Stratégie de distinction et dynamique des conventions : suggestions de complications (Commentaire) - article ; n°1 ; vol.18, pg 23-34
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Description

Sciences sociales et santé - Année 2000 - Volume 18 - Numéro 1 - Pages 23-34
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 6
Langue Français

Extrait

Géraldine Bloy
Stratégie de distinction et dynamique des conventions :
suggestions de complications (Commentaire)
In: Sciences sociales et santé. Volume 18, n°1, 2000. pp. 23-34.
Citer ce document / Cite this document :
Bloy Géraldine. Stratégie de distinction et dynamique des conventions : suggestions de complications (Commentaire). In:
Sciences sociales et santé. Volume 18, n°1, 2000. pp. 23-34.
doi : 10.3406/sosan.2000.1480
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/sosan_0294-0337_2000_num_18_1_148023
Sciences Sociales et Santé, Vol. 18, n° 1, mars 2000
Stratégie de distinction
et dynamique des conventions :
suggestions de complications
Commentaire
Géraldine Bloy*
P. Batifoulier et F. Bien examinent plusieurs modèles de jeu de coor
dination issus de la théorie des conventions dans le but de rendre intell
igibles les comportements des médecins en matière de choix tarifaire
durant la période 1980-1990. Quelques modèles relativement simples de
théorie des jeux ont le mérite de rendre compte du choix d'un secteur tari
faire appréhendé ici non pas comme un problème de décision d'un indi
vidu souverain mais comme un problème de coordination des acteurs au
sein du corps médical.
Nos remarques invitent à une réflexion sur les limites de l 'outil pré
senté ici — limites envisagées pour certaines par les auteurs dans leur
conclusion — et proposent d'un point de vue sociologique un certain
nombre de pistes susceptibles d'enrichir le modèle. Elles s'organisent
autour de deux questions principales : comment articuler mimétisme et
distinction pour rendre compte des choix tarifaires des médecins libé
raux ? Comment penser le travail de coordination des acteurs, en l'o
ccurrence des médecins ?
* Géraldine Bloy, sociologue, Institut d'histoire contemporaine, UFR STAPS,
Université de Bourgogne, BP 138, 21004 Dijon Cedex, France. GERALDINE BLOY 24
Les hypothèses que nous formulons ont été élaborées, pour l'essent
iel, à l'occasion d'une enquête qualitative menée par entretiens auprès
de médecins généralistes libéraux, toutes n'ont pas été testées... Loin
d'apporter des conclusions définitives, elles constituent, à bien des
égards, un programme de recherche sur lequel économie et sociologie
gagneraient à intensifier leur dialogue.
Conformisme et distinction
La thèse des auteurs est que le choix du secteur tarifaire est le fait
de médecins qui n' engagent pas une stratégie de différenciation ou de dis
tinction par rapport à leurs confrères mais plutôt une stratégie de mise en
conformité par à un système de décisions et d'attentes. Dans cette
lecture par les conventions, il importe moins de s'interroger sur la pert
inence intrinsèque d'une convention tarifaire (le secteur 2 est- il préférable
au secteur 1 ? pour le médecin ? pour le patient ? pour la qualité de la
médecine pratiquée ?) ou sur son caractère optimal, que de s'assurer
qu 'elle résout convenablement le problème de coordination qui se pose
aux agents. Une observation d'ordre statistique vient à l'appui de ce ra
isonnement, puisqu'il existe localement des normes tarifaires très large
ment partagées par les médecins au sein d'une spécialité (ou d'une
orientation, ou d'une technique, pour ce qui concerne les omnipraticiens).
Il est ainsi bien établi que le résultat agrégé de ces décisions, en
principe individuelles, de détermination de niveaux d'honoraires n'est
pas anarchique. Il convient donc d' envisager le problème du choix du sec
teur d'activité à l'échelle d'un ensemble de praticiens et non à celle d'un
médecin isolé. On rejoint ce faisant un principe fondamental de l'analyse
sociologique selon lequel l'action des individus se déploie et prend sens
seulement dans une configuration d'interdépendances (Elias, 1991). Dire
