Terre, paysans et pouvoir politique (Grèce, XVIIIe-XXe siècle) - article ; n°1 ; vol.48, pg 85-107
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Terre, paysans et pouvoir politique (Grèce, XVIIIe-XXe siècle) - article ; n°1 ; vol.48, pg 85-107

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Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1993 - Volume 48 - Numéro 1 - Pages 85-107
Land, Peasants and Economic Power — Greece, 18th-20th century.
After obtaining its independence in 1830, the new Greek State converted all Ottoman estates into National Lands. The notables and merchants were neither much interested nor allowed to buy them, but kept their traditional control on taxfarming, trade and credit. The peasants kept their holdings and were allowed to expand to rented and illegally occupied public land. Meanwhile, traditional clientelism blended with early parliamentary democracy and universal male suffrage; and the peasants became a formidable electoral force. Such conditions favoured negotiation, compromise and privilege-sharing between the two politically dominant classes. The Bourgeoisie enjoyed tax-haven legislature, large subsidized credits, and unconditional protectionism, abandoning tax-farming and agricultural credit to the State. The Peasantry peacefully obtained land, tax, and credit reform, product subsidies and cancellation of debts — and this in just over eighty years (1871-1955). The lower urban classes, under- represented in Parliament, paid the bill through heavy taxes and waves of inflation. Their discontent was diverted to chauvinist and populist ideologies; contained through social mobility, civil service recruitments or other spoils; and occasionally suppressed by authoritarian regimes, brief and relatively mild. The interwar crises and World War II reversed this unstable equilibrium and led to a period of conflict and instability.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Georges B. Dertilis
Terre, paysans et pouvoir politique (Grèce, XVIIIe-XXe siècle)
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 48e année, N. 1, 1993. pp. 85-107.
Abstract
Land, Peasants and Economic Power — Greece, 18th-20th century.
After obtaining its independence in 1830, the new Greek State converted all Ottoman estates into "National Lands". The notables
and merchants were neither much interested nor allowed to buy them, but kept their traditional control on taxfarming, trade and
credit. The peasants kept their holdings and were to expand to rented and illegally occupied public land. Meanwhile,
traditional clientelism blended with early parliamentary democracy and universal male suffrage; and the peasants became a
formidable electoral force. Such conditions favoured negotiation, compromise and privilege-sharing between the two politically
dominant classes. The Bourgeoisie enjoyed tax-haven legislature, large subsidized credits, and unconditional protectionism,
abandoning tax-farming and agricultural credit to the State. The Peasantry peacefully obtained land, tax, and credit reform,
product subsidies and cancellation of debts — and this in just over eighty years (1871-1955). The lower urban classes, under-
represented in Parliament, paid the bill through heavy taxes and waves of inflation. Their discontent was diverted to chauvinist
and populist ideologies; contained through social mobility, civil service recruitments or other spoils; and occasionally suppressed
by authoritarian regimes, brief and relatively mild. The interwar crises and World War II reversed this unstable equilibrium and led
to a period of conflict and instability.
Citer ce document / Cite this document :
Dertilis Georges B. Terre, paysans et pouvoir politique (Grèce, XVIIIe-XXe siècle). In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 48e année, N. 1, 1993. pp. 85-107.
doi : 10.3406/ahess.1993.279120
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1993_num_48_1_279120TERRE ET PAYSANS
TERRE, PAYSANS ET POUVOIR POLITIQUE
Grèce, xvine-xxe siècle
Georges B. Dertilis
Trois grandes réformes économiques ont lieu en Grèce, entre 1870 et
1940, toutes liées, exclusivement ou en grande partie, à la question
paysanne : bien qu'elles se réalisent graduellement et sans aucune planifica
tion à long terme, elles ont des répercussions sur la condition de la populat
ion rurale. Après avoir cédé aux agriculteurs les terres nationales en 1871,
la réforme agraire leur attribue les grandes propriétés privées en 1924. La du système de crédit accroît le flux de capitaux bancaires vers les
campagnes dès les années 1870 et remplace, en 1929, les prêteurs d'argent
traditionnels par une banque agricole publique. La réforme du régime fiscal
débute peu avant 1870, avec la réduction de plusieurs impôts grevant les
produits et les revenus paysans, et s'achève entre 1935 et 1955, quand tous
ces impôts sont éliminés. Ainsi, dans l'intervalle relativement court de
85 ans, s'accomplissent en Grèce trois réformes fondamentales : celle de la
terre, celle du crédit, celle du régime fiscal. Elles s'accomplissent paisibl
ement ; la « grande révolte paysanne » de l'histoire grecque moderne n'est
qu'une flambée locale qui dure trois jours.
