Shimomura Toratarô et sa vision de la machine - article ; n°1 ; vol.40, pg 115-125
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Description

Ebisu - Année 2008 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 115-125
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2008
Nombre de lectures 14
Langue Français

Extrait

Osamu Kanamori
Augustin Berque
Britta Boutry-Stadelmann
Nathalie Frogneux
Suzuki Sadami
Shimomura Toratarô et sa vision de la machine
In: Ebisu, N. 40-41, 2008. Actes du colloque de Cerisy. "Être vers la vie. Ontologie, biologie, éthique de l'existence
humaine". pp. 115-125.
Citer ce document / Cite this document :
Kanamori Osamu, Berque Augustin, Boutry-Stadelmann Britta, Frogneux Nathalie, Sadami Suzuki. Shimomura Toratarô et sa
vision de la machine. In: Ebisu, N. 40-41, 2008. Actes du colloque de Cerisy. "Être vers la vie. Ontologie, biologie, éthique de
l'existence humaine". pp. 115-125.
doi : 10.3406/ebisu.2008.1525
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ebisu_1340-3656_2008_num_40_1_1525n" 40-41 , Automne 2008 - Été 2009 Ebisu
Ohimomura toratarô
et sa vision de la machine
KANAMORI Osamu
Université de Tokyo
Terre inconnue
Au Japon, la philosophie des sciences a brillamment commencé par un
groupe d'écrits importants deTanabe Hajime [fijÉ/û (1885-1962) : Saikin
no shizen kagaku ïj4?5^)f'jMf4'T: (La science de la nature de nos jours)
[1915]; Kagaku gairon f4^fl!PE Ira (Traité des sciences) [1918] ; Suri tetsugaku
kenkyû WLMM^f-^% (Études sur la philosophie des mathématiques)
[1925]. En particulier le Traité des sciences a été reçu chaleureusement
par les lecteurs japonais, et a laissé une influence persistante. Seulement,
ces écrits introduisaient presque sans changements les débats des écoles
néo-kantiennes qui étaient prédominantes à cette époque en Europe.
Shimomura Toratarô TtJï^&ÉP (1902-1995), l'objet de notre com
munication, a une orientation plus proche des études sur l'histoire des
sciences1. Même parmi les illustres membres de l'école de Kyoto, et dans la
lignée de Tanabe, c'est Shimomura - qui avait sans doute une coloration
rationaliste très forte - qui a contribué le plus directement à l'histoire
des sciences par sa trilogie Shizen tetsugaku ElMf?^ (Philosophie de la
nature) [1939], Kagaku shi no %"f-^.<7)^^ de
l'histoire des sciences) [1941] et Mugen-ron no keisei to kôzô M
' Shimomura avait également été grandement influencé par l'école néo-kantienne.
Il semble qu'il ait été impressionné par les écrits de Hermann Cohen, et il note
lui-même : « La pertinence logique des néo-kantiens me fait éprouver une émot
ion proche du sentiment esthétique » (Shimomura Toratarô, Esse biburiogurafikku
x -y -b • t* 7* V •% fy 7 -i y 9 (Essai bibliographique), Tokyo, Misuzu shobô &T ~fWW,
1999, p. 301). 116 KANAMORI Osamu
t$i?j| (Formation et structure de la théorie de l'infini) [1944]2. Or, ces
œuvres n'ont pas été écrites dans une atmosphère purement scientifique
ou académique. On le comprend en regardant les dates de publication :
à l'arrière-plan de ce qui poussait Shimomura à débattre de l'histoire des
sciences, c'était la Deuxième Guerre mondiale qui dévoilait le visage d'une
guerre scientifique et technologique. En fait, il y a la remarque suivante
dans Philosophie de l'histoire des sciences :
Aujourd'hui, la science ne se pose plus en simples termes de formation
et d'éducation, on est arrivé à un point où il s'agit de la discuter en tant
que problème fondamental de mesures politiques, de mesures national
es. [...] C'est pour ainsi dire un changement de perspective, on passe d'un
point de vue humaniste, mondialiste, à un point de vue politique et national
iste. Aujourd'hui, la science n'est plus ce que les scientifiques du xvne siècle
avaient intentionné, à savoir une discipline « pour la gloire de Dieu », mais
une discipline « pour l'essor de la nation ». [...] Dans l'état du monde
d'aujourd'hui, la science décide de la grandeur ou du déclin d'un pays, et on
ressent très franchement qu'elle est justement ce qui détermine l'existence
même de l'Etat3.
