Šev?enko, le poète national de l Ukraine - article ; n°1 ; vol.44, pg 89-107
20 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Šev?enko, le poète national de l'Ukraine - article ; n°1 ; vol.44, pg 89-107

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
20 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue des études slaves - Année 1965 - Volume 44 - Numéro 1 - Pages 89-107
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 39
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Marie Scherrer
Ševčenko, le poète national de l'Ukraine
In: Revue des études slaves, Tome 44, fascicule 1-4, 1965. pp. 89-107.
Citer ce document / Cite this document :
Scherrer Marie. Ševčenko, le poète national de l'Ukraine. In: Revue des études slaves, Tome 44, fascicule 1-4, 1965. pp. 89-
107.
doi : 10.3406/slave.1965.1887
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1965_num_44_1_1887SEVCENKO,
LE POÈTE NATIONAL
D K L'UKRAINE
PAR
MARIE SCHERRER
Si le nom de Ševčenko est connu en France, si son rôle de guide inspiré
de son peuple est admis par tous ceux qui s'intéressent au domaine slave,
son œuvre, par contre, reste peu connue et les quelques traductions assez
médiocres ne donnent qu'une idée imparfaite de l'envergure de son génie.
Lacune imputable surtout à la difficulté de rendre en français une poésie
fondée essentiellement sur le folklore ukrainien avec son arsenal de procédés
traditionnels : métaphores, épithètes constantes, emplois de diminutifs...
Cette poésie s'explique par les origines paysannes du poète, de cet enfant
du peuple qu'une ascension prodigieuse éleva au rang de porte-parole de
son pays. Vie et œuvre intimement liées au destin de sa patrie et que le
poète a résumées en cette phrase : « L'histoire de ma vie est une partie de
l'histoire de l'Ukraine » M.
Fils de serfs, il est né le 9 mars 1814 au village de Morynci, dans la
région de Zvenyhorod, au Sud de Kyj iv. Très jeune il eut le malheur de
perdre sa mère d'abord, son père deux ans plus tard. Resté orphelin à onze ans
il devint le souffre-douleur de sa belle-mère. Sensible, ombrageux, insoumis,
l'enfant faisait des fugues fréquentes; durement corrigé il recommençait à
nouveau, car il avait une idée bien arrêtée, celle de trouver un maître capable
de lui enseigner le dessin. Il avouera plus tard avoir volé de l'argent à son
maître d'école, le sacristain du village, pour s'acheter du papier et des crayons.
Enfance errante, vagabonde où la faim et le froid étaient les compagnons
habituels du petit Taras, elle a profondément marqué le poète et le sort
des enfants malheureux reviendra avec insistance dans ses vers.
í1) Тарас Шевченко, Повне зібраний творів в 6 томах, Киїн, 1963, Ак. наук УРСР,
V, р. 254. 90 MARIE SCHERRER
À l'âge de quatorze ans il échoua comme petit valet attaché à la personne
de son maître, le comte d'Engelhardt, propriétaire d'immenses domaines
hérités du prince Potemkin. Ses dons exceptionnels pour le dessin lui valurent
d'être envoyé à Saint-Pétersbourg, en apprentissage chez un artisan déco
rateur. Pendant quatre ans il mena l'existence peu enviable de l'apprenti
traité en domestique. Ne disposant que de ses nuits, il se rendait en cachette
au Jardin d'Été et là, à la lumière diffuse des nuits blanches, il dessinait
les statues qui ornent le parc. Un de ses compatriotes, le peintre Sošenko,
élève à l'École des Beaux-Arts, le découvrit et fut frappé par les dessins
du jeune apprenti timide, renfermé, à l'aspect misérable.
A partir de ce moment l'existence du jeune homme prit un cours différent.
Son nouvel ami lui fit connaître Eugène Hrebinka (1812-1848), écrivain
ukrainien d'un certain renom, auteur des Contes petits-russiens et traducteur
de la Poltava de Puškin. Sa maison hospitalière accueillait les hommes de
lettres russes et ukrainiens; c'est dans sa bibliothèque que le futur poète
puisa les livres qu'il lisait avidement pour rattraper le temps perdu. Le
cercle de ses amis et protecteurs ne tarda pas à s'élargir : le talent du jeune
serf, son destin malheureux, son charme personnel lui attirèrent la sym
pathie d'un autre compatriote Vasyľ Hryhorovyč, professeur d'esthétique à
l'École des Beaux-Arts, et du vieux Venecianov, peintre à la cour impériale.
