Une politique économique alternative pour le Tiers Monde ? Les leçons du Plan « Austral » et du Plan « Cruzado » - article ; n°109 ; vol.28, pg 25-52
29 pages
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Tiers-Monde - Année 1987 - Volume 28 - Numéro 109 - Pages 25-52
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Moïses Ikonicoff
Une politique économique alternative pour le Tiers Monde ? Les
leçons du Plan « Austral » et du Plan « Cruzado »
In: Tiers-Monde. 1987, tome 28 n°109. pp. 25-52.
Citer ce document / Cite this document :
Ikonicoff Moïses. Une politique économique alternative pour le Tiers Monde ? Les leçons du Plan « Austral » et du Plan «
Cruzado ». In: Tiers-Monde. 1987, tome 28 n°109. pp. 25-52.
doi : 10.3406/tiers.1987.4482
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1987_num_28_109_4482UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE ALTERNATIVE
POUR LE TIERS MONDE ?
LES LEÇONS DU PLAN « AUSTRAL »
ET DU PLAN « CRUZADO »
par Moïses Ikonicoff*
I. Politique de conjoncture et développement
La définition de politiques de conjoncture et l'étude des problèmes
posés par l'impact des phénomènes monétaires et fiscaux sur le niveau
des prix, la création d'emplois ou sur l'équilibre de la balance des paie
ments, n'ont pas suffisamment retenu jusqu'à maintenant l'attention
des analystes et des responsables de l'économie des pays du Tiers Monde.
Cette attitude ne semblait pas tout à fait déraisonnable compte tenu du
faible développement des forces productives et du caractère inarticulé
des structures économiques. On pouvait, en effet, s'interroger sur le
bien-fondé des tentatives de régulation de mécanismes quasi inexistants
ou des efforts réalisés pour induire le comportement des acteurs absents,
pour la plupart, de la scène économique. Dans ce contexte, le renforce
ment de la structure, à travers l'élargissement de la base productive,
apparaissait tout naturellement comme l'objectif prioritaire et pratique
ment exclusif de l'action des centres de décision publique. Le seul débat
réellement important concernait les voies susceptibles de mener à cet
objectif, c'est-à-dire, « les stratégies de développement ». On s'interro
geait alors sur les conditions de formation d'un excédent, les critères
de l'allocation des ressources ou sur le choix des activités prioritaires.
Par ailleurs, il était bien entendu que le plan à moyen terme formulé et
mis en œuvre par l'Etat constituait l'outil privilégié de la stratégie
de développement. Le degré de contrôle que l'Etat exerçait sur l'acti-
* Directeur de recherches au cnrs.
Revue Tiers Monde, t. XXVIII, n° 109, Janvier-Mars 1987 Z 6 MOÏSES IKONICOFF
vité économique était, certes, variable. Néanmoins, la véritable diff
erence entre modèles « libéraux » et modèles « étatiques » ne se référait
pas au présent, mais renvoyait à un avenir hypothétique où la structure
serait suffisamment diversifiée. C'est alors seulement que l'on pourrait
envisager, selon l'idéologie sous-jacente au projet, la possibilité d'une
éventuelle diminution des fonctions de l'Etat. Le paradoxe de la Côte-
d'Ivoire, se réclamant de l'idéologie libérale et disposant d'un secteur
public bien plus étendu que celui d'autres pays africains, comme le
Mali, ayant fait des choix opposés, constitue à cet égard un exemple
très significatif1. On peut donc comprendre pourquoi la polémique
entre monétaristes et néo-keynésiens qui agitait le monde académique
et opposait farouchement les hommes politiques des pays occidentaux,
ne résonnait que comme un lointain écho dans les forums où étaient
débattus les problèmes des économies du Tiers Monde. Néanmoins,
certains thèmes, comme l'inflation, n'étaient pas tout à fait absents de
la réflexion portant sur le développement, au cours de la période 1950-
1980. Ainsi, les conditions particulières de l'industrialisation de quelques
pays d'Amérique latine avaient attiré l'attention sur les processus infl
ationnistes dès le début des années 50. L'analyse classique, qui attribue
les causes de ce phénomène soit à la demande, soit aux coûts, s'avérant
inappropriée, les économistes latino-américains formulèrent une autre
thèse plus conforme aux réalités de la région. D'après cette thèse, le
processus d'industrialisation substitutif, arrivé à une certaine phase,
se trouve confronté inévitablement à des goulets d'étranglement sector
iels, concernant notamment les produits d'origine agricole, ainsi que
les produits intermédiaires et les équipements importés. Ces blocages
suscitent des pressions inflationnistes qui restent peu sensibles à des
politiques récessionnistes ou à des changements des prix relatifs. Il
s'agissait, selon cette thèse, d'une « inflation structurelle » susceptible
d'être réduite uniquement par une modification du régime de propriété
de la terre et par un changement de la structure du commerce extérieur,
lequel dépendait du passage à une phase supérieure de l'industrialisation.
