Redistribution foncière et différenciation sociale  au Vietnam : une étude de cas dans le delta du fleuve Rouge - article ; n°153 ; vol.39, pg 161-174
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Redistribution foncière et différenciation sociale au Vietnam : une étude de cas dans le delta du fleuve Rouge - article ; n°153 ; vol.39, pg 161-174

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Tiers-Monde - Année 1998 - Volume 39 - Numéro 153 - Pages 161-174
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Du Van Chau
Redistribution foncière et différenciation sociale au Vietnam :
une étude de cas dans le delta du fleuve Rouge
In: Tiers-Monde. 1998, tome 39 n°153. pp. 161-174.
Citer ce document / Cite this document :
Van Chau Du. Redistribution foncière et différenciation sociale au Vietnam : une étude de cas dans le delta du fleuve Rouge.
In: Tiers-Monde. 1998, tome 39 n°153. pp. 161-174.
doi : 10.3406/tiers.1998.5224
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_1998_num_39_153_5224REDISTRIBUTION FONCIERE
ET DIFFÉRENCIATION SOCIALE
AU VIETNAM
Une étude de cas dans le delta du fleuve Rouge1
par Du Van Chau*
Depuis 1981, le Vietnam a procédé à une décollectivisation progressive
de son agriculture. Les terres ont été réparties entre les paysans, qui jouis
sent à présent d'une très grande liberté dans la gestion de leurs exploitations.
Ces réformes, ainsi que l'ouverture au marché, ont fortement stimulé la pro
duction. Cependant, bien que leur objectif ait été d'effectuer une répartition
égalitaire, elles n 'ont pas modifié les inégalités antérieures entre les paysans.
C'est ainsi que dans la commune de Thanh Thuy, ici étudiée, ceux qui possé
daient d'importantes terres de vergers (qui n'ont été affectées ni par la col
lectivisation ni par les répartitions ultérieures) ont pu profiter beaucoup plus
que les autres de la libéralisation du marché des produits et de la terre, ce qui
a eu pour conséquence d'accroître fortement les inégalités.
La commune de Thanh Thuy est située au sud-est du district de Nam
Thanh, dans la province de Hai Hung (delta du fleuve Rouge) au nord du
Vietnam. Depuis 1972, nous y menons des recherches dans le cadre du
Programme Fleuve Rouge, programme de recherche franco-vietnamien
sur l'évolution des problèmes ruraux dans cette région. Une attention est
portée plus particulièrement aux questions foncières, telles qu'elles se
posent depuis 1988, date de début de la politique de rénovation écono
mique (Doi Moi), de restauration de l'économie de marché et de redistr
ibution de la majeure partie des terres entre les paysans. L'analyse que
nous présentons ici des résultats des enquêtes réalisées montre comment
les réformes foncières successives ont modifié la gestion et la productivité
des exploitations agricoles, mais aussi accru les disparités entre paysans.
* Ingénieur agronome, Institut national des sciences agronomiques (Hanoi-Vietnam).
1 . Article rédigé avec la collaboration de Maxime Haubert et, pour la traduction, de Nguyen Trong
Nam Trân.
Revue Tiers Monde, t. XXXIX, n° 153, janvier-mars 1998 162 Du Van Chau
La population rurale du delta dépasse aujourd'hui les 13 millions
(dont 2,6 millions dans la province de Hai Hung), soit une densité
moyenne supérieure à 10 hab./ha cultivé. Dans la commune de Thanh
Thuy, la superficie moyenne cultivée par habitant était en 1992 de
770 m2 (337 ha pour 4 379 habitants, soit 1 223 foyers).
Si l'on considère uniquement les cultures annuelles, base de la
consommation familiale, les potentialités de la commune paraissent fai
bles : alors que, dans le reste du district, en particulier au nord, les terres
utilisables au cours de la même année pour trois saisons culturales (les
meilleures terres rizicoles) occupent de 50% à 70% de la superficie
cultivable, elles n'en couvrent que 25 % à Thanh Thuy. Cependant, bien
que la principale occupation soit la riziculture, la plus grande partie des
revenus provient des vergers, lesquels couvrent 57 ha, soit près de 20 %
de la superficie totale cultivée. Ils sont soit diversifiés (orange, clément
ine, pomme, cannelle...), soit spécialisés dans la production de litchis.
Le litchi de Nam Hà (dans la commune de Thanh Thuy) est réputé et
surnommé « la Princesse » des fruits.
Pour comprendre l'importance des vergers, et particulièrement de
ceux qui sont plantés en litchis, dans l'économie paysanne et dans les
transformations qu'elle a connues au cours de la période récente, il est
nécessaire de rappeler brièvement l'évolution des régimes de répartition
et de gestion de la terre au Nord- Vietnam.
APERÇU SUR LA POLITIQUE AGRAIRE DE 1960 A NOS JOURS
L'organisation de l'agriculture vietnamienne est passée par plusieurs
étapes. Pour ce qui concerne le delta du fleuve Rouge, les principaux
jalons ont été les suivants.
De 1960 à 1981, c'est la période collectiviste, pendant laquelle la pro
duction agricole est presque totalement du ressort des coopératives de
production, les paysans ne conservant pour leur production autonome
que des lopins familiaux, généralement attenants aux habitations et dont
la superficie totale ne dépasse pas en moyenne 5 % des terres cultivables.
Les activités des paysans, dans l'agriculture ou en dehors de celle-ci, sont
rémunérées par des points-travail (10 points-travail = 1 công). A la fin de
la saison culturale, le produit des récoltes est réparti au prorata des côngs
obtenus. Dans un tel contexte de rapports de production, les paysans ont
tendance à penser que la terre et le bétail appartiennent à la coopérative1.
1 . Cf. Nguyen Due Nhuan, Les contradictions de l'organisation scientifique de l'espace et du travail
agricoles au Nord- Vietnam, 1954-1981, L'espace géographique, n" 2, 1982, p. 81-94. Redistribution foncière et différenciation sociale 163
En 1981, к directive n°100 donne aux paysans davantage de possibil
ités pour augmenter leurs revenus. Tout en conservant leurs lopins
familiaux, ils reçoivent des parcelles de rizières, sous contrat, de la coo
pérative. Celle-ci rémunère la force de travail sur les superficies contract
uelles. En fin de saison, les points attribués sont convertis en produits.
Par exemple, lorsque la coopérative remet à un foyer un sào1 de rizières
de catégorie 1, qui vaut 10 côngs, le foyer lui doit une redevance
de 150 kg de paddy. Si le rendement du groupe familial dépasse cette
quantité, le surplus lui est acquis. Dans cette période, le paysan subit
deux contraintes :
— en premier lieu, le travail de la main-d'œuvre est converti en denrées
produites, mais seulement après que la coopérative ait déduit toutes
les contributions dues à l'État (rémunérations des services tels que
l'irrigation et la fourniture de fertilisants, et autres prélèvements des
différentes caisses de la coopérative) ;
— en deuxième lieu, bien que le paysan puisse bénéficier du surplus si
sa production dépasse les quantités déterminées dans le contrat, les
prélèvements sont très élevés et les rendements bas. La valeur d'un
công (unité de valeur-travail) est faible à cause de la pluralité d'acti
vités autres qu'agricoles et donc du grand nombre de jcôngs corre
spondant aux différents métiers, ainsi qu'à des services administratifs
pesants, de type bureaucratique.
Au début de son application, la directive n° 100 a été acceptée avec
enthousiasme. Cependant, la valeur du point étant considérée comme
trop basse, les paysans se sont détournés du travail de la terre. A la fin
de la période, ils sont de plus en plus nombreux à rendre leurs rizières
contractuelles. Les résultats d'exploitation des terres coopératives s'en
sont ressentis et ont été très médiocres.
En 1988, la directive n° 10 officialise le retour à l'unité de production
familiale autonome. Les terres autres que celles relevant des lopins fami
liaux sont réparties de la manière suivante2 :
— 10% de la superficie cultivable est attribué définitivement aux pay
sans (terres dites « de 10% ») ;
— la majeure partie des autres terres cultivables est répartie entre les
familles (avec un plafond de 3 ha par famille), pour une durée de
trois à cinq ans, en fonction du nombre d'actifs (selon les disposi
tions officielles, un actif masculin est âgé de 17 à 60 ans et un actif
1 . Un sào équivaut à 300 m2.
2. Cf. Pascal Bergeret, La politique foncière au Vietnam, Études vietnamiennes (Hanoi), n" 1, 1995,
p. 33-47. 164 Du Van Chau
féminin de 17 à 55 ans; les enfants et les vieillards comptent pour
une moitié d'actif) ; la répartition se veut égalitaire, les terres étant

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