Les discriminations racistes : une arme de division massive
213 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Les discriminations racistes : une arme de division massive , livre ebook

-

213 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Les "nouveaux discours" sur l'égalité des chances, la promotion d'une élite méritante, la mixité sociale, ou encore la cohésion sociale sont les nouveaux masques idéologiques de la domination. De la marche pour l'égalité en 1983 aux sans-papiers aujourd'hui, de multiples combats ont mis en avant la fonction sociale de l'inégalité raciste de traitement : organiser une concurrence ethnique entre force de travail pour maximiser les profits. Mener ces combats efficacement suppose de s'attaquer aux racines de l'inégalité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2011
Nombre de lectures 230
EAN13 9782336250175
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2010 5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296138827
EAN : 9782296138827
Les discriminations racistes : une arme de division massive

Saïd Bouamama
Je tiens à remercier Jean-François Gasmeur et Yvon Fotia pour leur aide à la réalisation de cet ouvrage.
Je dédie cet ouvrage à Abdelmalek Sayad dont l’œuvre inachevée est porteuse d’égalité et d’émancipation.
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Remerciements Dedicace Préface Introduction Les grilles de lecture des discriminations racistes
Introduction Chapitre 1 : Les mots sont importants Chapitre 2 : La grille de lecture culturaliste Chapitre 3 : La grille de lecture ouvriériste Chapitre 4 : Le paradigme de la concurrence systémique Conclusion
Les masques idéologiques
Introduction Chapitre 1 : La victimisation ou la grille de lecture du malade imaginaire Chapitre 2 : Le tokénisme ou l’arbre qui cache la forêt Chapitre 3 : La diversité ou la diversité qui fait diversion Chapitre 4 : L’Egalité des chances ou tant pis pour ceux qui n’ont pas de chance Chapitre 5 : La cohésion sociale ou l’approche morale du social Chapitre 6 : La mixité sociale ou la pathologisation des milieux populaires Conclusion
Conclusion générale - Les pseudo-pratiques de lutte contre les discriminations racistes Liste des ouvrages écrits par Saïd Bouamama
Préface
Certains diront : encore un livre sur les discriminations ! Ce sont les mêmes qui disent : « Assez de repentance ! » - comme s’il y avait eu le début de l’ombre d’une repentance - applaudis par tous ceux pour qui le pire cauchemar serait d’avoir à s’excuser de leurs ignominies ou de celles de leurs pères et frères. Arrogance du dominant, et arrogance française. Ou peut-être retard français : peut-on imaginer les Anglais parler aujourd’hui de la colonisation de l’Inde et la défendre en disant : « mais nous avons fait des routes et des hôpitaux » ?

Eh bien non, ce n’est pas « encore » un livre sur les discriminations mais enfin un livre sur les discriminations. Les discriminations racistes. Mais enfin, dira-t-on, depuis le temps qu’on parle du racisme ! C’est vrai. Mais de quoi parle-t-on ? Qu’entend-on par racisme, depuis le temps qu’on en parle, que des universitaires, des chercheurs du CNRS, des sociologues, des philosophes, écrivent des livres sur le sujet ? Ces livres, pour la majorité d’entre eux, parlent des individus racistes et de leurs idées. Ils ne sont pas à dédaigner, loin de là. Mais, quand dans son livre pionnier, paru en 1972, Colette Guillaumin parlait de l’Idéologie raciste , elle incluait dans l’idéologie les représentations et les pratiques, pas seulement les idées. Puis, dans les années 80, les idées des racistes - ou des sexistes -, leurs « préjugés » sont devenus le seul centre d’intérêt des chercheurs. Les plus connus des spécialistes du racisme en France sont les chercheurs qui ont analysé les théories racistes, qui ont distingué des époques, des nuances, des écoles : le racisme « biologique » précédant le racisme « culturel », le racisme du prolétariat à distinguer du racisme des bourgeois ; le racisme nazi, le racisme français, le racisme espagnol ; l’histoire des idées racistes, la structure philosophique des idées racistes. Ce n’est pas inintéressant. Et cela meuble : pendant ce temps, on avait l’impression que le terrain était occupé (et certainement, sur le plan de l’institution universitaire) il l’était, l’impression qu’on progressait dans la connaissance du racisme, qu’on allait pouvoir lutter contre.

