Une interprétation de l Incwala swazi. Étude du symbolisme dans la pensée et les rites d un peuple africain - article ; n°6 ; vol.28, pg 1403-1422
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Une interprétation de l'Incwala swazi. Étude du symbolisme dans la pensée et les rites d'un peuple africain - article ; n°6 ; vol.28, pg 1403-1422

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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1973 - Volume 28 - Numéro 6 - Pages 1403-1422
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Laura Makarius
Une interprétation de l'Incwala swazi. Étude du symbolisme
dans la pensée et les rites d'un peuple africain
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 6, 1973. pp. 1403-1422.
Citer ce document / Cite this document :
Makarius Laura. Une interprétation de l'Incwala swazi. Étude du symbolisme dans la pensée et les rites d'un peuple africain. In:
Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 6, 1973. pp. 1403-1422.
doi : 10.3406/ahess.1973.293431
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1973_num_28_6_293431INTER-SCIENCES
Une interprétation
de rincwala swazi
Étude du symbolisme dans la pensée
et les rites d'un peuple africain
YIncwala Bien connue est la grâce grande à la cérémonie description annuelle détaillée des qu'en Swazi, a donnée peuple Hilda bantou Kuper, de
l'Afrique sud-orientale x. Cette fête qui dure plusieurs jours et exige la parti
cipation de la cour, des prêtres, des notables, des régiments et du peuple, est
un ensemble de rites parfois spectaculaires se déroulant autour du souverain,
qui en est l'acteur principal. Bien qu'elle semble avoir peu de choses en commun
avec une fête des premiers fruits, elle est considérée comme un rituel de
prémices.
Les auteurs qui se sont penchés sur YIncwala se sont bornés à rechercher
un thème principal auquel se rapporteraient certains de ses aspects. Pour les
uns, ce thème serait l'expression de tensions et de conflits sociaux, pour
d'autres la manifestation des structures hiérarchiques de la société, la « dramat
isation » de l'institution monarchique ou du passé légendaire des Swazi, pour
d'autres encore la « séparation » et la « purgation » rituelle du souverain, qui
serait réintégré au sein de la nation après la réactivation de ses pouvoirs
i. Kuper, 1947. Les chiffres de pages entre parenthèses dans le texte se réfèrent à cet
ouvrage. Pour faciliter la lecture de notre texte, nous résumerons le déroulement de la
cérémonie.
Petite Incwala. Ier jour : retour des prêtres Belwandle allés puiser l'eau nécessaire
aux rites ; chants sacrés, le roi est traité avec des médecines, puis accomplit le rite consis
tant à « cracher les médecines de fertilité ». — 2 e jour : chants et répétition du même
cérémonial.
Période intérimaire de 14 à 15 jours.
Grande Incwala. Ier jour : cueillette de la lusekwane. — 2e jour : retour des cueilleurs.
— 3e jour : cueillette d'autres feuillages, traitement du roi ; mise à mort d'un bœuf,
assommé à coups de poing ; rites du roi en rapport avec un autre bœuf ; consommation
de Yimpundvu. — 4e jour : le roi répète le rite de « cracher les médecines » ; rites de goûter
aux nouvelles récoltes ; danse des princes et du roi ; danse du roi dans un costume d'herbe ;
rite du lancement de la gourde. — 5e jour : ségrégation du roi et de la cour, état de tabou
de la population. — 6e jour : rite de purification par le feu d'un bûcher. — A la fin de la
cérémonie une journée est consacrée aux réjouissances et à faire ripaille.
3 1403 INTER-SCIENCES
surnaturels 2. Tentatives d'interprétation qui restent dans les généralités et
ne fournissent pas une analyse spécifique des phénomènes de YIncwala.
Une telle carence n'a rien de surprenant. Comme l'a souligné H. Kuper,
YIncwala est étroitement liée à l'institution royale et à la personne du souverain
(pp. 197, 221, 223). Ce n'est donc qu'en partant de la compréhension du contexte
royal Swazi qu'on pourra l'étudier ; mais le contexte royal Swazi doit être
lui-même envisagé dans le contexte plus général de la royauté africaine,
royauté que l'on définit souvent, d'un terme conventionnel, comme « divine »
ou « sacrée ».