Par leur intermédiaire il fut introduit auprès du poète Žukovskij et enfin
il eut l'insigne privilège d'être présenté au grand Brjullov, revenu de Rome
avec son célèbre tableau Le dernier jour de Pompéi que Walter Scott en
personne était venu admirer à Rome et dont il avait dit que « c'était plus qu'un
tableau, c'était une épopée » ^.
Ses nouveaux amis décidèrent d'affranchir le jeune homme. Brjullov
consentit à se rendre personnellement chez le comte d'Engelhardt pour le
convaincre de la nécessité d'accorder la liberté à ce peintre de talent. Peine
perdue, le comte, homme pratique, ne l'entendait pas de cette oreille. Il
exigea la somme énorme de 2.500 roubles en assignats pour cette valeur
marchande sûre. Force fut de s'incliner et de se procurer la somme demandée.
On décida alors d'organiser une loterie avec pour lot unique le portrait de
Žukovskij, exécuté par Brjullov. Une partie importante de billets fut achetée
par la famille impériale, circonstance qui, plus tard, aura des répercussions
fâcheuses sur le destin du poète.
Le 22 mai 1838 fut, sans doute, le jour le plus beau dans sa vie : devenu
un homme libre il acquérait le droit de s'inscrire à l'École des Beaux-Arts.
Devenu l'élève préféré du grand maître, il fut admis dans son intimité. Du
jour au lendemain il passait de sa misérable mansarde dans le somptueux
atelier de Brjullov.
Pendant quelques années il mena une existence heureuse, exempte de
soucis matériels. La bourse accordée par la « Société pour l'encouragement
des arts », l'argent gagné en faisant des portraits, lui permirent de s'acheter
<x) Павло Зайцев, Життя Тараса Шевченка, HTILI, 1955, p. 49. ŠEVČENKO 91
des vêtements décents, élégants même. Dans ses souvenirs il parie avec
attendrissement d'une de ses premières acquisitions vestimentaires, un
magnifique imperméable aux reflets éblouissants. Il put goûter aux joies
et aux plaisirs autrefois inaccessibles, fréquenter les réunions littéraires et
artistiques, aller aux concerts, au théâtre, aux expositions.
Jusqu'en 1838 il est connu comme peintre de talent : rien ne laisse prévoir
sa vocation de poète. Les témoignages des contemporains sur sa nouvelle
orientation sont pratiquement inexistants. Est-ce la mort du poète Kotlja-
revs'kyj, survenue en 1838 et ressentie comme une perte douloureuse par
les Ukrainiens, qui incita Ševčenko à lui consacrer une élégie? Ou un album
de croquis rapporté par son excellent ami, le peintre Wiïly Sternberg, et
qui lui rappela son pays ? Ou simplement la nostalgie de ce méridional,
transplanté dans la capitale froide et brumeuse, ainsi qu'il le suggère dans
un de ses contes lorsqu'il écrit qu'assis dans l'atelier de son maître, rêvant
devant ses tableaux, il voyait surgir dans son imagination les steppes infinies
d'Ukraine où chevauchaient les cosaques... (1).
Eugène Hrebinka mis dans la confidence l'incita vivement à persévérer et
le décida à publier son premier poème, La folle, dans l'almanach ukrainien
Lastivka publié à Saint-Pétersbourg en 1841. Encouragé par ce succès,
Ševčenko composa en un an les poèmes : Kateryna, Le peuplier, Ivan Pidkova,
La nuit de Taras. Lorsqu'en 1840 parut son premier recueil, le Kobzar,
nom donné en Ukraine aux chanteurs populaires, ce fut l'enthousiasme
général. L'Ukraine entière se reconnut dans ces œuvres issues du sol natal,
pénétrées de traditions folkloriques et historiques, mais transformées, trans
figurées par le génie du poète, écrites en vers mélodieux, légers où toutes
les ressources d'une langue harmonieuse étaient utilisées avec maîtrise.
Le Kobzar fut suivi à un an de distance par les Hajdamaky, poème sur
une révolte paysanne au xvine siècle.
En 1843, le poète décida de se rendre en Ukraine. Il arrivait dans son
pays auréolé de gloire, et son voyage fut une tournée triomphale. Les maisons
les plus aristocratiques s'ouvrirent devant lui. Il fut invité par le riche et
prétentieux Grégoire Tarnovs'kyj lequel jouait volontiers au mécène et
protecteur des artistes. Par Tat'jana Volchovs'ka, vieille dame excentrique,
connue par ses fastueuses réceptions dans son magnifique domaine, su
rnommé le « Versailles ukrain

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents