Poésie populaire, poésie nationale. Deux intercesseurs : Fauriel et Mme de Staël - article ; n°35 ; vol.12, pg 3-24
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Description

Romantisme - Année 1982 - Volume 12 - Numéro 35 - Pages 3-24
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Andrée Denis
Poésie populaire, poésie nationale. Deux intercesseurs : Fauriel
et Mme de Staël
In: Romantisme, 1982, n°35. pp. 3-24.
Citer ce document / Cite this document :
Denis Andrée. Poésie populaire, poésie nationale. Deux intercesseurs : Fauriel et Mme de Staël. In: Romantisme, 1982, n°35.
pp. 3-24.
doi : 10.3406/roman.1982.4537
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1982_num_12_35_4537Andrée DENIS
Poésie populaire, poésie nationale.
Deux intercesseurs : Fauriel et Mme de Staël
Dans l'essai intitulé Briefwechsel uber Ossian und die Lieder
alter Wolker, Herder regrette que les Allemands, ardents à imprimer les
œuvres des auteurs modernes, n'aient pas, à l'exemple des Anglais et
des Français, recueilli « les chansons du peuple », qu'on entend « dans
les rues, les ruelles et sur les marchés, dans les rondes naïves des pay
sans, chansons qui souvent ne sont pas scandées, ou dont la rime est
mauvaise » (1). Malgré cette antériorité des efforts français dans la
collecte des textes anciens, l'expression « poésie populaire » évoque
davantage pour nous les noms des chercheurs et philosophes de l'école
romantique allemande : Herder, Brentano et Arnim, A. W. Schlegel,
les frères Grimm ; encore qu'un moment de réflexion nous ramène
à celui qui fut un des pères spirituels de la pensée romantique et peut-
être lui-même des romantiques l'un des plus authentiques : Rousseau.
C'est dans le perspective des échanges entre les deux cultures,
française et allemande, que nous situons notre étude, car un dialogue
et une discussion se sont instaurés entre leurs représentants, non seul
ement au niveau des idées, mais dans les faits eux-mêmes.
Il peut sembler paradoxal d'inclure Mme de Staël dans ce débat,
puisqu'il lui est communément fait reproche de ne guère s'être intéressée
à la poésie populaire. A ce titre, on pourrait dire qu'elle est représent
ative de l'attitude dominante des Français. Mais elle joue un rôle
trop important dans la connaissance de l'Allemagne pour être négligée ;
dans De l'Allemagne, en filigrane souvent, nous reconnaissons des
théories d'Outre-Rhin ; d'autre part, elle fut une médiatrice effective
entre Fauriel et les Allemands, sur le plan des faits, tout au moins.
Fauriel qui connaissait Mme de Staël, attira vraiment son attention
par son article sur De la Littérature, paru dans la Décade Philosophique
(mai-juin 1800). Il ne pouvait qu'être intéressé par les relations qu'elle
établit entre littérature et société ; la compétence de Fauriel et sa
sûreté de jugement se font déjà jour au courant des théories de
Wolf, il lui reproche en particulier d'admettre, à propos des poésies
homériques,
« sans aucun doute et sans discussion, que ces poèmes sont l'ouvrage
d'un homme et sont antérieurs à tout autre poème grec. Ces faits ont été
souvent contestés, et l'une des considérations qui prouve qu'ils peuvent
(1) Briefwechsel Hamburg, 1773, dans Sturm und Drang. Kritische Schriften,
Heidelberg, Verlag Lambert Schneider, 1949, p. 539. Andrée Denis
l'être encore, c'est l'impossibilité où l'on est de les concilier avec plusieurs
des faits les mieux constatés de l'histoire des connaissances humaines. » (2)
Sainte Beuve, qui a identifié l'article, en loue le sérieux, et pense
que Fauriel exerça sur Mme de Staël, un des premiers, « une action
intellectuelle » (3). Quant à nous, nous remarquerons la référence aux
faits : manifestation de l'esprit scientifique que Fauriel appliqua à ses
recherches. Après cet article s'établit entre et Mme de Staël
une amitié — passionnée de la part de cette dernière — qui subit un
refroidissement lorsqu'en 1 802 Fauriel se lia avec Mme de Condorcet.