La théorie d'après laquelle les rois de ce type violent le tabou de l'inceste
(et /ou d'autres tabous) afin de promouvoir magiquement la fertilité de la terre
et la prospérité du royaume 3 — théorie qui rend compte tant des interdits
qui les entourent que du pouvoir magique dangereux et ambivalent qui leur
est attribué — nous donne la clé de l'interprétation du rituel aussi complexe
que fascinant de YIncwala, nous permettant d'en saisir le sens en le suivant
tout au long de son déroulement.
Dans le contexte général de la royauté qui a été ainsi précisé, s'éclairent
certains aspects de la royauté Swazi. Les rois Swazi commettent généralement
l'inceste avec leurs sœurs. H. Kuper écrit : « les Swazi modernes déclarent :
' Nous sommes comme les Tembe (une tribu voisine) : leurs rois, comme les
nôtres, épousent leurs sœurs ' » (p. 12) 4. Non seulement les Swazi ne cachent
pas le mariage incestueux de leur roi, mais il le considèrent comme une carac
téristique nationale distinctive.
L'inceste fraternel du roi est donc bien attesté, même si la sœur épousée
n'est pas la sœur de même père et de même mère, mais est remplacée, comme
cela arrive souvent, par une demi-sœur du même père ou par une cousine,
de manière a atténuer le scandale de l'inceste, tout en maintenant la tradition
de l'inceste royal.
A part l'inceste avec la sœur, ou avec la femme remplaçant la sœur, on
note des traces d'inceste maternel en rapport avec l'important rituel de la
pluie, prérogative du roi et de la reine-mère. Au cours de ce rituel extrêmement
secret, le souverain accomplirait un simulacre d'inceste avec sa mère, s'asseyant
2. Cf. Gluckman, 1954 > Kuper, 1947 ; Marwick, 1966 ; Beidelman, 1966. Voir
aussi Cook, 1930, qui considère YIncwala comme un rituel de prémices.
3. Cf. L. Makarius, 1970 B. Pour les références à YIncwala, voir Ibid., p. 672, suite
de la note 4 ; p. 675 et note 3. Pour les effets magiques de la violation délibérée des inter
dits, cf. L. 1968, pp. 33-35 ; 1972, pp. 49-66.
4. Les Swazi ont un mythe d'inceste royal dont le héros pleurait des larmes de sang.
Il était né d'une jeune reine, vivant dans la brousse, « là où les autres reines jetaient leurs
ordures ». (Ce qui est une connotation d'impureté, convenant à des violateurs). Ce jeune
garçon, Madlebe, manifeste de grands pouvoirs magiques. A la suite d'une intrigue,
il doit fuir le roi son père qui veut le faire tuer. A la mort de ce dernier, il revient et ren
contre dans la cour de la maison maternelle une belle jeune fille avec laquelle il fait
l'amour. Comme lui, elle pleure des larmes de sang, car elle est sa sœur. Les guerriers
« éprouvent une grande crainte de Madlebe », mais le conseil se réjouit et le nomme roi
(Kuper, p. 237). Noter le rapport entre inceste et sang. Pour les diverses formes d'atté
nuation, de transposition et de symbolisation de l'inceste royal, voir de Heusch.
1404 L MAKARIUS L'INCWALA, RITE BANTOU
nu sur les pieds de celle-ci, également dévêtue, afin de favoriser la venue de
la pluie 5.
D'autre part, le mariage du roi avec la première épouse rituelle, dite la
Matsebula, semble bien représenter une autre expression symbolique de
l'inceste. La jeune femme est unie au roi par un lien de consanguinité artifi
cielle, établi au moyen d'un rite d'incisions et d'échange de sang 6. Kuper
écrit que ce lien entre un homme et ses épouses ne peut être analogue à la
création d'un lien de parenté, parce que cela représenterait une brèche à
l'exogamie — un mariage avec une sœur artificiellement créée, alors que le
mariage avec de vraies sœurs est prohibé (p. 83). S'agissant d'un roi qui,
nous l'avons vu, pratique l'inceste royal, bien que sous une forme atténuée,
c'est précisément le contraire que l'on doit penser : le lien est bien un lien
fictif de consanguinité, établi dans le but de représenter une brèche de l'exo
gamie, brèche qui est fictive, symbolique, parce qu'une brèche réelle ferait
trop peur.
5. Schoeman, pp. 168-175. Il indique que la reine-mère est la gardienne des charmes
de pluie, les ikulu, dont le plus important est la ceinture sacrée qu'elle porte sur son
corps mi, juste au-dessus du sexe, et qu'elle garde sur elle lors du contact rituel avec son
fils. D'après la légende, les i

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