Versailles et l architecture urbaine au XVIIe siècle - article ; n°4 ; vol.10, pg 465-479
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1955 - Volume 10 - Numéro 4 - Pages 465-479
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre Francastel
Versailles et l'architecture urbaine au XVIIe siècle
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 10e année, N. 4, 1955. pp. 465-479.
Citer ce document / Cite this document :
Francastel Pierre. Versailles et l'architecture urbaine au XVIIe siècle. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 10e
année, N. 4, 1955. pp. 465-479.
doi : 10.3406/ahess.1955.2481
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1955_num_10_4_2481ANNALES
ÉCONOMIES - SOCIÉTÉS - CIVILISATIONS
ÉTUDES
VERSAILLES ET L'ARCHITECTURE URBAINE
AU XVIIe SIÈCLE
Bien que le prestige de Versailles soit actuellement au plus haut point,
les études relatives à son histoire n'ont pas fait de progrès substantiel
depuis de longues années. La publication de documents, tirés principalement
des archives suédoises, nous a apporté, depuis trente ans, la solution de
quelques difficultés et des précisions d'ordre chronologique importantes,
mais on se meut toujours dans le cadre déterminé par les admirables travaux
de Pierre de Nolhac au début de ce siècle. Ce n'est certes pas manquer à
sa mémoire que de le constater et de souhaiter en même temps que, suivant
son exemple, un nouveau pas soit fait pour interpréter plus complètement
une œuvre dont il a été le premier à comprendre la signification véritabl
ement exemplaire.
Cherchant, il y a vingt cinq ans, à préciser moi-même la signification de
la sculpture de Versailles, je m'étais trouvé amené à entreprendre une étude
sur les sources du style français du xvne siècle, acceptant ainsi au départ
cette idée que Versailles était, suivant l'expression si frappante de Pierre
de Nolhac, le « miroir du Grand Siècle ». Et la thèse finale suivant laquelle
le milieu versaillais, loin de se présenter comme une unité, révélait des
conflits de doctrine, une évolution mettant en cause à plusieurs reprises
les principes mêmes de l'art, n'avait pas été sans soulever alors des réserves
de divers côtés.
Le moment paraît venu de reprendre ces problèmes, mais en choisissant
cette fois comme point d'application principal l'architecture, qui a fourni le
cadre de l'entreprise. Sans rejeter l'idée que Versailles constitue le miroir
le plus fidèle de l'époque, il est permis, en effet, de penser que l'on s'est
contenté d'une vue rapide, la seule possible au départ, et, surtout, qu'on
Annales (10* année, octobre-décembre 1955), n° 4. 30 466 ANNALES
se faisait il y a cinquante ans une idée encore très sommaire des rapports
qui unissent une œuvre monumentale à la société contemporaine. Pierre
de Nolhac a été des premiers à concevoir ce lien de l'art et de la société.
Il serait sûrement d'accord pour souhaiter que se développent des études
destinées à mieux montrer la place que Versailles a tenue dans la conscience
du Grand Siècle.
On formulera, d'abord, deux observations. La première est de fait.
Il y a cinquante ans, on partait de cette idée que le siècle de Louis XIV
constituait une époque dominée d'une manière absolue par la personnalité
du roi. Les progrès de notre connaissance des formes de la civilisation
contemporaine en Europe tendent peut-être aujourd'hui à diminuer à
l'excès la place tenue par le roi et par la France à l'époque classique. On
fait couramment de Versailles un chapitre de l'art baroque international.
Une première tâche consiste pour nous à replacer l'entreprise versaillaise
à sa place parmi les mouvements artistiques du temps qui sont le reflet
de mouvements de civilisation. Il est pour cela nécessaire que nous admett
ions l'idée que la création de Versailles n'est pas l'œuvre d'une génération
unanime, mais le produit d'un milieu fortement divisé et qui, durant les
cinquante années de l'entreprise, a vu se modifier et les hommes et les mœurs.
