Une moyenne montagne calcaire des Alpes Italiennes: le Massif Ferrante Presolana (Alpes Bergamasques) - article ; n°4 ; vol.7, pg 281-294

Michel Chardon

Description

Méditerranée - Année 1966 - Volume 7 - Numéro 4 - Pages 281-294
14 pages

Informations

• Publié par: MEDITERRANEE0
• Publié le: 01 janvier 1966
• Nombre de lectures: 15
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Monsieur Michel Chardon
Une moyenne montagne calcaire des Alpes Italiennes: le Massif
Ferrante Presolana (Alpes Bergamasques)
In: Méditerranée, 7e année, N°4, 1966. pp. 281-294.
Citer ce document / Cite this document :
Chardon Michel. Une moyenne montagne calcaire des Alpes Italiennes: le Massif Ferrante Presolana (Alpes Bergamasques).
In: Méditerranée, 7e année, N°4, 1966. pp. 281-294.
doi : 10.3406/medit.1966.1209
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medit_0025-8296_1966_num_7_4_1209UNE MOYENNE MONTAGNE CALCAIRE
DES ALPES ITALIENNES :
LE MASSIF MONTE FERRANTE-PRE SOLANA
(ALPES BERGAMASQUES)
La cime de la Presolana (2 521 m) domine une vaste région pres
que entièrement calcaire dont les altitudes ne s'abaissent pas au-
dessous de 1 000 m. Celle-ci forme dans son ensemble (fig. 1) une
masse compacte et élevée entre la haute vallée du Serio à l'Ouest, la
large vallée de Clusone-Castione délia Presolana au sud, le Val di
Scalve à l'est tandis que vers le nord elle fait face, au-delà des vallées
de Vilminore et de Lizzola Alta aux sommets les plus élevés des
Alpes Orobiques (Pizzo Coca 3 052 m, Pizzo del Diavolo 2 926 m,
Mte Gleno 2 883 m) . Ce puissant contrefort calcaire en avant de
la ligne de faîte orobique s'apparente à ceux du massif de la Conca-
rena, du Pizzo Arera, de la Corna Grande et des Grigne. Plus étendu,
plus compact que ses voisins, il présente une vaste région calcaire,
d'altitude déjà élevée et d'aspects variés.
Vers l'est, la masse de la Presolana a grossièrement une forme
d'étoile dont les sommets dépassent les 2 000 mètres. Son armature
est constituée par une arête de calcaire dolomitique de deux kilomèt
res, de direction ouest-est, de la cresta de Valzurio au Monte Visolo
et comporte en son centre le point le plus élevé avec le Pizzo délia
Presolana (2 351 m) . Sur cette muraille se branchent des arêtes
secondaires de direction nord-sud plus courtes encadrant de profonds
cirques glaciaires. L'ensemble de forme puissante et trapue domine,
à l'est les gorges du torrent Dezzo profondément entaillées dans les
calcaires, au sud la haute vallée Borlezza qui vient se terminer au
Giogo délia Presolana et au nord la vallée du Nembo et de ses
affluents, largement remblayée de débris glaciaires et fluvio-glaciaires
incisés par les rivières. 282 M. CHARDON
Fig. 1. — Situation du Massif Ferrante-Presoîana dans la partie
orientale des Alpes Bergamasques
Du côté de l'ouest, les grandes faces blanches de la Presolana
s'abaissent par le Passo Scagnello vers de grands plateaux calcaires
couverts d'une maigre végétation dont l'altitude oscille entre 1 600 et
2 100 m. Mais ceux-ci sont loin de présenter l'uniformité d'une table
calcaire. Retombant en pente abrupte et profondément burinée par
les glaces et les eaux au nord, ils s'inclinent en pente plus douce et
peu accidentée vers la Valle di Valzurio au sud. Les points les plus
élevés sont donnés par des arêtes de calcaires très dentelées de direc
tions perpendiculaires sud-est - nord-ouest pour les principales et
sud-ouest-nord- est pour les arêtes secondaires. Le point culminant
étant donné par le Monte Ferrante avec 2 426 m. Elles encadrent des
bassins de forme géométrique, ouverts sur un côté, et qu'ont modelés
les glaces quaternaires.
Car ce massif, première masse montagneuse en avant de la chaîne
orobique, connaît un climat froid et extrêmement humide. S'il n'existe
aucune station climatique dans le massif lui-même, les stations péri
phériques enregistrent d'importantes précipitations. Sur une moyenne LE MASSIF MONTE FERRANTE-PRESOLANA 283
de trente années, Clusone à 648 m d'altitude reçoit 1 507 mm par an,
Schilpario à 1 200 m, 1 709 mm et Vilminore à 1 018 mètres, 1 695 mm,
et une moyenne de 77 jours de neige. Foppolo, station située il est
vrai plus à l'est, à 1 520 m, reçoit en moyenne 2 073 mm. Toutes ces