L'analyse latino-américaine de l'inflation montre que les problèmes
conjoncturels étaient également abordés, à l'époque, dans une perspec
tive des moyen et long termes, comme tous les autres problèmes liés
au développement.
Milton Friedman, lui-même, en se référant à l'évolution économique
1. Voir Moïses Ikonicoff et Silvia Sigal, L'Etat relais, un modèle de développement des
sociétés périphériques ? Le cas de la Côte-d'I voire, Revue Tiers Monde, 1, XIX, n° 76, octobre-
décembre 1978. UNE POLITIQUE ECONOMIQUE ALTERNATIVE ZJ
de l'Inde, lors des deuxième et troisième Plans quinquennaux, consi
dérait qu'il était « bien plus important de s'intéresser aux forces fonda
mentales qui déterminent la croissance économique qu'au débat qui
tourne autour de la hausse ou de la baisse des prix »2. Et l'auteur ajoute
que « l'inflation peut se révéler un impôt joliment productif». L'exemple
le plus extrême de dissociation entre politique conjoncturelle et poli
tique du développement est donné par les pays du Tiers Monde qui,
en s'intégrant à des « zones monétaires », abandonnent purement et
simplement la gestion de la monnaie nationale pour la confier de fait
à l'ancienne métropole par l'intermédiaire d'organismes financiers
régionaux.
Au cours des années 80, on assiste à ce que l'on va appeler « la
crise des modèles de développement », qui traduit un déclin considé
rable de l'intérêt porté aux « projets » tandis que la politique conjonctur
elle devient à son tour le sujet de préoccupation dominant. Les respons
ables de l'économie des pays du Tiers Monde doivent en effet faire
face, désormais, au déséquilibre financier externe persistant, et de ce
fait, à la pression croissante exercée par le Fonds monétaire interna
tional (fmi) sur les systèmes nationaux de décision économique.
Les conditions dans lesquelles les pays du Tiers Monde ont été
amenés à réfléchir aux outils de la politique conjoncturelle expliquent
l'importance accordée aux « recettes » du fmi que l'on a souvent tendance
à considérer comme la seule politique économique de court terme envi
sageable. Et, curieusement, cette attitude est commune à ceux qui
adhèrent à la politique proposée comme à ceux qui la refusent.
On peut s'étonner du fait que le déséquilibre financier extérieur
n'ait pas produit les mêmes conséquences bien plus tôt étant donné
que ce phénomène, comme d'ailleurs l'intervention du fmi, ne date
pas des années 80 pour la plupart des pays du Tiers Monde.
IL Le changement de nature du déficit extérieur
II faut probablement chercher une explication dans la nature même
des déficits extérieurs. En effet, jusqu'à la fin des années 70, la balance
commerciale était le plus souvent à l'origine des déficits, généralement
liés au processus de diversification de la structure économique, alors
2. Milton Friedman, Inflation et développement économique, texte d'une conférence
prononcée à Bombay (Inde) en 1963, et publié in Inflation et systèmes monétaires, Paris

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