Français 2005 ISUP
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Examen du Supérieur ISUP. Sujet de Français 2005. Retrouvez le corrigé Français 2005 sur Bankexam.fr.

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Publié le 08 mars 2007
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Langue Français

Extrait

INSTITUT DE STATISTIQUE
DE l’UNIVERSITÉ de PARIS
CONCOURS D'ENTREE JUIN 2005
EPREUVE DE FRANCAIS
2
heures
Résumer en 200 mots Ie texte de Georges Bataille, intitule
"Le berceau de
I'humanité: la Vallée de la Vézère".
Une marge de dix pour cent est admise pour Ie compte
des mots. On appelle "mot" toute unité typographique : un article élide, par exemple,
compte pour un mot; c'est-a-dire compte pour quatre mots.
II est rappelé que Ie résumé consiste à dégager l’essentiel de la pensée de
I'auteur, et, sans chercher à en copier Ie style, a la traduire avec clarté et objectivité dans
une rédaction plus condensée.
Le P. Teilhard de Chardin note que I'espèce humaine, bien qu'elle ait dans Ie monde
introduit la réflexion, n'a «rien ébranle dans la Nature au moment de son apparition». Les
récentes découvertes de la science accusent ce caractère discret, pour ainsi dire insignifiant, de
notre connaissance. Notre espèce est venue au monde «comme n'importe quelle autre espèce
exactement». Cette observation s'oppose, mais sans Ie contredire au caractère que, d'autre part,
nous ne pouvons manquer de prêter
a
cette venue au man de. L'essentiel de notre naissance est
bien un caractère incomparable de I'humanité. L'humanité différa des I'abord de I'animalité par
une qualité qui la situait
a
I'oppose. Des I'origine, la différence n'était pas en un sens mains
tranche qu'aujourd'hui.
Sur Ie plan de la connaissance I'Homme de Neandertal s'impose
a
notre attention.
Nous ne devons jamais perdre de vue que Ie travail élaborait la conscience. Avant tout Ie travail
est I'opération intellectuelle qui fit du cerveau de I'animal, qu'était d'abord I'homme, un cerveau
humain. Ce cerveau partit de I'informe silex et dégagea de I'expérience les actions qui
changeaient cette pierre en objet utile, en outil. II devait concevoir I'utilité de I'objet et la forme
qu'imposait I'utilité ici devait, en un mot, faire oeuvre d'intelligence. Mars non seulement ce
premier homme de la Vézère excella dans cet ordre d'activité : son séjour dans la vallée ne
s'acheva pas sans qu'iI ait accompli la démarche décisive qui lui donna, au-delà de la
connaissance des objets, la conscience de la Mort.
Nous oublions souvent que notre conscience de la mort est I'un des rares traits
fondamentaux qui nous distinguent. Mais nous tuons avec légèreté les. animaux, nous disant
qu'ils n'ont pas cette conscience de la mort qui nous appartient, et si nous ne pouvons prendre a
la légère la mise a mort d'un homme, c’est qu’il sait à
I'avance ce qui arrive, il sait ce qu'est fa
mort. L'observation de la conduite des singes a d'ailleurs montré que la mort semble, loin de les
frapper, les laisser sans réaction, incompréhensifs. L'homme de Neandertal, au contraire, a réagi
profondément, il a réagi humainement devant la mort. II n'a pas été humain uniquement par
I'application de son esprit au travail de la pierre: il a connu l'usage de la sépulture, c'est dire que
les restes de ceux qu'il avait connus vivants lui inspirèrent des sentiments voisins de ceux qui
généralement définissent I'humanité.
1
2
Si nous nous rapportons aux conduites et aux sentiments des peuplades primitives,
no us devons penser que Ie mort effrayait ceux qui restaient. Sans doute, ceux qui I'ensevelirent
ont-ils voulu se préserver de la menace qu'ils voyaient en lui plutôt que Ie préserver de la dent
des fauves. Dans l'esprit des premiers hommes, nous semble-t-il, deux ordres de possibilités
s'opposèrent. D'un cote une série d'activités efficaces, en quelque sorte raisonnées, s'offrait
à
celui qui chassait
à
I'aide d'armes fabriquées, pourvoyant de cette manière
à
sa subsistance. II
disposait de haches de pierre, d'épieux à la pointe de pierre. II façonnait en outre en forme de
boules des pierres destinées au Jet. Ses outils lui permettaient de dépecer méthodiquement les
animaux, d'en prélever la fourrure. L'immense période de I'Homme de Neandertal, sur laquelle
a
I'instant nous portons la réflexion, fut d'abord chaude. Mais bient6t la dernière des grandes
glaciations (Ia glaciation wurmienne) exposa la vie humaine
à
des froids sibériens. La faune fut
alors
à
la mesure de ces froids : Ie mammouth, Ie rhinocéros laineux, Ie renne étaient communs
dans nos régions. L'homme ne réagit
à
la dureté de ce climat que par son industrie : iI dut alors,
faute d'en être préserve naturellement, opposer au froid la fourrure travaillée des animaux. II dut
en même temps travailler Ie bois et I'utiliser, en plus de I'entretien de ses foyers,
à
des fins que
nous ignorons, puisque la corruption a détruit la totalité (peu s'en faut) des éléments de bois
