Réflexions sur l efficacité symbolique des productions culturelles - article ; n°1 ; vol.24, pg 37-52
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Description

Langage et société - Année 1983 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 37-52
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Davallon
Réflexions sur l'efficacité symbolique des productions culturelles
In: Langage et société, n°24, 1983. pp. 37-52.
Citer ce document / Cite this document :
Davallon Jean. Réflexions sur l'efficacité symbolique des productions culturelles. In: Langage et société, n°24, 1983. pp. 37-52.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lsoc_0181-4095_1983_num_24_1_1948SUR L'EFFICACITE SYMBOLIQUE REFLEXIONS
DES PRODUCTIONS CULTURELLES
J. DAVALLON
Le texte qui suit reprend une communication faite au Xle Colloque
de l'Association Internationale des Sociologues de Langue Française en sep
tembre-octobre 1982* Etant donné le contexte, nous avions mis l'accent sur
des aspects plus spécifiquement sociologiques, notre but étant précisément
de signaler l'importance des fonctionnements formels et signifiants (disons,
"sémiotiques") au sein même de certains processus sociaux.
Nous avons laissé à ce texte sa forme assez libre de plaidoyer pour
une sociosémiotique. Ainsi conçu, il constitue le contrepoint d'une autre
communication qui présentait la même thèse mais en la développant à l'adress
e de sémioticiens ; intitulée "Systèmes sémiotiques et rapports sociaux",
elle fut publiée dans Espace et représentation, Actes du Colloque et Albi
1981, Paris : Ed. de la Villette, 1982.
* Dans le Comité de Recherche "sociologie et sémiotique". Nous
remercions les participants à ce comité pour les remarques
qu'ils ont bien voulu faire à propos de cette communication -
et tout particulièrement Sylvia OSTROWETSKY (responsable du
Comité), Pierre BOUDON et Maurice ERARD. - - 38
Je me propose ici de porter à votre examen la thèse suivante : la
sémiotique nous offre aujourd'hui la possibilité et les moyens d'affiner et
de différencier, d'élargir et de développer notre approche des mécanismes
de la reproduction des rapports sociaux.
Inutile, ce me semble, de revenir longuement, avant de commencer,
sur l'importance du pouvoir de violence symbolique dans la reproduction -
c'est à dire le maintien et la transformation - des rapports de force
sociaux. Nous savons „ en tant que sociologues, qu'il existe une spécificité
proprement symbolique de l'exercice du rapport de force entre dominants et
dominés, en ce qu'il vient précisément ajouter, comme nous le rappelait
P. BOURDIEU, une force seconde au rapport de force lui-même, dissimulant
ce dernier par l'imposition de significations légitimes . Cette violence
symbolique, s'exerce au moyen certes d'institutions, mais aussi par l'inter
médiaire d'objets qui sont le résultat d'une production particulière : les
2 objets culturels .
1. Sur ce terme, se reporter à P. BOURDIEU ; J.C. PASSERON, La Reproduction :
Eléments pour une théorie du système d'enseignement, Paris : Ed. de Minuit,
1970, p. 18.
2. J'entends ici par objet culturel l'ensemble des objets concrets (livres,
écrits, peintures, images, films, architectures, sculptures, etc.) résultant
d'une production formelle et destinés à produire chez celui qui les reçoit
un "effet" symbolique (contemplation esthétique, adhésion à des valeurs,
production d'une croyance, etc.). Le terme d'oeuvre culturelle, qui est
parfois employé, risque de prêter à confusion pour réintroduire un jugement
de valeur entre ce qui est reconnu comme oeuvre d'art selon les règles du
gout légitime et les objets culturels moins valorisés (par exemple : voir
l'opposition entre art et publicité). Ces objets culturels sont donc en
fait des biens symboliques, c'est-à-dire les produits d'une économie et
d'un processus générateur qui leur sont propres ; et ils ont un mode d'opé-
rativité sociale qui tient à la fois à leur statut de biens symboliques et
au même de leur production comme objets symboliques. Sur ces
questions, consulter : P. BOURDIEU "La production de la croyance : contri
bution à une économie des biens symboliques", Actes de la recherche en
sciences sociales (13), fév. 1977, pp. 3-43 ; "Postface" in : E. PANOFSKY,
Architecture gothique et pensée scolastique, Paris : Ed. de Minuit, 1967,
pp. 133-167. H. PERETZ, "Culture (sociologie de la -)" in : Encyclopaedia
universalis . Voir aussi : L. MARIN, "Les sciences humaines et l'oeuvre d'art"
in : Encyclopaedia universalis, vol. 17, pp. 135-152. - - 39
Ce mode d'exercice de la domination a l'avantage de dispenser de
l'exercice continu d'une force nue, puisque ces objets fonctionnent en effet
comme des dispositifs qui "mémorisent" les rapports sociaux ainsi que les
raisons qui les légitiment. Simultanément, un tel processus de médiation de
la domination dénie l'origine proprement sociale de la violence ainsi que
ses enjeux ; la force des effets produits par l'objet semblant provenir
"tout naturellement" du pouvoir du langage ou bien encore du génie créateur.