Si les réformes débutent tôt et s'achèvent rapidement, elles améliorent
aussi sensiblement la vie matérielle des populations rurales. Non seulement
les paysans grecs deviennent, dès le xixe siècle, des petits propriétaires, mais
ils se trouvent dans une situation meilleure que la paysannerie dans la plu
part des autres sociétés européennes — à l'exception de la France et du
Danemark. Certes, dans plusieurs régions rurales de la Grèce la pauvreté
existe encore, même au milieu du xxe siècle. Mais cela n'est pas la règle par
tout dans le pays ; et il suffit d'évoquer la condition des paysans dans plu
sieurs autres sociétés européennes pendant le long xixe siècle, pour
comprendre combien fausse est l'image misérabiliste du paysan grec,
dépeinte par une littérature folklorisante ou une historiographie morali
sante. Pour mieux apprécier la condition dès paysans grecs il suffit de la
comparer avec celle des paysans en Europe orientale sous le second ser-
85
Annales ESC, janvier-février 1993, n° 1, pp. 85-107. TERRE ET PAYSANS
vage ; ou bien avec celle des paysans bulgares, cause de la dictature des agra-
riens de Stamboliiski et des conflits sanglants de l'entre-deux-guerres ; ou
bien avec le sort des paysans en Espagne, où le retard des réformes agraires
fut l'un des principaux facteurs à l'origine de la guerre civile. Par ailleurs,
quoique celle-ci rappelle la guerre civile grecque de 1943-1949, les deux cas
ne sont pas comparables. Tout en étant un conflit social, la guerre civile en
Grèce résulte surtout de l'occupation nazie de ce pays et des énormes boule
versements internationaux qui affectent l'Europe de l'Est et les Balkans
après la deuxième guerre mondiale.
Les facteurs sociaux et politiques qui rendent compte des réformes en
Grèce doivent être analysés dans la durée moyenne, celle de la période
1830-1940. Ils doivent pourtant être inscrits dans les structures de longue
durée, qui déterminent en partie les oscillations de la conjoncture, le cadre
du conflit politique et les limites du pouvoir. Ces structures ont déjà été
décrites dans un article récent paru dans les Annales ESC, 1992, n° 2 ; résu
mons-les ici très brièvement.
Du xve au xxe siècle et dans la plus grande partie de la péninsule hellé
nique, les conditions géophysiques et démographiques favorisent la petite
exploitation de la terre et empêchent la grande exploitation extensive,
dépendante d'une main-d'œuvre salariée. La propriété est davantage
entravée quand la conquête ottomane institue le droit foncier islamique,
dépossède l'Église de ses biens, élimine la noblesse byzantine et affaiblit la
bourgeoisie chrétienne.
A la fin du xviii6 siècle, les revenus acquis par l'exploitation directe de
grandes surfaces terriennes sont minimes par rapport à ceux que les posses
seurs de terres obtiennent par le métayage, l'emphytéose, la location et
l'usufruit, ou à ceux que les marchands tirent du crédit et à ceux que le fisc
prélève par l'impôt.
Du xixe siècle au xxe siècle, le développement rapide des cultures
commercialisées réduit l'autosubsistance à un rôle marginal pour un grand
nombre de familles paysannes. Il est à l'origine de l'augmentation de leurs
besoins de financement et du renforcement du rôle du crédit ; mais
revenus augmentent également ainsi que leur potentiel d'autofinancement ;
ce développement se fait donc dans des conditions relativement équilibrées,
ce qui reproduit le schéma traditionnel : marchands et agriculteurs partagent
les revenus, mais sans partager les terres.
Par ailleurs, les revenus des cultures commerciales méditerranéennes
sont faibles par rapport aux bénéfices du crédit et du commerce. Ceci asso
cié au risque plutôt élevé entrave l'investissement de capitaux et, par
conséquent, la transformation technologique qui seule pourrait surmonter
les limites physiques et démographiques de la productivité. Ainsi le système
économique et social tend à se reproduire dans un équilibre instable, qui
reflète une grande capacité d'adaptation des couches aussi bien bourgeoises
que paysannes et une forte tendance au compromis. Or ces conditions, en
favorisant les réformes, contrebalancent les tendances reproductives du sy
stème et préparent sa transformation qui, justement, adviendra au xixe et au
xxe siècle sous la pression de forces politiques.
86 B. DERTILIS TERRE ET POUVOIR POLITIQUE EN GRECE G.
Les faits
La réforme agraire
Le débat sur les causes de la révolution hellénique contre le pouvoir
ottoman demeure encore ouvert. Il est néanmoins incontestable que dans
leur plus grand nombre, les révolutionnaires étaient des paysans qui se
révoltaient non seulement pour avoir l'honneur d'être appelés Hellènes,
mais également pour obtenir des droits civiques, donc une participation au
pouvoir politique, pour établir leurs droits sur la terre qu'ils cultivaient et de
se libérer d'un fisc avide et de créanciers rapaces. En ce sens, cette révolu
tion à la fois nationaliste et « chrétienne », libérale et &#

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