Les effets sur l emploi de la loi du 11 juin 1996 sur la réduction du temps de travail
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Les effets sur l'emploi de la loi du 11 juin 1996 sur la réduction du temps de travail

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De nombreux travaux économétriques ont cherché à évaluer l'impact des politiques de réduction du temps de travail ex ante et à expliciter les conditions de réussite de ces politiques. Peu d'éléments sont, en revanche, disponibles sur des évaluations ex post. Cette seconde voie est choisie pour évaluer les effets sur l'emploi de la loi du 11 juin 1996 (dite « loi Robien ») sur la réduction du temps de travail, en confrontant des données disponibles sur les établissements ayant décidé d'entrer dans ce processus avec d'autres sources de données (Acemo, Unedic, Diane). Les caractéristiques qui différencient les établissements ayant signé une convention offensive dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 des autres, ne sont pas les mêmes selon que l'on compare ces établissements avec des établissements n'ayant pas encore réduit leur durée du travail en septembre 2001 (premier groupe de comparaison) ou des établissements ayant réduit leur durée du travail, mais seulement après janvier 2000 (deuxième groupe de comparaison). Dans le premier cas, les éléments importants sont la taille, l'évolution antérieure des effectifs et le coût du travail alors que dans le second, les différences sont plutôt liées à la santé économique et financière des entreprises. Ces différences mettent en évidence l'existence d'une sélection des établissements ou des entreprises lors de l'entrée dans le dispositif de réduction du temps de travail. Compte tenu des différences fortes entre les établissements ayant réduit leur durée dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 et ceux n'ayant pas encore réduit leur temps de travail en septembre 2001, seule est conservée l'estimation de l'effet emploi du dispositif calculée pour le second groupe de comparaison. On montre alors que, sur la période de mise en place du dispositif, la croissance des effectifs des établissements ayant réduit leur durée dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 est significativement plus élevée que celle des autres, même après la ...