stations se trouvant dans le fond des vallées à des altitudes modestes,
il est raisonnable de penser que les plateaux et les sommets à plus de
2 000 m reçoivent au minimum pour les points les plus élevés de
2 m 50 à 3 mètres d'eau par an. G. Morandini (11) estime que le ma
ximum des chutes de neige serait pour les Alpes Centrales Italiennes
vers 2-100-2 500 m et intéresserait par conséquent toute notre zone.
En somme, un massif pas très élevé mais très humide et très enneigé.
Cette forte humidité explique l'importance de l'érosion post-glaciaire
dans cette grande masse de calcaire.
Structure et Lithologie : Le problème du réseau karstique sou
terrain.
Sur le sol calcaire, la végétation herbacée mettant à profit la
forte humidité monte jusqu'à 2 500 m colonisant les moindres an-
fractuosités, mais la forêt ne dépasse pas 1 700 mètres. Les points
d'eau sont extrêmement rares et les principales rivières prennent leur
source à la périphérie. Il est intéressant de noter toutefois que le
cirque glaciaire situé au pied nord de la Presolana est occupé par un
lac qui utilise son fond en forme d'entonnoir, mais ce lac n'a pas
d'exutoire apparent, étant barré vers le nord par un seuil rocheux
qui le domine de près de 100 m. Le réseau hydrographique de toute
cette masse calcaire est entièrement souterrain, et en rapport étroit
avec la structure et la lithologie.
L'ensemble est constitué d'une importante masse de sédiments
calcaires d'âge triasique recouvert par des masses charriées, elles-
mêmes calcaires triasiques (fig. 2). Les terrains autochtones consti
tuent l'essentiel des plateaux situés à l'ouest de la Presolana, faibl
ement inclinés vers le sud ils affleurent sur le versant nord en position
stratigraphique normale. Sur les calcaires noirs de l'Anisien reposent
1200 m de calcaires ladiniens dont 7 à 800 m de dolomie d'Esino,
recouverts à leur tour par quelques sept cent mètres de calcaires du
Raibler coupés de bancs marneux. L'ensemble très compact ne fait
pas apparaître de grandes différences de dureté. De même, ce sont
des calcaires qui constituent les masses charriées. La Presolana est
une grosse « motte » très fracturée de dolomie d'Esino (Ladinien)
avec à sa base une semelle de grès du Ladinien inférieur dit Wenge- I
M. CHARDON 284
'•" ■5D0' ' 1000m- -0'- Y ■ W D -V
VtQnccVaqa.
tfoniana.
A
/ s y 7$ ^M
À ô 10 11 12 M
Fig. 2. — Carte géologique simplifiée du Massif Presolana-Ferrante
I. Terrains quaternaires des vallées. — 2. Dolomie principale. Norien. — 3. Raibler
(calcaires avec banc plus marneux) Carnien. — 4. Dolomie d'Esino. Ladinien. —
5. Ladinien Inférieur. — 6. Anisien (calcaires noirs). — 7. Principales lignes du
relief. — 8. Faille. — 9. Bord de masse chariée. — 10. Principales sources captées. —
II. Accumulations morainiques les plus importantes. — 12. a) débit minimum excep
tionnel ; b) débit de maigre ordinaire.
ner (De Sitter 1949) qui forme la Cima Verde, la nappe de la Cima
Timogno est la plus étendue constituant tout le sud-ouest du flanc
sud de ce plateau et venant buter contre la faille de Clusone, accident
majeur limitant vers le nord la masse de dolomie principale du
Norien (dolomie principale des auteurs italiens). Il nous faut signaler Fie. 3. — Deux coupes Nord-Sud dans la Presolana
On remarquera que les deux grands ensembles charriés (Nappe de Timogno et
du Ferrante-Presolana) ont glissé vers le Sud, mais ne sont pas poussés vers le
Nord (théorie classique des nappes).
1. — Plan de charriage.
2. — Faille.
a) Dolomie principale. Norien VI 00 to l Trias Supérieur. b) Raibler ou Carnien
c)d'Esino j. ,, . '-^^^ ( d) Ladinien Inférieur \ Trias Inférieur.
e) Anisien \ 286 M. CHARDON
aussi les lambeaux charriés du Monte Ferrante et des cimes voisines
à l'ouest qui paraissent se rattacher à la masse de la Presolana (fig. 3) .
Nous n'entrerons pas dans le cadre de cette étude limitée au karst et
aux formes morphologiques glaciaires et karstiques de surface, dans
le difficile problème de l'étendue et de l'origine des nappes, problème
traité par M. de Sitter et ses élèves pendant l'entre-deux guerres, par
les géologues italiens (Nangeroni) et dont l'étude est reprise aujour
d'hui par l'Univers