Cette stratégie d’occupation était aussi une stratégie de containment  ; pendant ce temps, on oubliait l’autre moitié des protagonistes du racisme : les victimes. Dans ces livres, sauf exception déjà mentionnée, aucune place pour celles et ceux qui pâtissent du racisme, celles et ceux qui ne sont pas seulement tués ou injuriés par « les racistes », mais surtout discriminés. Ce terme passif « être discriminé » vient d’ailleurs d’apparaître dans la langue. Les premières études, confidentielles, parlant à l’occasion de discrimination, remontent tout au plus aux années 90.

En fait, les victimes du racisme n’intéressaient personne. Et l’ampleur du préjudice qu’elles subissent n’était pas appréhendée : ces destinataires des actes racistes ne pouvaient être victimes que d’individus isolés, qui les insultaient et parfois les agressaient physiquement. C’était ça le racisme, c’était à la fois révoltant et exceptionnel.

Les spécialistes du racisme refusaient l’idée même de racisme systémique, soutenant que cela signifierait « un racisme sans acteurs ». Et à Dieu ne plaise ! Quelle horreur ! Or, que les acteurs ne soient pas des individus isolés ne veut pas dire qu’il n’y ait pas d’acteurs, mais que dans un système, il est difficile, voire impossible, de tenir pour responsables quelques individus nommément identifiés.

Quand toute une population, en raison de son « origine », ou de son « sexe », souffre d’un taux de chômage extraordinairement élevé, d’un taux de promotion extraordinairement bas, cela n’est imputable à aucun individu, ni même à des individus. C’est ce qu’on appelle le racisme systémique, et c’est cela que Bouamama étudie et dénonce.

Dans le même temps, et avant même de le dénoncer, il doit dénoncer la dénégation et le déni : « Non, il n’y a pas de discrimination en France. Tout le monde est égal ». Ah oui ? « Oui, puisque c’est dans la Constitution, dans nos valeurs, dans notre identité nationale.
Oui, puisque c’est écrit ».

Dans l’optique française, les faits comptent pour peu : seuls les principes ont de la valeur, et les nôtres sont irréprochables. L’égalité est un de nos principes, donc l’égalité existe, tel est le sophisme français ; et la conséquence, c’est qu’on ne doit pas s’attarder ni même poser le regard sur ce qui dans la réalité n’est pas conforme au principe. « Si cela arrive, vous dit-on avec impatience, cela doit être accidentel, ou alors merveilleuse porte de sortie ! - peut-être n’avez-vous pas, vous personnellement, toutes les qualités requises ? Mais soyez assuré.e que nos principes ont été respectés à la lettre ». Le dédain pour la réalité, le dédain pour les victimes du racisme, pour leurs vies, pour leurs histoires, pleines d’efforts non récompensés et de souffrance morale, le même dédain est ce que les féministes rencontrent quand elles dénoncent l’injustice faite aux femmes, l’injustice qui est le pain quotidien, la musique de fond, l’odeur âcre qui entoure, qui constitue, qui est la vie des femmes.

C’est pour cela que Saïd Bouamama est mon âme frère, parce que le racisme comme système, le patriarcat comme système, se ressemblent énormément. Tous les systèmes hiérarchiques, tous les systèmes de classement possèdent les mêmes mécanismes : d’abord, la discrimination, ensuite, ses rationalisations : les femmes sont trop ceci ou trop peu cela, comme les « issus de l’immigration ». Les rationalisations peuvent varier : on ne reproche pas les mêmes choses aux unes et aux autres. Mais ces rationalisations ont en commun d’être des rationalisations des mêmes actions : de la « mise en bas » dans la réalité. Ces rationalisations, l’idéologie raciste ou l’idéologie sexiste, sont aussi en elles-mêmes une action : on espère que les humiliés.ées et les offensés.ées vont finir par croire qu’ils et elles sont sales, impurs.es, incapables, méprisables. Bien sûr, méprisables : car sinon, pourquoi seraient-ils/elles méprisés.ées ? Pourquoi se retrouveraient ils et elles finissent par le croire, sinon totalement, au moins un peu. Le racisme, comme le sexisme, les minent de l’intérieur. Il leur est difficile, parfois, souvent, de trouver en eux la conviction de leur pleine humanité, cette conviction sans laquelle on ne peut se révolter.

Aujourd’hui, pour de multiples raisons, grâce à de multiple révoltes - Marches pour l’égalité, naissance des Indigènes de la République (dont Bouamama a été l’un des initiateurs), émeutes des banlieues en 2005 - et aux injonctions de l’Europe, la France est obligée de prendre en compte les discriminations raciales, que Bouamama préfère à juste titre appeler les discriminations racistes.

Mais les prend-elle vraiment en compte comme des discriminations systémiques ? Certes sur le plan juridique, ell

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents