Orphée dans le miroir du conte merveilleux - article ; n°93 ; vol.25, pg 59-82
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Description

L'Homme - Année 1985 - Volume 25 - Numéro 93 - Pages 59-82
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 103
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Nicole Belmont
Orphée dans le miroir du conte merveilleux
In: L'Homme, 1985, tome 25 n°93. pp. 59-82.
Citer ce document / Cite this document :
Belmont Nicole. Orphée dans le miroir du conte merveilleux. In: L'Homme, 1985, tome 25 n°93. pp. 59-82.
doi : 10.3406/hom.1985.368542
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1985_num_25_93_368542Nicole Belmont
Orphée dans le miroir du conte merveilleux
Thompson type Nicole qui Belmont, porte (La Fille le Orphée n° aide 313 dans le héros dans le miroir dans la classification sa du fuite) conte est, merveilleux. internationale parmi les — contes Le Aarne- conte merv
eilleux, l'un des plus séduisants et l'un des mieux composés narrativement.
Une analyse des versions françaises qui comportent l'épisode de la « fiancée
oubliée » révèle le parcours initiatique du jeune héros aboutissant à l'acqui
sition d'une épouse et à l'instauration d'un équilibre entre consanguinité
et alliance, entre résidence matrilocale et résidence patrilocale. En s'inter-
rogeant en outre sur le schéma narratif du conte, on s'aperçoit qu'il est
symétrique et inverse de la légende grecque d'Orphée et Eurydice. Cette
lecture donne au conte une dimension eschatologique inapparente au
premier abord et permet de poser des jalons théoriques à propos de la
nature du conte merveilleux.
Nicole Belmont, Orpheus through the Fairy Tale Looking- Glass. — The
Girl as Helper in the Hero's Flight, number 313 of the Aarne-Thompson
international folktale classification, is one of the best composed and most
appealing fairy tales. An analysis of the French versions of this story which
include the « forgotten fiancée » episode reveals the young hero's initiation-
like journey leading to the acquisition of a wife and the establishment
of a balance between consanguinity and alliance, between matrilocal and
patrilocal residence. Moreover, the tale's narrative scheme is shown to be
the inverse of that of the Greek legend of Orpheus and Euridyce. This brings
out the story's hidden eschatological quality and raises theoretical questions
regarding the nature of fairy tales.
Le conte type portant le numéro 313 dans la classification interna
tionale d'Aarne et Thompson a reçu le titre La Fille aide le héros dans sa
fuite (The Girl as Helper in the Hero's Flight), alors qu'il est connu dans
le corpus des contes français comme La Fille du diable1. Son aire de répar-
1. A. Aarne & S. Thompson, The Types of the Folktale, Helsinki, Academia
Scientiarum Fennica, 1973 (FFC n° 184) ; P. Delarue & M.-L. Tenèze, Le
Conte populaire français. Catalogue raisonné des versions de France et des pays
de langue française d'outre-mer..., I, Paris, Maisonneuve & Larose, 1967 (cité
infra : Catalogue). Signalons également deux études sur ce conte type récem
ment parues, dont la première est d'inspiration formaliste tandis que la seconde
procède d'une démarche plus originale : Stella Longo Reggiardo, « L'Analyse
L'Homme 93, janv.-mars 1985, XXV (1), pp. 59-82. NICOLE BELMONT ÔO
tition comprend l'Europe entière, une partie de l'Asie occidentale et
orientale, l'Amérique du Nord où les Européens l'importèrent et où
certains Indiens l'adoptèrent, des îlots africains où il est également d'ori
gine européenne2. Les versions littéraires les plus anciennes sont italiennes :
il est attesté en premier lieu dans un poème épique du XVIe siècle, le
Mambriano, et ensuite dans G. Basile, Rosella (III, 9) et La Palomma
(II, 7, où il ne se retrouve qu'en partie)3. Dans ses Contes de fées,
Madame d'Aulnoye en donne une version très arrangée, L'Oranger et
l'abeille, qui, selon Paul Delarue, n'aurait eu aucune influence sur la tra
dition orale française, bien qu'elle ait été diffusée dans la littérature de
colportage4. Il voit dans ce conte type un des plus longs, un des mieux
composés, un des plus aimés. Et il ajoute : «... dans aucun autre on ne
trouve assemblés tant d'éléments venus du fond des âges : filles-oiseaux,
métamorphoses, enchantements, objets et animaux qui parlent, opéra
tions magiques très diverses et d'une étrangeté parfois déconcertante.
Mais ces motifs, dont l'extrême ancienneté ne saurait faire de doute, sont
bien antérieurs à l'opération créatrice qui les a choisis parmi bien d'autres
ou prélevés dans des assemblages déjà réalisés pour en faire une construc
tion cohérente et logique, œuvre d'art véritable dont la solidité est à
l'épreuve du temps. »5
Ces motifs anciens se laissent repérer sans trop de difficultés. On en
trouve un certain nombre dans l'histoire de Jason et de Médée, qui relate
l'expédition des Argonautes à la recherche de la Toison d'Or. Jason doit
accomplir, comme le héros de La Fille du diable, des travaux difficiles
imposés par un roi magicien et n'y réussit qu'avec l'aide magique de
Médée, la fille de celui-ci. Elle s'enfuira avec Jason qui s'est emparé de
la Toison d'Or et s'emploiera à retarder son père qui les poursuit. Jason
délaissera plus tard Médée, comme le héros du T 313 oublie sa fiancée
ou épouse6.
des versions trouvées en Argentine du conte type 313 », et Vivian Labrie,
« Cartographie et analyse graphique de l'univers physique du conte à odyssée »,
in Le Conte, pourquoi ? comment ? (Folktales, why and how ?), Actes des
journées d'études en littérature orale. Analyse des contes — Problèmes de
méthodes, Paris, 23-26 mars 1982. Paris, Éd. du CNRS, 1984 (« Colloques
internationaux du CNRS »).
Rappelons, avec P. Delarue & M.-L. Tenèze {Catalogue : 49), que « chaque
conte type est désigné par le numéro de la classification admise internationa
lement par tous les folkloristes [...] et dite classification Aarne-Thompson,
en abrégé Aa-Th. » Chaque conte type est donc pourvu d'un numéro précédé
de la lettre T et d'un titre : T 313 La Fille aide le héros dans sa fuite pour le
conte type étudié ici.
2. S. Thompson, The Folk-tale, Berkeley, University of California Press, 1977 : 9°-
3. G. Basile, The P entamer one. Translated and edited by B. Croce & N.-M. Pen-
zer, London, 1932, 2 vol.
4. Catalogue : 240.
5. Ibid. : 234.
6.: 237, et Grace Knapp, « The Motifs of the Jason and Medea Myth Au Miroir d'Orphée 61
S. Thompson différencie trois sous-types de ce conte, mais les auteurs
des divers catalogues nationaux n'ont pas tous adopté ce classement qui
n'est pas fondé sur des critères cohérents. Les sous-types 313 A et 313 B
se distingueraient par des motifs d'introduction différents : le « garçon
promis au diable » dans 313 A et La Guerre des animaux (T 222) pour
313 B — ce dernier faisant appel à des thèmes très anciens retrouvés
notamment dans la légende babylonienne d'Etana7. Cette forme parti
culière du conte — dont le corpus français ne connaît qu'une seule ver
sion8 — pose des problèmes difficiles à résoudre en raison de l'apparente
hétérogénéité entre l'épisode introductif et le récit lui-même. Enfin, le
sous-type C serait caractérisé par un long épisode dit de « la fiancée
oubliée », placé à la suite de la narration. Notre hypothèse implique que
cet épisode fait organiquement partie du conte, bien qu'il soit précédé
immédiatement de ce qui pouvait apparaître comme une conclusion
suffisante à certains conteurs. Parmi les quatre-vingt-huit versions fran
çaises recensées en 1957 par P. Delarue, un tiers environ comporte cet
épisode final de la fiancée oubliée. La proportion est à peu près la même si
l'on inclut les versions de langue française d' « outre-mer » : Canada,
Louisiane, Antilles, etc. Notre corpus sera donc constitué pour l'essentiel
par les versions françaises de ce conte type et, parmi ces versions, par
celles qui comportent l'épisode de la fiancée oubliée, puisqu'elles repré
sentent, à notre avis, la forme structurellement complète de la narration.
Nous voudrions en effet mettre au jour 1' « opération créatrice » — pour
reprendre les termes de P. Delarue — qui a permis, en assemblant des
motifs narrat

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