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Langue Français

Extrait

EMPLOI
Les effets sur l’emploi de la loi
du 11 juin 1996 sur la réduction
du temps de travail
Murielle Fiole et Muriel Roger*
De nombreux travaux économétriques ont cherché à évaluer l'impact des politiques de
réduction du temps de travail ex ante et à expliciter les conditions de réussite de ces
politiques. Peu d'éléments sont, en revanche, disponibles sur des évaluations ex post.
Cette seconde voie est choisie pour évaluer les effets sur l’emploi de la loi du 11 juin
1996 (dite « loi Robien ») sur la réduction du temps de travail, en confrontant des
données disponibles sur les établissements ayant décidé d'entrer dans ce processus avec
d'autres sources de données (Acemo, Unedic, Diane).
Les caractéristiques qui différencient les établissements ayant signé une convention
offensive dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 des autres, ne sont pas les mêmes selon
que l'on compare ces établissements avec des établissements n’ayant pas encore réduit leur
durée du travail en septembre 2001 (premier groupe de comparaison) ou des
établissements ayant réduit leur durée du travail, mais seulement après janvier 2000
(deuxième groupe de comparaison). Dans le premier cas, les éléments importants sont la
taille, l'évolution antérieure des effectifs et le coût du travail alors que dans le second, les
différences sont plutôt liées à la santé économique et financière des entreprises. Ces
différences mettent en évidence l’existence d'une sélection des établissements ou des
entreprises lors de l’entrée dans le dispositif de réduction du temps de travail.
Compte tenu des différences fortes entre les établissements ayant réduit leur durée dans
le cadre de la loi du 11 juin 1996 et ceux n'ayant pas encore réduit leur temps de travail
en septembre 2001, seule est conservée l'estimation de l'effet emploi du dispositif
calculée pour le second groupe de comparaison. On montre alors que, sur la période de
mise en place du dispositif, la croissance des effectifs des établissements ayant réduit
leur durée dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 est significativement plus élevée que
celle des autres, même après la prise en compte du biais de sélection.
* Murielle Fiole et Muriel Roger appartenaient à la Dares au moment de la rédaction de cet article. Actuellement, Murielle Fiole appartient
au Ses du Ministère de l’Équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer et Muriel Roger à l’Inra Paris-Jourdan.
Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 357-358, 2002 3e mouvement de réduction du temps de tra- (1997), une stratégie s'est dessinée durant les
vail récent s’inscrit dans une tendance his- années 1980 ayant pour but de coupler une forteL
torique. Pour s’en tenir aux quarante dernières réduction de la durée du travail, dont on attend
années, la durée hebdomadaire du travail des des effets positifs sur l’emploi, et un aménage-
salariés à temps complet est passée, dans les ment du temps de travail qui, lié à une réorgani-
secteurs marchands, de 45 heures par semaine sation de la production, doit être source de gains
en moyenne en 1960 à 39 heures à partir du de productivité. Dans ce cadre, les incitations
milieu des années 1980, après la baisse de la financières mises en place au cours des derniè-
durée légale de 40 à 39 heures en 1982. Du fait res années en faveur des établissements ou des
des dispositions d'incitations à la réduction du entreprises choisissant d'entrer dans un disposi-
temps de travail prévues par la loi du 11 juin tif de réduction du temps de travail visent à les
1996 (1) puis par celle du 13 juin 1998 (2) et de faire bénéficier d'une partie des externalités que
l'abaissement de la durée légale à 35 heures ces entreprises ou établissements engendrent
pour les entreprises de plus de 20 salariés au pour la collectivité. (1) (2)
début de l'année 2000 et de moins de 20 salariés
au début de l'année 2002, la durée hebdoma- Dans la loi du 11 juin 1996 sur la réduction du
daire moyenne des salariés à temps complet temps de travail, les incitations financières à la
n'était plus que de 36,6 heures fin 2000 (Passe- réduction de la durée ont pris la forme de dégrè-
ron, 2002). vements d'une partie des cotisations sociales
auxquelles sont soumis les employeurs. Compte
La baisse de la durée, longtemps considérée tenu du coût induit sur la collectivité par ces
comme un instrument d’amélioration des condi- allégements, l'opportunité et l'efficacité d'une
tions de travail, a aussi participé à une profonde telle politique en termes de création d'emplois
transformation des conditions de vie. Depuis ont donné lieu à de nombreux débats. L’objectif
plus d’un siècle, la réduction du temps de travail de cet article est d’apporter des éléments de
a accompagné la croissance économique. Pour réponse à ce débat en utilisant les outils métho-
des auteurs comme Cette et Taddei (1998), ce dologiques développés récemment pour l’éva-
sont les formidables gains de productivité enre- luation des politiques publiques pour l’emploi
gistrés durant cette période qui ont permis cette (Heckman, Lalonde et Smith, 1999) (3). Comme
réduction et le dépassement de toutes les con- le souligne Magnac (2000), ces outils ne four-
traintes conjoncturelles de financement. Toute- nissent toutefois qu’un jugement quantitatif glo-
fois, comme l'illustrent Bourdieu et Reynaud bal qui ne constitue qu’une partie du travail
e(2002) pour le 19 siècle, la baisse de la durée d’évaluation des politiques publiques.
est un phénomène complexe. À cette époque, la
législation sur la réduction du temps de travail a
Le lien entre la réduction du temps de travail etété mise en place suite à la prise de conscience
le niveau d’emploi est complexe. La réductionpar les acteurs sociaux des effets externes
de la durée du travail n’accroît l’emploi que siengendrés par la longueur des journées de tra-
elle s'accompagne du maintien du volumevail sur la santé publique. Cette prise de cons-
d’heures de travail demandé par les entreprises.cience a contraint les employeurs à modifier
Or, dans une optique de long terme, ce volumeleur horizon temporel et à penser que la réduc-
d’heures dépend de la productivité et du coût dution de la durée du travail n'était pas nécessaire-
travail qui sont eux-mêmes affectés par la durée.ment incompatible avec la compétitivité des
De nombreux travaux ont décrit les effets poten-entreprises, et qu’à long terme, selon une logi-
tiels d’une réduction collective du temps de tra-que d’efficience, disposer d’une main-d’œuvre
vail sur l’emploi et ont défini les conditionsen meilleure santé pourrait permettre de réaliser
strictes, au niveau des entreprises, du succèsdes gains de productivité.
d’une telle politique (CGP, 1993 ; D’Autume et
Cahuc, 1997 ; Cette et Taddei, 1998 ; Cette etLes lois actuelles sur la réduction de la durée du
Gubian, 1998 ; Dares, 1998). temps de travail ont relancé le débat sur l'oppor-
tunité d'une intervention publique incitant à une
forte réduction de la durée. À la suite de la per-
1. Dite « loi Robien ».
sistance d'un niveau de chômage élevé depuis la 2. Dite « loi Aubry I ».
3. Une évaluation de la loi de réduction du temps de travail defin des années 1970, la réduction du temps de
1982, par des méthodes proches, a été réalisée par Crépon ettravail n'est plus uniquement considérée comme Kramarz (2001). Toutefois, la problématique pour la loi du 11 juin
1996 est quelque peu différente puisque la réduction du tempsun instrument d'amélioration des conditions de
de travail est non obligatoire et ne découle pas d'une modifica-vie des travailleurs, mais elle constitue surtout
tion des normes générales de durée du travail comme cela avait
un outil de partage du travail. Pour Freyssinet été le cas en 1982, mais plutôt d'incitations financières ciblées.
4 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 357-358, 2002L’efficacité d’une politique de baisse de la 1995 assouplit les conditions de mise en œuvre
durée du travail e

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