La reconduction des rapports sociaux n'en apparaîtra elle-même que plus
naturelle.
Quelque soit la valeur heuristique de ce modèle sociologique, la
difficulté reste tout de même la définition de la procédure d'imposition des
significations : celle donc de la de la violence symbolique.
Ne conviendrait-il pas de distinguer ce qui est de l'ordre de la
reproduction politique des rapports de domination de ce qui appartient aux
mécanismes de reproduction sociologique des rapports sociaux: Du premier
relèverait une stratégie visant le maintien de la domination, tandis que le
second serait constitué d'un ensemble de mécanismes sociologiques, économiques,
sémiotiques qui assurent la reproduction de la société comme société et qui
sert de soubassement à la politique. Une telle distinction pourra
paraître parfaitement secondaire et de pure méthode, mais sans elle nous som
mes toujours enclins à doter les processus sociaux - et singulièrement les
processus d'imposition des significations - d'une aura d'intentionnalité. A
osciller entre une conception qui ne voit pas d'alternative à un contrôle
social exercé par les dominants, et une conception qui nous renvoie implaca
blement à la fatalité d'un déterminisme structurel. Dans un cas comme dans
l'autre, une "volonté dernière"(consciente ou non d'ailleurs, peu importe)
est érigée en instance originaire ; la violence symbolique correspond dès - - 40
lors à une transmission efficace des éléments de cette volonté aux
dominés afin qu'ils restent dominés ; et les objets culturels, "par définition",
ne sont que les simples outils de cette imposition.
En fait, la violence symbolique s'exerce de manière beaucoup plus
rusée ; et inversement, les processus symboliques ne sauraient être réduits
à l'exercice de cette violence. Cette dernière ne se trouve-t-elle pas, en
effet, à la charnière entre une stratégie visant la reproduction d'une domi
nation et les mécanismes de la reproduction des rapports sociaux ? Autrement
dit, ne s'exerce-t-elle pas selon une procédure de représentation des rapports
sociaux, réductrice des contradictions inhérentes à ces derniers ; et ce, en
offrant aux divers acteurs sociaux les langages (entendez : les outils sémio-
tiques) leur permettant de se représenter leur position et leur pratique
sociales ? Ce qui présupposera bien sur que toute activité signifiante soit
conçue comme une activité sociale, mais obligerait aussi de considérer que la
nécessité même d'une médiation sémiotique montre assez la complexité des deux
processus de reproduction différents et, a fortiori, celle de l'articulation
de la reproduction de la domination sur la reproduction des rapports sociaux.
Aussi avancerai-je l'hypothèse que les objets culturels sont au cen
tre de cette articulation, dans la mesure où ils en sont les opérateurs. Ques
tion méthodologique immédiate devant cette hypô-thèse : avons-nous réellement
les moyens d'une analyse des objets culturels selon un tel point de vue ? Mon
argumentation ira, vous vous en doutez bien, dans le sens d'une réponse positive,
Les deux conditions sans lesquelles il serait vain d'envisager un
quelconque examen de notre hypothèse, semblent pouvoir être satisfaites. Tout
d'abord, les développements récents de la sémiotique nous offrent aujourd'hui

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