Morale de justice ou morale de responsabilité: un débat entre L Kohlberg et C. Gilligan à propos du développement du jugement moral - article ; n°1 ; vol.10, pg 21-38
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Morale de justice ou morale de responsabilité: un débat entre L Kohlberg et C. Gilligan à propos du développement du jugement moral - article ; n°1 ; vol.10, pg 21-38

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Déviance et société - Année 1986 - Volume 10 - Numéro 1 - Pages 21-38
Les recherches empiriques et théoriques à propos du développement du jugement moral se trouvent confrontées au problème du caractère universel ou relatif des normes ou des principes moraux. Tant Piaget que Kohlberg posent effectivement le principe universel de justice comme fondement ou comme hypothèse susceptible d'expliquer de manière rationnelle les différents stades du développement moral des individus. Ils aboutissent ainsi à une conception du choix moral qui transcendrait les différences culturelles. A cette « morale de justice », C. Gilligan oppose une «morale de responsabilité» selon laquelle chaque choix moral est unique et « construit » à partir de la situation dans laquelle il se pose plutôt que « déduit » du principe abstrait de justice. C'est l'enjeu de ce débat que nous examinons dans cet article.
The empirical studies and theories concerning the development of moral judgement find themselves confronted with the vast problem of relative norms versus universal moral principles. Piaget as well as Kohlberg, effectively state the universal principle of justice as a base or reasonable hypothesis for explaining the different stages of moral development of an individual. They conclude with the idea of a moral choice that trancends cultural differences. With this « moral justice », C. Gilligan contrasts « moral responsibility », according to which each moral choice is unique and « constructed » from the situation in which it arises, rather than « deducting » it from the abstract principle of justice. It is this crux of the debate that we examine in this article.
Die empirischen und theoretischen Forschungen tiber der Entwicklung der moralischen Beurteilung wird mit dem Problem des universalen oder relativen Charakters der Normen oder moralischen Prinzipien kon- frontiert. Sowohl Piaget als auch Kohlberg nehmen das universale Gerechtigkeitsprinzip als Grundlage oder als als Hypothese, wodurch auf rationelle Weise die Verschiedenen Stadien der moralischen Entwicklung der Einselwesen erklärt werden kann. Si erhalten so eine Konzeption der moralischen Wahl, die die Kulturunterschiede transzendieren könnte. Dieser « Gerechtigkeitsmoral » stellt C. Gilligan eine « Verantwortlichkeitsmoral » gegenüber, bei der jede moralische Wahl, abhängig von der vorkommenden Situation, einzig ist und « konstruktiv » wirkt. Dieses ist die Basis der Debatte, die wir in diesem Artikel führen.
De empirische en theorische opzoekingen over de ontwekkeling van het morele oordeel worden vandaag geconfronteerd met het probleem van het universeel of relatief karacter van de morele normen of princiepen. Zowei Piaget also Kohlberg liggen inderdaad het universal princiepe van rechwaardigheid als grondslag of hypothèse die het mogelijk maakt op rationele wijze de verschillende stadia van de morele ontwikkeling van de individuen. Zo komen zij tot een begrijp (conceptie) van de morele keuze die de kulturele verschillen zou transcenderen Tegenover deze « moraal van gerechtigheid », stalt C. Gilligan een «moraal van verantwoordelijkheid » volgens dewelke elke morele keuze evig is « gebouwd » vertrekkend van de situatie waarbij zij gesteld wordt eerder dan afgeleid van het abstract princiepe van rechtvaardigheid. Dit is de inzet van het debat dat wij in dit artikel onderzoeken.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 297
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Fr. Digneffe
Morale de justice ou morale de responsabilité: un débat entre L
Kohlberg et C. Gilligan à propos du développement du jugement
moral
In: Déviance et société. 1986 - Vol. 10 - N°1. pp. 21-38.
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Digneffe Fr. Morale de justice ou morale de responsabilité: un débat entre L Kohlberg et C. Gilligan à propos du développement
du jugement moral. In: Déviance et société. 1986 - Vol. 10 - N°1. pp. 21-38.
doi : 10.3406/ds.1986.1462
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1986_num_10_1_1462Résumé
Les recherches empiriques et théoriques à propos du développement du jugement moral se trouvent
confrontées au problème du caractère universel ou relatif des normes ou des principes moraux. Tant
Piaget que Kohlberg posent effectivement le principe universel de justice comme fondement ou comme
hypothèse susceptible d'expliquer de manière rationnelle les différents stades du développement moral
des individus. Ils aboutissent ainsi à une conception du choix moral qui transcendrait les différences
culturelles. A cette « morale de justice », C. Gilligan oppose une «morale de responsabilité» selon
laquelle chaque choix moral est unique et « construit » à partir de la situation dans laquelle il se pose
plutôt que « déduit » du principe abstrait de justice. C'est l'enjeu de ce débat que nous examinons dans
cet article.
Abstract
The empirical studies and theories concerning the development of moral judgement find themselves
confronted with the vast problem of relative norms versus universal moral principles. Piaget as well as
Kohlberg, effectively state the universal principle of justice as a base or reasonable hypothesis for
explaining the different stages of moral development of an individual. They conclude with the idea of a
moral choice that trancends cultural differences. With this « moral justice », C. Gilligan contrasts « moral
responsibility », according to which each moral choice is unique and « constructed » from the situation
in which it arises, rather than « deducting » it from the abstract principle of justice. It is this crux of the
debate that we examine in this article.
Zusammenfassung
Die empirischen und theoretischen Forschungen tiber der Entwicklung der moralischen Beurteilung wird
mit dem Problem des universalen oder relativen Charakters der Normen oder moralischen Prinzipien
kon- frontiert. Sowohl Piaget als auch Kohlberg nehmen das universale Gerechtigkeitsprinzip als
Grundlage oder als als Hypothese, wodurch auf rationelle Weise die Verschiedenen Stadien der
moralischen Entwicklung der Einselwesen erklärt werden kann. Si erhalten so eine Konzeption der Wahl, die die Kulturunterschiede transzendieren könnte. Dieser « Gerechtigkeitsmoral »
stellt C. Gilligan eine « Verantwortlichkeitsmoral » gegenüber, bei der jede moralische Wahl, abhängig
von der vorkommenden Situation, einzig ist und « konstruktiv » wirkt. Dieses ist die Basis der Debatte,
die wir in diesem Artikel führen.
De empirische en theorische opzoekingen over de ontwekkeling van het morele oordeel worden
vandaag geconfronteerd met het probleem van het universeel of relatief karacter van de morele normen
of princiepen. Zowei Piaget also Kohlberg liggen inderdaad het universal princiepe van rechwaardigheid
als grondslag of hypothèse die het mogelijk maakt op rationele wijze de verschillende stadia van de
morele ontwikkeling van de individuen. Zo komen zij tot een begrijp (conceptie) van de morele keuze
die de kulturele verschillen zou transcenderen Tegenover deze « moraal van gerechtigheid », stalt C.
Gilligan een «moraal van verantwoordelijkheid » volgens dewelke elke morele keuze evig is « gebouwd
» vertrekkend van de situatie waarbij zij gesteld wordt eerder dan afgeleid van het abstract princiepe
van rechtvaardigheid. Dit is de inzet van het debat dat wij in dit artikel onderzoeken.Déviance et Société, 1986, Vol. 10, No 1, pp. 21-38
MORALE DE JUSTICE
OU DE RESPONSABILITÉ:
UN DÉBAT ENTRE
L. KOHLBERG ET C. GILLIGAN
À PROPOS DU DÉVELOPPEMENT
DU JUGEMENT MORAL
Fr. DIGNEFFE*
Les recherches empiriques et théoriques à propos du jugement moral
se trouvent toutes, à un moment donné, confrontées à un problème central
que l'on peut sommairement définir comme suit : la sphère de la morale
doit-elle être considérée comme un ensemble de principes et de normes
relatifs aux cultures dans lesquelles ils s'inscrivent (et dès lors l'apprentis
sage moral ne constitue qu'un des aspects de la socialisation), ou bien doi
t-on poser l'hypothèse d'une universalité des principes éthiques, au-delà de
toutes les différences culturelles ? La question, ainsi formulée, concerne
plusieurs champs de recherches, et plusieurs disciplines. Elle interpelle les
sociologues dans la mesure où l'intériorisation des règles morales peut-être
considérée comme un des aspects du processus de socialisation. Elle relève
de la psychologie et de la psychologie sociale qui s'intéressent aux méca
nismes d'apprentissage social d'une part, au processus de développement du
jugement moral d'autre part. Enfin, elle pose certains problèmes relatifs à
l'éthique et concerne dès lors la philosophie morale et politique.
Nous voudrions, dans cet article, aborder ce problème complexe en
prenant un point de départ limité, et une perspective précise. Notre point de
départ est constitué par un des aspects de la théorie du développement du
jugement moral de L. Kohlberg *, qui concerne le statut du « stade 6 », c'est-
à-dire, pour le psychologue américain, le stade le plus élevé du développe
ment du jugement moral, stade où le sujet juge et agit en fonction du prin
cipe de justice considéré comme principe universel. Les recherches empiri
ques et les positions théoriques sur lesquelles se fondent Kohlberg et ses
collaborateurs ont suscité un grand nombre de débats, qui ont d'ailleurs
amené Kohlberg lui-même à complexifier et à nuancer sa position. En inte
rvenant dans ce débat et en envisageant les différents problèmes qu'il sou
lève, nous laissons la question ouverte, mais nous voulons contribuer à
montrer comment s'organisent et se constituent les prises de position « rela-
tivistes» et « universalistes », afin de mieux comprendre les présupposés et
les enjeux de ces différentes positions.
* Université Catholique de Louvain.
21 Les réflexions que nous suggérons se situent dans une perspective qui
se trouve en marge ou en retrait par rapport aux distinctions traditionnelles
et parfois arbitraires qui opposent les psychologues (ou les psychologues
sociaux) et les sociologues. Nous pensons en effet que l'étude des relations
que le sujet établit avec les règles morales constitue un de ces lieux privilé
giés où l'individuel et le social se rencontrent. Le sociologue d'une part, par
le biais de la micro-sociologie, observe comment les positions et les situa
tions «façonnent» la conscience morale du sujet. Le psychologue d'autre
part, est amené à rechercher comment, au-delà des différences indivi
duelles, la manière dont l'individu entre en interaction avec le milieu dans
lequel il vit (qu'il s'agisse d'autres individus ou d'institutions) organise la
formation des «solutions morales» que les individus produisent. Enfin, si
l'on veut « comprendre » le vécu du sujet et ses représentations de la règle
morale, on se trouve inévitablement confronté à un problème d'ordre philo
sophique qui concerne le statut même de la norme morale.
Dans un premier point, nous montrerons comment l'origine des
recherches de Kohlberg s'inscrit dans un contexte social et politique précis,
celui d'après la seconde guerre mondiale. Nous serons ainsi amené à situer
le psychologue par rapport aux sociologues culturalistes américains et à
voir pourquoi et comment il distingue le processus de développement moral
du processus de socialisation. Cela nous permettra également de mention
ner les critiques faites par Kohlberg à propos des explications de la déviance
par la constitution de sous-culture délinquantes.
Ensuite, à propos de l'hypothèse du «stade 6», stade le plus élevé
dans le développement du jugement moral, nous étudierons le rapport entre
la psychologie morale de Kohlberg et sa philosophie morale. Nous verrons
comment une certaine conception de la justice, telle qu'elle apparaît dans la

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