Le problème des générations de Versailles n'est pas seulement, comme je
le posais il y a vingt-cinq ans, celui de l'échelonnement entre des groupes
rivaux d'une tâche qui traduit une évolution des moyens d'expression,
mais celui d'une évolution sociale et économique qui met en cause les fonde
ments politiques et sociaux de l'État.
On voit ainsi se poser le second problème de base : dans quelle mesure
peut-on garder la notion du miroir? Plus que jamais, certes, il est loisible
d'admettre que Versailles, l'œuvre artistique majeure de ce temps, constitue
l'instrument d'observation le plus objectif et le plus complet qui nous ait
été légué par les hommes du grand siècle. En revanche, il faut abandonner
l'idée que ce miroir nous renvoie nécessairement une vue sans ride ; et il
faut rejeter également l'idée que la part des différents artisans de l'œuvre
est conforme à l'ordre des hiérarchies administratives et sociales de la Cour.
Ce qui est inexact, c'est de croire que, parce que l'œuvre artistique comporte
une certaine harmonie ou plus exactement une certaine puissance d'envoû
tement, elle témoigne du rôle dominant de celui qui l'a voulue et du succès
absolu de sa politique. Louis XIV a pu créer Versailles, il a pu également
s'imposer à la nation, étouffer toutes les dissidences, il ne les a pas supprimées •
et, dans Versailles même, on les découvre lorsqu'on s'approche un peu et
qu'on dépasse la vue rapide. Versailles n'est pas le produit d'un plan idéal
méthodiquement et progressivement exécuté par parties afin de matérialiser
l'idéal unanime d'une société rigide. Le xvne siècle français n'a pas eu ce
caractère glacé et froid que lui prêtent ses détracteurs. Il vit, et il vaut par
la violence de ses conflits, qui mettent en cause les fondements passionnels
de l'ordre humain — tout autant que certaines œuvres contemporaines
où perce un moindre effort de perfection durable. Ce qui se reflète dans le
grand miroir de Versailles, ce n'est pas uniquement l'ordre officiel, mais VERSAILLES ET L'ARCHITECTURE URBAINE 467
les mille tendances qui ont fait de la France de la fin du xvne siècle le lieu
de la civilisation à la fois la plus lucide et la plus révolutionnaire de l'Europe.
Miroir donc, plus que jamais, mais pas nécessairement d'un ordre de mort
et d'une société totalitaire — bien mieux représentée par des formes d'art
soi-disant libres mais caractéristiques de sociétés intellectuellement confor
mistes.
*
Pour qui veut substituer à l'étude globale d'un Versailles unanime —
qui n'a jamais existé — la vision d'un Versailles terrain des grands conflits
intellectuels et sociaux du xvne siècle, la première démarche est d'examiner
les programmes. Doit-on considérer que, simplement, le domaine s'est
développé, suivant les lois d'une croissance naturelle, par un accroissement
simultané des ressources et des ambitions de ses créateurs sans modification
du dessein fondamental? Ou bien faut-il admettre au contraire plus qu'un
échelonnement dans la détermination des buts et des formes de l'architec
ture?
Il se trouve que le débat se trouve centré, d'une manière très précise,
autour de l'activité des dix premières années du règne de Louis XIV. Et,
même, que c'est entre les années 1666 et 1674 que se sont concrétisés trois
programmes, correspondant à trois solutions artistiques et humaines du
problème posé. Il va de soi que cette position du problème est arbitraire
et qu'elle écarte du débat de nombreux éléments non seulement d'exécution
mais de conception, indispensables pour la connaissance aussi bien de Vers
ailles que de la société française du xvne siècle. Elle permettra seulement
de présenter, dans les limites d'un article, quelques idées et quelques faits
pouvant servir de point de départ à une enquête qui devra s'étendre à toutes
les formes d'art et à toutes les phases de l'œuvre considérée.
Louis XIV vient, pour la première fois, à Versailles en 1651. Il a 13 ans.
Il y vient pour chasser, en passant. Il y trouve un petit château construit
par son père. C'est un pavillon de chasse très modeste : brique et

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