travaille de cette période. C'est alors que les hommes se sont installes dans les cavernes (mais
ils ne les ont ornées que plus tard de figures animales). Nous ne devons d'ailleurs pas nous dire
que la vie de ces temps fut affreuse. Les Eskimos vivent aujourd'hui dans des conditions
voisines et les Eskimos quels que soient les efforts pénibles et les souffrances auxquels ils sont
soumis, sont loin d'ignorer la gaieté. A la base de cette vie humaine des premiers temps nous ne
devons pas nous représenter un sentiment de détresse : la capacité de venir
à
bout des
difficultés par I'activité constante et Ie travail imposa sans nu doute au Moustérien Ie sentiment
de I'emporter.
Mais comme tous ceux qui I'ont suivi Ie Moustérien se heurta
à
la seule puissance qui
décidément I'humiliait ; il lui fallut comme nous s'incliner devant la mort : devant la mort échouait
décidément son effort industrieux. Le domaine de I'activité efficace s'était ouvert
à
son
intelligence naissante. Le domaine de la mort en était la limite, c'est comme tel qu'il se révéla
à
I'esprit de ces premiers hommes : tout
à
coup la mort introduisait ce qui dément la valeur de
I'activité humaine, ce qui bouscule Ie sentiment de capacité lie aux premières lueurs de
I'intelligence. L'animal n'attend rien et la mort ne Ie surprend pas ; la mort échappe en quelque
sorte
à
I'animal. Mais I'homme, qui travaille, attend Ie résultat de son travail, et la mort détruit la
tranquille attente qui est Ie fondement de toute pensée. La pensée est d'abord une attente : la
mort répond
à
cette attente en I'anéantissent ; la mort se révèle
à
nous par I'anéantissement de
cette attente qui est la base de notre vie. C'est de cette manière que I'activité intelligente de
I'homme Ie mit en présence de la mort, en présence de la négation radicale, terrifiante, de ce
qu'il est essentiellement.
En réalité, la connaissance d'un ordre de possibilité qu'ordonnait I'activité réfléchie,
aboutit a la connaissance de I'ordre de possibilité contraire qu'introduit soudain la violence de la
mort. Ces deux possibilités, non I'une d'entre elles, mais I'une et I'autre en leur intime liaison,
embrassent I'étendue de la connaissance, telle qu'elle distingue I'homme de I'animal. La
connaissance n'est pas seulement connaissance des objets et de I'action qui en dispose
efficacement, elle est en conséquence immédiate connaissance de la mort, donnant la limite du
pouvoir de I'action humane. D'un cote son domaine est rassurant ; c'est de I'autre Ie domaine de
la terreur. Et cette opposition des deux domaines inconciliables rend compte de I'état d'esprit
mobile et ambigu qui est Ie propre de I'homme.
3
Mais I'homme préhistorique, dans son rapport à la mort, ne manquait pas de
ressources et c'est aussi par la pratique artistique qu if chercha
à
dominer sa terreur. Et lorsque
I'on regarde, en effet, les fresques des cavernes, ce qui frappe est Ie pouvoir de parvenir au plus
haut degré de I'habileté sans avoir laisse de traces de tâtonnement. Claude Levi-Strauss a note
la valeur privilégiée qu'ont dans I'histoire les premières démarches : elles peuvent du premier
mouvement trouver ce qui par la suite ne sera retrouve qu'avec peine, Mais la première
démarche au moment ou I'humanité sortit de I'interminable hiver des premiers temps fut la plus
sûre, la plus digne d'admiration, II y eut dans la main de ces hommes dont I'art fut la création,
qui partaient d'un passe vide précèdent, une vertu qui la rapproche de la main la plus ferme de
nos jours. A peu près du premier coup, I'art atteignit Ie pouvoir d'évocation qui devait par la suite
ne se retrouver que difficilement. Les balbutiements ne sont pas Ie fait des premiers hommes,
mais de ceux qui vinrent après des périodes de sommeil, ainsi des artistes carolingiens qui
suivirent dans notre pays I'éclipse mérovingienne ou de ceux de la Renaissance qui ne sont que
lentement sortis de la gaucherie du Moyen-âge,
Profondément la caverne de Lascaux évoque ces églises ou les liturgies magiques
assemblent des centaines d'exécutants, ces théâtres ou nous entendons dans Ie recueillement
les plus belles oeuvres de Mozart. Le «génie poétique» se retrouve dans tous les peuples, il est
commun à tous les hommes, mais il s'est manifeste
à
Lascaux avec cette sorte de fracas qui est
Ie propre de la naissance. II est vraisemblable que les hommes de la Vézère comme les
indigènes de l'Australie figurèrent les animaux qu'ils chassaient dans I'espoir qu'en les faisant
apparaître sur la paroi ils les amèneraient a paraître devant leurs armes disposer d'une
apparition, c'était déjà les faire tomber dans leur pouvoir. II y eut une croyance générale de
I'humanité archaïque
à
I'effet magique des représentations. Du fond de cette caverne qui
fascine, les artistes anonymes, effacés, de Lascaux nous invitent
à
nous souvenir d'un temps où
les êtres humains ne se voulurent de supériorité que sur la mort.
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