cela ne conduit pas cependant à envisager le comportement des acteurs
uniquement sous l'angle de la mise en conformité par rapport à autrui,
par rapport au groupe de confrères au cas présent.
Tout d'abord, le modèle serait certainement compliqué mais aussi
enrichi par la prise en compte non seulement des deux secteurs d'activité
distincts mais aussi de l 'éventail des honoraires pratiqués au sein du sec
teur à honoraires libres. Si l'unité du secteur 1 d'un point de vue tarifaire
n 'est pas contestable puisqu 'elle découle de la convention qui régit ce
segment du marché, les pratiques en matière de dépassement d'honor
aires ne débouchent pas forcément sur une norme tarifaire homogène.
De fait, la décision de passage en secteur 2 se décompose en deux temps STRATÉGIE DE DISTINCTION ET DYNAMIQUE DES CONVENTIONS 25
pour le praticien : dans un premier temps, il opte (en conscience et/ou
après observation des stratégies tarifaires de son entourage et des possib
ilités économiques de sa clientèle, nous y reviendrons) pour la formule
du dépassement d'honoraires, dans un deuxième, il détermine un ordre de
grandeur plausible pour ses honoraires. De combien peut-il ou doit-il
dépasser le tarif conventionné ? Les options sont théoriquement infinies
mais cet infini s'organise d'après nos observations en un petit nombre
d'alternatives (clairement liées à une unité monétaire et qui devraient de
ce fait être recomposées par l'introduction de l'Euro) :
- le dépassement peut rester modéré (le point focal est alors donné
par les chiffres ronds situés au dessus du tarif conventionné de secteur 1,
pour un généraliste la consultation sera estimée entre 130 et 150 francs) ;
- avec un dépassement plus substantiel, les médecins généralistes
rencontrés se présentent eux-mêmes comme « chers », affichent des honor
aires compris entre 170 et 200 francs et ont conscience d'occuper le seg
ment supérieur du marché ;
- pour une minorité de praticiens, le dépassement conduit à un tarif
« hors norme », de l'ordre de plusieurs centaines de francs On peut alors
considérer que la référence au tarif de la convention médicale est complè
tement abandonnée : le tarif pratiqué est sans rapport avec les 115 francs
du premier généraliste venu, ce qui doit signifier que la médecine prati
quée n'a rien à voir non plus... A médecine exceptionnelle, honoraires
exceptionnels, voilà la seule « justification » opposable lorsque la somme
à la charge du patient devient supérieure à celle remboursable (1).
Le choix du secteur 2 n 'est donc qu 'une étape dans le positionne
ment du médecin sur ce marché très particulier des soins. Ce choix (et le
suivant, celui d'un des segments tarifaires du secteur 2) a été celui d'une
minorité assez importante de praticiens qui ont rompu avec une situation
initiale dans laquelle tous les médecins (à quelques exceptions près) rece
vaient la même rémunération à l'acte, celle du tarif conventionné. La stra
tégie des médecins passés en secteur 2 peut alors être lue comme une
stratégie de distinction, notamment en ce qui concerne les omnipraticiens.
Une petite moitié des généralistes ayant opté pour le secteur 2 pratique
une médecine différente (acupuncture, homéopathie, mésothérapie etc.).
Leur démarche tarifaire est donc associée à une démarche médicale part
iculière. Même chez les généralistes « classiques » que nous avons ren
contrés, le dépassement d'honoraires se veut significatif de la qualité de
(1) Cette stratégie de fixation d'un prix très élevé visant délibérément à ne toucher
qu'une demande limitée sur un marché haut de gamme est connue en marketing sous
le nom de « stratégie du prix d'écrémage ». GERALDINE BLOY 26
la médecine pratiquée. Il ne nous appartient pas de valider la qualité des
soins fournis, ni sa liaison réelle ou supposée avec le tarif pratiqué, même
si la question est importante aussi bien pour les patients que pour les ges
tionnaires du système de santé. Cette évaluation de la qualité en matière
de soin et, plus encore, de la consultation médicale soulève des questions

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