Mais les relations se maintinrent ; c'est chez elle que Fauriel rencontra
plus assidûment Frédéric Schlegel, avec qui il avait appris le sanscrit
prè£ de Chézy ; et qu'il fit la connaissance ď August Wilhelm. Les rela
tions entre les deux hommes furent durables ; à la mort de Mme de
Condorcet, en 1822, August Wilhelm invita Fauriel à Bonn, mais
celui-ci préféra se rendre à Brusuglio, près de Manzoni (4). C'est à
juste titre que M. Duranton, dans son étude sur le « Mythe troubadour »
vu par le groupe de Coppet, l'incorpore à ce groupe (5) ; si ses œuvres
parurent sous la Monarchie de Juillet, il s'est occupé de la poésie
provençale et des origines des chansons de geste dès les premières
années du siècle, et celui que Sainte Beuve appelle « l'inoculateur de
la plupart des esprits distingués de ce temps-ci en histoire, en méthode
littéraire, en critique » (6) n'a pas manqué d'agir sur ses amis, tout
comme ses idées se sont formées et fortifiées au cours d'une confron
tation ininterrompue avec les leurs. Ajoutons que Fauriel connut
aussi personnellement Jacob Grimm en 1814, et que les deux hommes
restèrent en rapport (7). Sans établir de classement, on peut dire
qu'avec Raynouard, A. W. Schlegel, Friedrich Diez, Fauriel fut l'un
des fondateurs de la philologie romane. Son originalité nous paraît
consister en la liaison qu'il établit entre poésie populaire et poésie
savante, par la dimension sociologique qu'il donne à son étude (dépas
sant Diez nousa-t-il semblé) ; le recueil des Chants populaires de la
Grèce moderne, et notamment la Préface, ainsi que le Cours sur La
poésie populaire des Serbes et des Grecs sont l'illustration et la justi
fication moderne des vues exposées dans les Cours sur YHistoire de la
poésie provençale et sur Dante et les origines de la langue et de la
littérature italiennes (8).
(2)Claude La Décade Fauriel Philosophique, et la fortune européenne 10, 20, 30 prairial des poésies an VIII populaires ; cit. par grecque Miodrag et Ibrovac, serbe,
Paris, Didier 1966, p. 311.
(3) Sainte-Beuve, Portraits contemporains, Paris, 1846, t. 2.
(4) J.-B. Galley, Claude Fauriel membre de l'Institut, St-E tienne, 1909.
(5) H. Duranton, « L'interprétation du mythe troubadourpar le groupe de Coppet »,
Colloque de Coppet, 1974, dans Actes et documents du deuxième colloque de
Coppet, Genève, Slatkine ; Paris, Champion, 1977, p. 344-373.
(6) Sainte-Beuve, Revue des Deux-Mondes, t. X, 1845, p. 63 1.
(7) M. Ibrovac, ouvr. cité, p. 77.
(8) Chants populaires de la Grèce moderne, Paris, 1824, 2 vol. ; Histoire de la poésie
provençale, cours fait par M. Fauriel à la Faculté des lettres de Paris, 1830-31,
Paris, 1846 ; La Poésie populaire des Grecs et des Serbes, cours professé en Sor
bonně (1831-32), édité par M. Ibrovac dans Fauriel et la fortune européenne... ;
Dante et les origines de la langue et de la littérature italiennes, cours professé en
Sorbonně (1833-34), Paris, 1854. populaire 5 Poésie
Avant d'aborder l'étude des œuvres de nos deux auteurs, nous
croyons bon de préciser quelques notions et leur utilisation, qui sont
au cœur du débat sur la poésie populaire : Naturpoesie (poésie de la
nature) ; Kunspoesie (poésie savante ou cultivée) - Fauriel dit aussi
« poésie artiste » (9) - ; et Volkspoesie (poésie populaire). Il ne s'agit
certes pas de faire un historique de leurs variations d'un auteur à
l'autre, ou chez un même auteur. Dans ce domaine fluctuant, nous
essaierons plutôt d'envisager des problématiques différentes, naissant
de leurs combinaisons diverses, entre elles ou avec d'autres éléments.
Comme nous l'avons signalé, l'un des précurseurs au 18eme siècle
fut Rousseau. Nous nous rappelons tous le texte de la Nouvelle Héloïse,
qui évoque les chansons des vendangeuses à la veillée :
« la plupart de ces chansons sont de vieilles romances dont les airs ne sont
pas piquants ; mais ils ont je ne sais quoi d'antique et de doux qui touche
à la longue. Les paroles sont simples, naïves, souvent tristes ; elles plaisent
pourtant » ;
et le musicien commente :
« [...] je suis convaincu que de toutes les harmonies il n'y en a point
d'aussi agréable que le chant à l'unisson, et que, s'il nous faut des accords,
c'est parce que nous avons le goût dépravé. En effet, que pouvons-nou

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