Ce qui ressort clairement par exemple dans de nombreux livres publiés
par un éditeur qui s'appelait Société pour l'industrie scientiste (Kagakushugi
kôgyôsha f4^i4HH£t) à peu près à la même époque, est que l'enco
uragement de la science visait avant tout à encourager la technologie, et que
l'encouragement de la technologie était l'antichambre pour l'essentiel :
l'augmentation du prestige de l'État et la haute efficacité sur les champs
de bataille. Shimomura, tout comme beaucoup d'autres intellectuels, était
conscient de cette situation.
Or, ce qui fait que les écrits précoces de Shimomura méritent encore
aujourd'hui d'être lus, c'est que l'auteur dépassait l'actualité de son époque,
soutenue par ce type de conscience de la situation, pour mettre en place
une problématique de type universel. Ce n'est pas que les études d'histoire
des sciences, au Japon, aient commencé avec Shimomura. Néanmoins, les
analyses que l'auteur avait fournies dans ses trois écrits précoces ont conféré
à l'histoire des sciences une signification en termes d'histoire de la pensée,
et ils comportaient des éléments qui intéressaient même les non spécial
istes. Sa devise maintes fois répétée était que ce n'est pas « l'histoire des
sciences », mais « l'histoire qui mène vers les sciences » qu'il fallait garder
2 Les trois textes sont réunis dans le recueil Suri tetsugaku, kagakushi no tetsugaku
WM.^^- ' f^iÈOfri^ (Philosophie des mathématiques et philosophie de l'histoire des
sciences), Tokyo, Misuzu shobô &"f"f iSjSK 1988. Dans cet exposé, les indications ne
renvoient pas à la première édition, mais à ce recueil.
3 Shimomura Toratarô, Suri tetsugaku, kagakushi no tetsugaku, op. cit., p. 293. Toratarô et sa vision de la machine 1 1 7 Shimomura
au centre de l'attention, et cette devise ouvrait l'horizon de l'histoire des
idées scientifiques qui portait à maturité l'histoire des sciences naturelles.
Shimomura, de son temps, a élevé d'un cran le niveau des recherches en
histoire des sciences au Japon. Philosophie de la nature (1939) investigue
en termes d'histoire conceptuelle les trois stades de développement de la
physique - la mécanique classique, l'électro-magnétique du xixe siècle et la
théorie quan tique du début du xxe siècle. Formation et structure delà théorie
de l'infini (1944), tout en donnant une vue d'ensemble des débats en méta-
mathématiques, présente une vision des mathématiques qui est proche du
formalisme de Hilbert4. Philosophie de l'histoire des sciences (1941) évoque
les mathématiques théoriques fondées principalement en Grèce antique
et éclaire, de manière philosophique, ce qu'elles apportèrent en tant que
connaissances authentiques pour le développement ultérieur de la civi
lisation en Europe. Nous aborderons ce dernier texte à nouveau un peu
plus loin.
Certes, le Shimomura des années suivantes est difficile à classer comme
historien des sciences ou historien de la pensée scientifique. En particulier
à partir de son voyage en Europe, alors âgé d'environ cinquante-cinq ans5,
il a continuellement élargi son champ de recherche, et il est difficile de
dresser un portrait unique, unifié, de son monde intellectuel. Lorsqu'il
s'agit de ses écrits sur les artistes de l'époque de la Renaissance comme
Léonard de Vinci ou Albrecht Durer, cela passe encore. Ces personnalités
étaient actives à une époque où art et science étaient encore considérés
comme un ensemble ; et si l'on tient compte des fondements mathémat
iques de la représentation de l'espace selon les lois de la perspective, le
contenu de leurs travaux intéresse largement l'histoire des sciences. Mais
quand il s'agit de saint François d'Assise, qu'en est-il6 ? Lorsqu'on prend
en considération le tempérament de Shimomura et les résultats de ses pre
miers travaux, on peut dire qu'il y a une certaine continuité s'il s'intéresse
à l'ordre des Dominicains. Mais quant à saint François d'Assise, même si
on essaie de trouver une quelconque unité ou continuité avec les autres tr
avaux de Shimomura, on ne peut guère trouver de lien avec le rationalisme
"* David Hilbert (1862-

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