nabuco de Pesquisas Sociais, 1970. professionnelle des domestiques au Brésil 267 Mobilité
lecture attentive de cette recherche montre cependant que les chiffres
produits par l'enquête infirment ce passage vers le secteur industriel.
Bien sûr, il ne s'agit pas que d'une étourderie, mais bien d'un indice
de la place prépondérante que prendra cette question tant dans
l'imaginaire social, sous diverses formes, que dans les assez rares anal
yses1 de l'emploi domestique. Si, en 1970, l'industrie apparaît tant aux
enquêtrices qu'aux patronnes comme dévoreuse de domestiques, il faut
dire que la rotation dans l'emploi y est déjà très marquée ; fidéliser
une bonne employée domestique semble aux patronnes de cette
époque relever du défi. Mais, dans cette enquête, les difficultés ment
ionnées par les patronnes sont, pour 30 % des réponses, liées à des
problèmes de confiance entre les protagonistes de la relation de tra
vail, alors que le changement réel de profession ne concerne que 3,9 %
des réponses concernant les départs de domestiques. Le problème est
donc mentionné, puis les raisons liées à cette forme particulière de
mobilité, qui font que les employées domestiques quittent leur place
pour en retrouver une autre ... comme domestiques, sont évacuées.
La reprise, telle quelle et sans recul, par les chercheurs et chercheus
es de la crainte des patronnes de voir disparaître les domestiques,
avalées qu'elles seraient par l'industrie croissante, n'est pas si courante
dans la littérature. Pourtant, le thème ne cesse de réapparaître dans les
recherches et autres enquêtes. Parallèlement aux préoccupations des
chercheur-e-s, la question de la mobilité constitue, sans aucun doute,
un point très sensible du discours que les employées domestiques ont
sur elles-mêmes. Le lien entre mobilité et fuite de la place occupée est
sous-jacent quand les employées domestiques parlent de leurs propres
perspectives. Du moins est-ce le cas des domestiques de Recife2, dans
l'enquête qui est à la base de cet article3. Le désir de mobilité profes-
1. B. Lautier et J. Marqu

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